Dans LO cette semaine
a écrit :La direction de la CGT et Total : Les travailleurs de Dunkerque lâchés pour quelques tables rondes avec les patrons
Dès le mardi 23 février, à l'issue de la négociation avec la direction de Total et avant même le vote des grévistes, la direction des syndicats CGT du groupe Total annonçait sa décision de « suspendre » le mouvement déclenché dans l'ensemble des raffineries. Mais qu'est-il donc sorti de ces négociations de si positif, justifiant une décision aussi rapide ?
Un tract signé par la coordination des syndicats CGT du groupe Total tente de l'expliquer, répétant le mot « obtenu » en caractère gras dix fois sur les deux pages.
On trouve ainsi, dans les soi-disant avancées, la promesse faite par la direction de Total d'un « plan d'investissement sur cinq ans pour l'ensemble des raffineries, présenté et discuté avec les représentants du personnel ». Mais quel plan et quel engagement ? Dans combien d'entreprises ce genre de plan d'investissement a précédé un plan de licenciements ?
On peut relever aussi, dans cette longue liste de ce qui a été « obtenu » par la CGT : « une table ronde sous la présidence de Monsieur le préfet de la région avec l'ensemble des acteurs économiques, sociaux, politiques et syndicaux du bassin dunkerquois », « une table ronde nationale avec le ministère de l'Industrie, l'UFIP, les organisations syndicales, sur l'avenir du raffinage et ses enjeux pour la France et nos emplois », « un comité européen, avec la possibilité de désigner une expertise portant sur l'ensemble du raffinage européen ».
Et comme ce texte ne pouvait pas ne pas parler des travailleurs de la raffinerie de Dunkerque, il proclamait fièrement que Total s'était engagé « à ce que toutes les options, y compris celle de la poursuite de l'activité de raffinage à Dunkerque, soient abordées ». Un engagement de Total qui ne l'engageait en fait à rien, mais qui était lui aussi suivi d'un « obtenu » triomphant.
Autrement dit, il n'a été question que des réunions autour d'une table avec la direction de Total sur la politique que les patrons entendent mener. La direction de la CGT entend faire passer pour une victoire le fait qu'elle puisse discuter avec les patrons, qui feront évidemment ce qu'ils veulent, de leur « stratégie industrielle ».
Et c'est pour cela que les dirigeants syndicaux ont laissé seuls les travailleurs de la raffinerie de Dunkerque face aux patrons de Total. Au moment où le mouvement solidaire des raffineries du groupe montrait qu'il aurait peut-être été possible d'imposer la garantie de l'emploi et du salaire pour l'ensemble des travailleurs.
Aline RETESSE
a écrit :Raffinerie - Feyzin (Rhône) Une reprise au goût amer
Les travailleurs de la raffinerie Total de Feyzin s'étaient mis en grève le 17 février, en solidarité avec ceux de la raffinerie des Flandres, décidant la grève illimitée et cessant la production. Lundi 22, ils avaient même mis en route les procédures d'arrêt total de la raffinerie, qui s'est donc retrouvée complètement arrêtée mercredi 24 février au matin.
Mais c'est ce jour-là, alors que la grève se durcissait et tenait bon, qu'est arrivée la consigne des dirigeants syndicaux nationaux de Total de la suspendre. À l'assemblée générale de 13 h 30, la nouvelle était déjà connue par les médias et les 300 grévistes présents voulaient comprendre.
En fait, beaucoup n'ont guère été convaincus par les arguments syndicaux prétendant que tout avait été obtenu. Un certain nombre de grévistes se sont exprimés pour dire leur mécontentement, dire qu'ils étaient partis pour aller jusqu'au 8 mars, jour de la réunion du Comité central d'entreprise, que les dirigeants syndicaux disent une chose un jour et autre chose le lendemain, que l'objectif de faire redémarrer les Flandres n'était pas atteint, que Total avait mis un genou à terre et qu'en continuant il était possible de lui faire mettre les deux, et qu'ils étaient sceptiques quant à la possibilité de redémarrer le mouvement après le 8 mars.
Tous ceux qui ont ainsi exprimé leur sentiment de ne pas être allés jusqu'au bout des possibilités de la grève ont été applaudis. Mais les travailleurs ne se sentaient pas de poursuivre la grève sans le soutien des directions syndicales nationales, et éventuellement seuls (à part les Flandres), puisqu'ils ont appris à l'assemblée générale que la raffinerie de la Mède, dans les Bouches-du-Rhône, avait déjà décidé de reprendre le travail.
Ils ont donc voté la suspension de la grève à 95 %. Mais beaucoup l'ont fait avec amertume et un grand sentiment d'inachevé.
Correspondant LO
a écrit :Raffinerie des Flandres - Dunkerque : Pour la garantie de l'emploi et des salaires, la grève continue !
Les travailleurs de la raffinerie des Flandres Total de Dunkerque ont voté la grève jusqu'au 8 mars, date à laquelle doit se réunir le Comité central d'entreprise (CCE). Ils sont toujours nombreux aux assemblées de grévistes. Bien sûr, beaucoup d'entre eux ont pris comme un coup de massue le 23 février l'appel par la CGT, après la CFDT, à suspendre le mouvement de grève des cinq autres raffineries Total commencé le 17 février.
Celui-ci, qui bloquait toute une partie de la production française de carburant et inquiétait fortement les patrons et le gouvernement, semblait pouvoir s'étendre aux raffineries d'Exxon-Mobil et peut-être à l'ensemble du secteur pétrolier du pays.
Cela tendait déjà à montrer la force qu'a la classe ouvrière, quand les travailleurs s'engagent dans des luttes qui tendent à se généraliser, surtout dans un secteur déterminant du fonctionnement de l'économie. Si le pays s'arrêtait faute de carburant dans les stations-service, les profits capitalistes pouvaient être menacés. Et surtout cela pouvait aussi servir d'exemple à d'autres travailleurs dans d'autres secteurs.
Le coup d'arrêt donné au mouvement par les directions syndicales n'en a été que plus durement ressenti. D'autant plus que la proposition de reprendre le travail a été lancée par la CGT avant même le vote des grévistes... Quant à la principale justification invoquée pour appeler à reprendre le travail - la pérennité pour cinq ans des raffineries autres que Dunkerque - elle apparaît pour le moins légère. L'objectif premier de la grève était l'avenir de Dunkerque et n'a pas été atteint. Et aussi qui peut faire confiance à l'engagement des dirigeants de Total ? Le coordinateur central de la CGT de Total lui-même déclarait lors de la manifestation du 1er février que « Total est le champion des promesses non tenues » !
Alors, si les dirigeants de Total se sentent en situation de force, ils pourront invoquer n'importe quel prétexte pour revenir sur leur parole et tenter de fermer une ou plusieurs autres raffineries, s'ils pensent que cela augmentera les profits des actionnaires.
Tout le monde attend maintenant le CCE du lundi 8 mars à Paris, au cours duquel la direction doit annoncer son plan pour l'avenir des salariés de la raffinerie des Flandres. Une manifestation groupant des travailleurs de toutes les raffineries Total du pays est prévue.
Pour les grévistes de Dunkerque, il n'y a qu'un projet acceptable : la réalisation du grand arrêt initialement prévu en mars pour mettre les installations à niveau, et le redémarrage de la raffinerie.
Total y perdrait de l'argent ? Mais cette année il s'apprête à verser aux actionnaires le même dividende que l'an passé, alors qu'il a fait des profits de 8 milliards, contre 14 en 2008. Il garantit donc les revenus des actionnaires malgré la baisse de ses profits. Alors pourquoi ne répartirait-il pas le travail entre les différents sites, en garantissant leur emploi et leurs salaires aux travailleurs de Total Dunkerque et aux sous-traitants ?
Serge VIARD
a écrit :8 milliards pour Total : Et ils n'en ont pas assez !
La direction de Total a tenté de justifier son projet de fermeture de la raffinerie des Flandres de Dunkerque par les « surcapacités » de raffinage face à une « consommation en baisse ». Total « perdrait » ainsi tous les mois, selon ses dires, environ 100 millions d'euros dans le raffinage en France. Mais cette séparation au sein du groupe, entre un secteur qui serait en perte et d'autres qui ne le seraient pas, a tout de l'arbitraire. À ce qu'on sait, Total gagne de l'argent, et pas qu'un peu.
Même si cela était vrai, ce dont on peut douter, sur une année la supposée perte s'élèverait donc à 1 milliard 200 millions. Or les bénéfices globaux de Total pour l'année 2009 se sont élevés à 8 milliards d'euros, et depuis l'année 2000 le groupe a réalisé 100 milliards d'euros de bénéfices. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il reste largement de quoi maintenir tous les emplois.
Mais, comme le déclarait Christophe de Margerie dans le Figaro du 2 mars : « L'important c'est d'avoir une société qui se porte bien. 8 milliards d'euros en 2009 c'est peut-être, sans provocation, pas assez. » C'est bien cela le problème : les capitalistes n'en ont jamais assez.
A. R.