("L'Huma" a écrit :ÉCO-SOCIAL
La direction reprend ses stocks manu militari
Hier matin, les salariés de l’usine Sediver de Saint-Yorre dans l’Allier ont trouvé porte close en arrivant au travail. Une centaine de gendarmes mobiles avaient été déployés à l’aube sur le site pour permettre à la direction de récupérer un stock de pièces de verre bloqué par les ouvriers qui se battent contre la fermeture du site. En fin de matinée, des intérimaires et une entreprise extérieure ont commencé le chargement des pièces, dans le calme. « On ne va pas se battre dans ce contexte, on est obligé de laisser faire », a déclaré à l’AFP Noël Paput, porte-parole de l’intersyndicale, qui a déploré que « les pouvoirs publics continuent de laisser faire le pillage de la société ».
refus du chantageIl y a un an, en janvier 2004, que le groupe italien Seves (ex-Vetroarredo), auquel appartient Sediver, premier producteur mondial d’isolateurs électriques en verre, a annoncé son intention de fermer le site
de Saint-Yorre, où travaillent 294 salariés. Face à la réaction syndicale, la direction a répliqué en proposant en août la « sauvegarde » de 166 emplois, contre une baisse des salaires. Les syndicats ont refusé le chantage en soulignant que ce projet n’était pas clair et cachait un simple report de la fermeture. En septembre, la direction a retiré son « offre » et lancé la procédure d’information-consultation du comité d’entreprise en vue de fermer l’usine. L’intersyndicale a saisi le TGI de Nanterre pour contester les justifications économiques de ce plan de licenciements, car le site est rentable.
Pendant ce temps, les salariés bloquaient les stocks. Mais en novembre, la direction a saisi le TGI de Cusset (Allier), qui a ordonné que les stocks puissent quitter l’usine.
les comptes plombés« Nous avons d’abord accepté cette décision et mis fin au blocage, raconte Gérard Balichard, délégué CGT. Mais ensuite nous nous sommes aperçus que les pièces de verre étaient vendues à perte à une usine chinoise du groupe. La direction fait tout pour plomber les comptes du site, pour pouvoir dire qu’il n’est pas rentable. Le 29 décembre, nous avons décidé collectivement de reprendre le blocage. » Depuis quinze jours, le préfet avait fait comprendre qu’il allait faire appliquer la décision de justice. Le déménagement d’hier n’a donc pas été une surprise.
Face au coup de force de la direction, les salariés ont encore un espoir du côté de la justice. Début janvier, le TGI de Nanterre a proposé une médiation, refusée par Sediver. Une nouvelle audience portant sur le plan de licenciements se tiendra donc le 9 février prochain.
Fanny Doumayrou
Article paru dans l'édition du 26 janvier 2005.