Un petit coup sur le terrain de Chévènement. En 2007 toutes les voix sont bonnes à prendre.
CITATION
Présidentielle 2007. Le tour de Fabius ?
En sillonnant la France, Fabius a compris que le PS était coupé des classes populaires.
On peut, bien sûr, ironiser sur son goût pour les carottes râpées et pour « Star Ac », sa façon de mettre en scène ses promenades à moto et ses confidences, très giscardiennes, sur sa calvitie. Marc-Olivier Fogiel, qui recevait Laurent Fabius vendredi, à l'occasion de la sortie de son livre « Cela commence par une balade », ne s'en est pas privé : « Là, franchement, c'est too much ! ».
Passons pourtant sur le côté : moi, le grand bourgeois, l'énarque, le normalien, le surdoué, le plus jeune Premier ministre de la France, je suis un homme comme les autres... Cette démarche n'est-elle pas le b.a.-ba de la politique ? Même de Gaulle s'y plia : à Londres, pendant la guerre, le général dut accepter, à la demande de Churchill qui voulait le rendre plus populaire, d'être photographié avec Tante Yvonne dans leur « cosy home ». Rien de nouveau, donc.
France d'en bas
Ce qu'il y a d'intéressant dans la « France d'en bas » selon Fabius, c'est le choix de ses étapes. Ici, dans l'Aude, il passe un long moment avec des pêcheurs et achète trois kilos de sole. Là, à Nantes, il se mêle à une foule de jeunes pour assister à une « folle journée » de musique. Près de Roanne, il visite une petite usine textile. En Seine-Saint-Denis, une locataire de HLM l'interpelle : « Vous trouvez ça normal que les enfants jouent avec des rats ? ». Sur un marché de Dordogne, des producteurs de noix plaident pour une agriculture qui préserve nos campagnes de la désertification... Bref, une France loin des « bobos » parisiens, dont Sylviane Jospin se fit la chroniqueuse dans son « Journal interrompu ».
La première leçon du 21 avril, dit Fabius entre les lignes, c'est que le PS était coupé des classes populaires - ouvriers, employés, agriculteurs, patrons de PME - qui venaient dire à la sortie des meetings : « Sans heures supplémentaires, on ne s'en tire plus ».
Marseillaise
La deuxième leçon, c'est que Lionel Jospin avait oublié de parler de la France. Or, il existe, entre le nationalisme flamboyant de Jean-Marie Le Pen et l'internationalisme d'Arlette Laguiller, un besoin de nation.
Fabius, sans ignorer la ville, privilégie une France villageoise. Par petites touches, l'élu d'une ville industrielle (Grand-Quevilly, Seine-Maritime), s'enracine. A l'occasion du 11 novembre, il confie : « J'aime la Marseillaise jouée sur les places de village, parents au garde-à-vous et moi avec ma chair de poule... ».
Leçon mitterrandienne
Après avoir ouvert les bras aux Verts et dit non aux leaders trotskistes - mais pas à leurs sympathisants -, Fabius tend la main aux électeurs de Chevènement en mal de fierté nationale. Il se souvient de la leçon de son maître Mitterrand : au premier tour, rassembler tout son camp. Même si les sondages placent devant lui Bernard Kouchner et Jack Lang, Laurent Fabius veut croire que les Français, constatant qu'il a souffert, mûri et beaucoup appris de ses différentes fonctions jugeront en 2007, comme pour Chirac en 1995, que « c'est son tour ».
Copyright © Le Télégramme 10/11/2003
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