Carmaux, patrimoine mondial des prolétaires

Marxisme et mouvement ouvrier.

Carmaux, patrimoine mondial des prolétaires

Message par Gayraud de Mazars » 09 Juil 2018, 15:31

Salut camarades,

Peut être j'ai écrit cet article parce que je suis né à Carmaux, la fière patrie des mineurs, des verriers et du grand Jaurès ! En tout cas je n'oublie pas que mon grand père Roger Baysse, stalinien de choc, était le secrétaire CGT des employés des mines de Carmaux et menait à Carmaux les grèves de 1948 ! ... Il est mort au fond au puit de la Tronquié, le 16 août 1953 ! Je n'oublie pas que son épouse ma grand mère Reine Bousquet elle aussi communiste, avait pour grand père Germain Bousquet, verrier à Sainte Clotilde à Carmaux et militant guesdiste du POF, avant l'arrivée de Jaurès à Carmaux...

Lors des évènements de Carmaux, Germain Bousquet avait été arrêté, on lui avait posé la question, Germain Bousquet vous êtes présumé révolutionnaire ? Il avait répondu simplement à la police - Pourquoi présumé ?

Carmaux, patrimoine mondial des prolétaires
Par Laurent Gutierrez, PCF de Côte d'Or

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https://www.lariposte.org/2018/07/carma ... oletaires/

Carmaux, aujourd’hui ville anonyme. Passez le viaduc du Viaur, entre Rodez et Albi, par Tanus, allez à Carmaux dans le Tarn en Segalar. Dans ses rues, regardez, vous êtes au milieu de sa dizaine de milliers d’habitants. A part le vendredi, jour de marché, personne. Seuls quelques anciens, au Coin Dulac se remémorent de vieilles histoires.

Dire que là, il y a plus de 100 ans vibrait le cœur même de la classe ouvrière, jusque dans la voix de Jaurès, son élu, en français à l’Assemblée Nationale, en occitan pour les verriers et mineurs de Carmaux !

Carmaux seule richesse le charbon et los carbonièrs (mineurs de charbon) :

Carmaux est lié à son site entre Massif Central et Bassin Aquitain, au bord du Cérou. Depuis l’ère Primaire des millions de tonnes de charbon attendaient, pour enrichir la très catholique famille De Solage.

Elle exploitait des milliers d’anciens paysans, les nôtres, poussés à venir là, à cause de la crise agricole et vivre en descendant dans le trou pour suer du charbon et devenir carbonièrs (mineurs de charbon).

Ces mineurs restaient attachés à leur campagne, ils conservaient souvent une parcelle pour nourrir la famille, ces ouvriers – paysans guidés par l’exode rural – n’avaient plus que la fosse comme ambition, espérant que leurs enfants aussi pourraient être embauchés.

Carmaux la prolétaire :

Après la victoire de la grève des mineurs de mars 1892, du syndicat “rouge”, Carmaux est l’une des premières villes occitanes à se doter d’une mairie socialiste. Socialiste, pas à la sauce d’aujourd’hui, non, révolutionnaire, rouge, avec un maire authentiquement ouvrier, qui deviendra un ami fidèle et indéfectible de Jaurès, le carbonièr Jean – Baptiste Calvignac. Ce 1er mai là, de l’année 1892, en cette journée de lutte des travailleurs du monde, derrière le drapeau rouge, au cri de « Vive la Sociale », les verriers et mineurs de Carmaux allèrent voter pour élire un des leurs !

La réaction patronale dirigée par le marquis De Solage, qui pensait posséder la mairie comme il avait sa mine et ses écoles maristes, attaqua l’hérésie socialiste, ces sans-dieu qui pensaient d’abord à faire construire dans leur ville une école laïque… La hargne de ce grand notable ouvertement monarchiste, qui a décidé de persécuter ces mineurs qui lui échappent (mise à pied, licenciement…), ne fit qu’enrager ce monde ouvrier qui espérait mieux que des salaires dérisoires et voulait faire démocratiquement entendre sa voix et déjà dans sa mairie. C’était cela aussi la réalité de la lutte des classes.

La combativité des mineurs et verriers de Carmaux était animée par cette soif révolutionnaire que rien n’émousse, et dire que c’est en occitan que tout se passait, l’occitan pour ceux qui travaillaient, le français pour ceux qui les opprimaient.

Le socialisme à Carmaux vient de ces aristocrates de la classe ouvrière (éduqués, bien payés) que sont ces verriers venus travailler à Carmaux, à la verrerie Saint Clotilde. Ils étaient des exilés, licenciés du Centre de la France pour action politique, c’est qu’ils étaient à l’extrême gauche, guesdistes, là où ils passaient, ils ne faisaient pas que souffler des bouteilles, faisant ainsi payer bien cher aux patrons, leur savoir et leur expérience.

Ces ouvriers ne parlaient pas l’occitan, cependant bien intégrés, ce sont eux qui ont été les pionniers du socialisme à Carmaux, inspirateur des premiers cercles marxistes. Entre verriers et mineurs, au – delà des langues, c’était déjà la solidarité de classe… Internationale.

Carmaux et Jaurès :

Jaurès fut donc ce républicain assez modéré au départ, d’origine castraise qui se mit au service de la classe ouvrière et devint auprès des verriers et mineurs de Carmaux, socialiste. Il est à signaler que ce mouvement de balancier vers l’extrême gauche était assez rare pour les hommes politiques de l’époque, sans parler d’aujourd’hui !

On peut dire que Jaurès incarne Carmaux, pas seulement parce qu’il en fut son député dès 1893, mais il y a connu la condition ouvrière, les injustices, a défendu à sa manière la classe ouvrière. Il a su se faire aimer, lui l’intellectuel, dont se méfiaient les ouvriers. Mais, il parlait leur langue, celle du peuple, alors, il était devenu l’ami, qu’on appelait – : ” Nostre jan “.

C’est à Carmaux que Jaurès a gagné “ses galons de classe”, c’est ici que se dressa sa réputation internationale… Sans Carmaux, pas de Jaurès…

Carmaux : Tentative d’autogestion ouvrière:

En 1895, à Carmaux, en France et dans l’Europe entière, c’est la verrerie Sainte Clotilde qui fait l’actualité. Suite à la lutte acharnée entre les verriers et Résseguier, illustration du parfait patron réactionnaire, surgit une riposte ouvrière à la hauteur de l’exaspération. Il faut dire que Résseguier usa de tous les moyens pour briser l’action des verriers. Briser la grève et la solidarité ouvrière.

Il ferma l’usine, expulsa les meneurs, menaces, insultes, il fit même charger la cavalerie dans les rues de la ville, sabre au clair, contre les grévistes !

A Carmaux d’ailleurs, les verriers alliés aux mineurs entre les platanes bordant les rues, attachaient du fil de fer pour faire chuter les charges de cavalerie.

La ville était quadrillée par l’armée comme elle le sera aussi en 1948, pendant les grèves des mineurs, pour casser la grève et les revendications ouvrières.

Le patron de la verrerie Résseguier restait inflexible, appuyé par les forces de l’ordre, l’Etat bourgeois, le Préfet, par le marquis de Solages, le propriétaire des mines de Carmaux, par les cléricaux et toutes les forces de la Réaction alliées.

Pour seule réponse, le 25 octobre 1896, date historique, pour les travailleurs du monde, les verriers de Sainte Clotilde à Carmaux, créent grâce à la solidarité internationale, une verrerie ouvrière à Albi.

A l’appel de Jaurès et de tous les socialistes, fut construite la première usine, qui n’avait pas de bourgeois, pas d’actionnaires anonymes, comme propriétaires.

Ce refuge de l’ouvrier libre était par sa nature, verrerie ouvrière, propriété, certes, mais du prolétariat mondial !

Si par son fonctionnement, la verrerie ouvrière d’Albi, ne remit pas en cause l’ordre capitaliste, voyant ainsi ses limites, par sa seule existence au cœur de l’Occitanie, ces ouvriers révolutionnaires appuyés par Jaurès, avaient lancé à la face du monde, une mesure d’urgence, marque de combativité et d’imagination, une forme de « viure e decidir al país », vivre et décider au pays, une SCOP [Sociétés coopératives et participatives] avant l’heure.

Certes, depuis plusieurs années la verrerie ouvrière a été privatisée, mais elle fonctionne toujours. Les puits, les fosses sont fermés à Carmaux, de la Découverte, mine à ciel ouvert la plus grande d’Europe, plus de charbon ne sortira. Tout a été fermé, malgré les promesses de Mitterrand en 1980, qui avait lancé par un meeting sa campagne victorieuse à Carmaux, pour cette présidentielle du 10 mai 1981 !

Il ne reste à Carmaux que des traces pour l’archéologie industrielle et un projet pharaonique, celui de Quilès, qui s’est dit être une panacée à la faillite et désertification de la ville et qui s’est révélé être un désastre financier.

Cependant, à Carmaux nous n’avons pas perdu le sens général de ces luttes d’il y a plus de cent ans. Elles donnaient, à nos anciens, comme à nous, un sens à la vie. L’émancipation du monde du travail, à travers une conviction, c’est dans le socialisme qu’elle pourra se réaliser.
"Un seul véritable révolutionnaire dans une usine, une mine, un syndicat, un régiment, un bateau de guerre, vaut infiniment mieux que des centaines de petits-bourgeois pseudo-révolutionnaires cuisant dans leur propre jus."
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Re: Carmaux, patrimoine mondial des prolétaires

Message par thomas33 » 14 Juil 2018, 09:12

Bonjour Monsieur Gayraud de Mazars,
Votre article est très intéressante ! Merci pour votre partage ! Je vais visiter la ville de Carmaux dans la future proche.
Merci et très bonne journée !!! :D
Comment on faire le <a href="http://circuitvietnamcambodgepascher.com/">Carmaux, patrimoine mondial des prolétaires</a>3 semaines
thomas33
 
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Re: Carmaux, patrimoine mondial des prolétaires

Message par Gayraud de Mazars » 14 Juil 2018, 18:36

Merci Thomas ! Visite bien Carmaux, et le musée de la mine de Cagnac, je te le conseille !

Bibliographie indicative

A) ouvrages scientifiques-

- Rolande Trempé, "Les mineurs de Carmaux" 2 tomes, les Edition ouvrière 1971
- Rolande Trempé, "Jaurès et la verrerie ouvrière" Jaurès et la Nation faculté des Lettres et sciences humaines 1965
- Gérard Gorgues , "Une histoire des mines de Carmaux" Atelier graphiques Saint Jean, 1992
- Jòrdi Blanc, Jaurès e Occitània, collection viure al país, vent Terral éditor, 1985

B) roman-

Edouard Roy, "Une fumée sur le toit, Charlou mineur et paysan", édition universitaire, 1982

C) Documents iconographiques-

- France 3 sud, Au Charbon ! Carmaux photo souvenir, 1994
- "Ils ont tué Jaurès !" Carmaux 1994 enregistrement du spectacle mis en scène par Claude Moreau.

D) Bande dessinée-

- Philippe Marlière, Sylvie Montmoulineix, "Jean Jaurès et son discours à la jeunesse", la nacelle 1995
- G Cappele, ph Enjalbert, "Jean Jaurès", imp Jacques Mas, 1990

Dans les écoles catholiques ils chantaient :

Jaurès a la tribuna
Vos prometià la luna
Mas de per darrèr
Vos fot un cop de pè

Les mineurs socialistes chantaient :

1.Ciutadans escotatz plan
Una cançon vos vau cantar
Una cançon novèla
Facha per un carbonièr
Sa sapiença n'es pas bèla
Car es pas un bachelièr

2.A pas estudiat vint ans
Coma fan tant de fenhants
A pas usadas de plomas
De papiers ni de gredons
Son tresaur e sa fortuna
Es d'anar'l cros cada jorn

3.De sièis oras de matin
A tresont torna sortir
tot usat de fatiga
e confat de marrit èr
pendant trent ans de sa vida
e lo negre per dessert.

[...]

8.A Carmauç, fraires,
ritorsson los mestres dels carbons;
son els que ne comandane
ne dison als patrons,
abatem la Sociala
tedrem melhor los paurons.

9.Puei que socialistas son,
Re prendràn pas los dròlles al cros
Te cal estre progressista,
Client del duc d'Orléans,
Estre escrit sur la lista,
Facha pel rei dels fenhants.

Texte complet publié par Jacques Castagné : Rosières en Albigeois, édition de la Revue du Tarn, 1965, p .128

Fraternellement,
GdM
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Re: Carmaux, patrimoine mondial des prolétaires

Message par Gayraud de Mazars » 30 Juil 2018, 18:17

Salut camarades,

Perque an tuat Jaurès ?
Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?

Image

"Es sus la talvera qu'es la libertat" !

Dans la nuit du 31 juillet au 1er août 1914, partout dans Carmaux cette nouvelle, colportée par les militants, de porte en porte, elle se répand déjà, de la voix effondrée de Jean Baptiste Calvignac, le maire ouvrier - mineur et socialiste de la ville, en occitan, parce que, comme Jaurès ici, tous parlent cette langue, qui est celle de la vie et des travailleurs qui luttent, et portent ce cri sinistre :

« An tuat Jaurès ! An tuat nostre Janon ! ».

Ils ont tué Jaurès, nostre Janon ! C’est notre Jean qu’ils ont tué, car Jean Jaurès était leur député, plus que cela, il était l’ami, il était le camarade.

Dans les maisons des mineurs et verriers de Carmaux, résonnent la colère, le désespoir et le deuil.

C’est dire, si un esprit chancelant comme Raoul Villain, quand il arme son révolver, devant le café du croissant le 31 juillet 1914, a le sentiment d’accomplir un geste patriotique et l’impression qui se révèlera juste, d’être excuser par avance, par la majorité de l’opinion publique.

Comme il déclara lui-même au gardien de la paix qui l’arrêta :
« Si j’ai commis cet acte, c’est parce que Jaurès a trahi son pays, en menant sa campagne contre la loi de trois ans (trois ans de service militaire). J’estime qu’on doit punir les traîtres et qu’on peut donner sa vie pour une cause semblable. Je ressens un profond sentiment du devoir accompli… »

Le comble c’est que Raoul Villain passera la guerre en prison loin des combats, qu’il sera acquitté lors du procès. Il ressortira libre le 28 mars 1919 et que c’est la famille Jaurès qui devra payer les frais de justice ! S’il y a une justice, les bourreaux meurent aussi.

Raoul Villain sera exécuté en 1936 par des républicains, alors qu’il était en exil en Espagne, au tout début de la Révolution espagnole contre Franco et les généraux du coup d’Etat, contre la jeune République espagnole, qui venait d’élire un gouvernement de Frente Popular, de Front Populaire avec les communistes…

Fraternellement,
GdM
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Cançon - Los carbonièrs de la Sala

Message par Gayraud de Mazars » 02 Avr 2019, 18:54

Salut camarades,

Un p'tite chanson que j'adore de chez moi, en occitan, sur la fameuse grève des mineurs de charbon de La Sala (Decazeville) dans l'Aveyron...
Alara es d'escotar un muci ! Ecoutez un peu camarades...

Le texte de cette chanson fut écrit par Jean Boudou, (écrivain fort renommé dans la littérature occitane), quelques temps après la grève de 1961-62. Mans de Breish (Gérard Prodhomme) musicien et chanteur occitan, l’a mise en musique et en a fait l’enregistrement.

Depuis, plus d’un chanteur l’a interprétée. Par exemple, en l’an 2000, les écoliers de l’école publique du Sailhenc, à Decazeville, pour faire le compact-disque « Chants de Mine ! », sous la direction d’Hubert Turjman.

Cette chanson vit toujours, à l’occasion d’une fête, d’un concert ou d’un spectacle… comme un hommage aux mineurs du Bassin qui nous ont laissé une belle leçon de lutte pour la justice sociale.

Los carbonièrs de la Sala

https://www.youtube.com/watch?v=ZcogQI6JMF8
[Chorale]

ou

https://www.youtube.com/watch?v=VNJWWrFlzZ0
[Mans de Breish]

Occitans sens lo saber
Cantan l’Internacionala
La cançon dèl desèsper.
Del punh sarrat que se lèva
Saludèm l’acordéon
Cal comprend la nòstra grèva*
Jaurés ès al Panteon.
Luchas grandas d’un còp èra
La policia dins Aubinh
Per saquejar la misèria
Quand trigossèran Watrin.
La plegarem pas l’esquina
Ajudas-nos, paisans
Volem gardar nòstra mina
Lo pan de nòstres enfants.
Cantem l’Internacionala
La cançon de nòstre espèr
Los carbonièrs de La Sala
Nos an mostrat lo dever.


* grèva deus carbonièrs de La Sala en 1962
Paraulas de Joan Bodon
Musica de Mans de Breish

Traduction en français...

Les mineurs de Decazeville

Occitans sans le savoir
Chantent l’Internationale
La chanson du désespoir
Du poing serré qui se lève
Ils saluent l’accordéon
Qui comprend notre grève* ?
Jaurès est au Panthéon
Grandes luttes d’autrefois
La police dans Aubin
Pour maltraiter la misère
Quand ils ont défenestré Watrin
Nous ne plierons pas l’échine
Aidez-nous, paysans
Nous voulons garder notre mine
Le pain de nos enfants
Chantons l’Internationale
La chanson de notre espoir.
Les mineurs de Decazeville
Nous ont montré notre devoir


*grève des mineurs de Decazeville en 1962
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Re: Carmaux, patrimoine mondial des prolétaires

Message par Gayraud de Mazars » 02 Avr 2019, 19:58

Salut camarades,

Un article ancien de 2014, de la Dépêche du Midi... Sur Jaurès et Carmaux !

Auprès des mineurs de Carmaux, Jean Jaurès entre en socialisme

https://www.ladepeche.fr/article/2014/0 ... lisme.html

Carmaux n'a pas oublié Jaurès et se souvient 100 ans après sa mort que c'est là qu'il bascula en 1892 vers le socialisme, au contact des mineurs et des ouvriers verriers dont il fut le député jusqu'à son assassinat par un nationaliste à la veille de la première guerre mondiale.

"C'est ici que Jean Jaurès (1859-1914) est devenu Jaurès, en s'engageant à fond en 1892 dans la première grève politique des mineurs pour arracher la réintégration d'un syndicaliste licencié alors qu'il venait d'être élu maire de Carmaux, le premier maire socialiste de la ville", explique le directeur du musée du verre de Carmaux (Tarn), Laurent Subra.

A l'occasion de ce centenaire, le musée du verre comme celui de la mine tout proche, à Cagnac, dédient chacun une salle au défenseur des ouvriers que beaucoup de Carmausins appelaient "Nostre Joanon", selon M. Subra.

Une voix qui pourrait être celle du maire syndicaliste d'alors, Jean-Baptiste Calvignac, s'élève dans la salle d'exposition de l'ancienne verrerie royale de Carmaux: il témoigne dans un diaporama de l'amitié indéfectible qui s'est nouée alors entre les deux hommes et des 10 semaines de grève qui ont permis le succès de la lutte, malgré l'intervention de la troupe appelée pour faire respecter "la liberté du travail".

Le marquis de Solages propriétaire de la mine et député conservateur est contraint de démissionner de son mandat et Jaurès est élu pour la première fois comme député socialiste au début 1893.

- 'Le droit de l'ouvrier' -

Le jeune intellectuel républicain avait déjà été député du Tarn de 1885 à 1889, mais la grève des mineurs de Carmaux de 1892 le fait basculer définitivement vers le socialisme, souligne-t-on au musée du verre comme au musée de la mine.

Le musée de Cagnac met d'ailleurs en exergue de son exposition "Jaurès et les mineurs" une citation du "député des mineurs" rappelant son combat contre le pouvoir absolu du patronat: "Dans l'esprit de beaucoup de patrons, le droit de l'ouvrier est précaire et révocable et cesse dès qu'ils en font un usage qui déplaît au patron lui-même".

Bien avant le combat de Jaurès pour empêcher le déclenchement de la première guerre mondiale et son assassinat au compte des intérêts bellicistes, le militant socialiste a achevé de construire sa légende dans le Tarn dès 1895-1896 au travers d'une autre grève pour les droits des ouvriers, celle des ouvriers verriers.

Cette industrie complémentaire de celle du charbon avait aussi ses patrons "désireux de se débarrasser des ouvriers syndicalistes et socialistes" selon M. Subra.

- 'Première basilique' du prolétariat -

Deux syndicalistes de la verrerie Rességuier de Carmaux sont licenciés pour avoir été absents afin de participer à un séminaire syndical à Marseille. Les salariés se mettent en grève, en appellent à Jaurès qui "va en faire une affaire nationale". Ils ripostent au lock out patronal en lançant une souscription nationale pour créer une verrerie appartenant aux ouvriers.

La Verrerie Ouvrière d'Albi, constituée d'un capital de 5.000 actions de 100 francs, coopérative gérée par le syndicalisme, est à ses yeux la "première basilique" du prolétariat français. Elle n'a abandonné le statut de coopérative qu'en 1989 puis est entrée dans le groupe Saint-Gobain.

Accusé par le patronat local de représenter "la haine de classe et la ruine de l'industrie", Jaurès perd son siège en 1898 avant de le reconquérir en 1902 pour le conserver jusqu'à sa mort.

Au musée de la mine de Cagnac, la plupart des visiteurs viennent avant tout pour revivre l'aventure industrielle des gueules noires, au coeur de 350 mètres de galeries reconstituées et de leurs outillages sous l'un des derniers puits du domaine fermé en 1987.

Mais l'évocation des luttes sociales d'antan renvoie invariablement au "grand homme". "Quand on était dans la grande grève des mineurs de 1963, on ne pensait pas tous les jours à Jaurès, mais le centenaire nous rappelle que c'était vraiment un grand homme" déclarent en choeur deux anciens mineurs, Stanislas Swiatek et Elisée Roumegoux, 75 et 78 ans, seuls survivants parmi les 6 fondateurs bénévoles du musée en 1989.
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