Le centenaire du Congrès de Tours (1920 - 2020)

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Le centenaire du Congrès de Tours (1920 - 2020)

Message par Gayraud de Mazars » 19 Déc 2020, 10:59

Salut camarades,

Certains très sérieusement, des journalistes, hommes politiques, historiens, avaient annoncé sa mort ! A 100 ans, il est toujours vivant... Le PCF !

Quant à la conclusion de l'article sur la comparaison entre le PCF et la France Insoumise, c'est totalement faussé, car un clic sur internet pour Mélenchon et sa candidature, ne remplace pas la cotisation, ni le militantisme dans un Parti...

"On s'appelle camarade" : le Parti communiste français fête ses 100 ans et des jeunes continuent d'y adhérer

Le Parti communiste français a été fondé en décembre 1920. Un siècle plus tard le PCF a certes perdu son aura passée, mais attire encore des jeunes adhérents.

Article rédigé par Benjamin Mathieu, Radio France, Publié le 17/12/2020

https://www.francetvinfo.fr/politique/p ... 23467.html

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Des Jeunes communistes dans une manifestation à Lille (Nord), en juin 2020. (JC NORD)

Sur la place du Colonel Fabien à Paris, le siège du Parti communiste s'impose. Cette œuvre magistrale du l’architecte Oscar Niemeyer est aussi impressionnante dehors que dedans. Un bâtiment immense, à la déco des années 80. On s’attendrait à tout instant à croiser Georges Marchais dans les canapés en cuir du hall. Ce 17 décembre 2020, le Parti communiste français fête ses 100 ans. Un parti centenaire, dont le poids politique s'est effrité au fil des années.

“On n’adhère pas au PC pour faire carrière en politique”

Jessica Elonguert a 20 ans, cette jeune étudiante de Creil, dans l'Oise, vient pour la première fois. En juin dernier, elle est devenue conseillère municipale, un peu par hasard : “Un ami m'a poussée. Puis je partageais des idées. Cela m'a emmené à vouloir m'engager.” Elle vient d’adhérer au PCF cette année. Jessica a pris sa carte juste après le premier confinement. “C'est avant tout l'esprit fraternel qui m'a attirée. Simplement, on s'appelle 'camarade'. C'est un sentiment qui nous lie. Et puis l'esprit de solidarité, d'égalité et de justice sociale me plaisent.”

Pour Quentin Pénichon, ce sont les manifestations qui l’ont rapproché du Parti communiste. A 22 ans, il est étudiant en droit à Saint-Quentin en Yvelines : “J'ai rejoint les jeunes communistes en 2016 pendant les manifestations sur la loi travail. Et je vais rejoindre le PC dans les prochains jours.” Il adhère donc pour le centenaire du Parti communiste, par conviction : “Quand on adhère au Parti communiste français, ce ne n'est pas pour faire carrière dans la politique, pour être franc. S'il faut prendre des responsabilités, je le ferai, mais je ne suis pas là pour ça non plus. J'ai des idées, des principes, et je veux combattre pour la justice sociale.”

Concurrence de La France insoumise

À ses côtés il y a Léon Desfontaines, 24 ans, secrétaire général du Mouvement Jeunes Communistes de France. Il est militant depuis cinq ans et son discours est déjà bien rôdé : “On a beaucoup plus de richesses qui sont produites par rapport aux années 50 et pourtant elle n'ont jamais été aussi peu réparties. Tant que ce système perdurera, le parti communiste aura bien entendu de l'avenir et aura de nouvelles heures de gloire.”

Le Parti communiste est concurrencé par La France insoumise : alors que le PC revendique 70 000 adhérents, Jean-Luc Mélenchon n’a pas eu de mal à réunir 190 000 soutiens pour sa candidature à la présidentielle.


Fraternellement,
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Re: Le centenaire du PCF (1920 - 2020)

Message par Byrrh » 19 Déc 2020, 21:37

Plutôt les 100 ans du Congrès de Tours, non ?

Quel est l'âge du P"C"F ?

Le parti qui a cessé de se référer à la dictature du prolétariat ? 44 ans.

Si l'on parle du parti revendiquant son nationalisme jusque dans son nom, eh bien il a 77 ans, comme la dissolution de l'Internationale communiste par Staline.

Si au-delà du nom, le nationalisme est le critère, on peut même dire que ce parti a 85 ans.

Et si l'on prend pour repère l'exclusion de Rosmer et Monatte de sa direction, alors ce parti a tout juste 96 ans.
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Re: Le centenaire du congrès de Tours (1920 - 2020)

Message par Gayraud de Mazars » 20 Déc 2020, 08:04

Salut camarades,

Bon colloque initié par le groupe Militant, sur le centenaire du PCF, c'est un peu long mais à voir et à écouter ! La première partie sur l'histoire du Congrès de Tours est bien intéressante, la seconde partie par les politiques, plus sujette à caution, en soutien plus affirmé de Mélenchon...

Le centenaire de la naissance du Parti communiste

Colloque en visioconférence du samedi 19 décembre à 14h00 à 18h30

https://www.youtube.com/watch?v=3sKda2PNWBs

Avec François Ferrette (8:08), Jean-Louis Robert (42:48), Jacques Girault (1:02), Jean-Numa Ducange (1:17), Fadi Kassem (2:03), Jérôme Métellus (2:16), Guillaume Roubaud-Quashie (2:29), Francis Parny (2:40)

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Re: Le centenaire du Congrès de Tours (1920 - 2020)

Message par Gayraud de Mazars » 22 Déc 2020, 09:21

Salut camarades,

Du site Arguments pour la lutte sociale un article à lire...

Discussion, Mouvement ouvrier, Recension
La scission de Tours. Recensions
Par Vincent Présumey, le 20 décembre 2020

https://aplutsoc.org/2020/12/21/la-scis ... ecensions/

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Re: Le centenaire du Congrès de Tours (1920 - 2020)

Message par Gayraud de Mazars » 29 Déc 2020, 17:35

Salut camarades,

A lire ce livre sorti en décembre 2020...

Le Congrès de Tours (25 décembre–30 décembre 1920)
Jean Vigreux
Éditions de l’Université de Dijon, Collection « Essais », 2020, 240 pages, 10 €

Jean-François Bérel | 29 Déc 2020 | Histoire politique de la France (XIXe-XXe siècles), La IIIe République (1870-1940) | 0 |
Le Congrès de Tours (25 décembre–30 décembre 1920)

https://clio-cr.clionautes.org/le-congr ... -1920.html

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Jean Vigreux ou le spécialiste de l’histoire du communisme rural

Jean Vigreux, né en 1964, fut professeur certifié d’histoire de 1987 à 1990 tout en effectuant son service civil de 1988 à 1990, professeur agrégé de 1990 à 2001 puis maître de conférences de 2001 à 2008 et, enfin, est professeur des universités, depuis 2008. Après avoir été nommé maître de conférences en histoire contemporaine à l’université de Bourgogne (Dijon) de 2001 à 2008 ainsi qu’à l’antenne de Sciences Po Paris de Dijon (2001-2008 et 2012-2016), il est nommé professeur d’histoire contemporaine à l’université de Franche-Comté (Besançon) de 2008 à 2012 ; il revient à l’université de Bourgogne (Dijon) en tant que professeur d’histoire contemporaine, depuis 2012.

Sa thèse sur Waldeck Rochet (Waldeck Rochet, du militant paysan au dirigeant ouvrier, sous la direction de Serge Berstein, à l’IEP Paris, soutenue en 1997 et l’obtention de son HDR en histoire contemporaine en 2007, La politisation des ruraux au XXe siècle avec une étude inédite sur le communisme rural intitulée « La Faucille après le marteau » avec comme tuteur et garant Serge Wolikow) l’a conduit à travailler sur l’histoire du communisme rural et sur la politisation des campagnes.

Il mène également des recherches sur l’histoire des gauches européennes et l’histoire de la Résistance. Succédant à Serge Wolikow, il est actuellement directeur de la Maison des Sciences de l’Homme (MSH) de Dijon, depuis avril 2017. Par ailleurs, Jean Vigreux est le fils de l’historien Marcel Vigreux (1933-2001), professeur honoraire de l’université de Bourgogne (Dijon), qui commença son métier d’enseignant comme instituteur (1960) pour terminer sa carrière universitaire comme professeur d’histoire rurale, à Dijon.

Outre sa responsabilité actuelle en tant que directeur de la MSH de Dijon (depuis 2017), Jean Vigreux est également responsable du Master professionnel Archives des XXe et XXIe siècles européens : du papier au numérique de l’Université de Bourgogne (depuis 2013) ainsi que de l’axe 2 « Dynamiques et formes collectives » (avec Benoit Caritey, sociologie) au sein du Pôle 2 (« Mondes et pratiques populaires ») du Centre Georges Chevrier (UMR 7366).

Par ailleurs, il est responsable scientifique du Musée de la Résistance en Morvan (à Saint-Brisson, dans la Nièvre, 58), membre du conseil scientifique de la Fondation pour la mémoire de la Déportation (depuis 2020) et, enfin, président du Conseil scientifique du Parc naturel régional du Morvan (depuis 2014). De plus, il exerce des responsabilités éditoriales dont celles des publications du Musée de la Résistance en Morvan et la co-direction d’une collection « Histoire », aux Presses Universitaires de France (PUF), avec Johann Chapoutot et Arnaud Houte (depuis 2013).

À l’instar de son père, Jean Vigreux a été conseiller municipal, en l’occurrence dans la commune de Chenôve (21), de 2001 à 2020. De plus, outre sa dernière parution en 2020, parmi sa nombreuse bibliographie, nous pouvons retenir les ouvrages suivants :

Waldeck Rochet, une biographie politique, Paris, La Dispute, 2000, 377 p.
La Vigne du maréchal Pétain, Dijon, EUD, 2005.
Des Luttes et des hommes, Paris, Cultures et découvertes IHS, 2005.
Le Front populaire, Paris, PUF, 2011, coll. Que sais-je ?
La Faucille après le marteau. Le Communisme aux champs dans l’entre-deux-guerres, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, 2012.
Le Clos du maréchal Pétain, Paris, PUF, 2012.
Croissance et contestations 1958-1981, Paris, Seuil, 2014 (tome 9 : Histoire de France).
Histoire du Front populaire. L’échappée belle, Paris, Tallandier, 2016
François Mitterrand, la Nièvre et le Morvan, Dijon, EUD, 2017.
Mai 68 en Bourgogne, Dijon, EUD, 2018.
Histoire de la France contemporaine. Tome 9, Croissance et contestations (1958-1981), Paris, Seuil, 2018 (réédition en poche Point Seuil).
Histoire du Front populaire. L’échappée belle, Paris, Texto, 2018 (réédition en poche).
Le Parti rouge. Une histoire du PCF 1920-2020, avec Roger Martelli et Serge Wolikow, Armand Colin, 2020.


Le Congrès de Tours (25 décembre–30 décembre 1920) de Jean Vigreux : Centenaire du PCF oblige !

La commémoration du centenaire du Congrès de Tours a été l’occasion pour l’historien de publier son dernier ouvrage, en décembre 2020 : Jean Vigreux, Le Congrès de Tours : 25 décembre-30 décembre 1920, Dijon, Éditions Universitaires de Dijon (EUD), collection Essais, 2020, 240 p.

Répondant à un cahier des charges très précis (pas d’index, ni de chronologie, par exemple !), cet ouvrage de 270 pages comprend des remerciements (p. 5-6), une préface du professeur émérite d’histoire contemporaine (Université Rennes 2) et actuel président de la Société française d’histoire politique (SFHPo) Gilles Richard (p. 7-11), une introduction (p. 13- 24), quatre chapitres divisés en sous-chapitres (p. 25-130), une conclusion (p. 131-136), une riche bibliographie très actualisée (p. 137-144), des annexes au nombre d’une dizaine constituant un des points forts de l’ouvrage (p. 145-266) et, enfin, une table des matières (p. 267-268).

Après avoir présenté, dans l’introduction, le contexte historique du Congrès de Tours de décembre 1920, Jean Vigreux écrit « Dès lors, plusieurs interprétations ou mémoires contradictoires du congrès ont coexisté et ont pu perdurer jusqu’à nos jours, créant parfois des représentations qu’il faudra analyser au cours de cet ouvrage, sans oublier la riche historiographie sur le sujet avec la thèse pionnière d’Annie Kriegel soutenue et publiée en 1964 et l’ouvrage collectif aux Éditions sociales en 1980. Ces travaux revisités récemment par Romain Ducoulombier ont irrigué le champ de l’histoire du congrès de Tours […] » (p. 22-23).

Par la préface de Gilles Richard, nous apprenons qu’avec la publication de la thèse d’État d’Annie Kriegel (Aux origines du communisme français, 1914-1920, 2 tomes, Paris-La Haye, Mouton, 1964), l’hypothèse de « la greffe bolchevique » sur le socialisme français domina les débats de 1964 jusqu’à nos jours. Cependant, depuis les années 2000, les travaux les plus récents (dont ceux de Romain Ducoulombier, à partir de 2010, avec son Camarade ! La naissance du Parti communiste en France, Paris, Perrin, 2010), réhausse l’importance du contexte hexagonal dans l’apparition de la SFIC.

En effet, les expériences historiques du mouvement ouvrier français, le traumatisme que furent la Grande Guerre de 1914-1918 et l’expérience politique de l’Union sacrée ainsi que les graves échecs sur le plan politique (législatives de 1919) et sur le plan social (répression des grèves de 1919-1920), subis juste avant le congrès SFIO de décembre 1920, jouèrent un rôle déterminant dans la décision finale des militants en faveur de la IIIe Internationale communiste (IC).

Chapitre I : Un congrès de la SFIO après le traumatisme de la Première Guerre mondiale

Dans le premier chapitre, intitulé « Un congrès de la SFIO après le traumatisme de la Première Guerre mondiale » (p. 25-50), articulé en 3 points, Jean Vigreux aborde les questions de « Comment régénérer le socialisme ? » (p. 31-41), d’« Une hybridation : entre nouveauté et héritage » (p. 42-44) et, enfin, « Des motions au vote des militants dans les fédérations » (p. 45-49).

D’abord, l’auteur plante le décor du contexte historique avant le congrès de Tours. La SFIO quitte l’Union sacrée, fin 1917. En novembre 1918, La France sort vainqueur de la Grande Guerre mais totalement exsangue (rationnements, privations et cherté de la vie). Interpellé par la révolution bolchevique en Russie, la SFIO subit une scission en 1919, à la marge du parti (une minorité d’élus ou cadres SFIO), sur sa droite fondant le PSF : des socialistes patriotes refusant la révolution russe de 1917.

Néanmoins, avec les grèves de 1919-1920, le mouvement ouvrier français renaît avec force avec la CGT (syndicat revendiquant 700 000 adhérents) et la SFIO (180 000 militants en 1920), dirigée par Ludovic-Oscar Frossard (depuis le congrès de Paris, d’octobre 1918). Mais, l’échec électoral de la SFIO, aux législatives de novembre 1919, remets en cause l’espérance des socialistes français dans le parlementarisme au profit d’un parti SFIO régénéré hésitant entre la tradition du syndicalisme révolutionnaire ou la prise du pouvoir par la révolution des Soviets… !

La dénomination du PS-SFIC (appellation des communistes français de décembre 1920 à mai 1921, soit du congrès-fondateur de Tours au congrès de Marseille) est bien le résultat d’« une hybridation : entre nouveauté et héritage », en un socialisme régénéré à la française.

Pour le 18e congrès de la SFIO, les militants ont le choix entre trois motions : la « motion Cachin-Frossard et du Comité de la IIIe Internationale» (C3I), favorable à l’adhésion à l’IC sans réserves ; la motion du « Comité de la Reconstruction », tenant de l’adhésion à la IIIe Internationale avec réserves, menée par Paul Faure et Jean Longuet (le petit-fils de Karl Marx) ; et, enfin, celle du rejet de l’adhésion à l’IC constituée du « Comité de Résistance Socialiste » avec Léon Blum et du groupe refusant de condamner le ralliement à l’Union Sacrée, autour de Paul Renaudel et Albert Thomas.

Les résultats des votes dans les fédérations départementales de la SFIO sont connus avant l’ouverture du 18e congrès, à Tours, le 25 décembre 1920, et ils sont sans appel : 74 des 96 fédérations ont voté leur adhésion sans réserve à l’IC ! Autrement dit, les enjeux du Congrès de Tours sont ailleurs : est-ce que les « Reconstructeurs » accepteraient un compromis avec les « Majoritaires » ou vont-ils se scinder en leur sein ? Quant au groupe du rejet de l’adhésion à l’IC, les « Résistants », vont-ils quitter la SFIO ?

Chapitre II : Le congrès de Tours du côté des délégués et participants

Dans un deuxième chapitre, titré « Le congrès de Tours du côté des délégués et participants » (p. 51-82), divisé en 6 parties, Jean Vigreux traite successivement les sujets suivants : « Délégués et débats » (p. 54-61), « Les ferments de la scission ou de l’adhésion ? » (p. 61-64), « Défendre la « vieille maison » (p. 64-66), « Le coup de théâtre : la venue de Clara Zetkin » (p. 66-75), « Le quotidien des participants au congrès » (p. 75-80) et, enfin, « Les journalistes au congrès de Tours » (p. 80-82).

Le 18e congrès de la SFIO se déroule à Tours, pour des raisons de logistique (ville proche de Paris et bien desservie par le réseau ferré). Pendant cinq jours (25-30 décembre 1920), les 285 délégués du congrès sont porteurs de 4 575 mandats représentant les 178 732 adhérents de la SFIO, répartis en 89 fédérations sur les 96 fédérations métropolitaines et coloniales que compte le parti socialiste (7 sont manquantes à Tours). Sociologiquement, les délégués appartiennent en majorité aux professions libérales, à la fonction publique et à l’enseignement.

Pendant trois jours, les tractations vont bon train entre les « Majoritaires » (Cachin-Frossard) et les « Reconstructeurs » (Longuet) pour un projet de motion commune. Par conséquent, rien n’est joué avant la séance du matin du 28 décembre 1920, jour de la lecture du fameux « Télégramme Zinoviev », confirmant la position du Komintern depuis son 2e congrès de l’IC de juillet-août 1920 et la (longue) lettre de Clara Zetkin aux délégués du congrès !

Après quatre jours de débats (25-28 décembre 1920), les « Reconstructeurs » se divisent en deux : une partie rejoignent les « Majoritaires » favorables à l’IC et l’autre les « Reconstructeurs » voulant rester à la SFIO, autour de Jean Longuet. Sinon, la veille, lors de la séance de l’après-midi du lundi 27 décembre 1920, Léon Blum prend très longuement la parole en prononçant son expression restée fameuse de « garder la vieille maison » affiliée à la IIe Internationale, héritage de l’unification des gauches socialistes par Jean Jaurès, en 1905.

Le mardi 28 décembre 1920 est un moment de bascule ! En effet, après la séance du matin (lecture du télégramme Zinoviev et de la lettre de Clara Zetkin), la séance de l’après-midi est l’occasion d’un autre coup de théâtre avec la présence de Clara Zetkin au congrès de Tours. Cette dernière arrive à la salle du Manège, en fin d’après-midi, et fait un discours d’une vingtaine de minutes. Auparavant, Clara Zetkin réussit à organiser deux réunions : la première, le 27 décembre au soir et la seconde, le 28 décembre, au matin, où elle est chargée par Moscou de favoriser la rupture avec les tenants de la conciliation comme Jean Longuet.

Par ailleurs, les participants au congrès de Tours sont logés dans les différents hôtels de Tours, grâce à la cheville ouvrière de la fédération SFIO d’Indre-et-Loire : Victor Grossein (négociant en lingerie fine !). Ainsi, 340 personnes sont réparties sur plus de 25 hôtels (soit 198 près de la place de la gare de Tours et 142 près de la salle du Manège). Ces délégués se répartissent par courant politique ou par fédération. En revanche, les repas sont l’occasion d’échanges entre fractions adverses s’affrontant dans la salle du Manège !

Les journalistes (presse écrite, photographes et cinéma) sont également présents au congrès de Tours. En premier lieu, ceux accrédités par la SFIO (L’Humanité, Le Populaire) et le monde socialiste national voire international (La Pravda), sans oublier la presse parisienne à diffusion nationale (Le Gaulois, Le Petit Parisien, etc…). La couverture du congrès de Tours par la presse écrite est importante ainsi que par les photographes de l’agence Meurisse qui illustrent la plupart des articles de la presse présente à Tours. De plus, la fondation Albert Kahn envoie un reporter-photographe qui rapporte un film de 4 minutes 30, sur l’arrivée ou la sortie des délégués de la salle du Manège.

Chapitre III : Le congrès de Tours dans l’histoire mondiale du mouvement ouvrier

Dans un troisième chapitre, ayant pour titre « Le congrès de Tours dans l’histoire mondiale du mouvement ouvrier » (p. 83-108), Jean Vigreux aborde les trois questions suivantes : « La fin du congrès : l’adhésion ou la scission » (p. 84-90), « Le poids des fédérations rurales ou des jeunes militants ? » (p. 90-94) et, enfin, « Décaler le regard, de Halle à Livourne en passant par Londres ou Saïgon : Tours dans l’histoire mondiale du mouvement ouvrier » (p. 94-107).

Le mercredi 29 décembre 1920, lors de la séance de nuit, deux votes cruciaux ont lieu : le premier concerne les motions en lice (les motions Cachin-Frossard + Heine-Leroy contre la motion Longuet sachant que la motion Blum est retirée au moment du vote) : le résultat est sans appel (70 % des mandats sont en faveur de l’IC contre 22 % en faveur du maintien de la SFIO et 8 % d’abstention). Le second vote porte sur le contenu du « télégramme Zinoviev » (motion Paul Mistral des « Reconstructeurs » contre la motion Daniel Renoult des « Majoritaires ») : là aussi, le résultat est net (3 247 mandats pour la motion Renoult contre 1 328 pour la motion Mistral, sans oublier 143 abstentions.

Dès lors, la séance de nuit est levée, à 2h45 du matin, le jeudi 30 décembre. La scission est consommée et la majorité des socialistes français renouent avec la tradition révolutionnaire du socialisme hexagonal, avec l’internationalisme prolétarien et le rejet du parlementarisme ainsi que de l’unité de la SFIO, si chère à Jean Jaurès. Le 30 décembre 1920, à 10h, les « Résistants » se réunissent dans le temple maçonnique de la loge du GODF de Tours et le reste des « Reconstructeurs » se retrouvent à l’Hôtel de ville de Tours. Les « Résistants » et les « Reconstructeurs » se rassemblent dans la salle du conseil de révision de l’Hôtel de ville de Tours, à 14h, pour continuer et clore le 18e congrès de la SFIO. Le journal Le Populaire restent aux mains de la SFIO tandis que L’Humanité de Jaurès tombent dans l’escarcelle de la SFIC.

Avec le point consacré au poids des fédérations rurales ou des jeunes militants, l’auteur apporte une contribution originale sur le plan historiographique et historique. En effet, Annie Kriegel insistait sur le fait que le vote communiste était paysan et jeune. Pour Jean Vigreux, cela reste à vérifier et il s’appuie sur les travaux d’Edouard Lynch (sur les liens entre la société paysanne française et le socialisme pendant l’entre-deux-guerres) et d’Yves Santamaria (sur le profil des anciens combattants délégués au congrès de Tours).

Au total, les délégués « majoritaires » sont en moyennes plus jeunes que les autres et davantage des ouvriers par rapport aux autres délégués des courants adverses (« Reconstructeurs » et « Résistants »). En fait, ce qui pèse le plus dans le vote des fédérations SFIO, ce sont les conséquences de la Première Guerre mondiale sur la société française, le réveil du mouvement social en 1919-1920 et surtout la répression brutale des gouvernements de Bloc national qui a peur de la propagation révolutionnaire en France.

Enfin, le Congrès de Tours de 1920 a lieu cinq mois après le 2e congrès de l’IC (juillet-août 1920). Ce dernier impose comme ultimatum aux différents partis socialistes du monde de choisir entre la IIIe Internationale (la victoire de la révolution bolchevique en Russie) et la IIe Internationale (le camp de la « trahison » ainsi que du parlementarisme et de la bourgeoisie), entre 1920 et 1921.

L’auteur de l’ouvrage brosse à grands traits la situation du socialisme européen : avec des communistes majoritaires en Allemagne (congrès de Halle d’octobre 1920) mais aussi des PC minoritaires comme en Italie (congrès de Livourne de janvier 1921), Grande-Bretagne, Autriche et dans les colonies de l’Empire français avec l’intervention du délégué d’Indochine (en l’occurrence, le futur Hô Chi Minh), durant l’après-midi du dimanche 26 décembre. Comme l’écrit Jean Vigreux « La majorité de Tours reste alors une exception dans le monde socialiste, donnant à la naissance du PCF et à la scission une originalité qui marque tout le siècle des gauches françaises. » (p. 107).

Chapitre IV : Les mémoires du congrès

Dans un quatrième et dernier chapitre, appelé « Les mémoire du congrès de Tours » (p. 109-130), articulé en trois sous-chapitres, Jean Vigreux dresse un tableau des mémoires du congrès de Tours et de leurs évolutions, entretenues parallèlement par les socialistes et les communistes français qui sont restés irréconciliables sur le fond depuis un siècle : « Construction et héritages mémoriels des « frères ennemis » (p. 110-119), « D’autres passeurs de mémoires » (p. 120-127) et, enfin, « Des anniversaires récents » (p. 127-130).

La construction et les héritages mémoriels des « frères ennemis » (SFIO puis PS contre PCF) est au moins aussi intéressante que le Congrès de Tours lui-même qui « […] est à lire à plusieurs échelles qui permettent peut-être de dépasser le débat « continuité / rupture » (p. 112) ainsi que « Les racines et les enjeux de la régénération offrent aussi des grilles de lecture des mémoires opposés » (p. 112).

Dans la mémoire communiste, le PCF se dote en 1950 d’un ouvrage de référence, écrit par Jean Fréville, La Nuit finit à Tours, ouvrage manichéen maintes fois réédité (1960, 1970), figeant pour la postérité communiste le décor, la doctrine ainsi que les acteurs incontournables du Congrès de Tours. Tout comme la communiste, la mémoire socialiste est aussi plurielle avec l’oubli, pour cause de dérive pétainiste, du secrétaire général de la SFIO de 1920 à 1944 Paul Faure au profit de Léon Blum avec la patrimonialisation de son discours sur la garde de la « vieille maison ».

Mais, d’autres passeurs de mémoires existent car le Congrès de Tours a fait l’objet de plusieurs mises en récit, grâce à la scénographie et la télévision. De 1983 à 2001, le château de Tours accueilli l’Historial de Touraine qui consacre sa scène 30 au Congrès de Tours avec des personnages en cire (Blum, Cachin, Frossard, Longuet et Sembat). La seconde mise en scène est une fiction diffusée aux « Dossiers de l’écran », sur Antenne 2, le 29 avril 1980, intitulée « le grand fossé, le schisme socialo-communiste », réalisé par le cinéaste Yves Ciampi et écrite par l’historien communiste critique Jean Elleinstein, à partir du sténo du Congrès de Tours.

Enfin, Jean Vigreux termine son ouvrage par « des anniversaires récents » tels que la semaine de réflexion sur le Congrès de Tours, organisée par le PCF, lors du 80e anniversaire de sa naissance, après le 30e congrès des communistes français, à Martigues (en mars 2000), signifiant sa tentative de mutation, voulue par Robert Hue. En 2010, pour le 90e anniversaire du Congrès de Tours, une pièce de théâtre a été créée à Lyon suivie d’un débat entre historiens et représentants locaux du PS et du PCF.

Et, pour l’année 2020, année du centenaire du Congrès de Tours, plusieurs initiatives ont lieu tant d’un point de vue scientifique et universitaire que mémoriel grâce à des expositions (PCF, Fondation Gabriel Péri, MHV de Montreuil) ou des colloques (enquête sur « le Congrès de Tours vu d’en bas » de la SFHPo, colloque du centenaire à Tours, etc…).
L’ouvrage de synthèse le plus récent sur le Congrès de Tours appelé à faire date ?

En guise de conclusion (p. 131-136), Jean Vigreux fait le point sur l’après-Congrès de Tours, durant l’entre-deux-guerres. En effet, la SFIO est à reconstruire car exsangue (50 000 adhérents et 68 fédérations sans oublier la perte du siège du parti, des archives, du journal L’Humanité, les avoirs…) mais elle conserve la majorité des parlementaires (55 députés sur les 68 issus des législatives de 1919), de nombreux élus locaux (maires ainsi que conseillers généraux et d’arrondissements) et de très solides réseaux dans les milieux laïcs et franc-maçons. La SFIC, quant à elle, dispose de 130 000 adhérents.

Au 1er janvier 1922, le PS-SFIC devient le PC-SFIC. Après la période du Front unique des années 1921-1922, la SFIC est soumise à la bolchevisation du parti par l’IC, dès l’été 1924. Ensuite, est décrétée par l’IC la désastreuse politique « classe contre classe » de 1929 à 1934 puis le PCF prend un nouveau tournant avec le Front populaire jusqu’à la signature du pacte germano-soviétique de 1939, le tout sous la férule de l’IC !

Les sources et la bibliographie (p. 137-144) font référence aux travaux les plus récents (plusieurs ouvrages et articles sont datés de 2020 !) des meilleurs spécialistes de la question et à une sitographie renvoyant aux sources indispensables. De plus, les annexes (p. 145-266), au nombre de onze, font presque autant de pages que le texte (près de 120 pages d’annexes !). Certaines de ces annexes reprennent le sténogramme du Congrès de Tours (annexe n° 4, n° 6 et n° 10) mais d’autres (comme les annexes n° 1, n° 2 et n° 3) sont les sténogrammes de l’IC et les annexes n° 7 et n° 8, la retranscription d’articles de journaux. Enfin, les annexes n° 5, n° 5 bis et n° 9 sont des tableaux issus des travaux de Jean Vigreux pour les deux premiers et de Jean Elleinstein pour l’autre.

Au total, le dernier ouvrage de Jean Vigreux, Le Congrès de Tours : 25 décembre-30 décembre 1920, Dijon, Éditions Universitaires de Dijon (EUD), collection Essais, 2020, 240 p., sorti le 3 décembre dernier (en format poche et à un prix modique !), est la synthèse la plus récente sur cet évènement, assortie d’annexes parfois totalement inédites (tableaux n° 5 et 5 bis). Cet essai fait le point sur le demi-siècle de travaux historiques consacrés à la question et à l’évolution mémorielle du Congrès de Tours dans les rangs partisans et dans l’historiographie.

Ce livre s’adresse en tout point aux étudiants ainsi qu’aux enseignants sans oublier les passionnés d’histoires et les militants. Cet ouvrage sur le Congrès de Tours sera peut-être appelé à faire date, en espérant qu’il sera réédité après le séminaire sur l’enquête de la SFHPo sur « Le Congrès de Tours vu d’en bas » qui apportera probablement de nouveaux acquis sur le plan local. En attendant ce jour, une chronologie serait quand même la bienvenue, à la fois sur le Congrès de Tours, mais aussi en amont (1919-1920) et en aval (1920-1939), pour bien réalisé ce que fut le Congrès de Tours dans l’histoire du socialisme français et celui du socialisme mondial.

© Les Clionautes (Jean-François Bérel pour La Cliothèque)
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Re: Le centenaire du Congrès de Tours (1920 - 2020)

Message par com_71 » 30 Déc 2020, 16:26

Brève LO, 29/12/2020 a écrit : Cent ans après, l’avenir appartient toujours au communisme !
Il y a tout juste un siècle, à l’occasion du congrès de Tours convoqué par le Parti socialiste, Section Française de l’Internationale Ouvrière (SFIO), se constituait le Parti communiste en France. En réaction à la boucherie planétaire de la Première Guerre mondiale, déferlait sur le monde une vague révolutionnaire dont le premier épisode fut la Révolution Russe de 1917. Deux ans plus tard, la IIIe Internationale fut mise sur pieds. Le tout jeune parti communiste se proclama sa section française. Il ralliait à sa base des milliers de femmes et d’hommes enthousiastes, dévoués, prêts à engager le fer contre ce système capitaliste, porteur d’exploitation, de misère et qui venait de plonger l'Humanité dans la barbarie de la guerre.

La gangrène staliniste transforma ce formidable élan en une monstrueuse caricature, brisant toute perspective révolutionnaire. Il n’empêche, aujourd’hui encore, pour mettre fin à cette barbarie capitaliste qui se survit et conduit la société vers une nouvelle catastrophe, le seul drapeau qui vaille, reste celui levé il y a cent ans par le communisme naissant en France.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Re: Le centenaire du Congrès de Tours (1920 - 2020)

Message par Gayraud de Mazars » 01 Jan 2021, 08:39

Salut camarades,

100 ans du PCF – « Le Parti a toujours raison, c’est la réalité qui se trompe ! » :o

Qui sont ces militants, ces femmes et ces hommes qui restent au PCF aujourd’hui ? Je reste bien sûr en ce qui me concerne un camarade du Parti malgré ses tares et son affaiblissement.

Les camarades passent leur vie pour changer la société, il y a une force avec les travailleurs en lutte, en lien charnel avec la théorie marxiste, qui soulèvera la montagne capitaliste… Creuse donc, vieille taupe !

Le communisme reste un grand mouvement révolutionnaire, qui sont ses militants ?

Cela a été, et reste un grand mouvement, qui a soulevé des millions de gens sur la planète, pas des plus mauvais, pas des moins courageux, pas des moins dévoués, pas des moins intelligents…

Restons, alors, la Hardie bande de camarades pour le Communisme !

Combat Ouvrier N°1253 – Il y a 100 ans : La fondation du Parti communiste français
Le 25 décembre 2020 par La rédaction

https://combat-ouvrier.com/2020/12/25/n ... -francais/

Le 30 décembre 1920, le Parti communiste français (PCF) fut créé lors du congrès de Tours par une fraction d’anciens militants de la SFIO (Section française de l’Internationale ouvrière), l’ancêtre du Parti socialiste français.

À la veille de la Première Guerre mondiale, le principal parti ouvrier était la SFIO créée en 1905. La SFIO était membre de la Deuxième Internationale (ou Internationale ouvrière), un regroupement de partis révolutionnaires de toute l’Europe.
Ces partis socialistes avaient fait pénétrer parmi une fraction importante des travailleurs la conscience d’appartenir à une classe sociale dont les intérêts sont fondamentalement opposés à ceux du patronat qui forme la bourgeoisie capitaliste. Ils diffusaient les idées de la révolution sociale pour renverser la bourgeoisie et construire une société débarrassée de l’exploitation de l’Homme par l’Homme. Mais depuis longtemps, une tendance non révolutionnaire s’était emparée de la direction des partis socialistes et de la Deuxième Internationale. On appela cette tendance le « réformisme » ou « l’opportunisme » parce que ses partisans pensaient pouvoir arriver au socialisme par des réformes et des victoires électorales.
En août 1914, les députés de la SFIO votèrent pour la guerre contre l’Allemagne. Ce fut une démonstration publique de leur trahison envers la classe ouvrière et de leur allégeance à la bourgeoisie.
La plupart des autres partis de la Deuxième internationale prirent les mêmes positions nationalistes et soutinrent leur bourgeoisie alors qu’ils s’étaient engagés en 1912 à refuser une guerre impérialiste dans laquelle les bourgeoisies entraînent les ouvriers d’un pays ou l’autre à s’entretuer. Seule une poignée de militants, dont ceux du parti ouvrier bolchévique de Russie, maintinrent le drapeau de l’internationalisme ouvrier.

La révolution russe et la création de l’Internationale communiste

En 1917, la révolution ouvrière et paysanne éclata en Russie et le parti bolchévique mena les masses révolutionnaires vers la victoire contre la bourgeoisie russe. L’État ouvrier né de cette révolution se retira de la guerre en 1918 et se donna pour but d’étendre la révolution ouvrière partout en Europe et dans le monde.
Les révolutionnaires russes créèrent une nouvelle Internationale, la Troisième Internationale (ou Internationale communiste « IC ») et ils appelèrent les révolutionnaires à créer partout des partis communistes pour soustraire la classe ouvrière à l’influence des traîtres socialistes.
La naissance du PCF, section française de l’Internationale communiste
C’est à cet appel qu’ont répondu les fondateurs du Parti communiste français. La plupart étaient militants à la SFIO. Ils faisaient partie de ceux qui défendaient l’adhésion de la SFIO à la Troisième Internationale. Au congrès de Tours de la SFIO qui se tint du 25 au 31 décembre 1920, l’adhésion à l’IC fut adoptée à la majorité des présents (67,8 %). Ce vote créa une scission entre les révolutionnaires et les réformistes au sein de la SFIO. Le PCF (Section française de l’Internationale communiste) naîtra de cette scission.
Le jeune PCF comptait 130 000 membres et environ 200 000 sympathisants. C’est plus que la SFIO qui comptait 50 000 adhérents. Cependant cette dernière conservait la plupart des élus et gardait une forte influence sur la classe ouvrière organisée.
Le PCF, lui, a bénéficié de l’attraction créée par la révolution ouvrière en Russie sur les masses exploitées en France. Ce nouveau parti faisait trembler le patronat. Il dirigea d’importantes grèves notamment celle des métallurgistes du Havre de juin à octobre 1922. Petit à petit, le PCF gagna la confiance de beaucoup de travailleurs.
Sa base militante était profondément renouvelée par l’afflux de jeunes venus aux idées révolutionnaires après la guerre. Mais l’influence du réformisme restait bien présente. En réalité, ce nouveau parti avait gardé des déformations politiques et organisationnelles héritées de la SFIO. Par exemple, Frossard et Cachin, deux des principaux dirigeants du PCF à ses débuts, sont restés réformistes et des anti-bolcheviks. Cependant, lentement mais sûrement, l’atmosphère révolutionnaire de la Troisième Internationale pénétrait ce PCF.

La stalinisation du PCF

Malheureusement, avant même de pouvoir jouer son rôle de force révolutionnaire comme a pu le faire le parti bolchévique en Russie, le PCF s’est bureaucratisé et s’est enlisé dans le stalinisme.
Le stalinisme correspond à la formation dans l’appareil de l’État ouvrier russe ainsi que dans la Troisième internationale d’une couche sociale de bureaucrates. Ils se sont choisis comme chef Joseph Staline, un ancien dirigeant bolchévique ayant trahi les idées révolutionnaires. Les bureaucrates staliniens n’étaient pas des révolutionnaires. Ils ont gagné des positions dans l’appareil d’État dégénéré en URSS et ont éliminé les vrais révolutionnaires d’abord en les excluant du parti bolchévique et de l’IC, puis en les enfermant dans des prisons et des camps et en les faisant assassiner.
Le PCF a soutenu toute la politique contre révolutionnaire stalinienne à partir des années 1923-1924 et c’est ce qui explique son évolution jusqu’à nos jours, conservatrice, nationaliste, social-démocrate.

Pour un parti ouvrier communiste et révolutionnaire

Le PCF demeure de par sa composition sociale, malgré ses tares politiques et son affaiblissement électoral, un parti ouvrier intervenant dans une grande partie de la classe ouvrière et des couches populaires. Il existe encore chez lui des militants fidèles à l’idéal communiste en dépit de la direction stalinienne qui, elle, a abandonné les perspectives révolutionnaires communistes. Pire, le PCF a pesé de tout son poids pour tenter d’empêcher qu’un courant révolutionnaire existe parmi la classe ouvrière. Il n’y est pas parvenu puisqu’il existe en France aujourd’hui des militants authentiquement communistes et révolutionnaires par exemple ceux de l’organisation Lutte ouvrière, comme nous membre de l’UCI (Union communiste internationaliste). Bien plus petite que le PCF, avec des scores électoraux très faibles, cette organisation contribue néanmoins à redonner vie au véritable programme communiste révolutionnaire, aux véritables traditions bolchéviques, celles de la révolution d’octobre 1917 dirigée par Lénine et Trotsky. Ce sont ces militants-là avec tous ceux restés fidèles à cet idéal qui reconstruiront d’abord un noyau authentiquement communiste et révolutionnaire. Puis le parti se construira au travers des luttes larges et offensives de la classe ouvrière.


Fraternellement,
GdM
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Re: Le centenaire du Congrès de Tours (1920 - 2020)

Message par Gayraud de Mazars » 02 Jan 2021, 09:45

Salut camarades,

Bon article à lire dans le Journal Lutte Ouvrière n°2735/il y a cent ans

Décembre 1920 : la naissance du Parti communiste
29 Décembre 2020, par Christian BERNAC

https://journal.lutte-ouvriere.org/2020 ... 53777.html

Fin décembre 1920 à Tours, le congrès du Parti socialiste décidait par 3 028 mandats contre 1 022 l’adhésion à la IIIe Internationale créée en mars 1919 à l’initiative des bolcheviks. La majorité formait alors la Section française de l’internationale communiste (SFIC), qui prit peu de temps après le nom de Parti communiste, tandis que la minorité scissionnait et continuait l’ancienne SFIO.

L’Internationale communiste et sa section française étaient nées de la vague révolutionnaire commencée dans les tranchées et les usines de l’Europe en guerre, concrétisée en octobre 1917 par la victoire des ouvriers en Russie et prolongée par une série de révolutions prolétariennes embrasant l’Europe. Pour les révolutionnaires russes, ses initiateurs, elle devait être le parti mondial de la révolution. Mais, même en période de révolution, la constitution d’un parti révolutionnaire n’est pas chose facile, notamment parce que, en France comme ailleurs, la voie était obstruée par les appareils des vieilles organisations faillies, la SFIO et la CGT.

Lors de la déclaration de guerre en août 1914, comme la plupart des représentants de la Deuxième Internationale, les dirigeants du Parti socialiste SFIO et ceux de la CGT avaient sombré dans le patriotisme et l’Union sacrée, reniant tous les engagements pris lors des congrès internationaux.

Fernand Loriot et Louise Saumoneau avaient incarné le courant internationaliste dans le Parti socialiste au déclenchement de la guerre. Mais l’âme en fut le noyau de militants syndicalistes révolutionnaires de la CGT regroupés autour de Pierre Monatte et Alfred Rosmer, qui éditaient La Vie ouvrière.

Ces militants ouvriers furent les propagandistes des conférences de Zimmerwald et de Kienthal, qui avaient réuni en Suisse des opposants à la guerre. Ils mirent sur pied, avec l’aide de Trotsky alors exilé en France, le Comité pour la reprise des relations internationales (CRRI).

Au sein de la SFIO, sentant monter l’opposition à la guerre, certains sociaux-chauvins comme Longuet firent mine de réclamer la paix tout en continuant de voter les crédits de guerre. Fin 1916, au congrès de la SFlO, trois courants étaient représentés : les zimmerwaldiens avec Loriot étaient très minoritaires. Quatre ans plus tard, lors du congrès de Tours, le rapport de force était totalement inversé.

En France comme ailleurs, l’année 1917 vit éclater les mutineries sur le front et de nombreuses grèves à l’arrière. La fin de la guerre ne mit pas fin à l’agitation, bien au contraire. La montée révolutionnaire en Europe toucha la France. La CGT voyait ses effectifs atteindre 1,2 million d’adhérents, quatre fois plus qu’en 1913. Des soldats révoltés par la guerre adhéraient en masse à la SFIO, parti traditionnel de la classe ouvrière et le seul dans lequel une opposition à la guerre et à ses conséquences se manifestait. Des groupes enthousiastes de grévistes et de militants des organisations ouvrières se formaient dans tout le pays.

Dans ces circonstances, Trotsky et la nouvelle Internationale pressaient les révolutionnaires de constituer immédiatement un parti communiste. Il s’agissait, écrivait celui-ci en novembre 1919, « de construire une organisation pratiquement toute neuve en assurant simultanément la direction du mouvement de grève », de « faire preuve d’indépendance devant les masses ». Il ajoutait que défendre l’unité du Parti socialiste équivalait à trahir la révolution. Trotsky militait pour que le noyau syndicaliste révolutionnaire formé autour de Monatte et Rosmer, renforcé par les quelques révolutionnaires authentiques venus des rangs de la SFIO, se constitue en parti, afin en particulier d’attirer à lui les militants ouvriers à l’avant-garde des grèves.

Les années 1919 et 1920 virent en effet exploser une vague de grèves d’une ampleur alors inconnue. La direction réformiste de la CGT réussit à manœuvrer et à saboter le mouvement gréviste, en particulier la grande grève des cheminots de 1920 à l’issue de laquelle 18 000 d’entre eux furent révoqués. Le gouvernement fit emprisonner Monatte, Loriot et Souvarine pendant neuf mois. Le comité de la IIIe Internationale (C3I), successeur en 1919 du CRRI, n’en continuait pas moins à s’élargir, comptant déjà 10 000 membres en octobre 1919 et obtenant 43 % des voix au congrès de la SFIO à Strasbourg en février 1920. Mais il ne se distinguait toujours pas clairement ni de la vieille SFIO ni de la direction confédérale de la CGT. L’attachement au maintien de l’unité favorisait toutes les manœuvres des bureaucrates. En effet, devant la poussée à gauche, une grande partie de l’appareil de la SFIO n’écartait pas la possibilité d’une adhésion à la IIIe Internationale afin de conserver sa mainmise sur le parti. Mais pour cette fraction, il s’agissait tout au plus de changer d’enseigne en conservant le même appareil.

Ainsi Marcel Cachin avait été, durant toute la guerre, un social-patriote acharné, mais il choisit par calcul, avec Louis-Oscar Frossard, de se ranger dans le camp des révolutionnaires lorsque le congrès extraordinaire fut organisé à Tours. Ils endossèrent la motion d’adhésion à l’IC rédigée par Souvarine et ­Loriot depuis leur prison. Longuet lui-même louvoyait, présentant une « motion d’adhésion avec réserves » au vote des militants.

À l’issue du congrès, le jeune Parti communiste rassemblait 110 000 des 170 000 adhérents, donc la majorité, de l’ancienne SFIO. Mais il restait du chemin à faire pour qu’il devienne un véritable parti révolutionnaire. À côté des éléments réellement révolutionnaires, il pouvait offrir un cadre pour le recyclage d’éléments du vieux Parti socialiste compromis dans l’Union sacrée et les manœuvres politiciennes. Un certain nombre de syndicalistes révolutionnaires, Rosmer au premier chef, entrèrent malgré tout au PC pour travailler à le transformer. Trotsky eut bien des difficultés à convaincre ­Monatte de prendre place à sa direction en 1923, après que le parti eut exclu ses carriéristes les plus voyants. Cette direction révolutionnaire de 1923, avec Rosmer, ­Monatte et Souvarine, fut de courte durée : dès l’année suivante, avec le reflux de la vague révolutionnaire, la réaction stalinienne se renforçait en URSS et transformait l’Internationale Communiste en outil servile de la bureaucratie soviétique. Les cadres révolutionnaires en furent chassés en France comme ailleurs et les staliniens en herbe surent parfaitement s’appuyer sur les vieux réformistes usés par les compromissions. En tant que parti révolutionnaire du prolétariat le Parti communiste devait ainsi mourir avant d’avoir vraiment vécu.

Cent ans après il reste le programme, le drapeau, les leçons de la vague révolutionnaire et de la naissance de l’État ouvrier russe, les conseils de l’Internationale sur « la nécessaire indépendance devant les masses » même pour un groupe minoritaire. Ce patrimoine politique, seuls des militants trotskystes ont pu le conserver et pourront le transmettre pour construire les partis communistes et l’internationale, aujourd’hui plus que jamais nécessaires.


Et camarades, bonne année 2021, de lutte pour toutes et tous... Bona Annada a totes e tots per la lucha ! "A l'an que vèn, se sian pas mai que siguen pas mens." Soit : A l'année prochaine, si nous ne sommes pas plus nombreux, que nous ne soyons pas moins nombreux.

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Re: Le centenaire du Congrès de Tours (1920 - 2020)

Message par Gayraud de Mazars » 03 Jan 2021, 08:54

Salut camarades,

J'ai déjà posté bien sûr l'article sur le "Fil d'intervention de La Riposte", mais pour cause d'actualité, je replace la référence dans ce fil dédié au centenaire du Congrès de Tour...

Aux origines du PCF
31 décembre 2020, sur le site de La Riposte
Par Eric Jouen, PCF Barentin (76)

https://www.lariposte.org/2020/12/aux-origines-du-pcf/

Fraternellement,
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Re: Le centenaire du Congrès de Tours (1920 - 2020)

Message par pouchtaxi » 05 Jan 2021, 17:43

Gayraud de Mazars a écrit :
Le Congrès de Tours (25 décembre–30 décembre 1920)
Jean Vigreux
Éditions de l’Université de Dijon, Collection « Essais », 2020, 240 pages, 10 €



J'ai lu le livre de Jean Vigreux sur le congrès de Tours.

Je lui attribue un bon point, il est de taille modeste et tient dans une poche de manteau. Je trouve ça bien pratique !

La moitié du livre est constituée d’annexes documentaires qu’il était judicieux de réunir.

J’ai toutefois quelques réserves.

D’abord, page 18, l’expression :

La prise du pouvoir par Lénine en 1917,…..



Une révolution sociale réduite à une aventure personnelle….. Admettons qu’il s’agisse d’une métaphore et que mon irritation soit sottement subjective.


Il expose avec une certaine insistance le point de vue des opposants à l’adhésion à l’IC : déploration de la division, « oukase » russe ( la lettre de Zinoviev) inacceptable, refus des 21 conditions…


L’insistance de l’IC sur l’élimination des opportunistes n’est pas expliquée en terme de nécessité pour la construction d’un parti effectivement révolutionnaire. Le rôle de Cachin par exemple : Vigreux ne cache pas son attitude patriotarde pendant la guerre mais il est surtout présenté comme le co-auteur de la motion majoritaire Cachin-Frossard d’adhésion à l’IC. Ne pas relever sa roublardise de vieux routier d’appareil est curieux.


Plutôt que de décrire une nécessaire rupture avec une organisation perdue pour la révolution et l’ambition de construire un véritable outil pour la révolution, Vigreux insiste sur ce qu’il caractérise comme une « hybridation »( je cite) du vieux parti «…patriote, héritier des soldats de l’an II »( je cite) avec le nouveau….Ce congrès exprimerait donc la « continuité » : Révolution bourgeoise/Jaurès/Guesde/Lénine…Cette idée est retenue dans la conclusion du livre.


Les raisons pour lesquelles une très large majorité de la SFIO était favorable à l’adhésion me semblent à peine survolées. Il y a l’horreur de la guerre mondiale selon un point de vue purement pacifiste et très peu l’idée que cette guerre mondiale est une conséquence de l’ordre impérialiste (c’est pourtant dans la motion Cachin-Frossard. mais non thématisé par Vigreux) et que la seule réponse proprement prolétarienne, position de Lénine, est d’appeler à la Révolution sociale et donc de disposer d’un parti adéquat.


Je trouve qu’il manque à ce texte - d’historien , je veux bien - l’espérance mise dans la construction d’un parti mondial de la révolution en tant qu’instrument radicalement nouveau et pas seulement un rafistolage au goût du jour de l’ancienne SFIO.

L’inertie n’existant pas qu’en mécanique, la section française de l’IC se nommait pendant sa première année d’existence: PS-SFIC.
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