Les intellectuels progressistes arabes du Moyen-Age...

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Koceila » 14 Jan 2007, 21:21

Au fait, un grand poëte syrien, né au 10eme siécle et mort en 1057 disait:
a écrit :
"Les habitants de la terre se divisent en deux,
Ceux qui ont un cerveau, mais pas de religion,
Et ceux qui ont une religion mais pas de cerveau."
Al Maari
Koceila
 
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Message par Apfelstrudel » 14 Jan 2007, 23:54

Oui mais alors ça veut quand même dire que ceux qui ont une sensibilité sont des idiots. :33:
Puisque le monde se divise en deux (comme dirait l'autre...)
Apfelstrudel
 
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Message par yannalan » 15 Jan 2007, 08:04

Sur Al Maari, quelques extraits là :

http://www.lequasar.net/poesie/almaari.htm

Non, Koceila ne s'est pas trompé. Et oui, ces courants existaient à cette époque, qui était plus bouillonante au oint de vue des idées.
yannalan
 
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Message par yannalan » 15 Jan 2007, 13:10

POur approfondir sur le Moyen orient de l'époque, cet article de Raymond Debord (c'est pas ma tasse de thé politiquement, mais cet article précis est intéressant.

http://www.le-militant.org/praxis/quarmat.htm
yannalan
 
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Message par abounouwas » 16 Jan 2007, 00:38

Concernant l'article de Debord sur les Qarmates, il me semble truffé d'à-peu-près et de simplifications douteuses. Je le cite in extenso, avec une bio de Raymond Debord puis un certain nombre de remarques:

a écrit :Le mouvement qarmate, apogée des révoltes "communistes" aux premiers temps de l'Islam.

Raymond DEBORD

L’Islam peut-il produire sa propre évolution progressiste, à l’image de la théologie de la libération dans le monde chrétien ? En tous cas, le monde Musulman n’a pas attendu pour produire des mouvements égalitaristes radicaux, et ce dès le VIIIe siècle après JC. Aux Xe siècle les Qarmates fusionnent toutes les aspirations.
Si les sociétés n'ont pas toujours été divisée en classes (celles‑ci apparaissant avec l'existence d'un surproduit social), leur apparition a immédiatement suscité des mouvements contestant leur existence. Cette contestation primitive s’est développée généralement au nom d’une certaine nostalgie des sociétés antérieures : c'est le mythe de l'"âge d'or". Celui‑ci était clairement identifié à une période où la propriété privée n'existait pas. Dès l'antiquité, des penseurs comme Platon ont déploré les divisions sociales : "Même la ville la plus petite est divisée en deux parties, une ville des pauvres et une ville des riches qui s'opposent comme en état de guerre". Par la suite, la plupart des sectes juives et les fondateurs du christianisme se sont opposés de manière assez radicale à l'accaparement des richesses par une minorité de la société. Cette forme de "communisme" inspiré des valeurs religieuses n'a pas été le monopole du monde judéo‑chrétien, loin s'en faut.
Le monde musulman n'a pas échappé à cette tendance qui s'est manifestée dès ses origines. Au Ve siècle, de vieilles tendances égalitaristes (fortes en Iran) se sont incarnées dans le mouvement mazdékite, lié l'essor urbain. Aux VIIIe et IXe siècles, de nombreuses révoltes ont lieu en Iran et en Mésopotamie, se réclamant de l'héritage mazdékien, dont celle de Sunbad le Mage et d'Ustadasis. Des révoltes contre la misère causée par les impôts trop élevés ont lieu en Arménie. Il y a ensuite la révolte du "Prophète voilé", celle des Bâtinites et de la secte des "Étendards Rouges" de la Caspienne, celle des Hurramites puis enfin celle de Bâbek en Azerbaïdjan au IXe siècle. Esclaves et parias de toutes sortes se soulèvent aussi contre la misère dans les campagnes c'est le mouvement des Zotts (Tsiganes) de Basse‑Mésopotamie et celui des Zangs (ou Zanjs), esclaves gagnés aux idées mazdékites. Toujours au IXe siècle, les adeptes de la "Révolte des nus" prennent un temps le contrôle de Bagdad ; en Egypte, les artisans coptes se soulèvent et sont déportés par milliers.
"Le Xe siècle va fondre ces mouvements désordonnés, aberrants, hétérogènes, en un vaste mouvement homogène : le Qarmatisme, qui se confondra à ses débuts, avec le mouvement fâtimide (1) et s'étendra de l'Iran et du Golfe persique, jusqu'à l'Égypte et à l'Afrique du nord, avec des ramifications jusqu'en Espagne. Tout le monde musulman s'en trouvera secoué" (2)
Le mouvement Qarmate prend place sous la dynastie abbâsside. Celle‑ci durera cinq siècles (750‑1258). Elle est portée au pouvoir par une coalition entre Arabes et Persans, ceux‑ci fournissant nombre de grands dignitaires de l'État et établit sa capitale à Bagdad. Par certains aspects, la période abbâsside est considérée comme l'époque classique de l'Islam, celle de son apogée. Mais c'est aussi une période où l'immense empire est secoué par une série incessante de soulèvements, seules ses cinquantes premières années ayant été relativement stables.
Sous les Abbâssides, les grands bénéficiaires de l'essor économique et social sont la classe des marchands et les milieux de la Cour. Les marchands profitent de l'essor commercial dû au développement de grandes métropoles, de l'afflux d'or, de l'augmentation du crédit et de la hausse des prix. Les palatins ponctionnent les richesses par l'impôt et par leurs liens avec les banques. Mais alors que les villes voient se déployer des fastes inouïs, les masses populaires s'appauvrissent et les salaires sont loin de suivre la hausse des prix.
Les écarts de révenus étaient considérables. Si on considère qu'au IXe siècle une somme de 360 dinars par an suffisait à faire vivre une famille, un soldat en touchait 500, un dignitaire religieux quelques milliers (avec lesquels il devait aussi payer son personnel) et un vizir plusieurs centaines de milliers. Mais au delà de cette inégalité, nombreux étaient ceux qui n'arrivaient pas à accéder au strict minimum. "Les simples ouvriers ou employés en tous cas étaient loin de toucher toujours pareilles sommes" (3).
Jusqu'au Xe siècle, les corporations d'artisans sont étroitement contrôlées par l'Etat, poursuivant le modèle instauré par l'Empire byzantin (le ministerium, ou collegium). Mais peu à peu les corporations se détâchent du pouvoir des gouverneurs et de leurs agents. Elles deviennent de véritables confréries disposant de leur propre organisation et tendant à s'opposer de plus en plus au pouvoir. Ces confréries ont "des rites d'initiation, des serments secrets, des chefs élus (que l'on nomme "maîtres"), des conseils composés de ces chefs et une doctrine, aussi bien mystique que sociale" (4).

Pour comprendre l'émergence du mouvement qarmate, il faut également le situer sur le plan religieux, ici étroitement entremèlé au plan social. Les Qarmates sont des chiites d'obédience ismâilienne. Les ismâîliens, parfois considérés comme des extrémistes (gholât) ont une lecture non littérale du Coran et considèrent que celui‑ci a un sens câché qui ne peut être approché que par de longues études sous la tutelle d'un maître. Comme les autres chiites, ils croient également à l'existence d'un imâm caché (mahdi) La venue de celui‑ci doit annoncer la fin des temps et l'avènement du royaume de Dieu sur terre.
Dès 875/262 (5), une propagande messianique annonçant la venue prochaine du mahdi se répend dans les milieux ruraux et bédouins. Le trait dominant de la propagande colportée par les missionnaires (dâ'î, plur. du'wâ) est la revendication de l'égalité sociale ‑ encore qu'on en exclut les esclaves ‑ et de la communauté des biens. En 899/286, une crise doctrinale éclate chez les ismâîliens, dont certains refusent d'admettre les prétentions de Ubayd Allâh (6) à l'imamat : ainsi naquit dans le Sawâd le mouvement qarmate, dont le chef sera Hamdân Qarmat Ibn al‑Ash'ath, secondé par son beau‑frère 'Abdân. D'après les rares éléments connus, Hamdân Qarmat aurait été un laboureur vivant dans le Sawâd de Kûfa. Il réunit autour de lui des éléments paysans, mais aussi ouvriers, de Basse Mésopotamie (aujourd'hui en Irak) et met "la doctrine de l'imâm caché au service d'une révolution sociale" (7).
Rassemblant "les tendances protestataires de ces IXe‑Xe siècles qui correspondent à un moment d'extrême développement commercial, industriel et urbain, regroupant en un mouvement d'ensemble les grèves, les crises sociales et les révoltes, le qarmatisme développe une doctrine originale, insistant sur la liberté individuelle, le rejet de la loi formelle de l'Islam et l'affirmation du caractère relatif de tout système de relations humaines" (8). Il se distingue aussi par son aspect moderne et novateur. Non seulement les idées qu'il défend sont contradictoires avec celles de la classe dirigeante mais elles se distinguent également d'une simple nostalgie d'un passé plus heureux.
En 902/289, les Qarmates, sous la direction de Zikrawayh, attaquent les Ismâîliens de Salâmiya en Syrie. Puis ils assiègent en vain Damas et Alep, mais réussissent à occuper Hims, Hamâ, Ma'arrat an‑Nu'mân, Ba'labakk et Salâmiya qu'ils évacueront deux ans plus tard, après avoir été battus par les troupes du calife. Leurs chefs, faits prisonniers, sont alors brûlés vifs à Baghdâd. Mais l'agitation continue et les Qarmates attaquent la région de Tibériade, menacent Damas et s'en prennent aux caravanes de pélerins Irakiens se rendant à La Mekke. Ils sont à nouveau battus en 908 et leurs chefs suppliciés.
Mais la situation ne se calme pas pour autant. Les Qarmates sont solidement installés au Bahrayn où Abû Sa'id al‑Djannabî avait été envoyé dès 886/273 comme dâ'î. En 900/287, les Qarmates attaquent en direction de Basra et battent une armée envoyée par le calife al‑Mu'tadid. Après 903/290, Abû Sa'id occupe le Yamâma et envahit le 'Umân ; il est assassiné en 913/301, un de ses fils, Abû Tâhir, lui succède. Il sera pendant trente ans le chef de l'Etat du Bahrayn. Après une décennie de paix, Abû Tâhir va lancer des expéditions dévastatrices contre le Sud de l'Iraq et des attaques contre la caravane
irakienne des pélerins allant ou revenant de La Mekke. En 927‑8/315, il menace même Baghdâd et parvient jusqu'en Djéziré qu'il ravage.
Deux ans plus tard, le 12 janvier 930, Abû Tâhir mène une expédition contre La Mekke ; il massacre les pélerins, saccage la ville et emporte la Pierre Noire, arrachée à la Kaba. "Dans les années suivantes, on constate un net ralentissement de l'activité militaire des qarmates, qui n'en continuent pas moins de menacer, par de fréquents raids, la route du pèlerinage" (9). Ce n'est qu'en 944/332, après la mort d'Abû Tâhir que les Qarmates du Bahrayn, après avoir rejeté des offres antérieures tant Abbâssides que Fâtimides acceptèrent contre certains avantages et une importante somme versée par les Abbâssides de restituer la Pierre Noire à la Kaba.
L'État qarmate du Bahrayn sera une menace constante pour le califat abbâsside et ses voies de communication vers le Sud ; il restera indépendant jusqu'en 1075/467. Le mouvement lui‑même ne disparaîtra qu'au VIe/XIIe siècle. Certains considèrent que des idées qarmates avaient indirectement influencé l'occident, par exemple l'hérésie cathare. Pour d'autres, les grades d'initiations de ses confréries sont "probablement à l'origine de la franc‑maçonnerie occidentale" (10).
En tout état de cause, la doctrine qarmate reste assez largement méconnue, compte‑tenu du manque de sources et du caractère ésotérique de sa littérature (comme de toute la littérature issue de l'ismâilisme). "Un fait est du moins certain : c'est l'intérêt porté par les auteurs de la secte aux classes artisanales et au monde du travail en général, à ses techniques et à son organisation. Ils exhaltent la noblesse du métier manuel" (11).
La durée exceptionnelle de l'épisode qarmate montre qu'il n'était pas inéluctable que les classes dominantes l'emportent toujours. Il montre aussi que les aspirations égalitaires et la volonté révolutionnaire ne sauraient être considérées comme des produits du XXe siècle mais qu'ils sont constitutifs de l'histoire des peuples et présents dans toutes les civilisations. Le sunnisme "entame avec la période du califat abbasside la période de son organisation définitive" (12). Dès le IXe siècle, on déclare "closes les portes de l'ijtihâd" (effort d'interprétation et d'élaboration de la loi) et on fait "de l'imitation fidèle (taqlîd) des anciens et des docteurs la base même de la foi" (13). Dès lors, le sunnisme tend à devenir une religion conservatrice alors le chiisme dans sa version ismâilienne est une religion d'espoir et de contestation, une idéologie apte à servir les intérêts des classes dominées.
La conception de la religion des ismâiliens met en avant la dimension rationaliste de l'Islam. Par sa volonté, Dieu "s'est manifesté sous la forme de la Raison universelle véritable divinité des ismâiliens ‑ dont l'attribut principal est la Science". Dès lors, l'âme "s'efforce sans cesse d'acquérir la Science, afin de s'élever à la nature de la Raison" (13). Sa transcription dans le champs politique par les Qarmates et la rencontre avec les luttes des artisans ont donné lieu à la première idéologie socialiste. Quelques siècles plus tard, la fusion du matérialisme et des mouvements du prolétariat moderne offrira une résonnance à cette première tentative audacieuse.

Août 2003
Notes
(1) La dynastie Fâtimide fut fondée en Afrique du Nord par des prédicateurs chiites... A la fin du Xe siècle, les Fâtimides gouverneront un empire incluant les Iles de la Méditerrannée, le Maghreb, l'Egypte et la Syrie. A la différence des Qarmates, ils semblent avoir assez rapidement abandonné leur discours égalitaire pour une classique politique de puissance.
(2) Maurice Lombard "l'Islam dans sa première grandeur" (Flammarion, 1971)
(3) D. et J. Sourdel "la civilisation de l'Islam classique" (Arthaud, 1968)
(4) Maurice Lombard, opus cité, p. 156
(5) La première année est selon la datation chrétienne la seconde selon la datation musulmane.
(6) Mahdî des Fâtimides. Il est connu sous ce nom dans la tradition sunnite et sous celui d'Abd Allâh dans celle des Ismâiliens.
(7) Henri Massé "L'Islam" (Armand Colin, 1957)
(8) Maurice Lombard, opus cité, p. 157
(9) Henri Laoust "Les schismes dans l'Islam" (Pavot, 1965)
(10) Henri Massé, opus cité
(11) Maurice Lombard, opus cité, p. 157
(12) André Miquel "L'Islam et sa civilisation" (Armand Colin, 1977)
(13) André Miquel : opus cité, p.102


Biographie de l'auteur trouvée sur Wikipedia:
a écrit :Raymond Debord a commencé à militer en 1977 dans les rangs du Parti communiste français et a été trésorier de la Jeunesse Comuniste du Calvados. Sa principale influence est alors la pensée du philosophe Louis Althusser.

Il quitte le PCF en 1981 pour protester contre la présence de ministre communistes au gouvernement puis revient après leur départ. Secrétaire de l’UEC à l’Université de Caen, il est poussé hors du parti en 1986 et rejoint la LCR et les JCR.

Syndiqué à l'UNEF-ID, il est un des 100 élus étudiants ayant appelé à la grève générale des universités en décembre 1986. Debord devient porte-parole des JCR après un changement de majorité puis membre du comité central de la LCR.

Il est exclu en 1992 avec la plupart des JCR pour leur défense d'une certaine orthodoxie trotskyste face à la politique de "refondation de la gauche". Les JCR constituent alors la Gauche révolutionnaire avec d’ex-membres du PCF et divers autres petits groupes. Debord en reste le porte-parole et impulse la fusion avec le Committee for a workers international, mouvement international créé par la "Militant tendancy" britannique.

La stagnation de l’organisation et le maintien d’un certain sectarisme face à la grève de masse de novembre-décembre 1995 le poussent à démissionner et à rejoindre à nouveau le PCF. Mais le terrain d’activité principal sera désormais l’organisation des couches populaires immigrées, d’abord dans le quartier de la Goutte d’Or. Ce travail débouche en 1997 sur la création de l’Association populaire d’entraide.

En 2005, Debord a rejoint le Parti socialiste et le courant Forces Militantes.


La terminologie prête en effet à la discussion: parler de mouvements "égalitaristes" est un abus de langage. En fait, il s'est agi dans tous les mouvements contestataires de remettre en cause une trop grande concentration de richesses, jamais de prôner l'égalitarisme, encore moins de promouvoir des révoltes à caractère communiste, avec ou sans guillemets.
Si on veut réfléchir à la révolte des Qarmates, il faut l'inscrire dans la première phase abbasside, qui part de 750 et s'achève en 945 avec la mise sous tutelle du califat par les Bouyides. Deux caractéristiques fortes sont à retenir pour analyser cette période:

1° dès les années 640-650, la question de l'assimilation avait dessiné deux tendances politiques, celles des Mudarites-Qaysites (ou encore Arabes du Nord) dont l'orientation est résolument expansionniste et anti-assimilationniste. Les tribus des premières conquêtes sont jalouses de leurs revenus (razzias, rente foncière, capitation sur les citadins, taxes sur les marchands) et se maintiennent à l'écart des populations conquises. Les Yéménites (ou encore Arabes du Sud) veulent marquer un temps d'arrêt dans les conquêtes et acceptent d'intégrer les populations conquises dans le jund, l'armée officielle. Ces deux options s'affrontent sur l'ensemble de l'espace musulman, d'al-Andalus au Khorassan. Les "réservoirs de population" vont être en effet très sollicités dans les luttes palatiales.

2° l'élément militaro-tribal fait et défait les califes (choisis par la famille régnante), il devient de plus en plus gourmand dans ses exigences financières et oblige le pouvoir central à lui concéder des droits de prélever les taxes sur des domanes, ce droit s'appelle l'iqtâ', il n'est - à de très rares exceptions - pas un droit de propriété et ne se transmet pas.

L'administration va être déchirée entre deux courants: ceux qui jouent la pression fiscale pour desserrer l'étreinte militaire et ceux qui cherchent à baisser les taxes au bénéfice surtout des marchands et artisans (citadins).

a écrit :le Qarmatisme, qui se confondra à ses débuts, avec le mouvement fâtimide (1) et s'étendra de l'Iran et du Golfe persique, jusqu'à l'Égypte et à l'Afrique du nord, avec des ramifications jusqu'en Espagne.


Les Qarmates ne se confondent pas avec les Fatimides, tous deux s'inspirent de l'ismaélisme (ou chiisme septimain), mais auront des parcours différents.

a écrit :Elle est portée au pouvoir par une coalition entre Arabes et Persans


Les Abbassides ne sont pas portés au pouvoir simplement par une coalition arabo-persane (terme vague s'il en est). En deux mots, le mouvement est au départ une greffe de la branche de descendants d'Abbâs (oncle du Prophète) qui prend sur un groupe de contestation chiite (la Hâchimiyya, fondée à Koufa - garnison sur l'Euphrate dans le Sawâd - au début du VIIIe): la souplesse du matériau idéologique n'est pas à sous-estimer, c'est la force de l'infrastructure. Shaban (voir infra) parle d'un "Shî'ite-Khârijite-Marwânid-'Abbâsid movement", tout en soulignant que ce changement de pouvoir ne contentera pas toutes les parties, loin s'en faut.

a écrit :Sous les Abbâssides, les grands bénéficiaires de l'essor économique et social sont la classe des marchands et les milieux de la Cour.


Parler de classe des marchands est prématuré: le commerce est souvent le fait de chefs tribaux et il est difficile de parler des marchands en tant que groupe à part entière, encore moins de classe au sens marxiste.

a écrit :Le trait dominant de la propagande colportée par les missionnaires (dâ'î, plur. du'wâ) est la revendication de l'égalité sociale ‑ encore qu'on en exclut les esclaves ‑ et de la communauté des biens.


il serait bon d'avoir des précisions sur cette "égalité sociale" revendiquée, les deux restrictions de l'auteur le réclament en tout cas.

Je passe sur l'aspect "moderne et novateur" du qarmatisme, pourquoi plus que la prédication de Muhammad face à l'enrichissement outrancier des caravaniers mecquois?

La vieille regaine sur la fermeture de la porte de l'ijtihâd est un peu usée, surtout au IXe: Râzi conteste début Xe la création ex-nihilo (Philosophie de Razi, Averroès affirme l'indépendance de la philosophie, Ibn Khaldûn jette les bases de l'histoire, mais il y aurait encore bien des intellectuels à citer... Le moment critique est plus tardif, avec la victoire de l'activisme soufi au 13e qui quitte l'ascèse pour investir les villes et les élites.

a écrit :La conception de la religion des ismâiliens met en avant la dimension rationaliste de l'Islam.
;)

au fait, peut-être faudra-t-il déplacer ce fil vers l'histoire...
abounouwas
 
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Message par yannalan » 16 Jan 2007, 07:47

Oui, pour ce qui est du côté peu intéressant du personnage, ça je savais et je signalais.
Mais je pensais qu'il avait peut-être des connaissances historiques.
Je vois que même là-dessus, c'est de l'à-peu-près.
Merci Abu Nuwas pour tes précisions.
Je n'ai pas posté ça pour faire de la pub à RD, mais je pense que même si le mouvement qarmate n'est pas communiste, il est néammoins intéressant à connaître. Si tu as quelque chose de plus documenté et intéressant, je serais preneur.
yannalan
 
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Message par Koceila » 19 Jan 2007, 12:08

D'abord je voudrai répondre à Zelda :wavey:

a écrit :(Koceila @ dimanche 14 janvier 2007 à 21:21)

Au fait, un grand poëte syrien, né au 10eme siécle et mort en 1057 disait:


a écrit :"Les habitants de la terre se divisent en deux,
Ceux qui ont un cerveau, mais pas de religion,
Et ceux qui ont une religion mais pas de cerveau."
Al Maari


Koceila...

Es-tu bien sûr de ne pas commettre un contre-sens ? Ou en tout cas de le sous-entendre ?

Est-ce une critique de la religion en général (cela me surprend au dixième siècle, même dans l'avant-garde que constitue le monde arabe, je ne pensais pas qu'il y avait des intellectuels athées) ou bien faut-il remplacer religion par "sensibilité" pour en comprendre le sens actuel ?



Je te confirme, Zelda, qu'il existait pendant tout le moyen-âge musulman, un courant athéïste, aussi bien parmi les intellectuels que parmi les gens du peuple.

Parmi les intellectuels célèbres athées, on peut citer Al Rhazi, médecin et mathématicien de la Baghdad du temps d'Ahroun Erh Rachid (le héros des Milles et une nuits); Al Rhasi est sympathique à mes yeux car non seulement il ne cachait pas ses idées, il a contribué considérablement à l'avancement des connaissances dans le domaine de la médecine (il a écrit la première encyclopédie médicale), de l'astronomie (il affirmait que le soleil est le centre du système solaire et que la terre tourne autour du soleil, il a définit les premières équations pour l'attraction, il avait écrit également des traités sur le magnétisme et le vide).
Mais surtout, il consacrait tous ses bien pour aider les gens du peuple, et c'est pour cela qu'il sera en disgrâce: il n'hésitait pas à défendre les gens du peuple et ses idées en public.

Il faut dire que malgré tout, la Baghdad du 9eme siècle n'avait rien à voir avec celle d'aujourd'hui.
- A l'époque il existait des clubs de discussion très libres où intervenaient, les musulmans des trois schismes: kharidjites, chiites et sunnites, les chrétiens de diverses églises, les juifs et les athées.

- La Baghdad de l'époque était le centre du monde, aussi bien du pointe de vue culturel, richesses architecturales, des structures médicales (hôpitaux, dispensaires pharmacies) et le gouvernement des motazilites (issus du courant Kharidjite mais réformiste, eh oui déjà) assurait une certaine tolérance religieuse et politique qui n'existait nul part ailleurs, puis quand les sunnites prendront le pouvoir cela changera.........

Parmis les athées non déclarés on peut citer Omar Kayyam, Avicennes et Avérroès qui menaient comme même un certain combat contre l'absolutisme et le fanatisme religieux.
Koceila
 
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Message par Louis » 19 Jan 2007, 12:39

il ne me semble pas que les trois derniers étaient des "athées déclarés"

Omar kayamm était plus probablement partisan de l'ancienne religion fondée par zarathoustra

avicenne était membre du shiisme ismaelien (d'ou le fait qu'il soit toujours révéré en iran, meme actuelement)

quand a avéroes (Abu'l-Walid Muhammad ibn Rushd ) je ne crois pas du tout qu'il ait été "athée" Partisan d'une certaine "indépendance" vis a vis du religieux, certes !
Louis
 
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