Maurice Rajsfus...

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Message par artza » 13 Juin 2020, 21:57

...est décédé (les infos).
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Re: Maurice Rajsfus...

Message par Byrrh » 13 Juin 2020, 22:20

Souvenir de lui en 2002 : je devais le faire venir en Lorraine pour qu'il présente deux de ses ouvrages, Paris, 1942. Chroniques d'un survivant (éd. Noésis) et La Rafle du Vél d'Hiv (coll. Que sais-je ?). Il m'avait donné rendez-vous à Paris pour une première rencontre, devant la fontaine de la place Saint-Michel. Ensuite, nous avions parlé en marchant, et il m'avait en quelque sorte fait visiter le quartier. Nous nous étions séparés prés de la place de la Sorbonne, après qu'il m'avait montré un immeuble, en face de ce qui était encore les PUF : une boutique de fringues quelconque ; mais qui avait été une librairie collaborationniste sous l'Occupation, et que les FTP-MOI avaient dynamitée en 1942...
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Re: Maurice Rajsfus...

Message par com_71 » 13 Juin 2020, 23:01

Le Parisien a écrit :Disparition de l’écrivain et historien Maurice Rajsfus
Spécialiste des violences policières à partir de 1968, il fut l’un des créateurs du mouvement « Ras l’Front », lancé pour lutter contre les idées du Front national.

Le 13 juin 2020

Il avait entrepris à partir de 1968 de recenser inlassablement les violences policières. L'écrivain, journaliste, militant et historien Maurice Rajsfus s'est éteint samedi, à l'âge de 92 ans.

« Infatigable militant antiraciste et antifasciste, Maurice Rajsfus fut un des créateurs de "Ras l'Front" au début des années 1990 et animateur du bulletin "Que fait la police ?" qui dénonça pendant près de 25 ans les violences et l'arbitraire policier », indique son fils, Marc Plocki, qui a annoncé son décès.

« Maurice Rajsfus vient de nous quitter après un combat inégal de six semaines contre la maladie. Nous poursuivrons ses combats pour la justice et l'émancipation. Ami, ta rage n'est pas perdue ! », ont réagi Les Éditions Libertalia, qui l'avaient édité.

Rescapé à 14 ans de la rafle du Vel d'Hiv'

En tant qu'historien, il s'intéressa la Rafle du Vél d'Hiv à laquelle il avait réchappé à l'âge de 14 ans. Il se fit connaître par un premier ouvrage sur l'U.G.I.F. (Union générale des israélites de France) intitulé « Des juifs dans la collaboration ».

Cité comme témoin de la défense au procès de Maurice Papon, il avait refusé d'obéir à la convocation et avait finalement été dispensé. Défenseur de la cause palestinienne, il fit plusieurs séjours au Proche-Orient et publia plusieurs ouvrages sur le sujet au milieu des années 1990.

Auteur d'une soixantaine de livres, il avait récemment confié à Libération son souhait de vouloir transmettre ses archives d'articles autour de violences policières, méticuleusement constituées de 1968 à 2014.

https://www.leparisien.fr/societe/dispa ... 335050.php
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Re: Maurice Rajsfus...

Message par Gayraud de Mazars » 14 Juin 2020, 06:24

Salut camarades,

Je me souviens très bien de Maurice Rajsfus, avec la Ligue et Ras l’Front il me semble dans les années 90, il était venu à l'Université de Dijon faire une conférence. C'était un moment émouvant !

Fraternellement
"Un seul véritable révolutionnaire dans une usine, une mine, un syndicat, un régiment, un bateau de guerre, vaut infiniment mieux que des centaines de petits-bourgeois pseudo-révolutionnaires cuisant dans leur propre jus."
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Re: Maurice Rajsfus...

Message par Gayraud de Mazars » 14 Juin 2020, 06:56

Salut camarades,

Nathalie Arthaud on Twitter

"Pensée émue après la disparition de #MauriceRajfus, survivant de la Rafle du Vel d'Hiv, combattant infatigable contre toutes les oppressions coloniales, racistes, policières, contre toutes les injustices de cette société. Au-revoir camarade."


Fraternellement,
GdM
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Re: Maurice Rajsfus...

Message par Byrrh » 14 Juin 2020, 07:40

Byrrh a écrit :Nous nous étions séparés prés de la place de la Sorbonne, après qu'il m'avait montré un immeuble, en face de ce qui était encore les PUF : une boutique de fringues quelconque ; mais qui avait été une librairie collaborationniste sous l'Occupation, et que les FTP-MOI avaient dynamitée en 1942...

Librairie "Rive gauche", dirigée par des Français (dont Maurice Bardèche et Robert Brasillach) et des nazis, 8 place de la Sorbonne (47 boulevard Saint-Michel). Il y eut deux attentats : le 21 novembre 1941, bombes lancées à travers les vitrines par des jeunes du PC autour du futur colonel Fabien ; puis le 9 novembre 1942, nouvel attentat par Thomas Elek (qui sera fusillé en 1944 avec Manouchian) et son jeune frère de 12 ans, Béla : bombe incendiaire cachée dans un exemplaire évidé du... Capital.
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Re: Maurice Rajsfus...

Message par Ottokar » 14 Juin 2020, 08:07

Oui, je partage l'émotion, c'était un homme qu'on respectait, qui venait à nos fêtes et saluait Arlette dans les manifs
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Re: Maurice Rajsfus...

Message par com_71 » 22 Juin 2020, 17:42

Extrait d'un article de "Convergences"
Son livre de 1980 : Des Juifs dans la collaboration

Tout cela fait un peu oublier le coup de tonnerre que suscita, en 1980, son premier livre Des Juifs dans la collaboration, l’UGIF (1941-1944), préfacé par l’historien Pierre Vidal-Naquet [1]. Commencées quatre ans plus tôt, ses recherches portaient alors sur le rôle joué par certains notables juifs dans l’Union générale des israélites de France (UGIF), une organisation mise sur pied par Pétain à la demande du chef de la SS, Theodor Dannecker, Jüdenreferent (référent des Juifs) et collaborateur d’Adolf Eichmann, d’abord pour encadrer et ficher la communauté juive pour ensuite la déporter plus facilement.

Au nom « du moindre mal » les dirigeants de l’UGIF (dont certains furent plus tard eux-mêmes déportés vers les camps de la mort) rendaient régulièrement des comptes au Commissariat général aux questions juives de Vichy. Ils furent parmi les plus zélés à demander à la population juive de s’enregistrer dans les commissariats de police, de porter l’étoile en zone occupée, de faire tamponner la mention « Juif » sur leurs cartes d’identité en zone libre, voire d’inciter les autorités vichystes à épargner les Juifs français pour s’en prendre plutôt aux Juifs étrangers.

Cerise sur le gâteau, à la veille de la grande rafle du Vél d’Hiv à Paris, les 16 et 17 juillet 1942 – au cours de laquelle plus de 13 000 Juifs (hommes, femmes et enfants) furent arrêtés avant d’être déportés – des organisations juives proches du Parti communiste français, qui avaient eu vent de l’opération qui se préparait, diffusèrent des tracts en français et en yiddish mettant en garde la population. Lorsque certains, légitimement inquiets, contactèrent alors l’UGIF, cette dernière les rassura en affirmant qu’il s’agissait simplement de « propagande communiste ». Or les dirigeants de l’UGIF étaient parfaitement au courant de la rafle projetée. Mieux, c’est dans un de leurs locaux, situé au 29, rue de la Bienfaisance (Paris 8e), que furent confectionnées les étiquettes destinées aux enfants qui seraient séparés de leurs parents arrêtés et confiés à des orphelinats ou parqués dans des camps provisoires.

De plus la direction de l’UGIF fournissait – tant au gouvernement de Vichy qu’à l’Occupant – des listings détaillés de la population juive avec nom, adresse, profession, situation familiale, le tout décliné par commune et, à Paris, par arrondissement, en plus des listes des enfants hébergés dans ses centres qui devinrent ainsi de véritables souricières.

Et jusqu’au bout, par légalisme, naïveté ou peur des représailles, les dirigeants de l’UGIF refuseront de disperser ces enfants comme le lui demandaient des mouvements juifs de la Résistance qui se disaient d’ailleurs prêts à collaborer à cette tâche. C’est ainsi que fin 1944 fut arrêtée et périt une grande partie des 300 à 400 enfants regroupés dans les 11 centres de l’UGIF à Paris et en région parisienne. Bref, des dirigeants de l’UGIF prêtaient main forte aux bourreaux avant de devenir victimes à leur tour.

Maurice Rajsfus ou des résistants comme Adam Rayski, ancien responsable du journal communiste clandestin en yiddish Unser Wort (Notre parole), considéraient donc cette organisation comme un simple appendice de Vichy, impliquée de facto dans le processus de déportation dont elle fut complice.

Cette prise de position radicale ne fut pas du goût de tout le monde. Les dirigeants de la communauté juive, et notamment ceux du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) préféraient laver leur linge sale en famille et infligèrent un simple blâme pour conduite imprudente aux dirigeants de l’UGIF qui avaient survécu.

Pour eux il était important de montrer l’image d’une « communauté juive unie dans le malheur » en gommant les différences de classe qui se manifestaient, même dans ces circonstances dramatiques.

Rajsfus, qu’il était difficile d’attaquer comme « antisémite » dans la mesure où, issu d’une famille juive polonaise, il était lui-même, avec sa sœur, un rescapé de la rafle du Vél d’Hiv (au cours de laquelle ses parents avaient été déportés à Auschwitz), fut donc boycotté et mis sur la touche. Il était d’autant moins en odeur de sainteté dans ces milieux largement sionisants qu’il avait toujours affiché son entière solidarité avec le peuple arabe de Palestine.

Aujourd’hui tout cela est un peu oublié. Mais, dès ce premier livre, Maurice Rajsfus démontra qu’esprit libre et indépendant, il n’hésitait pas à s’attaquer aux tabous, même – et surtout – si cela dérangeait. Et c’est une attitude qui fut la sienne sa vie durant.

https://www.convergencesrevolutionnaire ... ?navthem=1
Un lien pour le ebook en .epub : http://dl.free.fr/mWGfxVlEH
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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