Difficile de ne pas être touché par ces poings levés.
Mais raison de plus : quitte à citer Líster, tu pourrais au moins rappeler qu'il fut, avec son armée, l'un des fers de lance de la contre-révolution en Aragon et en Catalogne... et plus largement du rétablissement de l’État bourgeois...
Je peux admirer le sentiment de ta grand-mère, celui d'être "restée rouge". Mais quant à l'oubli... il s'agirait effectivement de ne rien oublier.
Morrow,
https://www.marxists.org/francais/morro ... row_14.htm Le 11 août, le gouvernement décréta la dissolution du Conseil de l'Aragon. On nomma à sa place un gouverneur général, nanti des pouvoirs que la législation en cours accorde aux gouverneurs civils ». Cette législation datait du temps de la réaction. Montecon, le gouverneur général, ne fut toutefois qu'une potiche. Le véritable travail fut exécuté par les forces militaires sous la direction du stalinien Enrique Lister.
Lister, un des héros fabriqués par les staliniens (C.N.T. publia sa photo sous le titre « Héros de plusieurs batailles. Nous le savons parce que le Parti communiste nous l'a dit » l'ironie étant le seul moyen de franchir la censure) conduisit ses troupes à l'arrière de l'Aragon. Les conseils municipaux élus directement par la population furent dissous par la force. Les collectivités furent anéanties et leurs dirigeants emprisonnés. Comme dans le cas des prisonniers du P.O.U.M. en Catalogne, le gouverneur général lui-même ignorait où se trouvaient les membres du Comité régional de la C.N.T. arrêtés par les bandes de Lister. Ils possédaient bien entendu des sauf-conduits du gouverneur général, mais cela ne servit pas à les sauver. Joaquin Ascaso, président du Conseil de l'Aragon, fut emprisonné sous l'inculpation de... vol de bijoux ! La censure gouvernementale interdit à la presse de la C.N.T. de publier la nouvelle de l'emprisonnement d'Ascaso et de divulguer son lieu d'incarcération, et, de son point de vue intégralement réactionnaire elle avait raison, car Ascaso représentait, comme avant lui le défunt Durruti, la chair et le sang des masses. Elles auraient alors démoli sa prison de leurs mains nues.
Qu'il suffise de dire que la presse officielle de la C.N.T. peu soucieuse de réveiller les masses – compara l'assaut contre l'Aragon à l'assujettissement des Asturies par Lopez Ochoa en octobre 1934.
La presse stalinienne publia des fables fantastiques pour justifier le viol de l'Aragon. Frente Rojo écrivit :
« Sous le régime du Conseil de l'Aragon défunt, les citoyens et la propriété ne jouissaient d'aucune garantie [... ] Le gouvernement trouvera en Aragon des arsenaux gigantesques, des milliers de bombes, des centaines de mitrailleuses du dernier modèle, des canons et des tanks stockés là, non pour combattre le fascisme sur les champs de bataille, mais appartenant à ceux qui voulaient faire de la province un bastion à partir duquel ils combattraient le gouvernement de la République [...] Pas un paysan qui n'ait été contraint d'entrer dans les collectivités. Celui qui résistait subissait, sur son corps et sa petite propriété, les sanctions de la terreur. Des milliers de paysans ont quitté la région, préférant quitter la terre que de supporter les innombrables méthodes de torture du Conseil [...] la terre fut confisquée, ainsi que les anneaux, les médaillons et même les pots de terre. Les animaux, le grain, et même la nourriture cuite et le vin de la consommation familiale furent confisqués [... ] On installa dans les conseils municipaux des fascistes connus et des chefs phalangistes.
Munis des cartes du syndicat, ils faisaient office de maires et de conseillers, d'agents de l'ordre public en Aragon, eux qui, bandits de profession à l'origine, établirent un régime gouvernemental de banditisme. »
S'attendait-on sérieusement à ce que quelqu'un croie à ces absurdités ? L'alibi selon lequel une insurrection se préparait, manifestait à l'évidence la mentalité policière des staliniens. C'était malheureusement faux. Les armes ? Le 6 mai, le front de l'Aragon était tombé sous le contrôle total du gouvernement, le général Pozas, membre du parti stalinien, détenant le commandement suprême. Avant cela, et depuis octobre 1936, la presse de la C.N.T., du P.O.U.M. et de la F.A.I., avait longuement déploré précisément la pénurie d'armes sur le front de l'Aragon. Elle avait dénoncé aussi le fait que la garde armée des collectivités en soit dangereusement dépourvue, alors qu'elle faisait véritablement partie de la défense de première ligne, compte tenu de l'irrégularité et de la mouvance du front. La presse, les tribunes, les radios reprirent pendant huit mois ces accusations, et l'on accusait de surcroît les staliniens de limiter la distribution des armes de l'aide russe. Ils avaient accueilli ces accusations précises par un silence de mort. Et maintenant, dans l'atmosphère de pogrom d'août 1937, ils déclaraient qu'il y avait trop d'armes ! Nul ne croyait, nul ne pouvait croire ces absurdités, pas même les membres du parti.
Mais ces accusations se passent de réfutation car, le 18 septembre, en effet, l'homme dénoncé comme le principal coupable, celui qui aurait fait régner la terreur, installé les fascistes, etc., Joaquin Ascaso, fut libéré. S'ils avaient été capables de prouver leurs accusations contre lui dans leurs cours corrompues, pourquoi les staliniens ne le firent-ils pas? la réponse, c'est qu'il ne s'agissait que de balivernes. Ce qui, cependant, était terriblement réel, c'était la destruction des collectivités d'Aragon.
Broué,
https://www.marxists.org/francais/broue ... 0/pbet.pdf (p. 150)
Immédiatement, la 11° division du commandant communiste Lister, envoyée par Prieto aux environs de Caspe, passe à l'action contre les Comités et les collectivités dont la presse du Front populaire unanime réclame la dissolution. Le journal du Conseil Nuevo Aragon est supprimé et remplacé par le communiste El Dia. Les Comités locaux sont remplacés par des Conseils municipaux installés par les troupes de Lister. Les locaux de la C.N.T. et des organisations libertaires sont occupés militairement, puis fermés. De nombreux responsables sont arrêtés, et parmi eux Joaquin Ascaso, le 12 août, inculpé de «contrebande»et de «vols de bijoux». Le 18 septembre, bénéficiant d'un non-lieu, il est remis en liberté. A cette date, l'objectif est atteint, le dernier pouvoir révolutionnaire a été définitivement liquidé.
La esperanza traicionada, en deux parties :
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https://www.youtube.com/watch?v=-6M2cabQIfM-
https://www.youtube.com/watch?v=tyUf_-u5Lq0(En espagnol, je ne sais pas si la version française est disponible en ligne...)