Salut Zelda.
Zelda a écrit :
Extrait de la dernière LDC.
Quant à l’extrême droite, elle peut tout aussi bien prospérer au contact de certaines catégories plébéiennes, déclassées, enragées par les conditions dans lesquelles le système capitaliste les contraint à vivre, en empruntant de la même manière une phraséologie antisystème voire anticapitaliste. Cette dimension existait à l’origine du fascisme italien comme du national-socialisme en Allemagne, qui fit notamment d’une partie des chômeurs, d’un certain lumpenprolétariat, d’anciens droits communs, une masse de manœuvre et une couverture masquant sa véritable nature.
Là on n'est plus dans le raisonnement scientifique.
1) l'extrême droite prospère avec la petite bourgeoisie déclassée.
2) puis sur cette base recrute des milieux populaires.
3) ces milieux populaires qu'elle recrute sont FORCEMENT des lumpen prolétaires.
Ah bon ? tiens tiens tiens ? et pourquoi ? parce que Trotsky l'a dit ?
A d'autres. Dans les milieux populaires, des tas de travailleurs absolument pas lumpen votent RN. (...)
"
L'extrême-droite prospère avec la petite-bourgeoisie déclassée" : c'est un raccourci, l'article dit "certaines catégories plébéiennes" et pas "petite-bourgeoisie".
Cela inclut des membres de la petite-bourgeoisie déclassée, des travailleurs déclassés (chômeurs) ET du lumpen prolétariat. (Il n'est écrit nulle part que chômeur = lumpen = anciens droits communs, ce sont trois catégories différentes citées à la suite) donc il n'est pas juste de reprocher que "
ces milieux populaires qu'elle recrute sont FORCEMENT des lumpen prolétaires".
"
Puis sur cette base recrute des milieux populaires" : plutôt d'autres milieux populaires, car la petite bourgeoisie déclassée fait déjà partie des milieux populaires.
C'est un fait que, en Italie et en Allemagne, ces milieux ont constitué les troupes du fascisme et du nazisme. Pas seulement les troupes électorales, mais aussi les troupes de choc contre la classe ouvrière organisée, les Juifs etc. Cela ne veut pas dire que des travailleurs en activité n'y ont pas participé, loin de là, mais la situation de déclassement est la plus favorable aux réactions enragées (les gens qui toute leur vie pensaient s'en être sortis et qui perdent tout du jour au lendemain à cause de la crise, sont bien plus virulents que ceux qui sont dans la misère depuis toujours). Et cette situation est particulièrement dangereuse dans un contexte où ces mouvements d'extrême-droite miment parfois un langage révolutionnaire et se donnent des allures "anti-système" voire contre le grand capital (sauf qu'il est qualifié de "cosmopolite" ou "juif"). Si en plus, il n'existe aucun contrepoids du côté du mouvement ouvrier, soit par absence de parti révolutionnaire, soit parce que le parti prétendument révolutionnaire ne l'est plus et trahit la classe ouvrière, alors la grande masse des travailleurs n'hésite pas longtemps et se met à la remorque de l'extrême-droite qui semble la voie anti-système la plus déterminée. C'est ce qui s'est passé en Italie et en Allemagne. L'extrême-droite a d'abord conquis la petite-bourgeoisie déclassée, les chômeurs et les lumpen, avant de partir à la conquête des autres couches sociales.
L'article de la LDC parle de la montée de l'extrême-droite et du nationalisme dans toute l'Europe en prenant l'exemple des pays où déjà, des bandes d'extrême-droite s'en prennent massivement et physiquement aux migrants, aux Roms etc. : la Hongrie, la Grèce (Aube Dorée), l'Italie, l'Allemagne. Il ne s'agit pas seulement d'un vote pour l'extrême-droite, comme en France où la percée du RN est pour l'instant uniquement électorale, mais de faire le coup de poing.
Bien sûr que, en France, une bonne partie de la classe ouvrière (et de la petite bourgeoisie des commerçants, artisans, petits patrons) vote RN et que c'est moins vrai pour d'autres catégories sociales (dont la petite bourgeoisie intellectuelle, artiste etc.) Mais tu peux reprendre ta liste de travailleurs qui votent RN autour de toi : compte ceux qui sont vraiment susceptibles de passer à l'acte de violence physique, forcément à ce stade il y en a beaucoup moins... Ce n'est même pas dit que s'il commençait à y avoir des violences physiques systématiques, certains ne prendraient pas peur au point de ne plus voter RN... Zelda, reprend donc la question et compte combien de travailleurs en activité autour de toi voteraient pour les Identitaires... parce que, en Hongrie ou en Allemagne, c'est bien pour des gens comme ça qu'une partie de la population vote.
Il se trouve que, en France, les violences existent mais sont très marginales en comparaison d'autres pays. Pourtant ici aussi, la force électorale du FN est d'abord venue dans les années 1980 des milieux commerçants, artisans etc. et n'est devenue plus massive chez les travailleurs en activité qu'après plusieurs trahisons de la gauche et l'approfondissement de la crise.
La stratégie du RN (pour l'instant) c'est de parvenir au pouvoir par les élections. Pour cela, il lui faut séduire d'autres couches sociales que celles qui votent déjà pour lui ! Il lui faut montrer patte blanche au grand patronat, à la petite et moyenne bourgeoisie intellectuelle, aux ingénieurs et cadres etc. (d'où sa valse-hésitation sur l'euro par exemple). Ce n'est pas le moment de trop faire le coup de poing alors que le résultat des Européennes montre que ça peut marcher... (D'ailleurs, on n'entend plus parler du "premier parti ouvrier de France" et s'il y avait zéro ouvrier sur la liste RN alors qu'ils auraient pu en mettre, c'est bien parce qu'ils cherchent à plaire à d'autres). Pas pour faire un gouvernement nazi, juste un gouvernement de droite bien réac qui procure les postes et autres avantages alléchants...
Par contre, la situation économique et sociale de plus en plus dramatique est une réalité, va s'aggraver encore et il est de plus en plus question d'une nouvelle crise économique plus violente que celle de 2008, à laquelle les Etats auront encore plus de mal à faire face. Dans ce contexte, les catégories "déclassées" peuvent devenir numériquement encore beaucoup plus importantes et enragées. Des groupes d'extrême-droite qui ne seront même pas forcément le RN peuvent prospérer à nouveau, peut-être même au détriment du RN, en choisissant de passer largement à l'acte des violences physiques. A moins que ces groupes ne surgissent de la droite "Wauquiez" ou "Dupont-Aignan" ou "Macron", qui sait... et doublent le RN sur sa droite. Feu le SAC de Pasqua, qui faisait le coup de poing contre les militants ouvriers ou les gêneurs (et était d'une porosité remarquable avec les milieux du grand banditisme), était bien dans la mouvance gaulliste... Benalla a incarné une petite police parallèle macroniste cassant du manifestant, etc.
Or, il n'y a toujours pas de parti ouvrier révolutionnaire en France pour faire face à cette situation. Cela peut surgir vite, mais inutile de dire que, avec les décennies de propagande chauvine et nationaliste des partis de gauche, de droite et d'extrême-droite que l'on a derrière nous, les idées d'extrême-droite ont une sacrée longueur d'avance.
La stratégie de LO pour le parti révolutionnaire consiste bien à convaincre d'abord la classe ouvrière (quel que soit son vote), parce que contrairement à l'extrême-droite la classe ouvrière c'est bien ce qui doit devenir le moteur (et je ne parle pas d'élection). Un parti appuyé sur une classe ouvrière combattive, vraiment antisystème, qui veut en découdre et qui aurait la capacité - inverse de celle de l'extrême-droite - d'entraîner derrière la classe ouvrière la petite bourgeoisie déclassée.