fil "interventions de La Riposte"

Re: fil "interventions de La Riposte"

Message par Zorglub » 26 Mars 2024, 19:31

TL;DR comme on dit sur le ouaibe.
Je ne me suis pas tout fadé, juste la conclusion à l'horizon bien bas.
...Ils seront obligés de se battre encore et encore parce que, tout simplement, ils n’ont pas le choix...

Les réformistes se démoralisent ainsi, parfois entraînant la classe ouvrière avec. Pour arrêter d'avoir à se battre toute sa vie pour la vie, ce n'est pas voter Mitterrand, Roussel ou Mélenchon (qui avait dit que voter pour lui éviterait d'aller manifester, mais se battre efficacement, c'est-à-dire pour le communisme.
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Re: fil "interventions de La Riposte"

Message par com_71 » 26 Mars 2024, 20:59

La Riposte a écrit :...Thatcher a fait venir des États-Unis un certain Ian McGregor, briseur de grève notoire, et l’a nommé à la tête de British Steel (l’industrie nationale sidérurgique), où il a imposé des fermetures et des suppressions d’emplois massives à une direction syndicale « modérée » et capitularde. Il a été muté au National Coal Board qui, comme British Steel, était nominalement une industrie publique. Entre-temps, en 1981, Arthur Scargill avait été élu président national de la NUM, ce qui constituait une victoire importante pour la gauche du syndicat.

La NUM n’était pas en position de force, malgré le leadership résolu et charismatique de Scargill. Il y avait une tradition d’organisations locales fortes, basées sur des bassins houillers particuliers de grande superficie, organisées par comté, région ou nation. Certains responsables de la NUM dans différents domaines n’étaient en aucun cas de gauche. Certains étaient hésitants et hésitants à des moments cruciaux et quelques-uns sabotaient même activement la grève dès le début...

50 ans ans après, toujours le même alignement sur la bureaucratie syndicale prétendument de gauche. Alignement bien partagé dans toute l'extrême-gauche à l'époque... et maintenant.

Cf.
LDC 112 https://www.lutte-ouvriere.org/mensuel/ ... neurs.html
LDC 114 https://www.lutte-ouvriere.org/mensuel/ ... ve-et.html
LDC 117 https://www.lutte-ouvriere.org/mensuel/ ... lisme.html
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Re: fil "interventions de La Riposte"

Message par Zorglub » 27 Mars 2024, 21:10

L'article du dernier LO (2904) :
Mars 1984-1985 : la longue grève des mineurs britanniques

Commencée en mars 1984, la grève des mineurs britanniques allait durer une année entière, jusqu’à leur défaite en mars 1985. Ce combat perdu par un des bataillons les plus combatifs de la classe ouvrière de Grande-Bretagne marqua durablement celle-ci.
Publié le 27/03/2024

La grève, commencée dans le sud du Yorkshire et aussitôt nourrie par l’annonce d’un nouveau plan de 20 000 licenciements, s’étendit vite au reste de la Grande-Bretagne grâce à l’action de dizaines de « piquets (de grève) volants ». Par leur dynamisme et leur résolution, ils entraînèrent en deux semaines 150 000 mineurs. La direction de la Fédération nationale des mineurs, le NUM, et son président Arthur Scargill, qui n’avaient pas cherché à lancer une grève nationale, étaient conscients que le bras de fer serait difficile car le NCB, le National Coal Bord, la direction des charbonnages, avait accumulé des stocks de charbon en vue d’un affrontement. Mais, devant le fait accompli, ils en assumèrent la direction. La politique proposée par le NUM aux mineurs, dont il avait la confiance, était d’allure radicale mais recouvrait un corporatisme qui menait à l’impasse.

Le NUM donna pour objectif à la grève de « sauver les puits », par le biais du blocage total de la production de charbon. L’énergie formidable des mineurs fut ainsi canalisée vers deux buts difficiles à atteindre, consistant à empêcher toute sortie de charbon transformé de la gigantesque cokerie d’Orgreave et à paralyser la production dans le Nottinghamshire. Cette dernière région était la seule où les grévistes étaient minoritaires mais, au lieu de chercher à convaincre les non- grévistes, le NUM invita au contraire les piquets à leur faire barrage en les traitant de « jaunes ». Sur ces deux fronts, les batailles rangées avec les policiers furent violentes mais finalement vaines.

Le patronat à l’offensive

Le patronat britannique était alors à l’offensive sur tous les plans, procédant à des réductions d’effectifs, au blocage des salaires et à l’accélération des cadences, et la Première ministre Margaret Thatcher réprima sans pitié ceux qu’elle nommait « l’ennemi intérieur ». Au cours de la grève, il y eut 11 000 arrestations, soit presque un gréviste sur dix, des milliers de blessés, des centaines de licenciements disciplinaires, et les avoirs du NUM furent mis sous séquestre. Il fallait décourager toute résistance ouvrière, et les médias jouèrent leur rôle de chiens de garde dans cette guerre de classe. Dockers et cheminots furent cependant nombreux à refuser de transporter du charbon « jaune ». Et la solidarité, notamment financière, avec les mineurs s’exprima de bout en bout dans les classes populaires.

Après l’été de 1984, malgré les coups et la fatigue, les trois quarts des mineurs étaient encore en grève. Misant sur leur découragement, Thatcher passa du bâton à la carotte, proposant des primes à ceux qui reprendraient le travail. À l’approche de Noël, le nombre de volontaires augmenta, car même les plus motivés se sentaient de plus en plus isolés. Début mars 1985, constatant que le blocage de la production avait échoué, le NUM puis un congrès de délégués des puits décidèrent la reprise du travail. Les mines, nationalisées depuis 1947, allaient fermer les unes après les autres. En 1994 leur privatisation ne fut plus qu’une péripétie dans la catastrophe sociale que subissaient des dizaines de communautés minières.

Une énergie formidable, gâchée par le corporatisme

Scargill, pour expliquer la défaite, accusa les autres syndicats d’avoir « manqué de solidarité » vis-à-vis de la grève des mineurs. Mais en réalité il avait toujours respecté les plates-bandes des autres bureaucrates, et n’avait à aucun moment cherché à entraîner d’autres catégories de travailleurs dans l’action, comme il aurait pu le faire en appelant les mineurs à s’adresser aux électriciens, aux métallurgistes et à d’autres par-dessus la tête de leurs dirigeants syndicaux. Pendant la grève, le NUM avait certes appelé le Parti travailliste et le TUC, organe qui regroupe la plupart des syndicats britanniques, à la solidarité. Mais les uns et les autres n’avaient offert aux mineurs que des phrases et n’avaient à aucun moment cherché à étendre la grève aux autres catégories.

Une autre politique que celle du NUM aurait-elle été possible ? Les mineurs bénéficiaient d’un appui moral très large dans les milieux populaires, à un moment où l’étau se resserrait sur tous les salariés, du public comme du privé. Les mineurs et leurs familles, au premier rang desquelles les femmes, forçaient le respect par leurs capacités d’organisation. Et ils auraient pu être les fers de lance d’une riposte ouvrière générale, si leurs piquets s’étaient déployés à la porte des grandes entreprises et sur les places publiques, et avaient invité les salariés de l’acier, du transport, des services municipaux, etc., à les rejoindre avec leurs propres revendications. Les mineurs pouvaient se battre derrière un autre étendard que celui du sauvetage du charbon britannique, dont la bourgeoisie voulait cesser l’exploitation. Se battre pour que celle-ci paye tous les frais d’une reconversion aurait signifié devenir les militants d’une véritable grève politique qui soit celle de tous les exploités. Mais le corporatisme du NUM – et de l’ensemble des appareils syndicaux – les priva de cette possibilité, tout en cantonnant les autres travailleurs au rôle de spectateurs ou de supporters.

Au cours de la seule année 1984, il y eut plus de journées de grève qu’au cours des trois décennies suivantes. Cela dit l’importance qu’eut la grève des mineurs, mais aussi combien elle fut ressentie comme une défaite par tous les travailleurs britanniques. Récemment, ceux-ci ont relevé la tête face aux attaques patronales et gouvernementales au cours de la vague de grèves de 2022-2023. Si celle-ci n’a permis d’arracher aucune concession significative, c’est aussi parce que les mobilisations dans la santé, le transport, l’éducation, etc., ont été maintenues dans des voies étroitement corporatistes et isolées les unes des autres par les bureaucraties syndicales. Transmettre ces leçons, comme celles de la grève 1984-1985, est vital.
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Re: fil "interventions de La Riposte"

Message par Gayraud de Mazars » 09 Avr 2024, 16:39

Salut camarades,

Combattre les idées reçues
9 avril 2024
Article publié sur le site de La Riposte
par Péjé

Les migrants ne volent pas le travail des français

La question de la migration est, depuis quelques années, au cœur des préoccupations des français et des débats. Les idées reçues sont légion et la confusion est savamment entretenue par les marchands de peur et les médias. Ainsi, il n’est pas rare d’entendre que les migrants veulent juste profiter de nos aides sociales, l’immigration représente aujourd’hui un quart de la population française, les migrants volent notre travail etc.
[...]

https://www.lariposte.org/2024/04/comba ... es-recues/

Fraternellement,
GdM
"Un seul véritable révolutionnaire dans une usine, une mine, un syndicat, un régiment, un bateau de guerre, vaut infiniment mieux que des centaines de petits-bourgeois pseudo-révolutionnaires cuisant dans leur propre jus."
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Re: fil "interventions de La Riposte"

Message par Zorglub » 09 Avr 2024, 18:40

GdM, tu peux, encore une fois, nous épargner les phraséologies nationalos ?

Quels Français ? Notre frère de classe ou le parasite Bolloré ? Quels migrants ? Notre frère de classe ou le dégénéré Elon Musk ?

Le PC déteint à tous points de vue.
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Re: fil "interventions de La Riposte"

Message par Gayraud de Mazars » 14 Mai 2024, 13:12

Salut camarades,

Révolution et contre-révolution au Portugal, 1974-1975. (Partie 1)
Le mardi 14 mai 2024
Article publié sur le site de La Riposte

https://www.lariposte.org/2024/05/revol ... -partie-1/

portugal-revolution-oeillets-archives-752x440.jpg
Portugal Révolution 1974 !
portugal-revolution-oeillets-archives-752x440.jpg (74.05 Kio) Consulté 39 fois


"La révolution portugaise de 1974-1975 a brusquement mis fin à un demi-siècle de dictature militaire. Elle a commencé, comme de nombreuses révolutions dans l’histoire, lorsque des divisions au sein de la classe dirigeante, de la bureaucratie d’État et de l’armée ont éclaté au grand jour. La brèche ouverte dans ce qui semblait jusqu’alors être un mur infranchissable de réaction a provoqué un puissant mouvement de masse venant d’en bas. Au cours de la lutte pour acquérir et consolider des libertés démocratiques, la classe ouvrière portugaise et les couches les plus pauvres et opprimées de la société rurale, ont rapidement pris une orientation socialiste et révolutionnaire, portant atteinte à la propriété capitaliste de l’industrie, des banques et des terres, frappant ainsi à la racine même de toutes les formes d’oppression et d’exploitation dans le monde moderne."

Le Portugal n’avait connu que la dictature depuis 1926, lorsqu’un coup d’État militaire a balayé le régime chaotique de la Première République, mise en place après le renversement de la monarchie en 1910. Antonio de Oliveira Salazar avait d’abord été ministre des Finances sous le régime militaire, avant de devenir Premier ministre en 1932. Adversaire implacable du socialisme, du syndicalisme et des droits démocratiques les plus élémentaires des travailleurs, Salazar a gouverné exclusivement dans l’intérêt des riches et des puissants, des corporations capitalistes et des grands propriétaires terriens. Son régime s’appuie sur l’armée, la police et la hiérarchie de l’Église catholique pour maintenir l’ordre capitaliste. La presse, la radio, les écoles et l’enseignement supérieur, toutes les formes d’expression publique furent étroitement contrôlés. Empêtrée dans la stagnation économique et culturelle, la société portugaise se trouvait dans une sorte de camisole politique, sociale, idéologique et morale.

Les opposants au régime ont été emprisonnés et torturés. Beaucoup d’entre eux ont disparu à jamais aux mains de la redoutable police secrète, la PIDE. Les activités du PIDE ne se limitaient pas au Portugal. Sur le modèle de la Gestapo d’Hitler, il a joué un rôle funeste aux côtés du général Franco pendant la guerre civile espagnole, mais aussi dans les guerres coloniales menées par le Portugal en Afrique. En 1936, après l’échec d’une tentative de marins portugais de livrer deux navires de guerre aux forces anti-franquistes, les mutins ont été emprisonnés et torturés par la police de Salazar dans la prison de Tarrafal au Cap-Vert, où de nombreux prisonniers politiques allaient souffrir et mourir au cours des décennies suivantes.

Salazar a eu un accident vasculaire cérébral en 1968, deux ans avant sa mort, et a été remplacé par Marcelo Caetano, ancien ministre des Affaires coloniales. À l’époque, l’impérialisme portugais tentait désespérément de conserver ses possessions coloniales en Angola, au Mozambique et en Guinée-Bissau. Comme pour l’impérialisme français en Algérie, les forces armées portugaises ont commis des atrocités à grande échelle contre les peuples autochtones.

En 1973, quelques semaines avant que Caetano ne se rende en Grande-Bretagne pour célébrer l’anniversaire de l’alliance anglo-portugaise, un prêtre catholique britannique a révélé le massacre de tous les hommes, femmes et enfants du village de Wiriyamu au Mozambique. Ce carnage faisait partie d’une campagne de fusillades, de pendaisons, de décapitations, de viols et de dépeuplement forcé le long du fleuve Zambèze, initiée par la PIDE en 1971.

La France avait perdu face à la révolution algérienne et, aux yeux de nombreux politiciens, commandants militaires et officiers subalternes, le Portugal se dirigeait clairement vers un sort similaire. Les guerres engloutissaient jusqu’à 40 % des maigres ressources de l’État, dans un pays en récession. Un grand nombre de Portugais étaient désespérément pauvres et durement touchés par la crise économique mondiale de 1973.

Alors qu’une poignée de familles extrêmement riches ont tiraient profit des massacres Afrique, le coût financier et humain des guerres a pesé lourdement sur la classe moyenne, et en particulier sur les travailleurs des villes et des campagnes. Des grèves illégales sporadiques et des manifestations étudiantes ont eu lieu, poussant Caetano à mettre en œuvre quelques réformes superficielles. La censure de la presse a été légèrement assouplie. Mais les problèmes étaient trop profonds. Les tentatives de réforme pouvaient se comprendre comme un signe de faiblesse. Les antagonismes de classe couvant dans la société civile se reflétaient également au sein des forces armées, qui s’avéreraient être le talon d’Achille de la dictature.

L’ampleur des guerres en Angola et au Mozambique a entraîné une expansion des forces armées et une augmentation des dépenses militaires. En 1973, sur les conseils du régime raciste de Rhodésie, Caetano a introduit une loi ouvrant des postes d’officiers commissionnés aux jeunes soldats et miliciens après une formation désormais minimale.

Cette réforme a provoqué un énorme ressentiment chez de nombreux officiers subalternes qui considéraient ce système de promotion accéléré comme une menace pour leur carrière. La controverse a conduit à l’émergence d’un mouvement d’opposition au sein de l’armée appelée les « capitaines », et plus tard le ou Mouvement des forces armées (MFA).

Le MFA a fourni un point focal organisé au mécontentement croissant au sein de l’armée. Il représentait la fin des guerres coloniales en Afrique, un changement de régime au Portugal et la démocratie. Certains des officiers subalternes avaient des idées radicales et socialistes, et certains entretenaient des liens avec les structures interdites et donc clandestines du Parti communiste portugais. Cependant, malgré ces tendances radicales, le caractère politique amorphe et confus du MFA a été démontré par son association avec le général Antonio de Spinola, qui avait été renvoyé de l’armée au début de 1974 à la suite de la publication d’un livre, Le Portugal et son avenir, qui plaidait pour le retrait des guerres et le maintien des colonies sous la forme d’une « fédération » avec le Portugal. Dans sa jeunesse, ce général extrêmement réactionnaire avait été observateur militaire au siège de Leningrad, dans les années 1940, auprès des nazis. Avant cela, il avait combattu aux côtés de Franco pendant la guerre civile espagnole. En 1974, son point de vue politique était clairement à l’extrême droite de la politique portugaise.

Une autre figure de proue du MFA était le colonel Otelo Saraiva de Carvalho, qui avait servi en Guinée-Bissau et en Angola. Il a été photographié en train de pleurer abondamment sur le cercueil de Salazar, en 1970, mais au début des années 1970, il se démarquait à gauche, tout en étant porte-parole du ministère des Affaires étrangères. En tant que colonel, il a pu réunir de nombreux capitaines autour de lui et les a convaincus de la nécessité d’un coup d’État militaire pour se débarrasser du régime de Caetano et se retirer des guerres coloniales.

Le coup d’État a été méticuleusement planifié et exécuté dans la nuit du 24 au 25 avril 1974. Incidemment, l’une des deux chansons diffusées à la radio en tant que signal pour le déclenchement de l’opération était celle qui représentait le Portugal au Concours Eurovision de de la Chanson de cette année-là.

Le coup d’État a été soutenu par la plupart des officiers intermédiaires des forces armées. Quatre personnes ont été tuées dans la révolte, toutes abattues par la PIDE. Caetano et ses ministres, retranchés dans des casernes à Lisbonne, ont été rapidement encerclés par les troupes rebelles. Cependant, Caetano a refusé de démissionner auprès d’officiers de rang inférieur, ce qui, a-t-il dit, serait « comme jeter mon pouvoir dans le caniveau ». Les forces rebelles auraient facilement pu forcer la question, mais ont choisi de faire appel au général Spinola. Et c’est ainsi que le général contre-révolutionnaire Spinola, qui n’avait joué aucun rôle dans la préparation du coup d’État et dont les liens personnels et politiques étaient avec ses ennemis, a pu devenir comme la figure de proue de la révolution !

Une junte de salut national, composée essentiellement de généraux, a assumé le pouvoir gouvernemental jusqu’au 16 mai, date à laquelle un gouvernement provisoire a été installé, comprenant des personnalités politiques modérées « indépendantes » et des représentants du Parti démocratique populaire, du Mouvement démocratique, du Parti socialiste et du Parti communiste. Spinola, en tant que président de la nouvelle république, espérait utiliser sa position pour freiner la révolution et protéger les intérêts capitalistes.

Cependant, le renversement de Caetano a déclenché un mouvement d’en bas qui allait dans le sens contraire. Les ouvriers se sont mobilisés pour prendre le contrôle des usines et des ateliers. Sur les grands domaines fonciers du sud du Portugal, les paysans et les salariés agricoles occupaient la terre et chassaient les propriétaires terriens. Le personnel a pris le contrôle des hôpitaux, expulsant les anciens administrateurs.

Un processus similaire était en cours dans l’ensemble de l’économie et de l’administration publique. Les travailleurs se sont emparés de nombreuses entreprises. Ils se sont mobilisés en masse pour prendre le contrôle de la société et la refonder sur de nouvelles bases. Ce mouvement révolutionnaire fut dirigé contre les patrons et contre les autorités associées à l’oppression du peuple. Ainsi, d’une prise de contrôle au sommet avec des objectifs limités, les semaines qui ont suivi le 25 avril ont vu le développement d’un mouvement révolutionnaire de masse. Des centaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues de Lisbonne pour célébrer le renversement de Caetano. Moins d’une semaine plus tard, le 1er mai, environ 1,5 million de personnes ont défilé dans la capitale.

Les soldats et les travailleurs ont partagé leurs idées et leurs expériences ; ils fraternisaient et se considéraient comme des participants à une lutte commune. La nécessité du « socialisme » – quel que soit le contenu précis de ce terme dans l’esprit des personnes engagées dans le mouvement – était une idée largement acceptée, exprimant le désir d’un changement social fondamental, de l’émancipation des exploités et des opprimés. Les partis politiques de gauche, jusqu’alors interdits au Portugal, avec leurs dirigeants en exil ou en prison, se sont rapidement remplis d’une masse d’adhérents et se sont retrouvés avec une base sociale massive. Il en était de même des organisations syndicales dans les usines et d’autres lieux de travail. À l’automne 1974, plus de la moitié des travailleurs portugais étaient syndiqués. Ce qui manquait, cependant, c’était une de structure organisationnelle générale susceptible de rassembler et unifier l’ensemble du mouvement révolutionnaire, semblable à celle qui avait émergé dans les révolutions de 1905 et 1917 en Russie. L’une des raisons en était sans aucun doute le rôle des directions du Parti socialiste et du Parti communiste, qui craignaient le développement d’une forme d’auto-organisation indépendante, unie et solidaire des travailleurs à l’échelle nationale. Quant au MFA, même si ses divers courants politiques se réclamaient vaguement de la « démocratie », il n’a présenté aucun programme social et économique digne de ce nom. L’intervention consciente et organisée de la classe ouvrière n’avait pas figuré dans ses plans. C’était comme s’il se retrouvait sur le dos d’un tigre qui les emmenait dans une direction qui allait bien au-delà de ses objectifs de départ.

Les éléments réactionnaires au sommet des forces armées du temps de Salazar et Caetano avaient perdu le contrôle des rangs. En dehors des tortionnaires fascistes de la PIDE et de quelques éléments relativement isolés au sein de l’armée, les capitalistes et les réactionnaires qui avaient dirigé le Portugal pendant cinq décennies de dictature se sont très vite retrouvés sans aucune force sérieuse pour les défendre, désormais. La voie de la transformation socialiste de la société semblait ouverte, et le pouvoir réel – c’est-à-dire le contrôle et la gestion de l’économie et la mise en place d’un appareil d’État représentant les intérêts des travailleurs – était à portée de main. Cependant, ce magnifique mouvement vers le socialisme a été restreint par les objectifs réformistes limités du MFA et les dirigeants socialistes et communistes.

Comme le cours des événements pendant les mois suivants allait démontrer, leur indécision et leur naïveté, au mieux, ou, au pire, leur trahison consciente se dressaient en obstacle à la conclusion réussie de la révolution. Avec le temps, cela permettrait aux forces de la réaction de se regrouper et de préserver leur pouvoir.


Fraternellement,
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