Contre la loi d’orientation Fillon

Message par Valiere » 04 Déc 2004, 08:48

Contre la loi d’orientation Fillon,
une autre école pour une autre société.

a écrit :François Fillon présente son projet de Loi d’orientation pour l’avenir de l’école comme un moindre mal comparé au rapport Thélot, et il ose même le présenter comme la continuité historique du plan Langevin-Wallon ! Dans les faits, il s’inscrit en totale cohérence avec les attaques libérales déjà largement engagées au niveau européen et au niveau gouvernemental : LOLF (loi organique relative aux lois de finances), réforme de l’Etat, décentralisation, précarisation croissante, plan Borloo. S’il ne met pas immédiatement en place de manière précise l’ensemble de ces dispositifs, il prévoit les réformes de structures qui les rendent possibles. L’autonomie renforcée des établissements en est la pièce maîtresse, ouvrant la voie à une déréglementation accentuée au sein du service public, aussi bien en ce qui concerne les élèves que les personnels.
· La garantie à touTEs les élèves de la maîtrise d’un « socle commun » se traduit par une conception  utilitariste et rétrograde de la culture jugée indispensable pour chaque jeune. Elle exclut les enseignements artistiques, l’éducation physique, et la démarche de projet interdisciplinaire, alors que c’est dans l’articulation étroite entre interdisciplinarité et savoirs disciplinaires que les jeunes peuvent appréhender la complexité du monde qui les entoure. Ce qui suppose l’absence de hiérarchie entre les disciplines, et un véritable travail pédagogique collectif. Au contraire, le projet de loi renforce encore la hiérarchie des disciplines par la mise en place d’un soutien individualisé pour les seules disciplines du « socle commun », et donne la priorité au français et aux mathématiques. L’inscription dans la loi de la « liberté pédagogique », dès lors qu’elle ne s’accompagne d’aucun cadrage dans les objectifs, comme l’accès à l’esprit critique, à l’autonomie, à une culture émancipatrice, légitime les pratiques les plus rétrogrades.
· Un système d’évaluation autoritaire et réactionnaire est mis en place au collège, avec une proposition de « note de vie scolaire » au Brevet des collèges, portant sur l’assiduité, la discipline, le civisme et l’engagement, dont on se demande bien quels seraient les critères. Le redoublement, qui pouvait être efficace lorsqu’il était accepté par l’élève et ses parents à l’issue d’un travail de conviction, devient une décision d’autorité qui revient en dernier ressort au directeur ou au chef d’établissement.
· Une montée globale de l’autoritarisme, une hiérarchisation et une division accrue des personnels caractérise le projet. Les pouvoirs du chef d’établissement sont renforcés, notamment son contrôle sur la pédagogie des enseignantEs. La création du conseil pédagogique présidé par le chef d’établissement, chargé d’élaborer le projet d’établissement ou le choix des manuels, la participation des enseignantEs coordonnateurs/trices à la notation et à l’évaluation de leurs collègues, aggravent la division entre enseignantEs, de même que la «meilleure reconnaissance du rôle de professeur principal ».
· Le projet Fillon s’inscrit bien dans la perspective d’une école de la sélection et du tri social, reprenant et amplifiant les politiques éducatives mises en place par les gouvernements précédents. Il passe notamment par la généralisation de l’option « découverte professionnelle » qui se mettra en place dès 2005 dans les lycées professionnels et les collèges, qui pourra s’articuler avec une « 4e d’alternance » fondée sur l’alternance école-entreprise, et qui barre l’accès à la voie générale. Le but est d’augmenter le nombre d’apprentiEs de 50 % pour atteindre les objectifs quantitatifs du plan Borloo et livrer au patronat une main d’œuvre d’autant plus docile qu’elle sera jeune. Et ce n’est pas l’introduction de mentions dans les BEP qui « revalorisera » la voie professionnelle. La question des classes passerelles et des réorientations possibles n’est même pas évoquée. Les voies de formation, et même les filières, demeurent étanches, puisqu’une mention au bac pro ne donnerait accès qu’à un BTS dans la même spécialité. C’est donc bien un schéma réactionnaire du système éducatif qui se rigidifie : les enfants de la bourgeoisie et des classes moyennes dans la voie générale, ceux des classes défavorisées dans l’apprentissage et la voie professionnelle, toujours plus précocement et sans retour. Le triplement des « bourses au mérite » accrédite l’idée que les enfants issus de milieux défavorisés auraient à donner des gages de leurs « mérites » pour avoir accès à une poursuite d’études, alors que les enfants de la bourgeoisie n’auraient pas besoin d’être « méritantEs ». Faire croire qu’une méritocratie scolaire pourrait contrecarrer une hiérarchie sociale fondée sur l’argent et l’origine familiale relève de la supercherie.
· Pour les enseignantEs, c’est une dégradation des conditions de travail et la casse des statuts nationaux. Au lieu de créer des postes en nombre conséquent, le soutien aux élèves en difficulté devra être assuré en heures supplémentaires. Le « remplacement » des collègues absents pour une durée allant jusqu’à trois semaines, y compris dans des « disciplines connexes », sera imposé en heures supplémentaires par le chef d’établissement. Le projet annonce le démantèlement des droits liés au statut national de 1950 en amorçant une globalisation sur une base annuelle (72 HS / an) dans les horaires statutaires des enseignantEs, préfigurant une annualisation de leur temps de travail. Le ministre annonce triomphalement le dédoublement des cours de langue « en commençant par la terminale » : faudra-t-il attendre 11 ans pour obtenir des dédoublements en CE1 ? Quant à la formation continue, dont on claironne l’importance alors que dans le Secondaire les Plans d’Action de Formation sont déjà réduits à une peau de chagrin et qu’elle se fait déjà largement hors temps scolaire, elle est renvoyée hors du temps de travail pour tous les personnels.
Pour nous, le projet de loi Fillon d’orientation pour l’avenir de l’école n’est ni amendable ni négociable, parce qu’il procède d’une logique de restriction budgétaire et de soumission aux impératifs du capital, tout comme la réforme des classes de Troisième mise en place pour la rentrée 2005 et la remise en cause de l’accueil des enfants de moins de 5 ans dans les écoles maternelles. Le retrait de ce projet s’impose. Nous le refusons en bloc, non pas parce que nous défendons l’immobilisme et le système actuel, comme la propagande gouvernementale (ou réformiste) voudrait le faire croire, mais parce qu’une réelle démocratisation scolaire ne peut s’envisager que dans une rupture avec le système capitaliste.
Nous militons pour une scolarité sans rupture ni orientation jusqu’à la fin du lycée actuel, donnant à tous les jeunes, dans un même lieu de socialisation, accès à une culture émancipatrice à un rythme adapté à chacunE, une culture polyvalente et polytechnique intégrant en une seule voie de formation culture générale, professionnelle et technologique. Nous militons pour la titularisation immédiate et sans conditions de concours ni de nationalité de tous les personnels précaires et l'arrêt de leur recrutement, la création d’un corps unique de tous les travailleurEs de l’Education Nationale - dont les TOS qui doivent rester dans la Fonction Publique d'Etat, un système de formation initiale et continue refondu préparant tous les personnels à la mise en œuvre des pédagogies émancipatrices, et la nationalisation laïque des écoles privées, confessionnelles et patronales.

Contact :
C’est par la lutte déterminée, y compris la grève reconductible, de toutes les parties prenantes du système éducatif, et des travailleurEs des différents secteurs professionnels, soutenuEs par leurs organisations, que nous pourrons obtenir le retrait du plan Fillon et des projets gouvernementaux dans lesquels il s'insère.
Valiere
 
Message(s) : 0
Inscription : 07 Mars 2004, 22:35

Retour vers Dans le monde du travail

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 1 invité