MOULINS
Social
jeudi 8 avril 2010 - 15:55
Les salariés de Vivanco, dans l'Allier, menacent de faire exploser leur usine
vivanco
L'agneau est devenu loup. Très modérés depuis la liquidation de Vivanco, il y a tout juste un mois, les ex-salariés brandissent la menace de faire exploser leur usine de Neuilly-le-Réal : « La seule façon d'être entendus ».
Dévorés tout crus par un groupe allemand « sans scrupules », les ex-Vivanco avaient pourtant tout accepté dans l'unique espoir de sauver leur emploi. Gel des salaires, absence de formation et licenciements économiques n'ont pas enrayé la marche forcée vers la liquidation judiciaire.
Le couperet est tombé lundi 8 mars au tribunal de commerce de Meaux : « Un sabordage économique et une liquidation finement orchestrée par notre direction pour faire payer nos licenciements par l'État ». Vivanco étant insolvable, les contribuables supporteront ainsi les licenciements et la cellule de reclassement. La facture pourrait atteindre 588.000 euros :
« C'est le comble. Vivanco est un groupe mondial très puissant. Il est financé par la Lone Star, un fonds de pension américain qui pèse 24 milliards de dollars ».
" Nous sommes des salariés fatigués "
Les quarante et un salariés ont alors occupé leur usine pour négocier de meilleures indemnités de départ. Vivanco proposait des miettes : 4.000 euros par salarié s'il renonce à toute action en justice. Ils ont refusé et c'est depuis le silence radio. Vivanco Allemagne a abandonné son site d'emballage de Neuilly-le-Réal et ses salariés à leur triste sort :
« Nous sommes des salariés fatigués. Nous occupons l'usine dans l'ignorance presque totale. Nous tirons le constat que notre action toujours très civique et digne n'aboutit pas ». L'agneau s'est transformé en loup. Il est devenu prédateur : « Vivanco pensait se débarrasser de nous à bon compte et croyait qu'on allait fléchir dans notre action. Il a fait un très mauvais calcul ».
" Le ministre fait la sourde oreille "
Les ex-Vivanco ont bloqué, ce matin vers 7 h 30, tous les accès à Neuilly-le-Réal, puis la Nationale 7 à Bessay. Un hors-d'oeuvre :
« Le ministre de l'industrie connaît depuis deux mois notre galère. Il fait la sourde d'oreille. Nos actions vont devenir plus virulentes ». Les ex-Vivanco ont décidé de brandir l'arme de l'intimidation. Comme les salariés de l'équipementier automobile Sodimatex, qui en fin de semaine dernière, ont menacé de faire exploser une citerne de gaz dans leur usine dans le but d'obtenir de meilleures indemnités de départ :
« Leur menace a trouvé un écho. La direction a décidé de reprendre les négociations. La nôtre continue de nous ignorer, malgré la plainte déposée au pénal pour escroquerie. C'est la seule façon d'être entendus. Il nous reste encore sur le site nos meilleures cartes : des bonbonnes de gaz ».
" On peut faire sauter la baraque "
Les ex-salariés regrouperont, dans les prochains jours, les bonbonnes au coeur de l'usine et disposeront des palettes sur la citerne de gaz, située à l'extérieur des bâtiments : « On nous prend pour des guignols. Mais attention, on peut faire sauter la baraque ! Il y a désormais de la haine en nous. Ils ont détruit nos emplois et nos vies. Après la dignité, il y a la rage. L'usine est au bord de l'explosion ».
Ils laissent la porte ouverte à leur direction pour renouer le dialogue : « Les négociations sur le plan social ont échoué. Ils ont encore une dernière chance et doivent la saisir au plus vite. Sinon on n'hésitera pas un instant. On a été trop longtemps des gentils. On ne veut plus de cette étiquette ». Les ex-Vivanco ne sont plus des agneaux. Les dents ont poussé, la mâchoire est plus puissante et la détermination plus grande...
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MOULINS
Justice
mardi 20 avril 2010 - 19:58
Première victoire des ex-CRC en justice
vivanco
Licenciés avec le strict minimum, les ex-salariés de CRC menaçaient leur ancienne direction de diffuser un document à ses clients pour rouvrir les négociations. Vivanco n'a pas obtenu gain de cause.
Pierre Raynaud Les ex-salariés de CRC et leur ancienne direction ne se parlent plus, depuis la liquidation du site de Neuilly-le-Réal début mars et une entrevue en préfecture. Ils échangent par mail ou se croisent au tribunal de grande instance de Moulins.
Les trente-trois ex-salariés ont été assignés, hier matin, en procédure d'urgence (référé), au TGI par Vivanco France. Pour Me Jean-Louis Deschamps, l'avocat des ex-CRC, « la direction a trouvé que les actions en justice comme seul terrain de négociations ».
L'avocate parisienne de Vivanco a plaidé la bonne foi de son client « qui a maintenu l'activité de CRC en injectant du cash et a envisagé un plan de cession de CRC pour éviter les licenciements ». Au final : aucune offre de reprise formulée, trente-trois licenciements et une proposition d'indemnités de 4.000 ? à chaque salarié s'il renonce à toute action en justice.
Les ex-Vivanco réclament 60.000 ?, soit 2 millions d'euros au total. Ils l'ont signifié dans un mail adressé à leur direction le 7 avril. Dans ce message électronique, ils ont joint un document, expliquant le « sabordage économique de CRC », qu'il diffuserait aux filiales de Vivanco et à ses clients en cas de non reprise des négociations :
« La volonté de nuire est réelle. Ils menacent d'adresser ce document diffamant et mensonger à nos clients stratégiques (Fnac, Auchan, System U, etc). Dans cette volonté de nuire, ils ont utilisé le papier à en-tête avec le logo de la société. C'est un sabotage, car ce mail aurait l'effet d'une bombe pour Vivanco, qui est toujours concernée par un plan de sauvegarde mais qui reste un partenaire fiable ».
Pas si fiable pour Me Deschamps. Notamment pour les négociations « qui se font à deux, comme les enfants ». Pour l'avocat des ex-salariés, Vivanco ne serait pas un bon père :
« La direction se refuse à nous rencontrer. Sa seule réponse, c'est une procédure. Ce document fait partie d'un combat légitime de salariés qui demandent réparation ». Des ex-salariés qui occupent leur ancienne usine depuis la liquidation. Illégalement pour l'avocate de la direction : « Il reste sur le site les archives, des documents comptables et de la marchandise. Cette occupation est un trouble manifeste ».
Vivanco ne peut pas « s'offusquer de cette occupation » pour Me Deschamps. Car le bâtiment, qui fait désormais partie des actifs, est sous la seule responsabilité du liquidateur judiciaire.
Le président du tribunal a rejeté les deux demandes de Vivanco et a condamné l'entreprise à des indemnités de frais de défense.