a écrit :De la radicalisation à la laïcité
mardi 29 avril 2008, par Jean-François Chalot
En 68, au moment du début du mouvement j’étais déjà engagé politiquement, militant des jeunesses socialistes SFIO, je voulais avec mes camarades construire l’unité ouvrière sans frontière à gauche... Nous avons subi des insultes et même des violences...Les staliniens n’étaient pas tendres avec les socialistes ... Nous avons continué malgré tout à distribuer des tracts devant les boîtes et à prôner l’unité...Nos inscriptions à la peinture en faveur de l’unité PC-SFIO-CNT sont restés longtemps sur les murs...
Entre Jules Moch que j’ai aperçu dans un congrès et Daniel Guérin, le socialiste libertaire, nous avons vite choisi le second et c’est ainsi que notre mouvement des jeunesses s’est revendiqué du socialisme révolutionnaire.
Notre radicalisme ne plaisait pas à nos « camarades » adultes et, traité un jour de « trotskiste » par le secrétaire fédéral de la SFIO j’ai voulu rencontrer ceux qui m’étaient proches et c’est ainsi qu’au début 68 je suis passé à « gauche de la gauche »
En 1968, à 20 ans je voulais construire un nouveau monde et passant d’un réformisme de culture familiale à une orientation révolutionnaire encore balbutiante, j’avais parfois des positions contradictoires. Participant activement à l’occupation jours et nuits de l’Ecole Normale de Melun, j’étais depuis mon entrée dans cette grande insitution républicaine un défenseur inconditionnel de ces EN que la bourgeoisie voulait liquider.
J’ai ainsi participé aux comités de défense des EN qui se sont développés l’année précédente. Cette analyse pertinente ne m’empêchait pas de scander sans hésitation
« A bas l’école des flics et des patrons » mais déjà je trouvais que l’école publique devait être défendue !
« Tu évolueras mon fils » me disait mon père à cette époque là ! Il pensait qu’avec le temps j’épouserai une option « réaliste », moins radicale.
Très vite, dès le début des années 70, formé par mes aînés, syndicalistes révolutionnaires j’ai compris que si la bourgeoisie avait assigné à l’école une fonction reproductrice du système, cette même bourgeoisie s’était fixé depuis plusieurs décennies comme objectif de rentabiliser l’école publique et de remettre en cause son caractère laïque.
Il s’agissait là d’un véritable échange de pratiques et de savoirs entre les syndicalistes lutte de classes et notre génération : nous apportions notre jeunesse, notre envie d’en découdre avec ce régime et eux leur analyse des rapports de force et leurs expériences.
J’ai mûri comme d’autres mais je reste indéfectiblement un révolutionnaire.... Certains parlent de républicains d’extrême gauche, je doute de l’existence d’un tel courant . Je milite pour la destruction de ce système d’exploitation capitaliste et de ces institutions anti démocratiques que certains nomment abusivement la République.... Un militant révolutionnaire doit à la fois défendre des acquis démocratiques républicains et à la fois oeuvrer pour mettre à bas ce système inégalitaire C’est ce que le « gauchisme » maladie infantile du communisme n’a pas compris... Mais comme nous l’expliquions en 68 aux bureaucrates staliniens qui n’ont eu cesse de casser la grande grève générale : il vaut mieux être être atteint d’une maladie infantile que de sénilité !
L’éducation, c’est l’ensemble des influences qui s’exercent sur l’individu et que l’individu exerce sur son environnement. Notre génération militante et notamment les milliers d’instituteurs révolutionnaires qui ont commencé leur carrière au début des années 70 ont compris que le combat laïque était et est d’une actualité brûlante. Influencés par nos aînés qui nous ont expliqué le sens de l’engagement laïque dans et autour de l’école, nous avons combattu tous les plans de destruction de l’école publique et notre génération a fourni les principaux cadres militants des grands manifestations du début des années 80 .
Aujourd’hui comme hier, il nous faut construire l’unité sans faille et sans exclusive de tous les laïques afin de combattre toutes les tentatives et elles sont nombreuses qui visent à remettre en cause la loi de séparation des églises et de l’Etat.
Le combat que nous menons pour la défense de l’école laïque, pour l’abrogation de toutes les lois anti laïques est le même que celui que nous menions en 68 quand nous voulions changer le Monde. Il est indispensable de lier le combat social et le combat laïque sans se fourvoyer dans des alliances douteuses avec les communautaristes de toutes obédiences ou se quereller sur l’accessoire.
Le mouvement laïque, c’est à la fois des associations comme l’UFAL, comme l’UNSA, le SNETAA-EIL , les libres penseurs indépendants ou la Fédération Nationale de la Libre Pensée. Il est indispensable de construire un grand front unitaire et d’agir résolument et avec force en défense de la loi de séparation des églises et de l’Etat et pour l’abrogation de toutes les lois anti laïques.
Jean-François CHALOT