santé sport et capitalisme

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par Ratus » 11 Nov 2004, 23:51

@gaby: Brohm pourtant se définit comme un intellectuel marxiste... il a publié dans la revue partisans qu'on peut considérer comme assez révolutionnaire non?

Voilà quelques propositions qui avaient été faîtes par Quel Corps? la revue qu'il a dirigé de nombreuses années...


a) L'interdiction pure et simple de toutes les compétitions mettant en jeu la sécurité des pratiquants et des spectateurs (courses automobiles et motos, courses en solitaire dans les montagnes, etc.). Il s'agit là d'une simple mesure de police d'ordre public : on interdit bien les manifestations de nature à « troubler l'ordre public ».

8) La dissolution du CNOSF et des fédérations sportives civiles dont l'utilité n'a plus lieu d'être (Cf. plus loin le paragraphe consacré à l'autogestion de la pratique sportive). La dissolution également de toutes les structures techniques parasitaires de la préparation olympique et du haut niveau (Conseillers techniques nationaux et régionaux, etc.). L'objectif n'étant plus de produire des champions, mais de mettre la pratique physique au service de la population et de la jeunesse.

c) Le contrôle fiscal et administratif régulier et sévère des clubs professionnels qui doivent être dorénavant tous taxés comme des entreprises capitalistes du spectacle ou du commerce. Il faut mettre fin à l'hypocrisie de ces prétendues associations loi de 1901. Le contrôle fiscal doit porter aussi, bien entendu, sur les joueurs salariés qui fraudent copieusement et touchent de juteux dessous de table. Il s'agit là d'un aspect particulier de la lutte contre la fraude fiscale. Et il y a des millions en jeu ! Dès lors, les petits entrepreneurs crapuleux hésiteront à deux fois avant de se lancer dans l'aventure du sport professionnel sans grands risques pour eux. A la limite même il s'agit de taxer le sport professionnel comme une activité de luxe au même titre que le caviar ou les parfums et donc de faire payer très cher (au service de la communauté) tous les fanas du ballon rond ou du cyclisme. L'argent ainsi dégagé servirait à financer les équipements sociaux et culturels dont manque le pays.
d) Au niveau du budget de l'Etat il s'agit de supprimer toutes les subventions aux sports d'élite pour en faire bénéficier les associations culturelles et sportives de base dont l'effort éducatif aura été reconnu. Le désengagement de l'Etat vis-à-vis du sport de haut niveau doit être total.

e) Le refus de la part des municipalités de gauche de subventionner à fonds perdus les déficits énormes des clubs professionnels (8>· La masse des contribuables n'a pas à supporter les charges financières de clubs privés qu'elle ne contrôle pas. Ces crédits iraient ainsi, là aussi, aux équipements collectifs (crèches, piscines, terrains de jeu et d'aventures, etc.).

f) La nationalisation de tous les terrains et équipements de sport et leur mise à la disposition du grand public, gratuitement. Le Parc des Princes et les autres grands stades ne doivent plus servir à l'entraînement et à la compétition d'une seule équipe professionnelle, ornais servir d'infrastructure aux activités éducatives hebdomadaires des scolaires et des pré-scolaires.

g) Dans l'immédiat l'accès libre et la gratuité doivent être garantis au public, que ce soit dans les piscines, les stades, les gymnases. Aucune obligation ne doit être imposée d'adhérer au club ou à une fédération pour pratiquer. Un sportif ne doit pas être identifié à un licencié.

h) Transitoirement, dans les clubs, la pratique sera gérée démocratiquement par l'assemblée générale des pratiquants. Il s'agit d'éviter que la pratique ne soit accaparée par des bureaucrates ; elle doit au contraire être librement autogérée. Il va de soi que toutes les sanctions disciplinaires propres aux anciennes fédérations seront déclarées illégales (par exemple les interdictions de changer de club en cours de saison).

i) Les grandes compétitions sportives, organisées à grands renforts publicitaires, doivent être non seulement contrôlées quant aux normes de sécurité (par exemple le privilège exorbitant du Tour de France qui mobilise les routes et les flics du pays), mais aussi lourdement taxées au titre d'une superTVA dont le taux dissuasif ferait réfléchir les capitalistes de la sueur.

j) Les installations sportives, et notamment les grands halls de sport, doivent absolument être contrôlés par les municipalités et être intégrés aux activités culturelles (théâtre, concert, lieux de réunions publiques, etc.). // faut éviter comme la peste la sportivisation des lieux de spectacles et la spectacularisation des lieux sportifs.

k) Toute construction d'équipements sportifs sera subordonnée à l'accord d'une commission d'urbanisme, de manière à éviter la spécialisation fonctionnelle des lieux sportifs. On favorisera au contraire la polyfonctionnalité des installations, leur transformation possible et surtout leur non-sportivisation. Les piscines par exemple doivent avant tout être des lieux pour nager ensemble et non pas une série de couloirs d'entraînement.

Par ailleurs la lutte contre le sport professionnel implique que soient menés de front trois autres types de lutte politique et idéologique :
l) contre l'aliénation religieuse et culturelle qui favorise les divers opiums et incite à l'évasion et au rêve. Il s'agit de donner la possibilité aux masses travailleuses d'activités culturelles non crétinisantes et centrées sur leur propre émancipation ;
2) contre les valeurs réactionnaires de la société bourgeoise incorporées par chacun d'entre nous et qui incitent à demander des spectacles dégradants, imbéciles et humiliants. Il s'agit là d'une lutte prolongée pour un nouveau statut du corps dans la société,
3) contre les conditions de travail, de transport et d'habitat qui forcent à l'évasion et au divertissement abrutissant. Si le spectacle sportif est populaire c'est parce qu'il permet d'oublier la réalité quotidienne sinistre. C'est aussi la raison pour laquelle le sport professionnel offre l'illusion d'une promotion sociale aux défavorisés. Pour un Pelé, humble noir brésilien qui réussit, combien de chômeurs et de ratés dans le sport professionnel (boxe, cyclisme, etc.) ?
Avec la disparition tendancielle du sport de compétition il faudra recycler les anciens sportifs. Il s'agit en général de personnes idéalistes et généreuses qui pourraient sûrement rendre service aux municipalités en exerçant un enseignement spécifique. Il n' a aucune raison de faire du corporatisme et de laisser le monopole de l’EPS aux profs de gym !
Un chapitre particulier doit être réservé au sport hippique. Il s'agit là d'une pratique de classe inadmissible. Les courses de chevaux seront donc purement et simplement supprimées et le pari mutuel interdit. Dans la foulée on supprimera tous les jeu de hasards et loteries (Loto, loterie nationale, casino etc.). Ce sera une contribution essentielle à la« moralisation de la vie publique ».
l) Les coups et blessures portés sur les terrain de sport seront considérés comme des délits contre la personne (coups et blessures volontaires ou involontaires). Cela permettra d'éviter les scandait des agressions délibérées commises sur les terrains sans que des sanctions ne viennent punir les auteurs considérés comme des sportifs « virils » (9). Là aussi la pratique sportive ne doit plus échapper à la juridiction commune de notre pays.

Promouvoir les activités physique:
éducatives et communautaires

Si l'on regarde à l'échelle de la planète on peut dire que la quasi-totalité de la population vit physiquement paupérisée. L'éducation physique est un luxe de riche. Aussi le droit aux activités physiques et sportives pour toutes et tous doit-il être inscrit dans les priorités nationales et internationales. Mais, bien entendu, ce n'est pas en généralisant le sport de compétition qu'on pourra lutter contre l'analphabétisme physique.
Dans les pays du tiers-monde, plutôt que d'exporter, comme le font les gouvernements français, des armes aux régimes militaro-policiers ou des centrales nucléaires en Afrique du Sud, il faudra respecter les impératifs suivants :
a) respect des traditions orales, folkloriques et rituelles qui rythment les pratiques corporelles dans les cultures non-occidentales. Il faudra donc soigneusement veiller à ne pas implanter des modèles étrangers ou néo-coloniaux comme cela fut le cas avec le sport britannique ;
8) développement d'équipements sportifs correspondants aux besoins de la population locale et non pas aux impératifs de la sportivisation impérialiste multinationale voulue par le CIO et la FIFA ; c) lutte particulière contre l'apartheid et toutes les formes de racisme dans et par le sport; d) développement des activités physiques en liaison avec les nécessités du développement culturel : alphabétisation, politique de la santé et de l'habitat, etc. Il s'agit de permettre à chaque africain ou asiatique de s'approprier sa culture et sa corporéité sans qu'interfèrent les soucis de promotion du sport de compétition.
Dans les entreprises il faut absolument prendre le contre-pied de ce qui a été fait jusqu'à présent. Au lieu d'introduire le sport bourgeois dans les activités de la classe ouvrière, il faudra au contraire tout faire pour développer des pratiques physiques capables d'élever la conscience de classe ouvrière et le désir d'auto-émancipation. Cela implique nécessairement :
a) la revendication de la réduction massive du temps de travail et le contrôle ouvrier sur les cadences de travail afin de diminuer les efforts physiques et
nerveux, sources d'accidents du travail et de stress. La revendication du temps libre (sous contrôle ouvrier) doit être l'occasion de remettre en cause fondamentalement la division capitaliste du travail qui est à l'origine de toutes les mutilations et aliénations par le travail ;
8) le refus de toutes les formes de gymnastique de pause ou d'éducation physique de compensation dont le seul objectif (par exemple au Japon ou en Suède) est la récupération de la force de travail et la rentabilisation des investissements énergétiques. S'il faut revendiquer des temps de pause et des aires de repos, ce n'est pas pour y caser des contraintes productivistes au service du patronat ! ;
c) la revendication d'heures libres pour la pratique physique et sportive, sous contrôle ouvrier, et dans un but culturel affirmé. De ce point de vue il faut souhaiter la disparition de la FSGT et de toutes les autres formes de sport corporatif qui ne font que singer le sport bourgeois civil. Pas de compétitions inter-ateliers ou inter-entreprises, pas de championnats corporatifs qui divisent l'unité de la classe ouvrière, mais libre pratique des activités sportives. Chaque comité d'entreprise ayant l'obligation de financer l'équipement sportif et de veiller au bon déroulement de ces activités. Il ne s'agit pas de faire des usines des « lieux dévie », ce qui dans le capitalisme est une utopie, mais de permettre à la classe ouvrière et surtout aux jeunes de profiter des avantages matériels de l'entreprise pour pratiquer des sports ;
d) l'organisation de loisirs et de vacances gratuites (financées par le patronat) pour les jeunes ouvriers (séjours à la montagne ou à la mer, etc.). Ces séjours peuvent d'ailleurs être compris comme des périodes de formation continue. Il n'y a aucune raison de laisser les sports de luxe à la bourgeoisie et à la petite bourgeoisie ;
e) l'accès gratuit pour tous les jeunes aux installations sportives et lieux culturels ;
f) la mise en place de commissions spéciales, sous contrôle ouvrier, pour surveiller les cadences, les conditions d'hygiène et de travail, les mesures de sécurité, etc.

A l'école, il y a quelques mesures urgentes qui s'imposent absolument :
a) Tout d'abord, dans le cadre d'une intégration totale de l'EPS à l'Education Nationale, il s'agira de reformer complètement la formation des enseignants en Education Physique et Sportive :

- suppression de la spécialisation sportive obligatoire, mais au contraire polyvalence sportive et extra-sportive ;

- formation approfondie en sciences humaines (histoire, sociologie, psychanalyse, etc.) ;

- double formation possible (par exemple allemand et EPS ou maths et EPS). Cela se fait dans d'autres pays, il n'y a aucune raison de le refuser. Nous sommes par principe pour les formations polyvalentes. Et cela permettrait aux enseignants âges de se recycler plus facilement;

- formation pédagogique sur le terrain tout au long du cursus universitaire ;

- la formation physique se ferait plutôt dans le sens d'une meilleure connaissance des pratiques corporelles et de l'image du corps que des résultats sportifs.

8) Ensuite, l'association sportive scolaire doit être absolument décloisonnée et fonctionner comme une association socioculturelle plutôt qu'exclusivement sportive. Le but de l'AS ne doit plus être la compétition mais l'initiation et la libre pratique de tous les sports et activités physiques, sans aucune réduction sportive possible. Or, trop souvent, l'AS est conçue comme vivier de recrutement pour les clubs civils !

c) Les horaires d'Education Physique (5 heures minimum) seront placés de telle sorte qu'ils ne constituent pas un exutoire des maths et de la physique, mais aient des effets psychologiques et physiologiques bénéfiques (notamment en fin d'après-midi). Et pourtant combien d'heures d'EPS le matin de bonne heure en hiver dans le froid, la boue et sous la pluie ! ! !
d) Les équipements scolaires seront absolument prioritaires et devront obéir à des normes évolutives non rigides, non sportives, de manière à ce qu'on puisse les utiliser également comme lieux culturels et publics.
e) Les épreuves d'EPS aux examens seront purement et simplement supprimées. Elles sont grotesques et inutiles. Elles dévalorisent et ridiculisent l'EPS. Le corps n'a pas à être noté !
f) La mixité totale sera rapidement introduite à tous les échelons, de manière à lutter contre le sexisme implicite ou explicite des milieux sportifs.
g) Dans la mesure du possible on favorisera l'association de l'éducation physique avec les autres disciplines dites « secondaires » : musique, dessin, chant, etc. Ce dont il s'agit, c'est d'une culture du corps intégrale prenant en compte toutes les dimensions (généralement refoulées) du corps (esthétique, érotique, symbolique, etc.).
h) II y a lieu de prévoir des séjours à la montagne et à la mer plus fréquents et gratuits où seraient possibles les initiations aux sports nouveaux de plein air (delta plane, surf, planche à voile, escalade, etc.).
i) L'essentiel de l'effort éducatif portera sur les maternelles et les primaires, là où précisément aujourd'hui il y a très peu d'éducation physique. L'objectif évidemment ne sera pas de recruter de futurs gladiateurs sportifs, mais d'éveiller les tout jeunes aux activités physiques éducatives et ludiques. En particulier on redonnera aux jeux physiques toute leur importance.
j) On peut parfaitement imaginer une ou deux demi-journées par semaine consacrées exclusivement aux activités de plein-air. Le principe étant qu'il faut au maximum respecter les besoins de mouvements et de jeux des jeunes enfants. Il faut une fois pour toutes se dire que l'éducation physique et sportive a autant de place et d'importance pour le développement des enfants que les maths et la géographie. Il serait temps de faire passer ces bonnes résolutions des congrès de parents d'élèves dans la vie effective...
k) Tout le système des colonies de vacances et des centres aérés devra être sévèrement revu et corrigé pour que l'on ne puisse plus chanter « les jolies colonies de vacances » ! Gratuites en leur principe, ces vacances devront beaucoup plus associer les adolescents et les enfants et ne plus être des parcs

à gamins. Les sites de montagne et de mer, jusque-là colonisés par le grand capital, seront dorénavant réservés en priorité à la jeunesse ouvrière et scolarisée.

En ce qui concerne les activités de tourisme, il faudra, là aussi, introduire une gestion socialiste rigoureuse incompatible avec le laxisme profiteur du capital. Parmi les mesures urgentes à prendre, on retiendra :

- l'interdiction de toutes les activités polluantes telles que le hors-bord, les motos-skis en montagne

ou les pique-niques dégradants. On veillera à réserver des domaines de plus en plus étendus à la protection de la faune et de la flore (réserves et parcs naturels) ;

- l'interdiction de toutes les chasses qui mettent en cause l'environnement, la survie des espèces et représentent des actes de cruauté insupportables : ce sera une contribution à la lutte contre le fascisme ordinaire des chasseurs-gros-cons !

- la stricte réglementation de l'alpinisme qui constitue aujourd'hui une course imbécile à la mort ; les pistes de ski sont devenues des boulevards à suicide ! II faudra absolument éviter que des fous
« du corps » ne mettent en cause leur propre vie et surtout celles des sauveteurs. Par ailleurs, les hautes montagnes seront totalement protégées contre l'intrusion de ces hordes de touristes qui saccagent tout sur leur passage à la recherche de l'edelweiss !

- l'interdiction (en liaison avec les organismes internationaux) de tous les safaris et rallyes qu'affectionnait tellement Giscard. L'Afrique et l'Asie ne doivent plus être des territoires néo-coloniaux pour maniaques de la gâchette... Surtout les rallyes automobiles seront déclarés dangers publics pour l'environnement et la population (que l'on se souvienne des derniers Paris-Dakar !) ;

- l'accès aux plages sera totalement libre et on révisera tous les permis de construire sur le littoral afin de désenclaver et libérer le front de mer ; toutes les villas ne respectant pas les dispositions de libre accès seront poursuivies juridiquement ou rasées;

- les plages privées et les plages payantes seront purement et simplement abolies : il faut mettre fin à cette division des plages suivant le fric et le taux de pollution !

- sur toutes les plages il y aura la permission de se foutre à poil ou de porter les maillots de bain de son choix. Les plages ne seront pas des annexes de l'évêché !

- les CRS et autres flics de la police nationale seront totalement remplacés par du matériel et des moniteurs civils, tant à la montagne que sur les plages : non à la militarisation des loisirs'.

- tous les centres de vacances et de loisirs devront être agréés par l'Etat quant aux normes d'hygiène et de sécurité : les transports seront gratuits pour les jeunes ouvriers et les scolaires ;

- on réglementera strictement la construction de nouvelles stations de ski de manière à éviter la « sarcellisation » de la montagne. Au demeurant, les stations de ski seront nationalisées et gérées par un office national de la montagne déclaré d'utilité publique. Cela permettra de contrôler la spéculation immobilière et surtout les prix des services offerts par les stations ;

- les centres de tourisme de luxe (club Méditerranée, etc.) seront strictement contrôlés pour éviter l'infiltration néo-coloniale dans les anciennes colonies. Il est intolérable que des bourgeois et petits-bourgeois

se goinfrent et baisent alors qu'à quelques centaines de mètres de ces lupanars les autochtones crèvent de faim et de misère. Non aux enclaves « romaines » dans l'univers de la pauvreté !

- des mesures spécifiques en faveur du tourisme populaire seront prises de manière à démocratiser réellement les loisirs. Ainsi, par exemple, dans le cadre d'une augmentation des congés payés (6 semaines pour tous), des séjours à la neige ou à la mer seront pris en charge par les organismes sociaux ou les comités d'entreprise à des prix très bas.
Dans l'institution militaire enfin, il s'agira surtout de développer une formation physique non militariste. En supposant que l'armée soit réellement démocratisée et au service des travailleurs, contrôlée par le pouvoir civil socialiste des travailleurs et non par une hiérarchie militaire (la nation en armes et non une caste de salauds et de crevures galonnées), en supposant donc une société socialiste où l'armée ne soit pas une institution de guerre civile, ni une armée néo-coloniale, on peut parfaitement imaginer la nécessité de ladite armée pour défendre le socialisme. Dans ce cadre là, la formation physique ne consistera pas à embrigader ou à humilier, mais à développer les qualités physiques du citoyen et à assurer sa préparation au combat. On sait parfaitement que les meilleures armées sont les plus démocratiques et celles dont la formation politique se fait au nom d'un idéal. Cet idéal sera la défense du socialisme démocratique et des libertés, la solidarité internationaliste. La formation physique reflétera cette éducation générale. Le service militaire sera mixte et égalitaire. On y apprendra non pas à glander, mais à manier réellement les armes et les engins. La compétition sportive n'y aura pas cours, pas plus qu'ailleurs, et si l'on insistera un peu plus sur les sports dits de combat, on mettra en avant également la formation physique polyvalente à l'aide des nouvelles techniques sportives (delta, surf, etc.). En temps de paix l'armée servira à des tâches d'utilité publique et au service civil (routes, etc.).

Conclusion

Toutes ces propositions sont pour la plupart « irréalisables » sans une volonté politique clairement affirmée. Il n'y a pas de réformes possibles dans le cadre du réformisme. Les réformes sont toujours le sous-produit d'un mouvement révolutionnaire. En ce sens ces revendications et propositions supposent fondamentalement un pouvoir ouvrier authentique. Mais en retour, et en attendant ce pouvoir, elles incitent à la prise de pouvoir et la préparent. Ce sont donc des revendications de transition qui mènent de la lutte syndicale à la lutte politique, de la lutte partielle à la lutte globale, de la réforme à la révolution. D'un autre côté ces propositions n'ont pas de sens isolément. Elles ne pourront être réalisées que dans le cadre de profonds changements dans l'organisation du travail, des transports, de l'habitat, de la santé et de l'éducation. En ce sens ces propositions sont également transitoires parce qu'elles forcent à généraliser les changements à toutes les institutions sociales.

C'est du point de vue de classe ouvrier explicitement que sont formulées ces propositions. Cela signifie donc que pour nous le socialisme est au bout du compte la seule forme de société capable de favoriser le développement intellectuel et physique de l'humanité. Il y va de l'avenir d'une éducation physique intégrale, où la formation intellectuelle, technique, esthétique et corporelle serait étroitement intégrée à l'ensemble des pratiques sociales. Comme l'écrit Marx : la société socialiste future sera la « démonstration pratique de la possibilité d'unir l'enseignement et la gymnastique avec le travail manuel et, vice versa, le travail manuel avec l'enseignement et la gymnastique ». Ce sera « une éducation qui unira pour tous les enfants au-dessus d'un certain âge le travail productif avec l'instruction et la gymnastique et cela non seulement comme méthode d'accroître la production sociale, mais comme la seule et unique méthode de produire des hommes complets. »

QUEL CORPS ?


Voilà aussi quelques précisions sur sa méthode:

Jean-Marie Brohm : A l'opposé de mes contradicteurs ma méthode est unitaire, elle est marxiste, ou plutôt freudo-marxiste à savoir une méthode dialectique qui pense en terme de négativité, d'unité des contraires. Je suis pour faire passer les contradictions au stade de l'antagonisme afin de faire exploser l’institution et je suis moi-même un élément de cette contradiction. Par principe donc je suis opposé à toute forme d'éclectisme tel que le pratiquent avec tant de bonheur certains théoriciens : un peu de Bourdieu, un peu de N. Elias, beaucoup de prudence et un zeste de Foucault sans parler de leur pratique souvent inexistante ou de leur crainte de devoir retourner sur les terrains boueux des stades... considérant comme infamant d'être prof de gym de base !
La catégorie centrale de la méthode marxiste est, comme G. Lukacs l'a bien montré, la catégorie de la totalité concrète. J'ai donc analysé transversalement, horizontalement, verticalement la totalité des instances de l’institution dans son rapport à toutes les institutions bourgeoises et dans son rapport au mode de production capitaliste à l'échelle mondiale (impérialisme). C'est ce qui m'a permis de comprendre le rôle des multinationales, des appareils d'États, du marché mondial, des institutions internationales (ONU) dans le développement du sport. La deuxième catégorie centrale est celle de négativité. J'insiste toujours sur les " mauvais côtés " du sport, ceux qui font mal. C'est la raison pour laquelle on m'accuse de négativisme ou de nihilisme. Mais depuis quand accuse-t-on un médecin qui procède à un diagnostic lucide de vouloir tuer son malade ? On constate cependant que les grandes révolutions théoriques dans les sciences humaines ont toutes insisté sur la négativité et la contradiction. Freud par exemple montre la négativité du désir, de la sexualité et de la pulsion de mort. Marx, pour sa part, souligne la lutte des classes, c'est-à-dire l'impossible réconciliation de groupes antagonistes. Pour ma part j'analyse la contradiction fondamentale du sport : le principe de rendement qui creuse lui-même sa propre tombe. La course au rendement conduit à ses propres limites. Il devient absurde de départager des concurrents sur des poussières d'espace ou de temps. L’analyse des contradictions de l’institution sportive me semble décisive car elle avive la crise et notre propre critique constitue une contradiction importante... Enfin la méthode marxiste est essentiellement une méthode conceptuelle. Ce sont ces concepts qui permettent de penser la réalité empirique et surtout de prévoir les tendances d’évolution. Les concepts de sportivisation, d'appareil idéologique d'État, de principe de rendement, d’olympisation du monde, de procès de production sportif nous ont permis d'avancer une série de thèses qui sont aujourd'hui incontournable
Ratus
 
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Message par Gaby » 11 Nov 2004, 23:54

:mellow:
Gaby
 
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Message par Ratus » 11 Nov 2004, 23:55

Encore quelques autres précisions sur la méthode:

il y a trois obstacles majeurs à la critique du sport :
- le refus en général de comprendre scientifiquement la société ; plus celle-ci devient complexe et contradictoire et moins les agents sociaux veulent analyser leurs rapports au " socius ". Cela entraîne des rapports magiques à la société : " il y aura toujours des riches et des pauvres, l’inflation est un mal incurable, il y aura toujours du sport, etc. " Cette pensée résignée est l’intériorisation de l’idéologie dominante et il est très difficile de la combattre parce qu’on remet en cause un consensus social.
- le rapport magique à l’institution sportive elle-même. Plus une institution vous est proche et moins elle est analysée, plus elle est opaque. Le sport semble être une vraie " nature ", éternelle, " vieille comme le monde ), et l'on ne se rend pas compte qu'il est le produit transitoire d'un développement historique qui a abouti à liquider à son profit toutes les pratiques corporelles traditionnelles, folkloriques, rituelles. La sportivisation mondiale a laminé tout ce qui était spécifique et original ; il ne reste plus que le modèle Adidas...
- le rapport aveugle au corps : le rapport au corps, c'est comme le rapport à la mort, à la sexualité, à l’inconscient, quelque chose d'opaque, de non-maîtrisé. Et si justement l'emprise du sport marche si fort c'est que le corps sportif est un corps aveugle. En se jetant à corps perdu dans le sport de compétition on ne remet pas en cause les préjugés dominants ; il faut maigrir, il faut souffrir, il faut améliorer ses performances bref autant d'injonctions terroristes à se conformer au moule établi. Mais jamais on ne se pose la question : quel corps ?
Ratus
 
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Message par Urriko » 11 Nov 2004, 23:56

(Ratus @ jeudi 11 novembre 2004 à 23:51 a écrit : @gaby: Brohm pourtant se définit comme un intellectuel marxiste... il a publié dans la revue partisans qu'on peut considérer comme assez révolutionnaire non?

Voilà quelques propositions qui avaient été faîtes par Quel Corps? la revue qu'il a dirigé de nombreuses années...


a) L'interdiction pure et simple de toutes les compétitions mettant en jeu la sécurité des pratiquants et des spectateurs (courses automobiles et motos, courses en solitaire dans les montagnes, etc.). Il s'agit là d'une simple mesure de police d'ordre public : on interdit bien les manifestations de nature à « troubler l'ordre public ».

8) La dissolution du CNOSF et des fédérations sportives civiles dont l'utilité n'a plus lieu d'être (Cf. plus loin le paragraphe consacré à l'autogestion de la pratique sportive). La dissolution également de toutes les structures techniques parasitaires de la préparation olympique et du haut niveau (Conseillers techniques nationaux et régionaux, etc.). L'objectif n'étant plus de produire des champions, mais de mettre la pratique physique au service de la population et de la jeunesse.

c) Le contrôle fiscal et administratif régulier et sévère des clubs professionnels qui doivent être dorénavant tous taxés comme des entreprises capitalistes du spectacle ou du commerce. Il faut mettre fin à l'hypocrisie de ces prétendues associations loi de 1901. Le contrôle fiscal doit porter aussi, bien entendu, sur les joueurs salariés qui fraudent copieusement et touchent de juteux dessous de table. Il s'agit là d'un aspect particulier de la lutte contre la fraude fiscale. Et il y a des millions en jeu ! Dès lors, les petits entrepreneurs crapuleux hésiteront à deux fois avant de se lancer dans l'aventure du sport professionnel sans grands risques pour eux. A la limite même il s'agit de taxer le sport professionnel comme une activité de luxe au même titre que le caviar ou les parfums et donc de faire payer très cher (au service de la communauté) tous les fanas du ballon rond ou du cyclisme. L'argent ainsi dégagé servirait à financer les équipements sociaux et culturels dont manque le pays.
d) Au niveau du budget de l'Etat il s'agit de supprimer toutes les subventions aux sports d'élite pour en faire bénéficier les associations culturelles et sportives de base dont l'effort éducatif aura été reconnu. Le désengagement de l'Etat vis-à-vis du sport de haut niveau doit être total.

e) Le refus de la part des municipalités de gauche de subventionner à fonds perdus les déficits énormes des clubs professionnels (8>· La masse des contribuables n'a pas à supporter les charges financières de clubs privés qu'elle ne contrôle pas. Ces crédits iraient ainsi, là aussi, aux équipements collectifs (crèches, piscines, terrains de jeu et d'aventures, etc.).

f) La nationalisation de tous les terrains et équipements de sport et leur mise à la disposition du grand public, gratuitement. Le Parc des Princes et les autres grands stades ne doivent plus servir à l'entraînement et à la compétition d'une seule équipe professionnelle, ornais servir d'infrastructure aux activités éducatives hebdomadaires des scolaires et des pré-scolaires.

g) Dans l'immédiat l'accès libre et la gratuité doivent être garantis au public, que ce soit dans les piscines, les stades, les gymnases. Aucune obligation ne doit être imposée d'adhérer au club ou à une fédération pour pratiquer. Un sportif ne doit pas être identifié à un licencié.

h) Transitoirement, dans les clubs, la pratique sera gérée démocratiquement par l'assemblée générale des pratiquants. Il s'agit d'éviter que la pratique ne soit accaparée par des bureaucrates ; elle doit au contraire être librement autogérée. Il va de soi que toutes les sanctions disciplinaires propres aux anciennes fédérations seront déclarées illégales (par exemple les interdictions de changer de club en cours de saison).

i) Les grandes compétitions sportives, organisées à grands renforts publicitaires, doivent être non seulement contrôlées quant aux normes de sécurité (par exemple le privilège exorbitant du Tour de France qui mobilise les routes et les flics du pays), mais aussi lourdement taxées au titre d'une superTVA dont le taux dissuasif ferait réfléchir les capitalistes de la sueur.

j) Les installations sportives, et notamment les grands halls de sport, doivent absolument être contrôlés par les municipalités et être intégrés aux activités culturelles (théâtre, concert, lieux de réunions publiques, etc.). // faut éviter comme la peste la sportivisation des lieux de spectacles et la spectacularisation des lieux sportifs.

k) Toute construction d'équipements sportifs sera subordonnée à l'accord d'une commission d'urbanisme, de manière à éviter la spécialisation fonctionnelle des lieux sportifs. On favorisera au contraire la polyfonctionnalité des installations, leur transformation possible et surtout leur non-sportivisation. Les piscines par exemple doivent avant tout être des lieux pour nager ensemble et non pas une série de couloirs d'entraînement.

Par ailleurs la lutte contre le sport professionnel implique que soient menés de front trois autres types de lutte politique et idéologique :
l) contre l'aliénation religieuse et culturelle qui favorise les divers opiums et incite à l'évasion et au rêve. Il s'agit de donner la possibilité aux masses travailleuses d'activités culturelles non crétinisantes et centrées sur leur propre émancipation ;
2) contre les valeurs réactionnaires de la société bourgeoise incorporées par chacun d'entre nous et qui incitent à demander des spectacles dégradants, imbéciles et humiliants. Il s'agit là d'une lutte prolongée pour un nouveau statut du corps dans la société,
3) contre les conditions de travail, de transport et d'habitat qui forcent à l'évasion et au divertissement abrutissant. Si le spectacle sportif est populaire c'est parce qu'il permet d'oublier la réalité quotidienne sinistre. C'est aussi la raison pour laquelle le sport professionnel offre l'illusion d'une promotion sociale aux défavorisés. Pour un Pelé, humble noir brésilien qui réussit, combien de chômeurs et de ratés dans le sport professionnel (boxe, cyclisme, etc.) ?
Avec la disparition tendancielle du sport de compétition il faudra recycler les anciens sportifs. Il s'agit en général de personnes idéalistes et généreuses qui pourraient sûrement rendre service aux municipalités en exerçant un enseignement spécifique. Il n' a aucune raison de faire du corporatisme et de laisser le monopole de l’EPS aux profs de gym !
Un chapitre particulier doit être réservé au sport hippique. Il s'agit là d'une pratique de classe inadmissible. Les courses de chevaux seront donc purement et simplement supprimées et le pari mutuel interdit. Dans la foulée on supprimera tous les jeu de hasards et loteries (Loto, loterie nationale, casino etc.). Ce sera une contribution essentielle à la« moralisation de la vie publique ».
l) Les coups et blessures portés sur les terrain de sport seront considérés comme des délits contre la personne (coups et blessures volontaires ou involontaires). Cela permettra d'éviter les scandait des agressions délibérées commises sur les terrains sans que des sanctions ne viennent punir les auteurs considérés comme des sportifs « virils » (9). Là aussi la pratique sportive ne doit plus échapper à la juridiction commune de notre pays.

Promouvoir les activités physique:
éducatives et communautaires

Si l'on regarde à l'échelle de la planète on peut dire que la quasi-totalité de la population vit physiquement paupérisée. L'éducation physique est un luxe de riche. Aussi le droit aux activités physiques et sportives pour toutes et tous doit-il être inscrit dans les priorités nationales et internationales. Mais, bien entendu, ce n'est pas en généralisant le sport de compétition qu'on pourra lutter contre l'analphabétisme physique.
Dans les pays du tiers-monde, plutôt que d'exporter, comme le font les gouvernements français, des armes aux régimes militaro-policiers ou des centrales nucléaires en Afrique du Sud, il faudra respecter les impératifs suivants :
a) respect des traditions orales, folkloriques et rituelles qui rythment les pratiques corporelles dans les cultures non-occidentales. Il faudra donc soigneusement veiller à ne pas implanter des modèles étrangers ou néo-coloniaux comme cela fut le cas avec le sport britannique ;
8) développement d'équipements sportifs correspondants aux besoins de la population locale et non pas aux impératifs de la sportivisation impérialiste multinationale voulue par le CIO et la FIFA ; c) lutte particulière contre l'apartheid et toutes les formes de racisme dans et par le sport; d) développement des activités physiques en liaison avec les nécessités du développement culturel : alphabétisation, politique de la santé et de l'habitat, etc. Il s'agit de permettre à chaque africain ou asiatique de s'approprier sa culture et sa corporéité sans qu'interfèrent les soucis de promotion du sport de compétition.
Dans les entreprises il faut absolument prendre le contre-pied de ce qui a été fait jusqu'à présent. Au lieu d'introduire le sport bourgeois dans les activités de la classe ouvrière, il faudra au contraire tout faire pour développer des pratiques physiques capables d'élever la conscience de classe ouvrière et le désir d'auto-émancipation. Cela implique nécessairement :
a) la revendication de la réduction massive du temps de travail et le contrôle ouvrier sur les cadences de travail afin de diminuer les efforts physiques et
nerveux, sources d'accidents du travail et de stress. La revendication du temps libre (sous contrôle ouvrier) doit être l'occasion de remettre en cause fondamentalement la division capitaliste du travail qui est à l'origine de toutes les mutilations et aliénations par le travail ;
8) le refus de toutes les formes de gymnastique de pause ou d'éducation physique de compensation dont le seul objectif (par exemple au Japon ou en Suède) est la récupération de la force de travail et la rentabilisation des investissements énergétiques. S'il faut revendiquer des temps de pause et des aires de repos, ce n'est pas pour y caser des contraintes productivistes au service du patronat ! ;
c) la revendication d'heures libres pour la pratique physique et sportive, sous contrôle ouvrier, et dans un but culturel affirmé. De ce point de vue il faut souhaiter la disparition de la FSGT et de toutes les autres formes de sport corporatif qui ne font que singer le sport bourgeois civil. Pas de compétitions inter-ateliers ou inter-entreprises, pas de championnats corporatifs qui divisent l'unité de la classe ouvrière, mais libre pratique des activités sportives. Chaque comité d'entreprise ayant l'obligation de financer l'équipement sportif et de veiller au bon déroulement de ces activités. Il ne s'agit pas de faire des usines des « lieux dévie », ce qui dans le capitalisme est une utopie, mais de permettre à la classe ouvrière et surtout aux jeunes de profiter des avantages matériels de l'entreprise pour pratiquer des sports ;
d) l'organisation de loisirs et de vacances gratuites (financées par le patronat) pour les jeunes ouvriers (séjours à la montagne ou à la mer, etc.). Ces séjours peuvent d'ailleurs être compris comme des périodes de formation continue. Il n'y a aucune raison de laisser les sports de luxe à la bourgeoisie et à la petite bourgeoisie ;
e) l'accès gratuit pour tous les jeunes aux installations sportives et lieux culturels ;
f) la mise en place de commissions spéciales, sous contrôle ouvrier, pour surveiller les cadences, les conditions d'hygiène et de travail, les mesures de sécurité, etc.

A l'école, il y a quelques mesures urgentes qui s'imposent absolument :
a) Tout d'abord, dans le cadre d'une intégration totale de l'EPS à l'Education Nationale, il s'agira de reformer complètement la formation des enseignants en Education Physique et Sportive :

- suppression de la spécialisation sportive obligatoire, mais au contraire polyvalence sportive et extra-sportive ;

- formation approfondie en sciences humaines (histoire, sociologie, psychanalyse, etc.) ;

- double formation possible (par exemple allemand et EPS ou maths et EPS). Cela se fait dans d'autres pays, il n'y a aucune raison de le refuser. Nous sommes par principe pour les formations polyvalentes. Et cela permettrait aux enseignants âges de se recycler plus facilement;

- formation pédagogique sur le terrain tout au long du cursus universitaire ;

- la formation physique se ferait plutôt dans le sens d'une meilleure connaissance des pratiques corporelles et de l'image du corps que des résultats sportifs.

8) Ensuite, l'association sportive scolaire doit être absolument décloisonnée et fonctionner comme une association socioculturelle plutôt qu'exclusivement sportive. Le but de l'AS ne doit plus être la compétition mais l'initiation et la libre pratique de tous les sports et activités physiques, sans aucune réduction sportive possible. Or, trop souvent, l'AS est conçue comme vivier de recrutement pour les clubs civils !

c) Les horaires d'Education Physique (5 heures minimum) seront placés de telle sorte qu'ils ne constituent pas un exutoire des maths et de la physique, mais aient des effets psychologiques et physiologiques bénéfiques (notamment en fin d'après-midi). Et pourtant combien d'heures d'EPS le matin de bonne heure en hiver dans le froid, la boue et sous la pluie ! ! !
d) Les équipements scolaires seront absolument prioritaires et devront obéir à des normes évolutives non rigides, non sportives, de manière à ce qu'on puisse les utiliser également comme lieux culturels et publics.
e) Les épreuves d'EPS aux examens seront purement et simplement supprimées. Elles sont grotesques et inutiles. Elles dévalorisent et ridiculisent l'EPS. Le corps n'a pas à être noté !
f) La mixité totale sera rapidement introduite à tous les échelons, de manière à lutter contre le sexisme implicite ou explicite des milieux sportifs.
g) Dans la mesure du possible on favorisera l'association de l'éducation physique avec les autres disciplines dites « secondaires » : musique, dessin, chant, etc. Ce dont il s'agit, c'est d'une culture du corps intégrale prenant en compte toutes les dimensions (généralement refoulées) du corps (esthétique, érotique, symbolique, etc.).
h) II y a lieu de prévoir des séjours à la montagne et à la mer plus fréquents et gratuits où seraient possibles les initiations aux sports nouveaux de plein air (delta plane, surf, planche à voile, escalade, etc.).
i) L'essentiel de l'effort éducatif portera sur les maternelles et les primaires, là où précisément aujourd'hui il y a très peu d'éducation physique. L'objectif évidemment ne sera pas de recruter de futurs gladiateurs sportifs, mais d'éveiller les tout jeunes aux activités physiques éducatives et ludiques. En particulier on redonnera aux jeux physiques toute leur importance.
j) On peut parfaitement imaginer une ou deux demi-journées par semaine consacrées exclusivement aux activités de plein-air. Le principe étant qu'il faut au maximum respecter les besoins de mouvements et de jeux des jeunes enfants. Il faut une fois pour toutes se dire que l'éducation physique et sportive a autant de place et d'importance pour le développement des enfants que les maths et la géographie. Il serait temps de faire passer ces bonnes résolutions des congrès de parents d'élèves dans la vie effective...
k) Tout le système des colonies de vacances et des centres aérés devra être sévèrement revu et corrigé pour que l'on ne puisse plus chanter « les jolies colonies de vacances » ! Gratuites en leur principe, ces vacances devront beaucoup plus associer les adolescents et les enfants et ne plus être des parcs

à gamins. Les sites de montagne et de mer, jusque-là colonisés par le grand capital, seront dorénavant réservés en priorité à la jeunesse ouvrière et scolarisée.

En ce qui concerne les activités de tourisme, il faudra, là aussi, introduire une gestion socialiste rigoureuse incompatible avec le laxisme profiteur du capital. Parmi les mesures urgentes à prendre, on retiendra :

- l'interdiction de toutes les activités polluantes telles que le hors-bord, les motos-skis en montagne

ou les pique-niques dégradants. On veillera à réserver des domaines de plus en plus étendus à la protection de la faune et de la flore (réserves et parcs naturels) ;

- l'interdiction de toutes les chasses qui mettent en cause l'environnement, la survie des espèces et représentent des actes de cruauté insupportables : ce sera une contribution à la lutte contre le fascisme ordinaire des chasseurs-gros-cons !

- la stricte réglementation de l'alpinisme qui constitue aujourd'hui une course imbécile à la mort ; les pistes de ski sont devenues des boulevards à suicide ! II faudra absolument éviter que des fous
« du corps » ne mettent en cause leur propre vie et surtout celles des sauveteurs. Par ailleurs, les hautes montagnes seront totalement protégées contre l'intrusion de ces hordes de touristes qui saccagent tout sur leur passage à la recherche de l'edelweiss !

- l'interdiction (en liaison avec les organismes internationaux) de tous les safaris et rallyes qu'affectionnait tellement Giscard. L'Afrique et l'Asie ne doivent plus être des territoires néo-coloniaux pour maniaques de la gâchette... Surtout les rallyes automobiles seront déclarés dangers publics pour l'environnement et la population (que l'on se souvienne des derniers Paris-Dakar !) ;

- l'accès aux plages sera totalement libre et on révisera tous les permis de construire sur le littoral afin de désenclaver et libérer le front de mer ; toutes les villas ne respectant pas les dispositions de libre accès seront poursuivies juridiquement ou rasées;

- les plages privées et les plages payantes seront purement et simplement abolies : il faut mettre fin à cette division des plages suivant le fric et le taux de pollution !

- sur toutes les plages il y aura la permission de se foutre à poil ou de porter les maillots de bain de son choix. Les plages ne seront pas des annexes de l'évêché !

- les CRS et autres flics de la police nationale seront totalement remplacés par du matériel et des moniteurs civils, tant à la montagne que sur les plages : non à la militarisation des loisirs'.

- tous les centres de vacances et de loisirs devront être agréés par l'Etat quant aux normes d'hygiène et de sécurité : les transports seront gratuits pour les jeunes ouvriers et les scolaires ;

- on réglementera strictement la construction de nouvelles stations de ski de manière à éviter la « sarcellisation » de la montagne. Au demeurant, les stations de ski seront nationalisées et gérées par un office national de la montagne déclaré d'utilité publique. Cela permettra de contrôler la spéculation immobilière et surtout les prix des services offerts par les stations ;

- les centres de tourisme de luxe (club Méditerranée, etc.) seront strictement contrôlés pour éviter l'infiltration néo-coloniale dans les anciennes colonies. Il est intolérable que des bourgeois et petits-bourgeois

se goinfrent et baisent alors qu'à quelques centaines de mètres de ces lupanars les autochtones crèvent de faim et de misère. Non aux enclaves « romaines » dans l'univers de la pauvreté !

- des mesures spécifiques en faveur du tourisme populaire seront prises de manière à démocratiser réellement les loisirs. Ainsi, par exemple, dans le cadre d'une augmentation des congés payés (6 semaines pour tous), des séjours à la neige ou à la mer seront pris en charge par les organismes sociaux ou les comités d'entreprise à des prix très bas.
Dans l'institution militaire enfin, il s'agira surtout de développer une formation physique non militariste. En supposant que l'armée soit réellement démocratisée et au service des travailleurs, contrôlée par le pouvoir civil socialiste des travailleurs et non par une hiérarchie militaire (la nation en armes et non une caste de salauds et de crevures galonnées), en supposant donc une société socialiste où l'armée ne soit pas une institution de guerre civile, ni une armée néo-coloniale, on peut parfaitement imaginer la nécessité de ladite armée pour défendre le socialisme. Dans ce cadre là, la formation physique ne consistera pas à embrigader ou à humilier, mais à développer les qualités physiques du citoyen et à assurer sa préparation au combat. On sait parfaitement que les meilleures armées sont les plus démocratiques et celles dont la formation politique se fait au nom d'un idéal. Cet idéal sera la défense du socialisme démocratique et des libertés, la solidarité internationaliste. La formation physique reflétera cette éducation générale. Le service militaire sera mixte et égalitaire. On y apprendra non pas à glander, mais à manier réellement les armes et les engins. La compétition sportive n'y aura pas cours, pas plus qu'ailleurs, et si l'on insistera un peu plus sur les sports dits de combat, on mettra en avant également la formation physique polyvalente à l'aide des nouvelles techniques sportives (delta, surf, etc.). En temps de paix l'armée servira à des tâches d'utilité publique et au service civil (routes, etc.).

Conclusion

Toutes ces propositions sont pour la plupart « irréalisables » sans une volonté politique clairement affirmée. Il n'y a pas de réformes possibles dans le cadre du réformisme. Les réformes sont toujours le sous-produit d'un mouvement révolutionnaire. En ce sens ces revendications et propositions supposent fondamentalement un pouvoir ouvrier authentique. Mais en retour, et en attendant ce pouvoir, elles incitent à la prise de pouvoir et la préparent. Ce sont donc des revendications de transition qui mènent de la lutte syndicale à la lutte politique, de la lutte partielle à la lutte globale, de la réforme à la révolution. D'un autre côté ces propositions n'ont pas de sens isolément. Elles ne pourront être réalisées que dans le cadre de profonds changements dans l'organisation du travail, des transports, de l'habitat, de la santé et de l'éducation. En ce sens ces propositions sont également transitoires parce qu'elles forcent à généraliser les changements à toutes les institutions sociales.

C'est du point de vue de classe ouvrier explicitement que sont formulées ces propositions. Cela signifie donc que pour nous le socialisme est au bout du compte la seule forme de société capable de favoriser le développement intellectuel et physique de l'humanité. Il y va de l'avenir d'une éducation physique intégrale, où la formation intellectuelle, technique, esthétique et corporelle serait étroitement intégrée à l'ensemble des pratiques sociales. Comme l'écrit Marx : la société socialiste future sera la « démonstration pratique de la possibilité d'unir l'enseignement et la gymnastique avec le travail manuel et, vice versa, le travail manuel avec l'enseignement et la gymnastique ». Ce sera « une éducation qui unira pour tous les enfants au-dessus d'un certain âge le travail productif avec l'instruction et la gymnastique et cela non seulement comme méthode d'accroître la production sociale, mais comme la seule et unique méthode de produire des hommes complets. »

QUEL CORPS ?


Voilà aussi quelques précisions sur sa méthode:

Jean-Marie Brohm : A l'opposé de mes contradicteurs ma méthode est unitaire, elle est marxiste, ou plutôt freudo-marxiste à savoir une méthode dialectique qui pense en terme de négativité, d'unité des contraires. Je suis pour faire passer les contradictions au stade de l'antagonisme afin de faire exploser l’institution et je suis moi-même un élément de cette contradiction. Par principe donc je suis opposé à toute forme d'éclectisme tel que le pratiquent avec tant de bonheur certains théoriciens : un peu de Bourdieu, un peu de N. Elias, beaucoup de prudence et un zeste de Foucault sans parler de leur pratique souvent inexistante ou de leur crainte de devoir retourner sur les terrains boueux des stades... considérant comme infamant d'être prof de gym de base !
La catégorie centrale de la méthode marxiste est, comme G. Lukacs l'a bien montré, la catégorie de la totalité concrète. J'ai donc analysé transversalement, horizontalement, verticalement la totalité des instances de l’institution dans son rapport à toutes les institutions bourgeoises et dans son rapport au mode de production capitaliste à l'échelle mondiale (impérialisme). C'est ce qui m'a permis de comprendre le rôle des multinationales, des appareils d'États, du marché mondial, des institutions internationales (ONU) dans le développement du sport. La deuxième catégorie centrale est celle de négativité. J'insiste toujours sur les " mauvais côtés " du sport, ceux qui font mal. C'est la raison pour laquelle on m'accuse de négativisme ou de nihilisme. Mais depuis quand accuse-t-on un médecin qui procède à un diagnostic lucide de vouloir tuer son malade ? On constate cependant que les grandes révolutions théoriques dans les sciences humaines ont toutes insisté sur la négativité et la contradiction. Freud par exemple montre la négativité du désir, de la sexualité et de la pulsion de mort. Marx, pour sa part, souligne la lutte des classes, c'est-à-dire l'impossible réconciliation de groupes antagonistes. Pour ma part j'analyse la contradiction fondamentale du sport : le principe de rendement qui creuse lui-même sa propre tombe. La course au rendement conduit à ses propres limites. Il devient absurde de départager des concurrents sur des poussières d'espace ou de temps. L’analyse des contradictions de l’institution sportive me semble décisive car elle avive la crise et notre propre critique constitue une contradiction importante... Enfin la méthode marxiste est essentiellement une méthode conceptuelle. Ce sont ces concepts qui permettent de penser la réalité empirique et surtout de prévoir les tendances d’évolution. Les concepts de sportivisation, d'appareil idéologique d'État, de principe de rendement, d’olympisation du monde, de procès de production sportif nous ont permis d'avancer une série de thèses qui sont aujourd'hui incontournable

Quelqu'un peut me faire un résumé ??
Ca me gonfle d'avance de lire tout ça...
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Urriko
 
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Inscription : 12 Avr 2004, 16:09

Message par Ratus » 11 Nov 2004, 23:58

Jean Marie Brohm : je voudrais d'abord préciser un point décisif : le vrai scandale de " l’effet Brohm", c'est que je suis à la fois prof de gym de base dans un lycée, donc homme de terrain, et intellectuel marxiste, sociologue du sport indépendant, n’ayant aucune attache avec une quelconque institution officielle et que donc ma parole est libre de toute implication institutionnelle. Le clash, le nexus pour parler de manière savante, est que j’analyse le sport théoriquement, mais aussi politiquement d’un point de vue révolutionnaire. Si je me contentais d'analyser le sport sans essayer de le détruire cela passerait bien. Nombreux sont en effet les intellectuels détachés de toute prise de position critique. Mais moi je critique, je conteste de l’intérieur ma propre pratique et ma propre détermination d’enseignant d'EPS. Voilà ce que l'on me reproche essentiellement. Ce qui fait donc problème est la conjonction entre une critique théorique et une remise en cause politique de fond, d’autant que je suis devenu un peu le contestataire de service dans les médias et ailleurs.
Ce qui fait mal et peur aussi c’est que par ma critique je contrains tous les praticiens à prendre position. Je ne laisse personne indifférent. Je suis un gêneur (même si on rend hommage au décapage opéré par ma critique) parce que l'analyse de l’institution sportive est un paradigme de l’analyse sociale du capitalisme et du stalinisme. Je n’ai jamais caché mes sympathies pour le trotskysme et la révolution permanente et parce que " j’annonce la couleur " je force les autres à énoncer leurs couleurs ou leurs cartes. De fil en aiguille toutes les questions : rapport au corps, à la sexualité, aux femmes, au travail, à la classe ouvrière, à l’État surtout et plus généralement aux valeurs incorporées, pour reprendre l'expression de Pierre Bourdieu sont portées sur la place publique. Je force donc à prendre position. Et cela fait peur, je n’y peux rien.




Voilà pour finir!
Ratus
 
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