Informations Ouvrières N° 754 - L'éditorial du 3 août
Les peuples veulent vivre
Devant la situation tragique imposée aux peuples du Moyen-Orient, nous avons choisi exceptionnellement de publier en tribune libre, à la place de notre éditorial, la correspondance que nous a fait parvenir un militant juif de Palestine. Le cri de révolte de ce militant juif, qui exprime son propre point de vue, rejoint celui d’innombrables militants palestiniens, libanais… Il exprime l’aspiration de tous les peuples à s’ouvrir la voie qui leur permette de vivre enfin libres, dans la démocratie et la paix. Nous soumettons cette correspondance à la réflexion et à la discussion de nos lecteurs.
L’armée israélienne prépare une attaque de grande envergure contre le Liban.
Le Premier ministre, Ehoud Olmert, vient de déclarer, en s’adressant à une assemblée des maires, « qu’il n’y a pas de cessez-le-feu et qu’il n’y en aura pas ». Il a ajouté que « nous devons nous attendre à de la souffrance, des larmes et du sang ». C’est effectivement l’avenir que préparent le gouvernement israélien et le haut commandement pour tous les peuples de la région. Après le massacre de Kafr Qana et la révélation d’autres massacres au Sud-Liban et à Gaza, la direction politico-militaire israélienne prépare une attaque de grande envergure au Liban, qui n’est pas destinée à obtenir la libération des soldats israéliens prisonniers, mais bien à instituer un nouvel ordre politique au Liban qui serve mieux les intérêts de l’impérialisme américain au Moyen-Orient. Olmert confie à l’assemblée des maires « qu’il y a une occasion unique de changer les règles au Liban ». Au même moment, pour mener plus facilement ses opérations militaires, qui ont déjà causé la mort de dizaines de Palestiniens non armés ces derniers jours, l’armée d’occupation vient de déclarer la fermeture complète de tous les territoires de l’Autorité palestinienne. La destruction systématique de toutes les institutions palestiniennes se poursuit sans interruption.
Plus que jamais, il est évident que le gouvernement israélien met en application les ordres directs de Washington, même si parfois il rue un peu dans les brancards. C’est ainsi que la « trêve » de quarante-huit heures, annoncée par Washington quelques heures après le massacre de Kafr Qana, n’a été confirmée que plus tard par le porte-parole de l’armée israélienne et n’a été appliquée que partiellement, puisque les canons israéliens n’ont pas cessé de tirer. Cette trêve n’est destinée qu’à gagner du temps et à empêcher la proclamation d’un cessez-le-feu par l’ONU.
Le massacre de Kafr Qana a provoqué une vague de protestations en Israël, bien qu’encore limitée à la population arabe et à de petits cercles d’opposants juifs à la politique guerrière israélienne.
Dans la ville arabe de Sakhnin a eu lieu un grand rassemblement populaire de 3 000 personnes, qui ont défilé dans la ville jusqu’au cimetière où sont enterrées les victimes de la répression de la grève générale de 1976 et des manifestations de 2000. Dans la ville d’Umm el-Fakhem, un piquet de protestation qui s’était formé après l’annonce du massacre s’est transformé spontanément en un défilé de dix mille personnes dans les rues de la ville. Une telle mobilisation populaire ne s’était pas produite depuis six ans.
La population arabe à l’intérieur d’Israël refuse d’être prise au piège de la « solidarité nationale » face aux bombardements du Hezbollah. Bien que deux enfants, à Nazareth, et une jeune fille, dans le village de Mghar, aient été tués par des missiles et que des dizaines d’autres aient été blessés, les parents des victimes accusent le gouvernement israélien de l’entière responsabilité de ces violences, au risque de se voir sanctionnés par la privation du soutien financier de la sécurité sociale.
Cette nuit, le cabinet politico-militaire a pris la décision souhaitée par le président Bush d’élargir l’ampleur de l’invasion du Liban et d’y envoyer les troupes de réserve qui viennent d’être mobilisées. Cela veut dire que nous allons connaître d’autres destructions, d’autres massacres et plus de souffrances. Seul un large mouvement de solidarité avec les peuples libanais et palestinien pourrait freiner les agressions de l’armée israélienne.
Ecrit dans la nuit du 31 juillet au 1er août 2006