le christianisme dans la société féodale naissante représentait aussi une "idéologie" unificatrice (un genre de symbole que tous pouvaient suivre, "bêtement" d'ailleurs).
Vers le 5e siècle, l'Eglise s'est institutionnalisée en prenant comme modèle administratif, la hiérarchie de l'empire romain (voir la publication : Politique et foi, collectif sous la direction de R. Metz et J. Schlick, Actes du 3e colloque du Cerdic à Strasbourg, Cerdic publications, Strasbourg, 1972 - ce doc rend bien l'interraction entre le modèle hiérarchisé de l'empire utilisé par l'Eglise pour gouverner les chrétiens en justifiant non seulement la position "gouvernementale" des chefs d'Eglises (évêques) mais aussi sa défense du pouvoir séculier, comme pouvoir venu de Dieu.
Des chrétiens ont commencé de critiquer ces dérives dès les débuts (notamment les anabaptistes) , puis au 12e et 13e siècle (les Vaudois) = tous linchés car mettaient en danger la hiérarchisation de l'Eglise romaine (catho) en même temps que l'oppression des dirigeants de l'Etat.
Vers 1400, un Tchèque, Jan Hus, critique la dérive de l'eglise romaine qui soutient le pouvoir séculier féodal en s'enrichissant sur le dos du peuple = linché car on accuse le Tchèque de vouloir soulever une révolution en Bohême. Ce n'était pas son idée ; il voulait plutot réformer les pratiques catholiques qui ne faisaient que lever l'impot etc. au même titre que les dirigeants d'Etats et n'était donc plus qu'un instrument supplémentaire à l'oppression (= remise en cause de la confusion entre pouvoir séculier et pouvoir spirituel qu'il voulait plus séparé). par contre sa condamnation au bucher va déclencher une véritable révolution nationale tchèque car on estime qu'en tuant Hus, le pouvoir du Vatican se fait le complice de l'empire allemand, les autrichiens opprimant les tchèques. Dans un 1er temps, les tchèques gagnent : ils mettent en place un pouvoir séculier indépendant de l'Autriche (en plus le dirigeant n'est pas issu de la noblesse!) mais eux aussi dérive en mettant en place une église d'Etat = eglise hussite qui existe encore et qui ne voit aucun inconvénient à soutenir un gouvernement , dès lors qu'il est tchèque. D'autres tchèques (Petr Chelcicky) se rebellent contre cette église nationale qui ne fait que remplacer l'eglise romaine sans être vraiment réformée - ou si peu - résultats : linchés aussi, on les accusent de séparatisme, d'obscurantisme, d'affaiblir la révolution hussite etc.
Vers 1530, Luther se détache de cette hégémonie romaine = pas linché car soutenu par les princes allemands. Sa théologie est basée sur la séparation totale entre pouvoir séculier et pouvoir spirituel ; prb = mène les luthériens au "laisser faire" souvent. En fait luther laisse faire quand ça l'arrange, c'est à dire quand ça ne met pas trop en question le pouvoir des princes locaux. Munzer organise contre cette position (politique à 100%) une révolte, notamment paysanne, car il estime que Luther défend les princes contre le peuples = mandat d'arrêt international lancé contre Munzer et ses potes, avec l'accord, et même l'invitation à le faire, de Luther.
En fait, on peut dire que l'eglise n'est pas qu'un instrument du pouvoir séculier, mais aussi un défenseur de ce pouvoir, voire un oppresseur supplémentaire, avec en prime un côté national, voir nationaliste.
D'ailleurs, pendant le 3e Reich, bcp de luthériens allemands soit soutiendront Hitler, soit laisseront faire.
La position de Calvin (fin 16e siècle) est un peu différente parce que s'il estime nécessaire la séparation entre pouvoir séculier et pouvoir spirituel, ses partisans ne peuvent rester très longtemps dans la "neutralité". Ils sont vite persécutés par les agents du roi, et du coup ça vire au politique : on leur reproche de vouloir destabiliser le pouvoir royal en mettant en cause la hiérarchie de l'eglise catholique (Histoire et dictionnaire des guerres de religion, collectif, Robert Laffont, collection Bouquins, 1998). Pour le coup, les calvinistes français (réformés) prennent l'habitude de ne pas restés neutres par rapport au politique. Prb = période la plus favorable aux protestants en France = 19e siècle avec association du protestantisme au capitalisme.
Après 1945, les protestants français sont favorables à une intervention de l'Etat dans l'économie mais restent attachés au système éco capitaliste. donc ferment les yeux sur les crimes de ce système tant en matière d'exploitation des richesses du tiers monde qu'en terme d'exploitation de travailleurs, même s'ils défendent une politique sociale dès la fin du 19e siècle (Klauspeter Blase, Le christianisme social, Van Dieren Editeur, Débats, Paris, 2003).
A ce moment-là plus qu'une instrumentalisation de l'Eglise par l'Etat, on peut plutot parler de pression de l'eglise sur une politique gouvernementale. Les protestants se battent alors pour qu'une loi soit votée pour la construction de logements "sociaux" (loi 1884 ? pas sure la date), pour une école laïque et gratuite pour tous... mais la liberté d'entreprise du capitalisme reste l'élément essentiel de la liberté individuelle, la garantie d'une libre expression de la création ... (mon cul!)
Dans les colonies, les protestants français sont largement installés, en position relativment favorables, et se font souvent les agents de la politique française (seule différence est le ton utilisé, très paternaliste chez les protestants français, on ne fait pas obéir les colonisés à coup de fouet, on leur dit plutot que c'est par amour fraternel qu'ils doivent rester dans l'obéissance). Enfin, quand éclate la guerre d'Algérie, certains sont qd même dans l'oas!! mais d'autres soutiennent le fln.
Des protestants dénoncent alors la dérive protestante similaire à la dérive de l'eglise catholique à l'époque féodale. Pour eux les chrétiens ne peuvent pas soutenir le système capitaliste car ce système est responsable des exploitations impérialistes etc. Ils ne défendent pas tant l'idée d'un christianisme apolitique, comme ceux d'après 1945 cité ci-dessus, mais plutot un engagement politique favorable à l'émancipation du peuple, pour une eglise ouverte à tous, et pas seulement au service de la bourgeoisie. Quelques noms : Georges Casalis (fr) et Josef Lukl Hromadka (tchèque) = théologie socialiste, ou théologie de la libération. Mais ce n'est plus de l'utilisation de l'Eglise...
bon , je crois que je me suis un peu laissée aller...