Rupture, avec quoi ?

Tout ce qui touche de près ou de loin à l'actualité politique en France

Message par Louis » 15 Juil 2004, 12:27

Nous autres marxistes révolutionnaires intriguons beaucoup de monde en ce début de vingtet-unième siècle. En France, nous attirons une sympathie considérable, mais nombreux sont les travailleurs qui ne comprennent pas tel ou tel point de notre projet, ou telle ou telle interprétation que nous faisons de l'histoire.
C'est pourquoi nous devons donner des réponses claires aux questions qui nous sont
souvent posées. Certaines le sont par les médias, certaines par des travailleurs qui nous côtoient, et certaines par les deux.
Depuis le bon résultat de notre candidat à l'élection présidentielle en 2002, l'une de ces questions est celle de la participation éventuelle de la LCR à un gouvernement. C'est une question importante pour celles et ceux qui veulent savoir quel type d'alternative politique nous comptons promouvoir. Une réponse était donnée par Olivier Besancenot en 2002 et 2003 : la LCR ne pourrait participer qu'à un gouvernement de rupture avec le capitalisme.Cette réponse avait le mérite éminent d'affirmer clairement ce qui nous sépare des partis de la gauche de gouvernement : l'acceptation ou non de la gestion du capitalisme. Elle avait le mérite aussi de mettre au centre du débat la question centrale pour tout partisan du socialisme digne de ce nom : celle de la propriété privée des moyens de production, de distribution et d'échange.

Le 16 octobre 2003, alors que les débats préparatoires au congrès touchent à leur fin,Philippe Corcuff publie dans Libération un article intitulé « Le spectre du "néo-gauchisme" » Notre camarade y présentait un point de vue tout différent, apparemment sans s'en rendre compte : « La LCR a affirmé à plusieurs reprises après le 21 avril qu’elle était disposée à participer ou à soutenir une expérience gouvernementale en rupture avec le sociallibéralisme». Le problème de cette formulation est qu'elle gomme complètement notre ambition de dépasser le capitalisme, en laissant penser que la tâche de l'heure est de prendre la place des vieilles organisations réformistes qui auraient failli à leur tâche d’obtenir des améliorations pour les travailleurs dans le cadre d’une société divisée en classes.
Les Thèses politiques votées par le XVe congrès de la LCR qui eut lieu du 30 octobre au 2 novembre 2003, et qui n'ont jamais été publiées dans leur version définitive, affirmaient en revanche que : « Militants pour la transformation radicale de la société, nous ne pourrions participer à un gouvernement qu'à la condition que celui-ci applique un programme de rupture avec le capitalisme et soit prêt pour cela à affronter les forces politiques et économiques de la bourgeoisie en s'appuyant sur la mobilisation et le contrôle des travailleurs ». A notre connaissance aucun débat dans l'organisation n'a remis en cause ces thèses depuis, et le traitement de la question du gouvernement en particulier. S'il subsistait quelque doute, il était clair que notre expression publique devait s'inspirer de ce texte.
Pourtant, le 19 juin 2004 dans un texte paru dans Libération, les camarades Johsua et Bensaïd confirment le glissement de l'expression publique de notre organisation, que l'on avait pu croire exceptionnel dans le cas du camarade Corcuff. En réponse à un article inepte de ce quotidien qui évoquait la possibilité d'un rapprochement de la LCR avec l'ex Gauche Plurielle, les camarades, qui sont des dirigeants connus, répondent : « [La] gauche radicale doit certes trouver les chemins du rassemblement social et politique, et affirmer plus fortement que par le passé son ambition à lutter pour un gouvernement qui rompe réellement avec les logiques libérales. La LCR a affirmé de longue date sa disponibilité pour un tel gouvernement quand le rapport de forces le permettra, mais certainement pas avec le PS actuel pour co-gérer une politique libérale ».
Comme il est courant, c'est sous le couvert de la réaffirmation d'une position intransigeante que des changements substantiels sont annoncés. Ainsi le problème de la participation de la LCR à un gouvernement ne serait plus du tout lié à la volonté et à la capacité ou non de ce gouvernement de rompre avec le capitalisme (sans même parler du type d'Etat qui rendrait cette rupture possible…). Il s'agirait dorénavant de simplement « rompre avec les logiqueslibérales ».
Le 8 juillet 2004, toujours dans Libération les deux mêmes camarades développent leur réponse. Un programme réformiste alternatif au contre-réformisme du PS y est détaillé :
« Pour passer de la rhétorique sociale de circonstance à un engagement effectif, il faudrait ramener dans un grand service public européen une large part des secteurs privatisés depuis vingt ans par les gouvernements de gauche eux-mêmes, reprendre le contrôle politique de l'outil monétaire sans lequel il n'y a guère de programme ambitieux d'emploi, établir une fiscalité européenne fortement redistributive, se libérer du carcan du Pacte de stabilité pour relancer la consommation ; bref, faire exactement le contraire des politiques suivies depuis vingt ans par les gauches libérales et poursuivies aujourd'hui avec zèle par Tony Blair ou Gerhard Schröder ».
Comme les camarades ne précisent pas que ce programme, s'il peut nuire aux intérêts d'un certain nombre de capitalistes, ne nuit en rien au capitalisme en tant que système dominant, que la « relance de la consommation » est un vieux slogan de conciliation de classe visant à stimuler une relance encore plus forte des profits tout en préservant la paix sociale, le lecteur a toute raison de penser que le programme de changement radical que préconisent D. Bensaïd et S. Johsua (« une défense active de l'emploi et des services publics, la lutte pour l'interdiction des licenciements, pour l'égalité des droits ») ne rentre aucunement en contradiction avec ce réformisme renfloué.
Il reste donc un seul obstacle à ce que la LCR entre au gouvernement : l'hégémonie du PS, en particulier de la droite du PS, puisqu’« on ne voit pas (…) comment sur une telle perspective Besancenot et Strauss-Kahn pourraient gouverner ensemble » !
Il faudrait qu'au lieu de signaler à grands gestes un terrain commun à l'appareil du PCF, campé précisément depuis des années sur la défense du réformisme historique, notre organisation dise clairement pourquoi elle se refuse à collaborer à tout gouvernement qui n'aurait pas la volonté et la capacité d'exproprier la bourgeoisie.
Plus important encore, il faudrait que notre ligne politique sur des questions d'une telle importance soit le reflet des décisions prises par le congrès, ou à tout le moins par la Direction Nationale élue par le congrès.
Sylvestre Jaffard
Louis
 
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Message par titi » 15 Juil 2004, 12:52

pour les jeunes du forum (à 35 balais j'ai l'impression d'etre vieux ici :-P )
a écrit :violente ou pacifique, la révolution c'est d'abord une rupture ; celui qui accepte la rupture avec l'ordre établi, avec le capitalisme, celui-là peut être membre du Parti socialiste


de qui de qui de qui ?
François Mitterrand, oui madame
titi
 
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Message par logan » 15 Juil 2004, 13:19

Faudrait mettre des textes de Rocard à l'époque du PSU
A coté Besancenot c'est Alain Madelin :hinhin:
logan
 
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Message par Valiere » 15 Juil 2004, 13:30

Je suis plutôt d'accord avec la LCR sur cette question politique même si je trouve que la direction n'est pas assez claire quand à la stratégie politique, oscillant entre le gauchisme et une stratégie de front unique...
J'espère que LO ne campera pas dans l'expectative et de toutes façons il est important que les deux organisations agissent de concert en évoluant...La LCR arrêtant son jeu communautariste et LO arrêtant son jeu isolationniste....
Il faut vraiment ne pas s'arrêter à ce forum et aller discuter avec d'autres... je parle de ceux qui ont une politique de rupture avec le système.
Valiere
 
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Message par Valiere » 15 Juil 2004, 14:26

Rojo... Là tu es dur... pas avec moi mais avec la LCR... Là je suis d'accord avec Picquet et ses camarades...et tu ne l'ignores pas...
Valiere
 
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Message par titi » 15 Juil 2004, 15:24

ah valière, au PS, il y a pleins de gens qui veulent la rupture avec le système....

avec le système chirac bien sur :hinhin:
titi
 
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Message par Valiere » 15 Juil 2004, 16:05

je ne t'ai pas parlé du PS... Mais de l'opportunité pour les révolutionnaires de marquer des points décisifs et de se construire comme des acteurs de premier plan et non comme des témoins très critiques.
Valiere
 
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Message par Louis » 15 Juil 2004, 20:54

les camarades de lo peuvent se moquer - surtout certains...-le fait que nous soyons pluralistes (et donc pluriel) est plutot une richesse qu'une tare (surtout quand on voit certains, qui pour pouvoir exprimer leur désacords, sont obligés de se construire a la marge de leur organisation, ça fait plutot rigoler !)

donc, ce message -dont je partage l'esprit, vous l'auriez compris- pour dire que certains ( dont moi) ne partagent pas certaines orientations d'une partie de la majorité de la lcr (qui doit donc préciser sa stratégie, puisque le fond du probleme, c'est qu'il y a comme du mou dans la corde a noeud) ! Mais il est clair que certains ici n'aiment pas les débats d'orientation (surtout quand y'a pas de "pret a penser" tout fait, quelle horreur !)
Louis
 
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Message par zarta » 15 Juil 2004, 21:06

je ne connais pas les différentes fractions lcr, mais si la direction est tellement éloignée des positions de Joshua et Bensaïd, pourquoi ceux-là semblent-ils encore à la lcr ?
c'est juste une question, pas un sous-entendu mesquin.
zarta
 
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