Ted Grant est décédé

Message par Debord » 03 Sep 2006, 18:04

(Combat @ dimanche 3 septembre 2006 à 14:16 a écrit : Militer au sein de la bureaucratie cubaine et vouloir marxiser Chavez est aussi droitier.

OK, j'ai compris ton point de vue. Attention toutefois à ne pas faire trop de raccourcis. Le cours actuel ambigu envers Chavez et Castro revient plus à Alan Woods qu'à Ted Grant, celui-ci n'ayant rien écrit depuis 2000.

Pour rester sur le sujet (dégénérescence de la IVe) Grant et le CWI sont les auteurs d'un autre document très intéressant, qui est une charge violente contre le SU et le CI http://www.tedgrant.org/archive/grant/1970/05/progint.htm
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Message par Combat » 03 Sep 2006, 18:59

En tout cas je ne peux pas comprendre comment on peut concilier l'entrisme au sein de parti bourgeois tels que le PS, Labor, PPP OU PRD et une appartenance marxiste en 2006. Les deux me paraissent totalement contradictoires.
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Message par pelon » 03 Sep 2006, 21:40

(Raymond @ dimanche 3 septembre 2006 à 16:58 a écrit : Vive notre grand leader Canard WC!
Pas d'attaques contre les participants du forum. :ph34r:
pelon
 
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Message par Debord » 09 Sep 2006, 23:59

(Combat @ dimanche 3 septembre 2006 à 19:59 a écrit : En tout cas je ne peux pas comprendre comment on peut concilier l'entrisme au sein de parti bourgeois tels que le PS, Labor, PPP OU PRD et une appartenance marxiste en 2006. Les deux me paraissent totalement contradictoires.

Il y a déjà un fil sur l'entrisme à l'adresse suivante.

http://forumlo.cjb.net/index.php?act=ST&f=11&t=17023

A part çà l'assimilation du PS, du Labour et de partis nationalistes révolutionnaires ou populistes comme le PRD mexicain et le PPP pakistanais est un amalgame plutôt grotesque... Idem pour les autoproclamations "marxistes". Mieux vaudrait un peu moins d' "ismes" et un peu plus d'arguments. D'autant qu'il y a effectivement dans le courant dont faisait partie Ted Grant comme chez ses frères ennemis du CWI l'idée pour le moins originale de l'entrisme dans certains partis bourgeois du tiers monde quand il n'y a pas de mouvement ouvrier autonome. Dans d'autres cas la préconisation est celle d'un labor party basé sur les syndicats. Mais après tout ce n'est pas très loin de la pratique préconisée par Marx lui même au milieu du XIXe siècle : http://www.marxists.org/francais/marx/work...fe18470000d.htm Il est effectivement regrettable qu'il y ait des pays où la représentation politique autonome du prolétariat n'existe toujours pas plus de 150 ans après ! Mais la proclamation de petits groupes ne résoud malheureusement pas ce problème.
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Message par Debord » 10 Sep 2006, 00:05

(txi @ mardi 5 septembre 2006 à 08:53 a écrit : D'autre part, je crois me souvenir d'une position délirante à propos de la Guerre des Malouines, où il était question de poursuivre la guerre sur "des bases socialistes"....

Ce n'est pas très sérieux ni correct de discuter d'un courant politique significatif sur la base de cancans ou de souvenirs fantaisistes. Pour un récapitulatif des positions de la Militant Tendancy sur la guerre des Malouines, revoir la polémique Alan Woods / Luis Oviedo (Parti ouvrier) : http://www.marxist.com/luis-oviedo-malvinas-war170204.htm
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Message par Combat » 10 Sep 2006, 01:11

Debord, vous etes vraiment des entristes sus generis a l'extreme. On arrive a une situation paradoxale ou ne pas faire de l'entrisme est presque un tabou pour l'IMT. Il faut rentrer dans tout et partout. L'IMT etait membre de l'ANC(l'est elle toujours?) qui a enchaine les masses sud africaines a la bourgeoisie du regime de l'apartheid pour citer un autre exemple.
Dis moi pour le cas de la Cote d'Ivoire ou proposes tu d'entrer? Dans le FPI, parti pseudo de gauche anti-imperialiste, mais coupable de miliers d'assassinats? Ou dans ce cas faut il enfin un groupe independant...je veux juste savoir.
Combat
 
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11 ans après sa mort, hommage à Ted Grant !

Message par Gayraud de Mazars » 21 Juil 2017, 16:06

Salut camarades,

Il y a 11 ans, disparaissait Ted Grant figure du trotskisme en Grande Bretagne et du vieux groupe Militant... Retour sur sa vie militante...

Hommage à Ted Grant (1913-2006)
Par Greg Oxley
Publié par La Riposte en juillet 2006

Image

http://www.lariposte.org/2006/07/hommag ... 1913-2006/

Le 20 juillet 2006, le marxiste et militant révolutionnaire Ted Grant est décédé, quelques jours après son 93ème anniversaire. Ainsi disparaît un homme qui fut le plus grand théoricien marxiste de sa génération. Il a consacré sa vie entière à la cause de la classe ouvrière et à la défense des idées du socialisme scientifique.

Ted a vécu une existence longue et active, dont il est difficile de rendre compte en quelques paragraphes. Je vais tout de même essayer d’en retracer les étapes et les accomplissements principaux.

Ted Grant est né en Afrique du Sud, en 1913. A l’âge de 15 ans, il adhère aux idées du marxisme. Il en avait fait connaissance grâce à un jeune communiste sud-africain du nom de Ralph Lee (Raphaël Lévy). Lee avait adhéré au Parti Communiste sud-africain en 1922, mais en avait était exclu dès la première vague d’« épurations » staliniennes.

A l’époque, l’Internationale Communiste, formée en 1919, subissait les conséquences de la dégénérescence bureaucratique de l’Etat soviétique. Léon Trotsky et l’Opposition de gauche menaient la lutte pour défendre l’internationalisme révolutionnaire contre la théorie stalinienne du « socialisme dans un seul pays ». Mais la défaite de la révolution chinoise (1925-1927) a scellé le sort de l’Opposition, qui fut exclue de l’Internationale en 1927. L’année suivante, Trotsky a été déchu de sa citoyenneté et expulsé d’URSS.

Au sixième congrès de l’Internationale, une copie de la Critique du projet de programme de l’Internationale Communiste, dans lequel Trotsky expliquait les positions de l’Opposition, est tombée entre les mains du militant communiste américain James Cannon. A son retour aux Etats-Unis, Cannon a fondé The Militant. C’est en lisant ce journal, qu’ils ont trouvé dans une librairie de gauche de Johannesburg, en 1929, que Ralph Lee et Ted Grant ont fait connaissance avec les idées de l’Opposition.

Ted a quitté l’école à 15 ans, puis a trouvé un emploi dans une compagnie de commerce maritime. Il consacrait son temps libre à l’étude des classiques du marxisme. En 1934, l’Opposition de gauche sud-africaine a pris forme à Johannesburg. Ted, avec Ralph et Millie Lee, fut parmi ses membres fondateurs. Mais peu de temps après, Ted décida de quitter l’Afrique du Sud et de s’installer en Grande-Bretagne. Lors de son voyage, il passa par la France, où lui et le camarade qui l’accompagnait, Sid Frost, ont rencontré Léon Sédov, le fils de Léon Trotsky, qui était une figure centrale de l’Opposition. Il arriva à Londres vers la fin de 1934.

Ted s’est immédiatement lancé dans l’activité politique. Il a participé à la célèbre « bataille de Cable Street », où 100 000 travailleurs britanniques ont dressé des barricades pour barrer la route à une manifestation de l’Union Britannique des Fascistes, dirigée par Sir Oswald Mosley. Les 7000 « chemises noires » ont été mises en déroute et ne se sont jamais relevées de cette magnifique riposte ouvrière.

Ted appartenait à une organisation, connue sous le nom de « Groupe Militant ». Elle n’était pas très grande, mais était très active, et ses militants faisaient preuve de beaucoup d’enthousiasme. Ses points forts étaient à Londres et à Liverpool. Ted disait toujours que cette période appartenait à la « préhistoire » du trotskisme britannique. Le travail n’a été mis sur une base politique et organisationnelle vraiment solide qu’à partir de la formation de la Workers International League (WIL), à la fin de 1937.

L’année 1938 a vu la création de la IVe Internationale. Pendant les années 30, l’appareil stalinien menait une politique de répression, de purges et d’exécutions contre les membres de l’Opposition, en Russie comme dans le reste du monde. La dégénérescence bureaucratique de l’Internationale Communiste avait atteint un point de non-retour. Face à la dictature stalinienne, au fascisme qui s’étendait en Europe et à la perspective d’une nouvelle guerre mondiale, il fallait hisser le drapeau de l’internationalisme et du socialisme pour préparer l’avenir. La WIL ne fut pas admise dans la IVe Internationale en 1938, car elle refusait « l’unité » artificielle – sans accord sur le programme, l’orientation et les perspectives – avec les autres groupements se réclamant des idées de Trotsky, unité qu’exigeait Cannon d’une façon purement bureaucratique.

La WIL n’avait pas tort de se tenir à l’écart. L’unité sans principes des groupements rassemblés par Cannon n’a pas fait long feu, et la section « officielle » de la IVe Internationale en Grande-Bretagne n’aboutit à rien. Malgré les difficultés exceptionnelles de l’époque, la WIL, à l’inverse, connut une croissance régulière de ses effectifs et de ses moyens d’action. La façon dont elle a mené son travail pendant la deuxième guerre mondiale mériterait à elle seule un article, et nous y reviendrons. La WIL a mené un travail exemplaire dans le mouvement ouvrier comme dans les forces armées. La lutte des classes n’a pas cessé pendant la guerre. A partir de 1943, surtout, un important mouvement de grève s’est développé, notamment dans les charbonnages. 120 000 mineurs ont fait grève dans le Yorkshire, 100 000 au Pays de Galles, et plusieurs milliers dans d’autres régions minières.

La Parti Communiste s’opposait catégoriquement au mouvement de grève, au nom de « l’union nationale » avec le gouvernement de Churchill, « allié » de Staline. Dans sa propagande, il imputait les grèves à l’agitation des « trotskistes », qu’il assimilait aux fascistes. Mais en réalité, même si la WIL soutenait les grèves, elle n’en était pas la cause. Les grèves exprimaient la colère croissante des travailleurs face aux profiteurs capitalistes et à la politique réactionnaire du gouvernement. Les années 1943 et 1944 ont vu le plus grand mouvement de grève depuis la grève générale de 1926. Dans ce contexte, la WIL, dont Ted était le secrétaire national, a pu étendre son influence dans les syndicats et recruter une nouvelle couche de militants ouvriers expérimentés. La WIL a également gagné une influence importante dans les forces armées, et notamment dans les « parlements de soldats » qui existaient dans la 8e armée, en Libye et en Egypte, ainsi que dans la Royal Air Force.

James Cannon ne pouvait que reconnaître la supériorité politique et organisationnelle de la WIL par rapport à la section officielle de l’Internationale, qui avait passé toute la période de la guerre à stagner dans un retranchement pacifiste stérile, ce qui la coupait irrémédiablement des travailleurs. En mars 1944, une fusion entre les groupes eut lieu – cette fois-ci sur la base des positions de la WIL. Cette fusion donna naissance au RCP (Parti Communiste Révolutionnaire), un nom choisi pour se distinguer de la politique d’« union sacrée » défendue par le Parti Communiste britannique. Lors du congrès fondateur du RCP, une nouvelle grève de 100 000 mineurs éclata. Des mouvements de grèves se multipliaient dans d’autres secteurs de l’économie. La grève des « apprentis ouvriers » prit une grande ampleur. Les services secrets britanniques (MI5) ont organisé une série de rafles dans les locaux du RCP, à Londres et dans d’autres régions. De nombreux dirigeants de l’organisation furent arrêtés, inculpés et incarcérés pour « implications dans des grèves illégales ». Mais grâce à une campagne nationale particulièrement vigoureuse menée par le RCP, le procès a donné lieu à un acquittement et les détenus ont dû être libérés sur-le-champ.

A la fin de la deuxième guerre mondiale, en 1945, Ted Grant avait 32 ans. Il était un révolutionnaire expérimenté et éprouvé. Et pourtant, s’il fallait déterminer la période la plus importante de sa vie, du point de vue de l’histoire du mouvement marxiste, je dirais sans hésiter que c’est l’après-guerre. L’issue de la guerre a débouché sur un contexte international auquel personne – pas même Léon Trotsky, assassiné par un agent de Staline en 1940 – ne s’attendait. Pour permettre à la nouvelle génération de militants révolutionnaires de comprendre l’époque, d’en dégager des perspectives et s’y orienter correctement, il fallait être capable d’appliquer la méthode du marxisme à cette nouvelle donne. Malheureusement, sans Trotsky, les dirigeants de la IVe Internationale n’en étaient pas capables. Ils répétaient, tels des perroquets, les perspectives et hypothèses formulées par Trotsky avant sa mort, et ne voulaient pas tenir compte des réalités.

Les Etats-Unis émergeaient de la guerre avec un appareil industriel non seulement intact, mais considérablement renforcé. Ceci leur permettait, par le biais du Plan Marshall, d’accélérer la reconstruction des économies dévastées du continent européen. Comme Ted l’expliquait alors, la perspective qui se dessinait, dans les pays industrialisés, était celle d’une période de croissance économique et d’une stabilité relative des rapports de classe, en même temps qu’une consolidation du stalinisme en URSS. Mais les chefs de l’Internationale ne voulaient rien savoir. Ernest Mandel, par exemple, insistait sur l’idée que le capitalisme britannique ne « connaîtrait plus jamais d’essor économique ». La direction de la IVe Internationale avançait l’idée que le capitalisme ne pourrait plus gouverner que par la dictature militaire. Elle prétendait également que l’URSS avait était été tellement affaiblie par la guerre qu’une « simple pression diplomatique » suffirait à « la détruire à court terme ».

L’abolition du capitalisme et l’établissement de régimes de type staliniens, en Chine et en Europe de l’Est, les laissaient tout aussi perplexes. Dans un premier temps, ils nièrent le fait que, dans ces pays, le capitalisme avait été aboli. Puis, dans une volte-face de 180°, ils se mirent à attribuer à certains d’entre eux un certificat « socialiste ». Ils considéraient, par exemple, que le régime dictatorial de Tito était une authentique « démocratie ouvrière ». Ces analyses erronées, et les innombrables soubresauts absurdes qu’elles engendraient, ne pouvaient que semer la confusion et la démoralisation dans les rangs de l’Internationale, la condamnant à l’impuissance et à une longue série de conflits internes, d’exclusions – dont celle de Ted et de son organisation – et de scissions.

Les écrits Ted Grant au cours de cette période conservent aujourd’hui toute leur validité. Ils sont, à côté des textes et résolutions des quatre premiers congrès de l’Internationale Communiste (1919-1923) et du premier congrès de la IVe Internationale (1938), un témoignage de la supériorité du marxisme comme méthode d’analyse. Les plus importants des écrits de Ted ont été publié par les éditions Wellred, en anglais, il y a de cela quelques années, dans un livre intitulé The Unbroken Thread. Les idées qu’il a défendues contre les dirigeants de la IVe Internationale sur les questions du « guérillérisme », du terrorisme, du Tiers-mondisme, du Titoisme, du Maoïsme, du Keynésianisme et de toutes les autres manifestations idéologiques du déclin et de la désintégration de la IVe Internationale, sont résumées dans son texte Le Programme de l’Internationale, publié en en mai 1970.

Ted expliquait que la longue période de croissance – les « trente glorieuses » – ne pouvait pas durer indéfiniment. Et effectivement, en 1973-74, il y eut la première récession mondiale depuis la fin de la guerre. Le chômage de masse et l’inflation galopante, inconnus en Europe depuis les années 30, minèrent le niveau de vie des travailleurs. En Grande-Bretagne et à travers l’Europe, des mouvements sociaux de grande ampleur se sont produits. J’étais lycéen à l’époque, à Ellesmere Port. Les manifestations et grèves provoquées par le blocage des salaires et les lois anti-syndicales imposées par le gouvernement conservateur d’Edward Heath m’avaient incité, avec quelques amis, à organiser une section du National Union of School Students, un syndicat lycéen qui venait de se créer. C’est à cette époque que j’ai rencontré Ted Grant. Son organisation, la Militant Tendency s’était résolument orientée vers les organisations de la classe ouvrière, et avait réussi à s’y établir comme la tendance majoritaire dans l’organisation de jeunesse du Parti Travailliste, le LPYS (Labour Party Young Socialists).

Je me souviens encore de la petite réunion publique à laquelle j’ai assisté – au printemps de 1973, me semble-t-il – dans le siège du Parti Travailliste, à Chester. Ted était un orateur exceptionnel. Il avait une connaissance solide de l’histoire et de l’actualité du mouvement ouvrier international, et expliquait les idées du marxisme d’une manière claire et percutante. Sa conviction, sa confiance inébranlable dans les perspectives qu’il développait et dans la capacité de la classe ouvrière à changer la société, étaient contagieuses. La réunion fut mémorable pour une autre raison. La salle était assez sombre, et il n’y avait pas d’ampoule au plafond. Au début de la soirée, cela ne posait pas de problème, mais nous nous sommes rapidement trouvés dans une obscurité quasi-totale. On ne discernait plus que la vague silhouette de l’orateur, qui ne nous voyait pas davantage. Mais cela ne l’a pas perturbé pour autant.

Ted et la Militant Tendency accordaient une importance primordiale à l’étude et à la discussion théoriques. Ceci nous donnait un avantage colossal dans le développement de nos idées et dans tous les aspects de notre activité. « Il n’y a pas d’action révolutionnaire sans théorie révolutionnaire », disait-il. Ce qui a fait le succès de cette organisation, c’était, d’une part, son attitude sérieuse en matière de théorie, de programme, de perspectives, d’organisation – et, d’autre part, son orientation vers les organisations traditionnelles de la classe ouvrière.

A partir de 1973, le Militant commençait à capter l’attention de militants individuels et de groupes révolutionnaires à l’étranger. Sa campagne de solidarité et de lutte contre la dictature franquiste, en Espagne, lui a permis de développer une organisation révolutionnaire clandestine, en Espagne, qui après la chute de Franco a connu un développement impressionnant, et publie aujourd’hui El Militante. Il a également pu établir une organisation en Irlande. D’autres contacts ont été pris en Allemagne, en Suède et en Italie. Mais la plus grande section de l’organisation internationale qui prenait forme restait la section britannique. Au moment de mon adhésion, en 1973, il y avait environ 250 adhérents. Vers la fin des années 80, il y en avait près de 7000, avec quelques 200 permanents, une base sociale massive à Liverpool, de nombreux élus locaux et deux députés travaillistes à la Chambre des Communes (le Parlement britannique).

A partir de 1990, l’irresponsabilité de plusieurs collaborateurs de Ted a détruit une partie de ce qui avait été accompli en Grande-Bretagne. Un certain nombre de dirigeants du Militant se sont convaincus qu’ils n’avaient plus besoin de s’orienter vers le mouvement travailliste et sa base syndicale massive. Ils considéraient également qu’une attitude trop insistante, à l’égard de la théorie et des méthodes de travail, constituaient un obstacle au développement du « parti révolutionnaire de masse », envisagé désormais comme un objectif à très court terme. Ted Grant et Alan Woods, en particulier, se sont opposés à cette dérive ultra-gauchiste, ce qui a entraîné leur exclusion et une scission. Le Militant a donc cessé d’exister au profit du journal d’un « Parti Socialiste » lancé dans l’indifférence générale. Cette aventure sectaire a abouti à un véritable effondrement de l’organisation britannique, dont les effectifs n’ont cessé de chuter.

Bien que minoritaire en Grande-Bretagne, la plateforme de Ted Grant et Alan Woods était largement majoritaire dans l’organisation internationale, et Ted ne fut pas perturbé outre mesure par ce revers. C’était tout à fait dans sa nature. Rien ni personne ne pouvait ébranler sa confiance dans l’avenir du mouvement marxiste. Cette confiance, il l’a gardée jusqu’à son dernier souffle. Il faut juste se remettre au travail, disait-il, rétablir les orientations et les bases théoriques du mouvement, et les désagréments occasionnés par la scission seront rapidement surmontés.

Encore un fois, il n’avait pas tort. Le mouvement international marxiste qui s’est construit sur les épaules de cet homme impressionnant n’a jamais été plus fort qu’aujourd’hui. Il est implanté dans près d’une trentaine de pays, du Pakistan aux Etats-Unis, en passant par pratiquement tous les pays de l’Europe occidentale et plusieurs pays latino-américains. Son autorité politique n’a jamais été aussi si grande.

C’est là un témoignage vivant de la grandeur et de l’accomplissement de cet homme. Ted Grant conservera à tout jamais, dans nos coeurs et dans l’esprit révolutionnaire qui nous anime, la place qui revient à l’un des plus grands représentants de la pensée et de l’action marxistes dans l’histoire du mouvement ouvrier. Il a donné toute sa vie, chaque fibre de son être, à la défense des opprimés de ce monde. Il mérite notre respect et notre gratitude. Mais avant tout, nous lui offrons notre engagement, nous aussi, de consacrer notre énergie, notre dévouement et notre vie à la grande cause du socialisme international.
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Ted Grant - Démocratie ou dictature ?

Message par Gayraud de Mazars » 10 Sep 2017, 17:45

Salut camarades,

Nous publions à La Riposte, ci-dessous un premier extrait de "La crise du Tiers-Monde et la lutte contre l’impérialisme"...

Démocratie ou dictature ? (1998)
Rédigé par Ted Grant (1913-2006), et Alan Woods, publié en juin 1998.

Image

https://www.lariposte.org/2017/09/democ ... ture-1998/

La situation présente se caractérise aussi par le revirement de l’impérialisme sur le plan de la démocratie. Hier, il appuyait des dictatures militaires alors qu’aujourd’hui il prétend promouvoir la « démocratie » là où il est possible de le faire. Les cas d’Haïti et des Philippines en sont de bons exemples. Les Etats-Unis ont retiré leur soutien à des hommes de paille dont ils disposaient sur place et desquels ils n’avaient désormais plus besoin. Il y a deux raisons à cela. D’une part, le stalinisme n’est plus une menace et de ce fait, sous la pression des masses, les impérialistes sont en mesure de concéder une démocratie formelle tant qu’elle ne remet pas en cause leurs intérêts économiques et stratégiques. D’autre part, les dictatures tendent à créer une dynamique propre. Elles créent des bureaucraties gigantesques et coûteuses, et les dictateurs eux-mêmes ont une tendance répandue au népotisme et au goût du luxe, ponctionnant une part des revenus que tirent les compagnies multinationales de ces pays. Certaines de ces dictatures osent même défier leurs maîtres impérialistes et leur poser des problèmes. Ce fut le cas de Noriega au Panama et de Saddam Hussein en Irak, pour ne citer qu’eux.

Aussi longtemps que la pression des mouvements de masse ne menacera pas l’existence même du système capitaliste, la démocratie est le moyen le plus économique de gouvernement du point de vue capitaliste. Dans tous les cas, les décisions les plus importantes seront prises à Washington, Paris et Londres. Il faut savoir quand-même que, pour le moment, la préférence de l’impérialisme pour des pouvoirs « démocratiques » ne veut pas forcément dire qu’il est en mesure de le mettre en place. N’oublions pas l’exemple de deux pays qui étaient supposés effectuer des transitions pacifiques vers une démocratie bourgeoise s’inscrivant dans ce nouvel ordre mondial : le Zaïre de Mobutu et le Nigéria. Dans ces deux pays, les juntes militaires avaient d’autres plans et ont trahi leurs promesses, au grand dam des impérialistes.

C’est aussi relié à la réticence des Etats-Unis de s’impliquer dans des interventions militaires directes à l’étranger. Notre tendance a expliqué que la défaite des Etats-Unis au Vietnam était due principalement à l’opposition des masses sur le plan national et à l’agitation parmi les soldats. Un général américain a même comparé la situation des militaires de son pays engagés au Vietnam à celle de la garnison de Petrograd en 1917. Si le Parti des Travailleurs Socialistes Américains avait eu un authentique programme révolutionnaire, les Etats-Unis auraient été au bord d’une situation révolutionnaire à ce moment-là. C’était la toute première fois que les Etats-Unis étaient vaincus lors d’une guerre. À cette époque, notre tendance expliquait que cela les empêcherait dorénavant d’intervenir avec des troupes au sol dans des pays étrangers. La seule exception que nous avons formulée concernait le Moyen-Orient, où nous avions expliqué que l’importance-clé des hydrocarbures pour l’impérialisme pouvait les forcer à intervenir en cas de situation révolutionnaire en Arabie Saoudite.

Depuis lors, nous avons vu les Etats-Unis, pouvoir impérialiste le plus puissant de l’histoire, se retirer du Liban et de la Somalie. Les seuls cas de véritables interventions de troupes au sol s’étaient produits dans de petits pays comme Grenade, Panama et Haïti où il n’était question que de rapides opérations contre de petits et faibles pays avec très peu de risques.

Par contraste, la guerre du Golfe contre l’Irak était principalement menée via des bombardements aériens. Même lorsque les Etats-Unis ont percé les lignes irakiennes ouvrant la voie vers Bagdad, ils ont renoncé à marcher sur la capitale. Les stratèges du Pentagone ont eu peur d’être enlisés dans une guérilla prolongée qui aurait rencontré une opposition de masse au pays une fois le premier soldat ramené dans un cercueil. Ainsi, nous observons la situation contradictoire où l’une des plus grandes puissances impérialistes de l’histoire est incapable d’intervenir au sol même dans un pays petit et faible comme la Somalie. Cependant, cette nouvelle « histoire d’amour » entre l’impérialisme et la démocratie ne durera que tant que la démocratie formelle garantira sa domination économique. Dans tous les cas, quelle sorte de démocratie est permise à ces peuples ? Au mieux, nous pouvons parler de semi-démocratie, une escroquerie et un cache-sexe pour dissimuler la domination des banques, des monopoles et de l’impérialisme. Et dès que la classe ouvrière et la paysannerie défieront sérieusement le régime capitaliste, les impérialistes reviendront sans hésitation aux mêmes vieilles méthodes s’appuyant sur des dictatures féroces.

En Amérique Latine, la plupart des régimes dictatoriaux sont tombés et ont été remplacés par des démocraties bourgeoises « normales » à peu près partout sur le continent. Mais là aussi, et avec l’intensification de la lutte des classes, des sections de l’appareil d’état montrent déjà des velléités de revenir à une répression ouverte contre le mouvement ouvrier et ses organisations. Au Pérou, un régime bonapartiste de type parlementaire donne un rôle de plus en plus important à l’armée dans la conduite de l’état, du système judiciaire etc. Dans beaucoup de pays latino-américains, la classe dirigeante enrôle des assassins pour liquider des activistes syndicaux. Au Honduras, en Colombie, au Brésil, en Argentine pour ne nommer que ces pays nouvellement entrés dans une phase de démocratie formelle, des activistes syndicaux et paysans ont été tués en plein jour. De là à installer des régimes ouvertement dictatoriaux il y a un pas, mais un pas que les classes dirigeantes de ces pays n’hésiteront pas à franchir avec l’appui inconditionnel de l’impérialisme états-unien et lorsque la situation l’exigera.

Cependant, les classes dirigeantes ne feront cela qu’à partir du moment où elles sentiront leur pouvoir menacé par le mouvement ouvrier dans leurs pays respectifs. À présent, le balancier a déjà commencé à virer à gauche dans la région. Des mobilisations massives ont eu lieu dans la dernière période. Des grèves, des grèves générales, et des quasi-insurrections localisées ont eu lieu dans la plupart des pays. En Equateur, une grève générale avec des caractéristiques insurrectionnelles a renversé le gouvernement honni de Buccaram. Mais l’absence d’alternative politique a laissé la place à un gouvernement démocratique encore plus « normal ». En Bolivie, nous avons assisté à une même manifestation d’héroïsme de la part des travailleurs qui ont organisé des grèves générales sur presque une année. Mais sans un parti révolutionnaire, il n’y aura aucune voie de sortie. Dans les conditions de la crise capitaliste, même les grèves les plus dures ne pourront résoudre les problèmes fondamentaux de la classe ouvrière.
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