Renouveller, réviser
Le "marxisme", le matérialisme historique, une sociologie de l'histoire, qu'importe le terme… Mais notre outil à nous, le marxisme ne pourra être invalidé que par des faits historiques qui l'invalideront, et non pas par quelque brillant analyste d'un groupe social.
Où sont les faits historiques qui réclameraient un renouvellement du marxisme, qui justifieraient sa révision ?
Le stalinisme ? le fascisme ? Nos outils ont été à la hauteur.
Le bureau des réclamations est ouvert.
Une ligne, juste une, avec une connerie
« Lis ça, tu vas te marrer... — Quoi ? — L'article du journal, là. — Tout ? — Non mais la fin, ça vaut le jus... — Toute la fin ? — Non, juste ces deux lignes-là ! — Les deux ? — Dis donc, t'aimes pas lire, toi ! » (Jean-Marie Gourio, "Brèves de comptoir")
Parfois, par boutade, je dis que faut trop se bourrer le mout, que y'a qu'à lire une des premières phrases du Manifeste, ça suffit largement.
« L'histoire de toute société jusqu'à nos jours n'a été que l'histoire de luttes de classes. »
Hélas ! Cette phrase contient une connerie ! On inaugure mal notre conception matérialiste de l'histoire. Il y a eu des sociétés sans classes, des sociétés qui ne disposaient pas d'un surplus social suffisant pour le partager inégalitairement.
Mais, dans l'édition de 1888, y'a un enrichissement à la phrase :
« L'histoire de toute société jusqu'à nos jours* n'a été que l'histoire de luttes de classes. »
Oui, Engels ajoute modestement une note, en bas de page :
« * Ou plus exactement l'histoire écrite. En 1847, l'histoire de l'organisation sociale qui a précédé toute l'histoire écrite, la préhistoire, était à peu près inconnue. [...] » (Note d'Engels, édition anglaise de 1888)
Le marxisme sait s'enrichir, sans tambours ni trompettes. Nous n'avons pas attendu la permission de l'un ou la directive de l'autre, et nous savons mieux que quiconque nous enrichir nous-même. Relisons, par exemple, le texte de Léon Trotsky sur les "90 ans de Manifeste communiste", pour voir ce qu'est un marxisme vivant – sans conférence de presse.
Lutte des classes
…n'a été que l'histoire de luttes de classes. »Toujours cette satanée phrase unique.
La lutte des classes… oui, c'est ça qui est au fronton de notre édifice à nous. Et dans nos sociétés, la lutte des classes la plus aigüe, c'est la lutte entre le prolétariat et le capitalisme.
Le prolétariat est la classe révolutionnaire de notre société, en ce sens que seule, cette classe, par sa position dans le domaine de la production des richesses, peut réellement révolutionner complètement la société en bousculant la classe dominante.
Ça ne se négocie pas.
Et toute discussion, toute divergence, n'est que le reflet de cette lutte des classes.
Y'a pas à tortiller du nez, à remuer la croupe :
… reflet de cette lutte des classes – dans le sens ou on ne trouve, en fin de compte, à travers les divers prismes déformant du débat, que le reflet de divergences sur l'importance accordé à la classe ouvrière, aux travailleurs dans le processus de transformation de la société.
Et notre causerie, messieurs dames, n'est que ça. Sommes nous d'accord ?
Je vous laisse la dessus : une phrase, rien qu'une, une phrase du Manifeste, avec une connerie dedans.