par Cyrano » 06 Mai 2019, 21:03
Mais non Zelda, la Poste ne passait pas son temps à acheminer que du courrier.
Tu oublies que y'avait les paquets et c'était un très, très gros boulot. Tu as peut-être connu cette époque des "achats par correspondance" (c'était la formule): la Redoute, Quelle, Vert Baudet, Les Trois Suisses (et Manufrance même), etc. Y'avait pas internet, mais y'avait d'énormes catalogues dans lesquels les gens choisissaient et c'était des volumes hallucinants de colis qui créaient énormément de manutention, avec un sacré paquet de camions qui véhiculait tout ça sur la route. Ah putain, je les maudissais les clients qui commandaient "par correspondance", plus on en mettait dans les sacs postaux, plus y'en avait.
Et c'était trié à la main : selon le département, on jetait dans les sacs postaux, three points, two points. Puis y'a au des codes-barres, puis y'a eu des machines qui lisaient les codes-barres, et dans un bruit d'usine on s'est retrouvé à surveiller que tout se passe bien avec les machines, sans plus pouvoir se parler en bossant à des mètres les uns des autres.
Je crois que c'est Antonio Labriola qui écrivait que l'homme du futur sera un heureux et génial fainéant. Mais pour le moment, le futur technologique, c'est celui de la logique du capitalisme.
Certes, dès qu'on change est-ce vraiment pire pour les travailleurs? Zelda tu dis que ce n'est pas la vérité, c'est vrai, mouaih, cépafo, mais c'est vrai aussi que ça peut être pire, et que ça peut être un élément de vie qui s'en va. Foin de la caissière qui échangeait vite fait avec les clients qu'à force elle connaissait, maintenant, elle a monté en grade, elle est hôtesse de la caisse auto, elle cause à personne, sauf si un client a un problème, elle se déplace, appuie sur une touche, et retourne à sa place, avec un coup d'œil à la pendule qui s'obstine à ne pas bouger, saloperie d'aiguilles.
Un crétin de chef de burau de poste, avec un look de prétendant d'amour est dans le pré, m'a dit que «La poste à papa, c'est fini.» Eh bien, c'est dommage qu'elle soit finie ainsi: remplacée par des machines de merde qui font que pour acheter un timbre faut une carte bancaire, la machine n'accepte pas la monnaie. Et pour expédier un paquet, un colisssssimo? Ah bon, faut aussi passer par la machine? Gain de temps? Oui et non: l'employé de la poste vous montre et appuie sur l'écran à votre place. Et on peut se plaindre? Bien sûr, on n'est plus la poste à papa. Avant c'était un boulot harassant, fallait entendre les jérémiades des clients, hop, le progrès: musique, tapez 1, 2, 3, soleil, toutes les lignes sont occupées.
Comme tu l'écris Zelda, c'est de l'automatisation, même assez fine, avec des règles et sans erreurs humaines, bin non, même plus besoin, c'est la machine qui fait les conneries à notre place, même ça? oui, même ça. Fernand Raynaud avait automatisé une moissonneuse-batteuse qui replantait illico ce qui avait été récolté. Pas au point, qu'il disait. Le futur du capitalisme, c'est pas au point.