"Qu'étaient les brigades internationales?" interroge l'article de Lutte ouvrière choisi pour illustrer cet éphéméride à l'occasion d'une cérémonie officielle à Madrid pour commémorer leur création.
Formées à l'initiative de l'Internationale communiste stalinienne, elles ne furent pour nombre de militants et d'engagés qu'un substitut d'une politique révolutionnaire dont Staline soucieux à ce moment d'un rapprochement inconditionnel avec les puissances impérialistes dites démocratiques (Pacte Laval-Staline) ne voulait à aucun prix.
Elles ne furent qu'un pion dans la restauration d'un état bourgeois espagnol bien mis à mal par la contre-offensive ouvrière au coup de force de Franco qui déclencha une révolution sociale et imposa à Franco une longue guerre de reconquête non prévue.
Il y a quelques mois paraissaient traduits en français les souvenirs écrits en yiddish d'un brigadiste juif polonais Sygmunt Stein.
Replié à Prague Stein travaille pour la revue de propagande du Birobidjan, un petit bout de Sibérie orientale très peu peuplée et offerte par Saline à la colonisation juive.
Ce projet bureaucratique tourne court, les procès de Moscou ébranlent plus d'un militant et l'air des bureaux du Komintern n'est pas des plus purs.
Stein décide de partir pour l'Espagne espérant y retrouver le combat pour les idéaux qui illuminèrent sa jeunesse et décidèrent du cours de sa vie.
Détaché à la propagande au QG des brigades, il découvre l'hystérie colérique paranoïaque de Marty, l'impéritie d'une bureaucratie irresponsable championne dans le communiqué bidon, les agapes orgiaques des chefs démoralisés et corrompus, les exécutions sommaires d'opposants réels ou supposés.
Dans le même temps les brigadistes sont envoyés à l'assaut des lignes franquistes, mal armés, mal équipés, y remportent souvent des succès certains mais au bout du compte inutiles.
Stein le vivra, combattant dans la compagnie juive Botwin, qui comptait 120 hommes envoyés à l'assaut sur un bout du front d'Estramadure avec un fusil pour dix hommes.
18 survécurent!
La déception de Stein sera immense à la hauteur de ses espoirs. Le révolutionnaire, le communiste en reviendra définitivement brisé.
Et la voilà la grande saloperie du stalinisme comme Stein l'écrivit en 1961:"dans le monde entier, le stalinisme a démoralisé le mouvement ouvrier et ouvert la voie à l'hitlérisme en Allemagne".
Ce témoignage est précieux et montre cruellement tout un visage du stalinisme et de ses légendes, mais trop limité au parcours d'un individu pour permettre la compréhension de la révolution espagnole, les objectifs politiques et sociaux contre-révolutionnaires des partis du Front populaire.
Ma guerre d'Espagne, Sygmunt Stein (édit.: du Seuil, 19 euro).