Mikhaïl Gorbatchev est mort !

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Mikhaïl Gorbatchev est mort !

Message par Gayraud de Mazars » 31 Août 2022, 15:38

Salut camarades,

Mikhaïl Gorbatchev vient de mourir à 91 ans. A la fin de sa vie il faisait des publicités pour pizza hut et autres activités alimentaires. Mais Gorbatchev c'était aussi le dernier dirigeant de l'Union Soviétique !

Il y a trente ans, mars 1985 : Gorbatchev au pouvoir en URSS
01 avril 2015
Dans le Journal Lutte Ouvrière n°2435
Par Pierre Laffitte

https://journal.lutte-ouvriere.org/2015 ... 36762.html

Il y a trente ans, en mars 1985, Mikhaïl Gorbatchev accédait à la tête du parti dit communiste et donc de l’État soviétique. L’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) est alors une grande puissance faisant partie, avec les États-Unis, des Deux Grands. Pourtant, fin 1991, à peine six ans plus tard, l’URSS va disparaître, ayant explosé en quinze pays indépendants, éclatés en régions souvent dressées les unes contre les autres. De sanglants conflits vont opposer et continuent d’opposer l’Arménie à l’Azerbaïdjan, la Géorgie à ses républiques autonomes, la Russie à la Tchétchénie, etc., avec, dernière en date, la guerre entre l’Ukraine et les séparatistes du Donbass.

L’arrivée de Gorbatchev au pouvoir allait donc marquer une étape décisive dans la désagrégation de l’URSS, et la destruction de ce qui restait des acquis de la Révolution de 1917. La population allait assister au pillage de l’économie par les responsables de l’administration et du parti, à l’effondrement de la production, avec comme conséquences un chômage de masse, chose inconnue en URSS, et un appauvrissement terrible pour près de 300 millions d’ex-Soviétiques.

Une page se tourne

Avec l’arrivée de Gorbatchev au Kremlin, une époque s’achevait : celle où la caste dirigeante, la bureaucratie, avait pu jouir de ses privilèges sans que cela déstabilise tout le régime.

Depuis le milieu des années 1920, dans cet État issu de la révolution ouvrière victorieuse d’Octobre 1917, l’espoir s’était évanoui d’être bientôt rejoint et épaulé par des pays développés, telle l’Allemagne, où une autre révolution prolétarienne l’aurait emporté.

Dans une URSS laissée exsangue par la guerre civile, avec une classe ouvrière épuisée et le recul des perspectives révolutionnaires internationales, la couche des administrateurs, des chefs petits et grands – la bureaucratie – réussit à exercer seule le pouvoir. Staline, le chef que les bureaucrates s’étaient donné pour briser le Parti bolchevique de Lénine et Trotsky, imposa un régime de terreur sur tout le pays, bureaucrates compris. Cette dictature personnelle, qu’ils durent supporter pendant trente ans, fut le prix acquitté par les membres de l’appareil d’État et du Parti pour asseoir leur situation privilégiée.

Après la mort de Staline en 1953, Khrouchtchev lui succéda en garantissant aux bureaucrates que c’en serait fini des méthodes expéditives contre eux. Mais la dictature ne se relâcha pas sur le reste de la société. Puis, en 1964, de hauts dirigeants de la bureaucratie, menés par Brejnev, évincèrent Khrouchtchev.

De « stagnation » en « remise en chantier »

Pendant plus de vingt ans, il s’instaura un donnant-donnant entre le Kremlin et la masse des bureaucrates. Ils pouvaient profiter de leurs privilèges et les accroître au détriment de l’économie, pourvu que cela ne perturbe ni le fonctionnement ni l’équilibre du pouvoir au sommet.

Sous cette apparente stabilité, l’économie soviétique, essoufflée car pillée de toutes parts, s’enfonçait dans la crise. Le pouvoir central réussissait de moins en moins à contrôler les agissements de son propre appareil, et se révélait impuissant à redresser la situation.

L’âge et la maladie finirent par avoir raison des hiérarques du brejnévisme et une nouvelle page s’ouvrit avec Gorbatchev. Succédant à des vieillards, il incarna, à 54 ans, la prise des commandes par une nouvelle génération et associa son nom à des réformes. Mais elles furent plus annoncées que réalisées. Si Gorbatchev déclara que l’URSS avait besoin d’une remise en chantier générale – ce que signifie le mot russe « perestroïka » – des millions de bureaucrates ne l’entendaient pas de cette oreille.

Au sommet de l’État, le nouveau dirigeant ne put conforter son pouvoir. Face à lui et contre lui, des membres du Bureau politique se plaçaient en défenseurs des pesanteurs du régime que Gorbatchev dénonçait publiquement. À tous les niveaux, nombre de bureaucrates ne voulaient à aucun prix de réformes qui, décidées dans l’intérêt collectif de leur système, pouvaient léser leurs intérêts particuliers.

Pour contourner ces blocages, au sommet puis dans des milieux de plus en plus larges de l’appareil, Gorbatchev et ses partisans cherchèrent des appuis dans d’autres couches de la société, telle que la petite bourgeoisie des grandes villes. Gorbatchev lui promit la « glasnost » (transparence des prises de décision), ce qui l’enthousiasma car elle rêvait de la fin de la censure, d’élections libres et de multipartisme… Derrière ce qu’elle appelait la démocratie, elle aspirait à vivre comme ses sœurs des pays riches, y compris à « faire des affaires », à gagner de l’argent par l’exploitation.

Sur ce terrain, Gorbatchev trouva encore plus démagogue que lui dans les sommets de la bureaucratie. Son allié au Bureau politique, Eltsine, devint son grand rival lorsqu’il promit à la petite bourgeoisie de restaurer le « marché », et à la bureaucratie de légaliser sa mainmise de fait sur les entreprises. S’étant fait élire à la tête de la république soviétique de Russie, Eltsine invita ses pairs, les chefs des autres républiques soviétiques, à « prendre autant de pouvoir qu’ils le pourraient », donc à saper le pouvoir central incarné par Gorbatchev.

Un pays et sa population livrés à la curée

En 1990, les événements s’emballèrent. Des pénuries en tout genre s’abattirent sur les consommateurs, les chefs des régions retenant dans leurs fiefs tout ce qui y était produit. Cela paralysa l’économie, organisée et fonctionnant jusque-là comme un tout centralisé et planifié à l’échelle du pays le plus vaste de la planète. Les entreprises d’État commencèrent à voir leurs biens, leur production, aspirés par des filiales privées créées tout exprès par les bureaucrates eux-mêmes.

Partout, les dirigeants prônaient l’indépendance, ici de leur république, là de leur région. Dans un pays en voie d’éclatement, jeté dans le chaos économique, politique et social, les électeurs votèrent massivement pour les indépendances, face à un système central largement associé par les populations aux maux qu’elles subissaient.

L’instauration de l’état d’urgence, en août 1991, fut une tragi-comédie. Ses responsables, une poignée de dirigeants, y renoncèrent trois jours plus tard, faute d’avoir trouvé du soutien dans leur propre appareil militaire et administratif. Eltsine et ses comparses ukrainiens et biélorusses se sentirent alors libres de porter le coup de grâce et, fin décembre 1991, ils proclamèrent la dissolution de l’URSS. Le poste de président de l’URSS, auquel Gorbatchev s’était fait élire, n’ayant plus de raison d’être, ils se débarrassaient de la tutelle d’un pouvoir central.

Les barons de la bureaucratie soviétique, autoproclamés « démocrates », avaient les mains libres, chacun dans son fief. Comme on pouvait s’y attendre, il n’y eut aucune démocratie pour la population, mais la bacchanale d’une foule de bureaucrates, d’affairistes, de mafieux lancés à la curée sur les ressources du pays. L’économie s’écroula ; des fortunes colossales s’édifièrent qui allèrent se cacher dans les paradis fiscaux ; des dizaines de millions d’ex-Soviétiques virent leur niveau de vie s’effondrer ; la mortalité grimpa en flèche tandis que les services sociaux et de santé publique disparaissaient.

Quant au délitement du pouvoir central, la fin de l’URSS n’y mit pas un terme. En Russie, il se poursuivit pendant dix ans avant que Poutine ne rétablisse une certaine autorité de l’État, à coups de trique. Avec des variantes, des régimes policiers, militarisés et corrompus se mirent en place dans les ex-républiques soviétiques. Ces systèmes dictatoriaux sont nécessaires aux nantis locaux, et aux sociétés étrangères qui font affaire dans ces pays, pour les piller et exploiter férocement leurs classes laborieuses.

Gorbatchev et ses velléités de réformer l’URSS ne firent ainsi qu’ouvrir la voie au règne des bureaucrates ex-soviétiques, des nouveaux bourgeois et des mafieux qui prospèrent dans leur ombre.


Gorbatchev : salué par les hommes de la bourgeoisie
Brève de Lutte Ouvrière
Le mercredi 31 août 2022

https://www.lutte-ouvriere.org/breves/g ... 00614.html

La mort de Mikhaïl Gorbatchev, le dernier président de l'URSS, donne lieu à une pluie d'hommages exprimés par les dirigeants des puissances occidentales. "Un homme de paix qui a ouvert un chemin de liberté aux Russes" pour Macron. "Il a permis un monde plus sûr et davantage de liberté" pour Biden.

Arrivé en 1985 au sommet de la dictature bureaucratique qui régnait sur l'Union soviétique, Gorbatchev a déchaîné des forces centrifuges qui ont conduit à l'éclatement de l'URSS en 1991 et à sa propre mise à l'écart.

Pour les habitants de ce vaste espace, "le chemin de la liberté" a signifié une plongée dans le chaos économique, la misère, les guerres. L'espérance de vie a reculé et les libertés démocratiques n'ont été qu'une promesse non tenue. Quant au "monde plus sûr", la guerre en Ukraine en témoigne...


Fraternellement,
GdM
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Re: Mikhaïl Gorbatchev est mort !

Message par Zorglub » 31 Août 2022, 18:34

Dans LO 2822 (ce jour) :
https://journal.lutte-ouvriere.org/2022/08/31/ex-urss-la-mort-de-gorbatchev_400694.html
Ex-URSS: la mort de Gorbatchev
Mikhaïl Gorbatchev vient de décéder. Il y a trois décennies, il se trouva, en tant que dirigeant de l’Union soviétique, porté au premier plan d’événements qui conduisirent à la disparition de l’URSS. On assista alors à la mise en pièces de cet État, de son économie et au vol de ses richesses par la caste dirigeante des bureaucrates dont Gorbatchev avait été le chef.

Pour 280 millions de Soviétiques il s’en suivit un chaos politique, de sanglants affrontements nationaux provoqués par les bureaucrates au pouvoir, un chômage massif et un appauvrissement terrible sur fond de régression de la société.
L’irresponsabilité de la bureaucratie à l’œuvre

Entre l’élection de Gorbatchev à la tête du bureau politique du parti dit communiste de l’URSS, en mars 1985, et l’effondrement d’un système que l’on disait tout puissant, fin 1991, il s’écoula cinq ans. Un laps de temps au cours duquel peu ou prou l’ensemble de la société entra en ébullition au fil des affrontements de pouvoir au sommet. Cette période exposa, sans le fard du prétendu socialisme stalinien, tout ce que cette bureaucratie avait de parasitaire car le pouvoir central – qui la représentait pourtant – n’avait plus les moyens de brider sa rapacité.

Les années Gorbatchev mirent à nu l’irresponsabilité congénitale de la bureaucratie à l’égard de son propre système. Le stalinisme lui avait apporté, un demi-siècle auparavant, une réponse dictatoriale, y compris pour tenir les bureaucrates à titre individuel afin de mieux servir leurs intérêts collectifs. Trotsky et l’Opposition de gauche, qui combattaient la dégénérescence de l’État ouvrier né de la révolution d’Octobre, et l’usurpation du pouvoir de la classe ouvrière par la bureaucratie, avaient alors maintes fois dénoncé cette dernière, sa rapacité et son irresponsabilité comme une des principales menaces pour l’existence même de l’URSS.

C’est ce que démontra la période 1985-1991. Car l’implosion de l’URSS ne résulta pas de la volonté de ses peuples. Au contraire, six mois avant que les rivaux russes, ukrainiens et biélorusses de Gorbatchev ne décident de dissoudre l’URSS, une majorité de la population se prononçait encore pour son maintien lors d’un référendum.

La disparition de l’URSS fut en réalité le fruit de l’activité prédatrice effrénée de millions de bureaucrates, et à leur suite d’une foule de mafieux et d’aspirants bourgeois, auxquels les difficultés de Gorbatchev à établir son pouvoir laissaient les coudées franches.
Marché de dupes et réforme impossible

Gorbatchev accéda au pouvoir alors que toute une génération de dirigeants, aux commandes depuis des lustres, était en train de disparaître. Avec ses 55 ans, il faisait figure de jeunot, bien qu’il ait déjà parcouru une longue carrière de haut bureaucrate. L’ère Brejnev (1964-1982), que Gorbatchev caractérisait comme marquée par la stagnation, l’avait convaincu que le système sur lequel prospérait la bureaucratie – avec sa corruption généralisée, son opacité, même pour ses propres dirigeants, avec les prélèvements d’une masse de bureaucrates sur l’économie étatisée et planifiée – menaçait à terme sa domination en générant toujours plus de blocages, de crises.

L’économie soviétique avait cessé de croître. Son essoufflement se manifestait notamment de la compétition militaire que les États-Unis imposaient à l’URSS. Tout comme en Afghanistan où l’armée du Kremlin affichait ses faiblesses face à des guérillas puissamment armées par l’Amérique.

En 1989, l’armée du Kremlin dut quitter l’Afghanistan. La même année, confronté à la fronde qui se généralisait en Europe de l’Est, Gorbatchev décida de laisser ces États rejoindre le giron occidental, avec la promesse des chefs de l’impérialisme – qu’ils n’ont bien sûr pas tenue – que leur bloc militaire, l’Otan, n’en profiterait pas pour avancer vers l’Est.

C’est tout cela qui vaut à Gorbatchev, encore aujourd’hui, d’être salué comme un « artisan de la paix » par les dirigeants de l’impérialisme.

En URSS même, il envisagea une refonte générale censée rendre l’économie et l’ensemble du système plus efficaces. Ce qu’il appelait perestroïka exigeait comme préalable de mettre en cause certaines rentes de situation des clans de la bureaucratie. Cela de haut en bas de l’appareil d’État, dans les régions, les républiques, dans toutes les branches de l’économie livrées à l’appétit de ces prédateurs.

Ces réformes furent à peine esquissées, mais les milieux dirigeants du pays y virent l’occasion de trouver des appuis au sein de l’appareil étatique contre Gorbatchev. Ce dernier chercha à son tour des relais dans des couches plus larges de la société, dont l’intelligentsia et la petite bourgeoisie, auxquelles il promit une large liberté de parole, la glasnost, et la possibilité de s’enrichir en légalisant de petites unités de commerce ou de production.
La foire aux démagogues

Sur ce terrain, il trouva encore plus démagogues que lui dans la bureaucratie. Ceux-ci, tel le russe Elstine, se firent l’écho des exigences croissantes d’une foule de bureaucrates et de petits bourgeois. Le pillage ouvert de l’économie étatisée s’emballa et, devant les pénuries que cela suscita partout ainsi que le discrédit qui retomba sur le pouvoir central, de hauts bureaucrates à la tête des 15 républiques de l’Union décidèrent qu’il serait plus profitable, à eux et à leur clan, de troquer la vieille étiquette du parti au pouvoir pour celle de défenseurs des intérêts de leur « nation » contre Moscou, siège du pouvoir central.

C’est pour se débarrasser de ce qui restait de la tutelle de ce dernier sur leur parasitisme que les chefs de la bureaucratie russe, ukrainienne et biélorusse décidèrent, fin 1991, de la dissolution de l’URSS.

Avec elle, Gorbatchev disparut de la scène politique. Mais pas la dictature et l’irresponsabilité de la bureaucratie : on le voit de la Russie au Kazakhstan, à l’Ukraine, etc. Pas non plus l’affrontement Est-Ouest dont on disait que Gorbatchev y avait mis un terme, alors que, on le vérifie tragiquement en Ukraine, l’Ouest impérialiste n’a en rien renoncé à imposer sa loi.

Quant à l’idéal communiste, dont les tenants du capitalisme célébrèrent en grande pompe la fin en même temps que celle de l’URSS, il n’est pas prêt de disparaître, tant qu’il y aura des militants pour le défendre et pour affirmer haut et fort que le système capitaliste ne peut pas être l’horizon indépassable de l’humanité, alors qu’il ne cesse de montrer vers quel abîme il l’entraîne.
Pierre LAFFITTE
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Re: Mikhaïl Gorbatchev est mort !

Message par Alex34 » 15 Nov 2022, 07:28

Bonjour,

Pour ma part, la politique de Gorbatchev était bien structurée, qui mettait en avant la transparence et la restructuration.
Alex34
 
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Re: Mikhaïl Gorbatchev est mort !

Message par Gayraud de Mazars » 15 Nov 2022, 08:40

Bonjour Alex,

Bienvenue sur le Forum !

Quant à la politique de Gorbatchev, si elle était, comme tu le dis, si bien structurée, comme peux - tu expliquer qu'au final ce fut un échec ?

Fraternellement,
GdM
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