CE SERA l'affiche choc de mars 2004. De celles qui font faire des cauchemars au PS : « Arlette et le facteur », ensemble candidats aux élections régionales. Arlette Laguiller comme chef de file en Ile-de-France (où elle est élue), Olivier Besancenot comme tête de liste à Paris (où il habite). Un meeting commun des deux stars de l'extrême gauche est déjà prévu. Et les nouvelles visées électorales de l'extrême gauche, à cinq mois des échéances, obsèdent les socialistes. Font éructer Laurent Fabius (qui dénonce « l'ultra-gauche »), déraper Julien Dray (lorsque le porte-parole du PS suggère l'ouverture des listes au second tour aux amis de Laguiller et Besancenot, avant d'être démenti par François Hollande), et pontifier Lionel Jospin (qui, dans une tribune parue dans « Libération », règle ses comptes avec les trotskistes). Motif de cette fébrilité inédite : les deux petites formations risquent bien de piquer des voix au PS. Car Lutte ouvrière et la Ligue communiste révolutionnaire présenteront bien des listes communes aux régionales de mars et aux européennes de juin. Un projet de profession de foi commune a été bouclé mardi, et un protocole d'accord entre les deux formations pour les échéances électorales sera soumis à l'approbation des militants de la LCR réunis en congrès à partir d'aujourd'hui à Saint-Denis.
« Le mécontentement social passe par nous » Or, unis, les trotskistes peuvent troubler le jeu à gauche. Au premier tour de la présidentielle de 2002, séparément, les deux candidats ont réuni 10 % des suffrages dans le pays, et totalisé plus de 2,7 millions de voix. Et les quelques sondages réalisés à ce jour leur prêtent une véritable « capacité de nuisance ». Les experts électoraux de la droite n'excluent d'ailleurs pas de voir l'extrême gauche dépasser les 10 %, et se trouver donc en mesure de se maintenir au second tour, dans les régions Nord-Pas-de-Calais, Midi-Pyrénées voire en Ile-de-France. Problème pour le PS : la Ligue, rejoignant LO, ne veut plus être considérée comme une réserve de voix pour une gauche qui a trahi, selon elle, les espérances de son électorat populaire. Les deux formations sont donc tombées d'accord ces dernières semaines sur un point capital : elles n'appelleront à voter à gauche au second tour qu'en cas de danger de victoire du FN. Ailleurs, elles ne donneront pas de consigne. Au risque de laisser la droite l'emporter. « Si le PS veut gagner, il n'a qu'à aller chercher ses voix, argumente Alain Krivine, dirigeant de la LCR. Mais électoralement, le mécontentement social passe par nous désormais. C'est bien ce qui leur fait peur. » Et ce qui fait sourire « Arlette et le facteur »...
Nathalie Segaunes
Le Parisien , jeudi 30 octobre 2003