Enseigner la préhistoire.

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par volodia » 23 Jan 2004, 21:50

(Barnabé @ vendredi 23 janvier 2004 à 20:31 a écrit :
Et là où je rejoins Caupo, c'est qu'effectivement, avec ses mécanismes propres l'évolution biologique se comprend à travers les lois de la dialectique: influence mutuelle des phénomènes (chaque espèce fait partie du milieu qui influe la sélection des autres), changement perpetuel (sous forme de mutations aléatoires), changement des variation quantitatives (mutations) en saut qualitatif (nouvelle espèce), car ces lois sont en fait les lois qui permettent de penser tout phénomène en mouvement (c'est à dire de tout phénomène réel).

Deux discussions se poursuivent en même temps.
1) les points communs entre les mécanismes régissant société, pensée et nature, résumés par Barnabé dans le passage que je cite. Bon OK tout est en mouvement, des forces contradictoires s'affrontent et il en émerge des changements qui parfois débouchent sur des ruptures. J'ai pas l'impression qu'il est indispensable d'avoir épluché l'anti-duhring et matérialisme et empiriocriticisme pour être d'accord avec ça. Il suffit de pas être trop idéaliste et finaliste. P'têt pas besoin d'en faire un tel fromage.

2) l'évolution aléatoire ou déterministe. Là je ne suis pas d'accord avec Rojo. L'homme a incontestablement, avec la conscience, qui elle-même résulte d'une édification et d'une centralisation du système nerveux très coûteuse en énergie, une particularité unique. (Pour rebondir sur qqch qui a été dit par Barnabé, je crois, à mon avis en effet la conscience n'a pas été sélectionné pour elle même mais comme effet -voire un dommage ?- collatéral de l'extrème complexification du système nerveux.) Il est très intéressant de savoir si l'organisation biologique a pour propriété générale de produire (à terme) la conscience, et nettement moins intéressant de savoir si elle produit le rhododendron ou le ragondin. Et je serais tenté de penser que oui, à terme la vie finit par engendrer la conscience. Bon par ailleurs je ne suis pas sûr que ce soit ce que la vie a fait de mieux. Mais enfin il faut s'en accomoder. :smile:
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Message par volodia » 23 Jan 2004, 21:55

PS Jacquemart tu te trompes le critère de l'interfécondité n'est pas du tout opératoire pour déterminer les espèces. Il ne marche qu'avec les animaux les plus complexes et encore beaucoup d'hybrides sont possibles, et même féconds. Pour les microorganismes il ne marche pas du tout, et pour les espèces éteintes -évidemment- il n'est d'aucune utilité. De façon générale la possibilité d'accoupler deux spécimens pour savoir si la descendance est féconde n'existe quasiment jamais ! En fait ce concept est très subjectif et fait l'objet de discussions importantes, certains scientifiques (minoritaires) disant qu'il est purement une création humaine.
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Message par Jacquemart » 23 Jan 2004, 21:59

Il me semble que les raisonnements tenus par Rojo en matière biologique snt les mêmes que ceux des anti-marxistes en matière sociale. Pour le paraphraser et montrer à quoi mène sa manière de voir :

Mais du point de vue de n'importe laquellle des autres sociétés qui existent en ce moment sur terre, et qui sont le fruit d'une évolution aussi longue que la notre, l'évolution ne peut aussi aboutir qu'a une forme sociale leur ressemblant.
Des formes de sociétés aussi dissemblables que les chasseurs paléolithiques de l'Amazonie, les communautés pastorales Touaregs, les chefferies océaniennes, etc. sont toutes et de façon égale "l'aboutissement de l'évolution sociale". Le capitalisme ou le féodalisme auraient très bien pu ne pas exister, seul une succession de hasards a fait que nous sommes dans une société industrielle.

Cette phrase te semble-t-elle compatible avec la perspective marxiste ?
Question subsidiaire : le "point de vue des sociétés" elles-mêmes, ou le "point de vue" des différentes espèces est-il le meilleur endroit où il faut se placer pour comprendre les phénomènes de manière objective ?
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Message par Barnabé » 23 Jan 2004, 21:59

Sur la notion d'espèce, justement on peut se creuser la tête autant qu'on veut (et il y a un paquet de scientifiques qui l'ont fait), il n'y a pas un critère objectif. L'interfécondité ne marche pas (exemple le chien et le loup sont interfécond[ps. edit, je revois au message de volodia ci-dessus]), des critères de physionomie (ressemblance) ne marchent pas(où mettre la frontière?). La seule chose qu'on peut utiliser c'est la généalogie, mais dans ce cas il est impossible de placer objectivement la limite. Bien sûr quand après séparation et évolution séparées, il n'y a plus interfécondité on peut être sûr qu'on a des espèces différentes (exemple l'homme et le chimpanzé). Et les espèces ne sont pas des abstractions esthético-philosophiques. Mais il est impossible de trouver un critère qui fixe précisément la limite.

La où je suis d'accord avec Jacquemart c'est qu'il s'agissait bien de papillons et pas de mouche dans l'exemple.

Sinon :
a écrit :On parle la même langue, mais on ne se comprend pas. Les bactéries ont la faculté de muter pour devenir de nouvelles espèces adaptées à leur milieu. Mais c'est l'exact opposé de ce que l'on peut appeler un organisme supérieur, à savoir un organisme polyvalent, capable d'évoluer dans un milieu changeant !

Là tu postule que la nature sélectionne a priori la polyvalence et que c'est le critère des "organismes supérieurs". Comme si les espèces polyvalentes étaient sélectionnées "au cas où" l'environnement changerait. Non, ce qui fait la survie d'une espèce dans un milieu donné c'est son aptitude à survivre dans ce milieu et c'est tout. Alors oui, l'humanité est polyvalente mais quand l'homo sapiens sapiens est apparu quelque part en Afrique, ce qui lui a permi de survivre et de se constituer comme espèce séparée(et éventuellement d'utiliser sa polyvalence pour s'étendre sur quasiment toute la planète), ce n'est pas sa polyvalence et sa capacité à pouvoir trouver le moyen de vivre dans le cercle polaire. Encore une fois le seul moteur de l'évolution c'est la sélection de caractères permettant la survie. Et les unicellulaires qui ont survécu c'étaient ceux qui avait le plus de variabilité, ce qui permettait de s'adapter à tout milieu (et c'est le produit d'une évolution aussi, il y a sans doute des bactéries qui variaient très peu d'une génération à l'autre et qui ont été éliminées par les changements de conditions extérieurs). Et dans le cas d'un fort changement des conditions (par exemple une élévation du climat) rien ne dit que c'est l'homme qui s'en tirera le mieux, le terme "espèce la mieux adapté" est une qualification après coup.
Enfin
a écrit : L'homme n'est justement pas plus évolué parce qu'il est "plus adapté" à un milieu, mais parce qu'il l'est moins que toute autre espèce. Et le même critère s'applique également pour les amphibiens contre les poissons, les reptiles contre les amphibiens, etc.

Si telle était le cas, l'homme moins bien adapté se serait tout de suite fait bouffé et c'était la fin de la grande histoire de l'humanité. Heureusement (pour lui ... et pour nous) l'homme était adapté à son milieu: son anatomie permettait une communication verbal plus évolué que n'importe quelle autre animal et donc une action concertée, et la bipédie entraînant la liberté des mains à permettait le développement technique, c'est cela qui c'est révélé un avantage selectif décisif dans quasiment tous les environnements.
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Message par Jacquemart » 23 Jan 2004, 22:18

Barnabé : tu ne discutes pas de ce que j'écris, mis de ce que tu crois que j'ai écrit.

a écrit :Là tu postule que la nature sélectionne a priori la polyvalence


Où ai-je parlé d'a priori ? Et surtout qu'est-ce qu'une sélection a priori ? J'ai du mal à imaginer...

a écrit :Comme si les espèces polyvalentes étaient sélectionnées "au cas où" l'environnement changerait


Même remarque. Absolument pas. En revanche, posons le problème à l'envers : les changements d'environnement (les crises climatiques) ne pénalisent-ils pas les espèces qui s'étaient très bien adaptées à une niche précise, et ne favorisent-ils pas l'émergence et la diffusion des espèces plus "généralistes" ?

a écrit :Non, ce qui fait la survie d'une espèce dans un milieu donné c'est son aptitude à survivre dans ce milieu et c'est tout


Absolument vrai... tant que le milieu ne change pas ! Mais justement, l'histoire de la vie, ce n'est pas qu'une histoire de milieux donnés, au sein desquels des espèces se spécialiseraient toujours davantage. C'est aussi celle des multiples changements de ces milieux, qui ont favorisé, sélectionné, l'apparition successive d'organismes de plus en plus complexes, de plus en plus capables de faire face à ces variations. Autrement dit, la stabilité d'un milieu pousse certes à l'adaptation des organismes par spécialisation. Mais la variation des milieux a poussé à l'adaptation des organismes par indépendance vis-à-vis de ce milieu.

a écrit :Si telle était le cas, l'homme moins bien adapté se serait tout de suite fait bouffé et c'était la fin de la grande histoire de l'humanité. Heureusement l'homme était adapté à son milieu: son anatomie permettait une communication verbal plus évolué que n'importe quelle autre animal et donc une action concertée, et la bipédie entraînant la liberté des mains à permettait le développement technique, c'est cela qui c'est révélé un avantage selectif décisif dans quasiment tous les environnements


La fin de ce paragraphe réfutant explicitant le début, je n'ai rien à ajouter à cela !
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Message par Barnabé » 23 Jan 2004, 23:00

Essayons de nous comprendre (donc corrige moi si ce n'est pas ce que tu veux dire): tu parles de la polyvalence comme d'un avantage sélectif et donc du coup comme un critère après coup d'évolution.
Le problème c'est que là et quand l'homme est apparu et s'est imposé comme espèce viable, la polyvalence n'a pas joué de rôle. C'est uniquement son adaptation aux conditions de son milieu qui ont joué. La polyvalence n'a joué son rôle qu'après, lorsque des homme ont migré et lorsque les conditions se sont modifié. Mais l'évolution fonctionne selon le principe de "ici et maintenant".
La polyvalence n'est pas un avantage sélectif.
Là où je peux être d'accord avec toi, c'est si on dit que la polyvalence de l'homme qui s'est manifestée après coup lui a permi de s'étendre sur toute la planète et de résister à tous les changement climatique sans avoir à se redifférencier en une nouvelle espèce.
Il y a bien une branche de l'évolution qui a été vers la complexité et la polyvalence. Ce n'est pas par "hasard", c'est le produit nécessaire d'une évolution. Mais cette complexité est un produit et pas une cause de l'évolution, et ce n'est pas le seul effet possible (je ne reviens pas sur les bactérie où l'effet produit par la sélection est la variabilité, et pour tous les autres êtres vivant, c'est un peu des deux). Et du coup cela ne me semble pas avoir trop de sens de dire que l'homme est l'espèce la plus évoluer (de l'unique point de vue de l'évolution biologique ). Car au fond cela revient à prendre comme critère un produit de l'évolution parmi d'autre alors que le seul critère objectif du point de vue de l'évolution elle même est la survie dans un milieu donné.
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Message par depassage » 23 Jan 2004, 23:08

Je suis d'accord pour dire que l'adaptabilité est-un critère. Ceci dit l'évolution des espèces dépend beaucoup des changement de milieu, l'évolution des société des changements de moyens de production ... Sans être déterministe, la part du hasard (qu'il faudrait qu'on définisse pour parler de la même chose, mettons de l'impondéré) n'est pas la même dans les deux cas : un changement d'ére climatique n'a rien à voir avec les espèces en présence et les niches écologiques qu'elles occupent (c'est faux en toute rigueur mais je schématise), par contre la découverte de nouvelles techniques à tout à voir avec la société qui les a vu naître.

Annexe : il s'agissait du papillon du bouleau, celui-ci était traditionnellement blanc, comme le bouleau, mais des papillons noirs existaient, et se faisait bouffer puisqu'il avait un camouflage version armée française en 1870... mais l'homme est arrivé et l'industrialistion avec la pollution qui va avec à noirci les bouleaux...
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Message par depassage » 23 Jan 2004, 23:17

par ailleurs, farouchement armée d'un esprit de consensus, je pense que Jacquemart n'a pas tort de considérer l'évolution au-delà de l'échelle d'une espèce et d'essayer d'en dégager un dialectique globale (ca fait pompeux dit comme ça)... pour donner une métaphore : on peut toujours dire qu'un gaz est un ensemble très grand de particules qui interagissent les unes entre elles, d'où un système de relations différentielles à résoudre, immense, insoluble et parfaitement inutile; on peut aussi raisonner globalement (ce que fait la thermodynamique avec succès) et considèrer un gaz comme un système physique caractériser par sa pression, sa température, son volume (et autres quantités)...
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Message par Jacquemart » 23 Jan 2004, 23:29

a écrit :Mais cette complexité est un produit et pas une cause de l'évolution


Absolument OK.

a écrit :et ce n'est pas le seul effet possible


Bien entendu. Sinon, depuis le temps, il n'existerait plus que des organismes complexes !

a écrit :Et du coup cela ne me semble pas avoir trop de sens de dire que l'homme est l'espèce la plus évoluer (de l'unique point de vue de l'évolution biologique ). Car au fond cela revient à prendre comme critère un produit de l'évolution parmi d'autre alors que le seul critère objectif du point de vue de l'évolution elle même est la survie dans un milieu donné.


C'est peut-être là que nous avons du mal à nous comprendre. Mon problème n'est pas de décerner à différentes espèces des diplômes d'évolution, afin de pouvoir repartir en brandissant fièrement tous mes premier prix d'être humain et faire ainsi honte à mon chat. Gotlib faisait déjà remarquer que si l'on prend comme critère non le cerveau, mais l'estomac, alors la vache peut légitimement nous prendre de haut.

Encore une fois, je discutais des conceptions de Gould selon lesquelles l'évolution n'a été qu'une succession de hasards, et que toute la suite d'événements qui a mené - entre autres, je te le concède - à l'apparition d'organismes de plus en plus complexes, jusqu'à l'Homme, n'était qu'un scénario extrêmement improbable. C'est cette idée, centrale chez Gould, qui n'est pas marxiste, parce qu'elle nie la nécessité. En particulier, elle nie que les variations climatiques devaient nécessairement produire, via des crises, des extinctions, des bouleversements, des organismes de plus en plus indépendants de leur milieu (appelés "plus évolués" pour faire vite).

Prendre comme critère d'évolution l'indépendance par rapport au milieu (dont la taille relative du cerveau n'est qu'un aspect), cela peut te sembler arbitraire, et dans une certaine mesure ça l'est. Mais ni plus ni moins que le critère des forces productives pour juger du développement d'une société.

Il n'y a pas de bons et de mauvais critères "en soi". Il y a des critères adéquats, ou non, au problème que l'on discute.
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