
Trouve dans le bouquin de Broue:
"La nouvelle apposition communiste en Union Soviétique n'est pas née de l'affaire tchécoslovaque, qui a seulement donné l'occasion d'organiser ses premières initiatives publiques et l'a contrainte à rompre avec la clandestinité totale des petits groupes d’initiés. La tradition qui la nourrit est en effet fort ancienne puisqu'elle remonte au bolchevisme lui-même.
Au cœur du noyau qui la constitue et l'inspire se trouve un homme, qui symbolise cette continuité, un vétéran du bolchevisme, rescape des camps staliniens. Alexis Kosterine. Né en 1895, militant ouvrier depuis 1911, membre du parti bolchevique depuis 1916, ancien combattant de la guerre civile, puis journaliste, Kostérine, arrêté au temps des grandes purges staliniennes, a été détenu dans divers camps de concentration jusqu'en 1955. Son nom est connu de tous les Russes, puisque le journal de guerre de sa fille Nina Kostérina, a été une sorte de « best-seller » de l'époque du dégel. Réintégré dans le parti à sa libération, à nouveau exclu en 1957, réintégré de nouveau, Kostérine devait être exclu une nouvelle fois en 1968. A la veille de sa mort, au lendemain de l'intervention en Tchécoslovaquie, il rédige une lettre de démission dans laquelle il affirme notamment : « Avec ou sans la carte du parti, j'étais je suis je serai marxiste-léniniste, communiste, bolchevik. Telle est ma vie, de ma jeunesse à ma tombe » [6].
C'est autour de cet homme que s'est constituée la tête de cette opposition communiste qui apparaît au grand jour en 1968, des hommes de toutes générations et de toutes conditions, mais tous marqués par leur attachement au bolchevisme et à la tradition révolutionnaire d'Octobre. Ce sont Pavel Litvinov, âgé à l'époque de vingt-huit ans, le petit-fils du vieux-bolchevik, assistant de physique; Pierre Iakir, quarante-cinq ans, fils du héros de la guerre civile fusillé en même temps que Toukhatchevski, lui-même en camp de concentration de 1937 - à quatorze ans - jusqu'en 1954, réintégré dans le parti à sa libération chercheur à l'institut d'histoire de l'Académie des sciences ; Pierre Grigorenko, cinquante-neuf ans, militaire de carrière ancien combattant de la deuxième guerre mondiale, général de brigade, professeur de cybernétique : sanctionné par Khrouchtchev en 1961, arrêté, et interne dans un « hôpital psychiatrique » en 1964, libéré, travaillant comme ingénieur, puis comme débardeur; Ivan Iakhimovitch, trente~huit ans, ancien président d'un kolkhoze modèle de Lettonie, longtemps figure de proue de la propagande officielle, rallié à l'opposition au début de 1968 ; Anatole Martchenko, le docker, auteur d'une remarquable récit [7] sur les camps de concentration post-staliniens dans lesquels il avait déjà passé plus de six ans. Ce sont aussi des femmes comme Larissa Bogoraz, enseignante, compagne de l'écrivain Iouli Daniel, comme la poétesse Natalia Gorbanevskaja, les étudiantes - de vingt ans - Olga Joffé, Irina Iakir, Valérie Novovordskaja, Irina Belgorodskaja, Irina Kaplan. Des hommes de tous les milieux sociaux, les mathématiciens Pavhntchouk [8], Pissarev, Pimenov, les enseignants Iouli Kim et Ilya Gabaï, l'étudiant-détenu politique Vladimir Boukovsky, les étudiants Ponomarev, Kapranov, Jiltsov, les ouvriers Borissov, Guerchouni, Djemilev, Vorobiev, les historiens Alexandre Snegov. Léomde Petrovski, petit-fils du vieux-bolchevik, Roy Medvedev, chargé par Khrouchtchev d'écrire un « bilan du stalinisme » qui ne put voir le jour qu'en samizdat - et des centaines d'autres dont les noms nous sont ou non parvenus.
Car ces hommes et ces femmes, entre lesquels Kostérine constitua le lien et dont il fut le véritable maître à penser, ont su, à leur tour, gagner et former des disciples qui surgissent au fur et à mesure des arrestations et des internements, et prennent la place des militants tombés".
http://www.marxists.org/francais/broue/wor...e_pbolch_22.htm
"La nouvelle apposition communiste en Union Soviétique n'est pas née de l'affaire tchécoslovaque, qui a seulement donné l'occasion d'organiser ses premières initiatives publiques et l'a contrainte à rompre avec la clandestinité totale des petits groupes d’initiés. La tradition qui la nourrit est en effet fort ancienne puisqu'elle remonte au bolchevisme lui-même.
Au cœur du noyau qui la constitue et l'inspire se trouve un homme, qui symbolise cette continuité, un vétéran du bolchevisme, rescape des camps staliniens. Alexis Kosterine. Né en 1895, militant ouvrier depuis 1911, membre du parti bolchevique depuis 1916, ancien combattant de la guerre civile, puis journaliste, Kostérine, arrêté au temps des grandes purges staliniennes, a été détenu dans divers camps de concentration jusqu'en 1955. Son nom est connu de tous les Russes, puisque le journal de guerre de sa fille Nina Kostérina, a été une sorte de « best-seller » de l'époque du dégel. Réintégré dans le parti à sa libération, à nouveau exclu en 1957, réintégré de nouveau, Kostérine devait être exclu une nouvelle fois en 1968. A la veille de sa mort, au lendemain de l'intervention en Tchécoslovaquie, il rédige une lettre de démission dans laquelle il affirme notamment : « Avec ou sans la carte du parti, j'étais je suis je serai marxiste-léniniste, communiste, bolchevik. Telle est ma vie, de ma jeunesse à ma tombe » [6].
C'est autour de cet homme que s'est constituée la tête de cette opposition communiste qui apparaît au grand jour en 1968, des hommes de toutes générations et de toutes conditions, mais tous marqués par leur attachement au bolchevisme et à la tradition révolutionnaire d'Octobre. Ce sont Pavel Litvinov, âgé à l'époque de vingt-huit ans, le petit-fils du vieux-bolchevik, assistant de physique; Pierre Iakir, quarante-cinq ans, fils du héros de la guerre civile fusillé en même temps que Toukhatchevski, lui-même en camp de concentration de 1937 - à quatorze ans - jusqu'en 1954, réintégré dans le parti à sa libération chercheur à l'institut d'histoire de l'Académie des sciences ; Pierre Grigorenko, cinquante-neuf ans, militaire de carrière ancien combattant de la deuxième guerre mondiale, général de brigade, professeur de cybernétique : sanctionné par Khrouchtchev en 1961, arrêté, et interne dans un « hôpital psychiatrique » en 1964, libéré, travaillant comme ingénieur, puis comme débardeur; Ivan Iakhimovitch, trente~huit ans, ancien président d'un kolkhoze modèle de Lettonie, longtemps figure de proue de la propagande officielle, rallié à l'opposition au début de 1968 ; Anatole Martchenko, le docker, auteur d'une remarquable récit [7] sur les camps de concentration post-staliniens dans lesquels il avait déjà passé plus de six ans. Ce sont aussi des femmes comme Larissa Bogoraz, enseignante, compagne de l'écrivain Iouli Daniel, comme la poétesse Natalia Gorbanevskaja, les étudiantes - de vingt ans - Olga Joffé, Irina Iakir, Valérie Novovordskaja, Irina Belgorodskaja, Irina Kaplan. Des hommes de tous les milieux sociaux, les mathématiciens Pavhntchouk [8], Pissarev, Pimenov, les enseignants Iouli Kim et Ilya Gabaï, l'étudiant-détenu politique Vladimir Boukovsky, les étudiants Ponomarev, Kapranov, Jiltsov, les ouvriers Borissov, Guerchouni, Djemilev, Vorobiev, les historiens Alexandre Snegov. Léomde Petrovski, petit-fils du vieux-bolchevik, Roy Medvedev, chargé par Khrouchtchev d'écrire un « bilan du stalinisme » qui ne put voir le jour qu'en samizdat - et des centaines d'autres dont les noms nous sont ou non parvenus.
Car ces hommes et ces femmes, entre lesquels Kostérine constitua le lien et dont il fut le véritable maître à penser, ont su, à leur tour, gagner et former des disciples qui surgissent au fur et à mesure des arrestations et des internements, et prennent la place des militants tombés".
http://www.marxists.org/francais/broue/wor...e_pbolch_22.htm