Intervention de Olivier Lestang au titre de la tendance Front Unique au Bureau National de la FSUL’alternative est simple :
* soit les directions syndicales appellent tant qu’il est temps à affronter le gouvernement par la manifestation centrale au siège du pouvoir pour le retrait de la « réforme » des retraites
* Soit elles porteront l’entière responsabilité du passage de cette loi
Il faut être lucides : pour le gouvernement, il n’y a pas le feu à la maison, tant s’en faut.
Mais il y a encore des braises, qui viennent d’être avivées par l’apport de bois sec qu’est le début de mouvement dans plusieurs centaines de lycées et quelques universités (Rennes, Toulouse), mouvement qui cherche à s’orienter contre Sarkozy, son gouvernement, pour le retrait de la « réforme » des retraites, c’est-à-dire qui cherche à se dégager du refus de l’intersyndicale à engager un quelconque combat contre le gouvernement Sarkozy-Fillon-Woerth et sa politique.
Je parle de braises parce qu’aucune illusion ne doit être propagée sur les grèves « reconductibles » (c’est-à-dire disloquées site par site, jour par jour). Ces ‘grèves’ (fort disparates au demeurant) n’existent que par la décision, et la capacité, dans tel ou tel secteur, des appareils syndicaux d’engager les travailleurs qui veulent bien les y suivre.
Les travailleurs dans leur grande majorité se sentent dépossédés, cadenassés, un peu comme des ours qu’on promènerait à intervalles réguliers au bout de la laisse de l’intersyndicale, dans d’inoffensives manifestations dépourvues délibérément de tout autre objectif que de récolter quelques piécettes, d’obtenir comme dit Chérèque des « inflexions » à un projet scélérat.
Alors dans cette situation, où le 12 octobre a aussi montré la tenacité du prolétariat malgré un tel cadre, la question qui est posée, alors que les vacances de la Toussaint approchent, alors que le projet gouvernemental arrive au terme de son examen au Parlement sous le pilotage quotidien de l’Elysée est simple.
Est-ce que les directions syndicales CGT, FO et FSU, vont donner un appel d’air où bien vont-elles étouffer ces braises en les couvrant de cendres ?
Car la contradiction essentielle aujourd’hui est bien celle-là : pour l’immense majorité de la population, et tout particulièrement la jeunesse qui tente d’engager un mouvement en ce moment même, Sarkozy est l’ennemi public numéro 1.
Or pour l’intersyndicale, et y compris pour les directions syndicales qui appellent à la « reconductible », l’« exigence » essentielle c’est d’être reconnus comme … des « partenaires n°1 ».
Ainsi Bernard Thibault répète à l’’envi : « Négociez avec les syndicats ou il ne faudra pas s’etonner que le mouvement se radicalise ». C’est d’ailleurs tout le sens de la journée prévue pour le 19 octobre, veille d’un vote au Sénat qui n’a aucune importance faut-il le rappeler, c’est l’Assemblée nationale qui tranche et qui a de fait déjà tranché.
Mais bien sûr les dirigeants syndicaux savent que le vote du Sénat ne change rien au vote de la loi, et quand ils le prétendent, ils mentent aux travailleurs.
La vérité, c’est qu’en convoquant une nouvelle « journée d’action » le 19 (en attendant les vacances), la veille du vote au Sénat, il s’agit en fait pour eux, via le Sénat, de poursuivre jusqu’au bout le « dialogue social » avec le gouvernement, avec Sarkozy.
Voilà bien le cœur du problème ! Et c’est la même chose pour les « reconductibles » (à force, ce mot finit par remplacer celui de « grève ») !
Car en guise de « radicalisation », il y a donc ces quelques grèves éparses où les mêmes appareils syndicaux se proposent de faire tourner les travailleurs qui les y suivent comme des poissons rouges dans un bocal. Et qu’en penser dans l’enseignement, à quelques jours des vacances de la Toussaint … quelle impasse !
Mais aujourd’hui les choses arrivent à un terme.
L’examen du projet par le Parlement est quasiment fini. Autant pour les salades servies depuis des mois sur les « inflexions », la « prise en compte des alternatives » et autres tournures verbales qui signifient toutes : nous ne voulons pas combattre [une dirigeante du SNEP a même manifesté son « souci » lors de ce bureau national que la FSU ne soit pas « perçue – mais par qui ? – comme voulant mettre le pays à feu et à sang, mais comme une fédération responsable revendiquant un grand débat public »].
L’alternative est : soit les directions syndicales unies exigent le retrait pur et simple de ce texte, soit elles battent en retraite, en en prenant la totale responsabilité au lieu d’en faire retomber la responsabilité sur les travailleurs, ce que visent ces « reconductibles » soigneusement dosées.
Or les déclarations de Sarkozy, celles de Fillon, le vote des principaux articles de loi au Sénat fait au rythme choisi par l’Elysée indiquent bien que ce n’est que dans la voie de l’affrontement avec le gouvernement que peut s’ouvrir cet appel d’air qu’attendent tant de travailleurs, tant de nos collègues, ainsi bien entendu que la jeunesse scolarisée.
Alors qu’est-ce qu’affronter le gouvernement aujourd’hui, qu’est-ce que donner le signal d’affrontement avec lui ? C’est de convoquer une manifestation centrale au siège du pouvoir, à Paris, sur le seul et unique mot d’ordre de « retrait ».
Et dans les circonstances toutes particulières qui sont celles d’aujourd’hui, l’aspiration existe dans le pays d’aller « marcher sur le château », l’Elysée, d’aller en découdre là où cette réforme a été décidée, pilotée (et préparée en concertation avec les sommets syndicaux), là où le calendrier journalier des séances et des votes du parlement est décidé, c’est-à-dire à l’Elysée, au siège du pouvoir de type bonapartiste corrompu, contre Sarkozy, par millions, pour le retrait de son projet de « réforme » réactionnaire.
Voilà ce que la FSU doit défendre aujourd’hui auprès des confédérations ouvrières, des fédérations de fonctionnaires, des organisations syndicales enseignantes.
Alors que les circonstances peuvent permettre une nouvelle fois d’appeler au combat contre un gouvernement qui fait déjà donner ses flics partout contre nos élèves – eux ne pratiquent pas il faut le dire le « dialogue social », s’y refuser une nouvelle fois serait prendre la totale responsabilité de laisser le gouvernement passer son chemin sans être menacé, de lui offrir sur un plateau une victoire politique dont, alors, les dirigeants des confédérations et des confédérations auraient à rendre compte.
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