Cyrano a écrit :
J'avoue que tout ce qui avait trait à la perte de diversité animale m'avait laissé de marbre. Le Dodo à la Réunion n'est plus un oiseau balourd mais une marque de bière, bof, on fait avec...
D'abord, quelques petites précisions : le dodo qui figure sur la bière de la Réunion est celui de l'île Maurice, ou dronte de l'île Maurice, apparenté aux pigeons et disparu probablement avant 1700.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bourbon_(bi%C3%A8re)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Dodo_(oiseau)
Il existait bel et bien un oiseau encore plus mystérieux appelé lui aussi dodo à La Réunion, qui a abusivement été représenté dans des dessins ou peintures faites ultérieurement, comme un oiseau ressemblant au dronte de l'île Maurice. Le recoupement de divers éléments dont des fossiles retrouvés ont conduit à déterminer qu'il s'agissait d'un oiseau pas du tout apparenté, une sorte d'ibis appelée solitaire de la Réunion ou ibis de la Réunion.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ibis_de_la_R%C3%A9union
(grrr... fait ch... Plestin, tu pinailles !)
Les oiseaux, qui sont en fait les seuls dinosaures ayant survécu (mais avec quel succès), représentent un groupe d'animaux extraordinaire à bien des égards. L'évolution a façonné un très grand nombre de groupes et de variétés, avec souvent une place importante de la sélection sexuelle qui est l'une des formes de la sélection naturelle. Cette sélection a fourbi plusieurs armes : celle du plumage, celle du chant, celle du comportement, avec chez beaucoup d'espèces une parade nuptiale mêlant les trois types d'armes pour séduire le partenaire en période de reproduction. La sélection naturelle a elle aussi conduit à une incroyable diversité de formes, de comportements et d'adaptation à tous les milieux.
J'aimerais donc créer ce fil, ne serait-ce que pour convaincre que la diversité des oiseaux est au moins aussi importante et aussi fascinante que la diversité des bières

Je l'alimenterai régulièrement mais n'hésitez pas à le faire aussi si le cœur vous en dit, il y a largement de quoi faire avec les oiseaux !
* * * *
C'est parti, avec... les oiseaux jardiniers ou oiseaux à berceau, qui vivent en Nouvelle-Guinée et en Australie. Ces oiseaux sont fascinants, parfois par leur plumage, mais surtout par leur comportement nuptial : le mâle construit un berceau de brindilles (ce n'est pas le nid) dont il décore les abords voire l'intérieur avec toutes sortes d'objets, créant ainsi une scène où il pourra effectuer sa parade nuptiale pour séduire la femelle.
Le jardinier satiné (Ptilonorhynchus violaceus), un oiseau qui aime le bleu et tire parti du plastique qui traîne dans la nature ! Il lui arrive même de peindre l'intérieur de son berceau.
https://www.youtube.com/watch?v=1EN9k6LEulg
Quelques extraits de l'article Wikipédia correspondant (mais tout est intéressant : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jardinier_satin%C3%A9 )
Construction du berceau
Le mâle choisit, dans une clairière, une petite aire dégagée d’environ 1,20 m de long et 0,60 m de large qu’il tapisse ensuite de brindilles d’une vingtaine de centimètres de long sur une épaisseur d’environ 5 cm. Puis, il élève, au centre de cette plate-forme, deux parois verticales et parallèles de rameaux solidement plantés dans le sol et fermement entrelacés. L’allée ainsi confectionnée mesure de 60 à 90 cm de long et 10-12 cm de large, dans sa partie intérieure, permettant juste à l’oiseau de passer. Les rameaux verticaux qui mesurent 30-35 cm se courbent légèrement à leur extrémité de façon à former une voûte plus ou moins prononcée. L’oiseau se met ensuite à décorer l’entrée principale et ses alentours (plus rarement les deux entrées) en disposant sur le sol de nombreuses garnitures de coloration prioritairement bleue et secondairement violette, verte et jaune (Ottaviani 2014).
Généralement un individu entretient un berceau pendant quatre ou cinq ans en le consolidant sur place chaque année ou en reconstruisant un autre un peu plus loin mais un mâle âgé de plus de 20 ans a été observé sur le même berceau pendant plus de 15 ans. La disparition d’un mâle dominant, établi depuis longtemps sur un site à succès, engendre une compétition acharnée pour sa possession qui, elle-même, occasionne des changements de propriétaires des berceaux voisins (Frith & Frith 2009).
Décoration
Ottaviani (2014) a répertorié tous les éléments décoratifs mentionnés dans la littérature, émanant de son observation personnelle ou provenant de documents photographiques et cinématographiques disponibles sur Internet. Ils sont répartis en éléments naturels : des fleurs et des fruits bleus, violets, rouges et jaune-vert, des cosses jaunes de graines de cycas, des plumes, notamment des rémiges de perruches de Pennant (Platycercus elegans) et des plumes bleues d’autres perruches et perroquets, des feuilles mortes, des champignons gris, des ailes bleues de papillons, des élytres de scarabées, des cigales et des araignées desséchées, des coquilles d’escargots brunes, des morceaux de peaux de serpents, des nids de guêpes, des crânes et des squelettes de petits mammifères, oiseaux et reptiles, des coquilles d’œuf, la peau d’un malure superbe mâle (Malurus cyaneus), la mandibule inférieure et des plumes d’un oiseau à berceau satiné mâle ! Les objets artificiels, très majoritairement de couleur bleue, se composent de sachets en plastique, capsules de bouteilles, petits jouets d’enfants (surtout des legos), boites d’allumettes et paquets de cigarettes, pailles de boisson, élastiques à cheveux, briquets, stylos, cartouches de fusils, pinces à linge, clés de voitures, différents morceaux de papiers, de tissus et de plastiques, bouts de ficelle, morceaux de métal, pièces de monnaie, débris de vaisselle blanche (avec un liseré bleu !), éclats de verre et de marbre, bijoux et même des préservatifs !
Peinture du berceau
Ce phénomène extraordinaire a été découvert par Gannon (1930) qui avait remarqué que le mâle utilisait un morceau d’écorce pour déposer de la peinture (mélange de charbon de bois et de salive) sur les brindilles intérieures du berceau. Les études ultérieures de la part d’autres naturalistes et le visionnage de séquences vidéo récentes ont affiné l’observation de Gannon et ont permis de reconstituer le déroulement de ce comportement singulier car il représente l’un des rares exemples d’utilisation d’outils dans le monde des oiseaux. Le mâle commence par écraser dans son bec des baies bleu-noir et de la poussière de charbon de bois (provenant de feux de brousse) dilués dans sa salive. Puis il saisit un fragment d’écorce fibreuse et étale à l’aide de ce « pinceau » la mixture colorée à l’intérieur de l’allée. La peinture s’écoule du morceau d’écorce que l’oiseau tient en travers de son bec entrouvert et qu’il déplace de haut en bas sur les parois. Cet enduit noir bleuté sèche rapidement et forme une croûte grumeleuse de 2-3 mm d’épaisseur qui s’effrite assez facilement au doigt. Au pic des parades nuptiales, certains mâles repeignent chaque jour leur berceau avec un nouveau pinceau. Le sol de l’allée est alors jonché de particules de peinture séchée. Cependant, certains individus n’utilisent pas d’outils et déposent directement le colorant par le bec (Ottaviani 2014).
Le jardinier ardent ou jardinier flamboyant (Sericulus ardens)
https://www.youtube.com/watch?v=1XkPeN3AWIE
Les commentaires de la BBC sont amusants mais à prendre avec réserve : l'iris de la "femelle" étant jaune sur cette vidéo, il s'agit plutôt d'un mâle juvénile jouant le rôle de femelle pour une séance d'entraînement. Parfois, chez cet oiseau, l'entraînement va jusqu'à un simulacre d'accouplement. Ceux qui ont réalisé le reportage savent parfaitement distinguer les oiseaux mâles immatures des femelles. La BBC a sélectionné une séquence et probablement adapté son commentaire pour le rendre "tous publics"

Le jardinier brun (Amblyornis inornata) dont le plumage est certes bien terne mais dont le berceau est carrément une hutte
https://www.youtube.com/watch?v=08xZeU6Aksc
Si vous voulez des infos sur un peu tous les membres de la famille :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ptilonorhynchidae