La tournée d'été de la région havraise va commencer lundi 4 juillet.
Les étapes seront : Le Havre (Seine-Maritime) le 4 juillet ; Gonfreville-l'Orcher (Seine-Maritime) et Honfleur (Calvados)* le 5 juillet ; Lillebonne (Seine-Maritime) le 6 juillet ; Fécamp (Seine-Maritime) le 7 juillet ; Bolbec (Seine-Maritime) le 8 juillet ; et à nouveau Le Havre le 9 juillet.
*C'est bien Honfleur qui est indiqué sur le journal, j'ignore si c'est une erreur ou pas ; habituellement, quand ce type de circuit est fait, c'est un duo Gonfreville-l'Orcher / Harfleur qui est comme Gonfreville une banlieue du Havre alors que Honfleur est une petite ville du Calvados également située près du Havre mais de l'autre côté de l'estuaire de la Seine.
Hormis Fécamp qui est un port de pêche en déclin et, par ailleurs, n'est-ce pas camarade com_71 , le berceau de la fameuse Bénédictine (fabriquée ici par seulement quelques personnes et embouteillée dans le Gard), les autres villes sont toutes situées dans la vallée de la Seine (Lillebonne, Gonfreville) ou à proximité immédiate (Bolbec) ou à son embouchure (Le Havre, Honfleur).
Le Havre est une ville de 168.000 habitants, au centre d'une unité urbaine de 233.000 habitants qui inclut également Montivilliers (15.500 habitant), Gonfreville-l'Orcher (9.100 habitants), Harfleur (8.300 habitants), Sainte-Adresse (7.300 habitants), Octeville-sur-Mer (6.000 habitants) etc. En face du Havre sur l'estuaire de la Seine, Honfleur (6.700 habitants) est reliée au Havre par le pont de Normandie. Plus en amont sur la Seine, en direction de l'est, Lillebonne (8.800 habitants) forme une unité urbaine de 21.000 habitants avec trois autres communes, dont la commune nouvelle de Port-Jérôme-sur-Seine (10.200 habitants) elle-même issue de la fusion de Notre-Dame-de-Gravenchon avec trois autres communes. Sur le plateau du pays de Caux dominant la vallée au-dessus de Lillebonne, Bolbec (11.600 habitants) forme une unité urbaine d'environ 18.000 habitants avec 4 de ses voisines. Enfin, plus au nord sur le littoral de la Manche, Fécamp compte près de 20.000 habitants.
C'est une région très ouvrière et très industrielle avec Le Havre comme ancien bastion du PCF où il est encore très implanté via la CGT (qu'il doit partager avec LFI) même s'il a perdu la mairie en 1995 au profit de la droite. L'actuel maire du Havre est Edouard Philippe.
L'économie tourne autour de l'activité du port du Havre, 2ème port maritime de commerce en France après Marseille et premier port de conteneurs. Ancien port négrier ayant bien enrichi la bourgeoisie française, c'est aujourd'hui un centre d'échanges de marchandises majeur avec l'Asie (dans les deux sens), devant l'Europe et les Amériques. Parmi les principaux produits transitant par ce port on trouve les produits pétroliers et l'automobile (véhicules neufs). Le Havre est également un port maritime de voyageurs desservant de nombreuses destinations. Le port du Havre dans ses différentes composantes emploie 16.000 personnes en direct (dont plus de 2.000 dans la manutention, les dockers proprement dits, fortement organisés dans une CGT puissante), sans compter les emplois induits. Le trafic de conteneurs est en expansion et vient de franchir le cap des 3 millions de conteneurs par an (loin derrière Rotterdam 15 millions ou Anvers 12 millions), mais ce phénomène s'accompagne aussi d'une hausse du trafic de cocaïne qui empoisonne l'ambiance locale, les gangsters menaçant de plus en plus souvent certains dockers pour les obliger à devenir leurs complices (en 2021, un docker membre de la CGT a été enlevé, séquestré, torturé puis battu à mort).
L'industrie est elle-même en grande partie liée aux activités du port.
La métallurgie emploie près de 11.000 personnes avec notamment l'automobile représentée par Renault à Sandouville. Cette usine réalise le montage de l'utilitaire Trafic. Elle emploie 1.677 personnes en CDI, sans compter les intérimaires qui selon les époques peuvent rajouter 700 personnes voire bien plus à l'effectif. Elle va peut-être battre un record de production cette année, mais elle est loin d'atteindre son effectif passé, jusqu'à 13.000 personnes au maximum et encore 4.650 personnes en 2006. L'usine a été très perturbée par le manque de composants (notamment électroniques) depuis l'été 2021 mais la situation semble s'améliorer. L'aéronautique est également présente dans le secteur avec l'usine Safran Nacelles (ex-Aircelle, ex-Hispano-Suiza) qui emploie 1.700 personnes et vient d'investir dans une nouvelle ligne qui devrait lui permettre de doubler sa production de corps arrière de nacelles d'avions en 2022. Dans le secteur des éoliennes offshore, la nouvelle usine Siemens Gamesa Renewable Energy vient d'ouvrir ses portes au Havre et embauche, elle compte déjà 500 personnes et vise les 750 dans les mois qui viennent ; mais le même groupe Siemens est propriétaire depuis 2015 d'une autre usine métallurgique, historique du Havre, Dresser Rand (pompes et compresseurs) où il a annoncé en 2021 la suppression de 300 emplois sur 500. Autre usine métallurgique importante dans le secteur, Sidel à Octeville-sur-Mer a largement bénéficié de l'essor de la bouteille en PET à la place de celle en PVC (eaux minérales etc.) et fabrique des lignes d'extrusion-soufflage pour les bouteilles PET, mais elle a réduit ses effectifs en 2015 en annonçant 206 suppressions d'emplois sur 840.
Autre secteur très développé dans la région havraise : la chimie et le pétrole, avec près de 6.000 emplois dans ce qui est le 1er pôle chimique et pétrochimique français. Au nord du Havre on trouve le terminal pétrolier en eau profonde d'Antifer qui réceptionne le pétrole importé pour l'envoyer par oléoduc dans les bacs de stockage de la C.I.M. au Havre, avant d'alimenter toute cette filière. Le complexe de TotalEnergies à Gonfreville-l'Orcher est le fruit de la fusion de deux usines voisines et liées, une raffinerie de pétrole dite Raffinerie de Normandie (historiquement Total) et une usine pétrochimique (historiquement Elf-Atochem), lors de la fusion TotalFina / Elf en 2000 ; après la fusion Total a développé au maximum les synergies industrielles entre les deux unités (échanges de matières...) Outre les carburants et combustibles fabriqués par la raffinerie, celle-ci produit une essence particulière appelée naphta qui sert de matière première à l'usine pétrochimique ; celle-ci "craque" le naphta dans un vapocraqueur (une batterie de fours) pour donner naissance à des molécules qui servent de briques élémentaires à la chimie : l'éthylène, le propylène, le benzène, le butadiène, permettant d'en synthétiser d'autres comme le styrène etc. Certaines de ces matières sont polymérisées sur place pour donner naissance à différents plastiques tels que le polyéthylène (PE), le polypropylène (PP) et le polystyrène (PS), d'autres sont vendues à différents industriels de la région ou à l'export. Total possède aussi une usine de fluides spéciaux hydrocarbonés (pour peintures, vernis, phytosanitaires...) à Oudalle. En tout, TotalEnergies emploie directement autour de 2.000 personnes près du Havre et c'est l'un de ses deux plus grands complexes intégrés d'Europe avec Anvers en Belgique.
Un second complexe pétrochimique sur le même modèle (et alimenté en hydrocarbures depuis Le Havre par pipelines) est celui du groupe américain ExxonMobil ("Esso") situé non loin du pont de Tancarville, à cheval sur les communes de Port-Jérôme-sur-Seine et Lillebonne. Il est issu du rapprochement en 2002 de deux raffineries voisines, l'une Esso (dite de "Port-Jérôme") et l'autre Mobil (dite de "Notre-Dame-de-Gravenchon"), suite à la fusion Exxon / Mobil de 1999 qui a donné naissance au premier groupe pétrolier mondial. Ces deux raffineries ont été restructurées pour n'en faire qu'une et comportent différentes unités pétrochimiques et chimiques ainsi qu'une usine de lubrifiants, le tout formant ce qui s'appelle aujourd'hui la plateforme "de Gravenchon" ; celle-ci emploie directement 2.150 personnes et est le plus grand complexe intégré d'ExxonMobil en Europe. Les produits fabriqués par la raffinerie sont des carburants et combustibles variés, ainsi que des bases lubrifiantes et des bitumes, en plus du naphta qui alimente le vapocraqueur de Gravenchon ; ce dernier produit notamment de l'éthylène et du propylène transformés en plastiques PE et PP (cf. Total), mais aussi du butadiène ; l'usine produit divers autres polymères, résines et additifs.
Différentes usines chimiques liées ou pas à la pétrochimie sont présentes à proximité de ces deux complexes, par exemple Chevron Oronite à Gonfreville-l'Orcher (additifs pour carburants et lubrifiants, environ 600 personnes), Lubrizol à Oudalle (même type de production, environ 250 personnes), Synthomer à Sandouville (ex-Omnova, ex-Goodyear, caoutchoucs, résines et latex synthétiques, 200 personnes) et Arlanxeo Elastomères (ex-Firestone, ex-Bayer Elastomères, ex-Lanxess, caoutchoucs synthétiques en solution à base de butadiène, 200 personnes). Le sucrier Tereos possède aussi à Lillebonne une usine de production de bioéthanol (biocarburant) à partir de blé, d'environ 150 personnes. A Gonfreville, le groupe norvégien Yara possède une usine d'ammoniac et d'engrais azotés de 150 personnes fonctionnant de manière plus ou moins épisodique en fonction de l'évolution des prix de la principale matière première, le gaz naturel ; elle a ainsi connu une interruption d'activité de 3 semaines au tout début de la guerre en Ukraine quand le prix du gaz a atteint des sommets, mais elle a repris son activité depuis. Dans un tout autre domaine de la chimie, l'usine Oril Industrie à Bolbec est l'usine de principes actifs pharmaceutiques du laboratoire Servier (cardiovasculaires, neuropsychiatriques...) et emploie près de 800 personnes sur deux sites ; elle a pollué la nappe phréatique en 2012 ; elle investit 100 millions d'euros actuellement pour doubler la capacité de production du principe actif d'un médicament contre "les jambes lourdes" parfaitement inutile, le Daflon, dont Servier prévoit que la demande mondiale devrait doubler en quelques années ; Oril promet 100 embauches en lien avec ce projet. Bolbec a été touché en 2011 par la fermeture de l'usine de joints d'étanchéité en caoutchouc Cooper Standard, qui a licencié 316 personnes.
Comme toujours dans la chimie, les effectifs de chaque site en comptant les emplois induits dans la sous-traitance (maintenance mécanique ou électrique, logistique, gestion des pipelines, conditionnement des granulés de plastique etc.) sont à multiplier par 2, 3 ou 4 selon les cas. Quelques autres secteurs industriels sont représentés, avec notamment une cimenterie, un peu d'agroalimentaire et de plasturgie.
Dans le secteur de l'énergie, la centrale thermique au charbon du Havre, qui employait environ 200 personnes, a fermé en 2021.
Le Havre compte également de gros employeurs dans le secteur des administrations et des services, notamment le Groupe Hospitalier du Havre (Hôpital Jacques Monod, Hôpital Flaubert, Hôpital psychiatrique Pierre Janet et quelques petits satellites) qui emploie 4.500 personnes et est le premier employeur de la ville devant la Mairie. Quant à la SNCF, elle n'emploie plus que 200 personnes contre 1.000 dans les années 1980, et la gare de triage de Soquence n'est plus que l'ombre d'elle-même.
De son côté, Honfleur est une petite ville à la fois touristique et industrielle. Elle a le même passé de port négrier que Le Havre et a aussi longtemps été un port de pêche à la morue. L'industrie du bois y est historiquement développée. L'usine de plaquage et tranchage Plysorol (ex-Isoroy) a fermé en 2002 et son successeur Essences Fines (placage seul) a été liquidé en 2017, licenciant les 30 derniers travailleurs. Mais une autre société, Norsilk, produisant du bois pour bardage, terrasses, lambris et ossatures de maisons, emploie 110 personnes dans le village voisin de Boulleville (Eure), tandis qu'ISB-Silverwood, spécialisée dans le bois d'aménagement, de rénovation ou de construction en emploie près de 100 à Honfleur. L'autre usine significative relève de la chimie : Arkema (ex-CECA) emploie 135 personnes à la fabrication de tamis moléculaires et de lévilite (minéraux micro-poreux à base de silice, utilisés pour filtrer les gaz et les liquides) ; cette usine est un fournisseur de la pétrochimie. Honfleur a accueilli entre 1983 et 1997 une éphémère usine de magnétoscopes puis de lecteurs de CD, Akaï Electric France, filiale d'un groupe japonais, qui a employé jusqu'à 691 personnes et empoché des aides publiques avant de mettre la clé sous la porte.
Du côté de Fécamp, ancien premier port français de pêche à la morue, les nombreuses pêcheries ont fermé ainsi que les usines de salaison du poisson qui employaient beaucoup de femmes. Aujourd'hui, Fécamp est davantage un port de plaisance qu'un port de pêche. Le secteur textile qui travaillait surtout le lin a également disparu et la liqueur Bénédictine ne génère plus qu'une activité confidentielle. Il y a malgré tout quelques usines de la métallurgie et de l'agroalimentaire dans une zone industrielle située à cheval sur deux villages limitrophes, Saint-Léonard et Epreville : la société de constructions électriques 2H Energy (une filiale de Fiat, produisant des groupes électrogènes, tableaux basse tension etc., y compris pour sous-marins, 150 personnes) ; la société Paumier et Fils (équipements de génie climatique et froid pour navires, 90 personnes) ; Delpierre (première usine française de harengs fumés, filiale du groupe Labeyrie, 250 personnes) ; Traiteur de Paris (pâtisserie surgelée, traiteur surgelé haut de gamme, 200 personnes, où une explosion en 2021 a fait 5 blessés dont 2 graves) ; et le groupe Olvea, héritier d'une ancienne entreprise fécampoise d'huile de foie de morue, qui s'est diversifiée dans les huiles végétales (amande douce etc.) dans les années 1970 et, surtout, dans les années 1990, dans les huiles de poisson riches en oméga-3 largement utilisées dans les compléments alimentaires, les produits pharmaceutiques etc. : Olvea emploie environ 150 personnes sur la zone industrielle. Fécamp accueille le Centre Hospitalier Intercommunal, récemment reconstruit sur les hauteurs de la ville, qui avec ses unités satellites emploie 900 personnes et est le premier employeur devant la mairie.
Au large de Fécamp, un gigantesque parc de 71 éoliennes en mer est en cours de création et de raccordement au réseau électrique. Au-delà de Fécamp, à 25 km plus au nord-est sur la côte, on note la présence de la centrale nucléaire de Paluel qui emploie 2.110 personnes en comptant les personnels d'EDF et les sous-traitants sur site : un grand nombre habitent dans la zone qui nous intéresse.
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La présence de LO dans la région du Havre n'a jamais été très importante. Il y a eu pendant des années une petite présence à la raffinerie Total de Gonfreville-l'Orcher, mais la présence de LO en Seine-Maritime a diminué avec l'exclusion de VDT en 1997 qui a beaucoup touché Rouen (comme Bordeaux) et le peu du Havre qu'il y avait. Aujourd'hui, cette présence de LO est reconstituée mais les militants sont encore peu nombreux au Havre ; ils n'en sont pas moins parvenus, déjà à deux reprises, à monter une liste LO aux Municipales dans la ville du Havre, chose qui n'avait jamais été possible avant. Il reste néanmoins beaucoup à faire en comparaison de la très forte implantation que peuvent avoir localement le PCF, LFI et bien sûr la CGT.
- Ici, la manifestation des dockers du Havre contre la loi Travail ("El Khomri") en 2016 :
https://www.youtube.com/watch?v=Zw9wRglTX3M
Alors, bon courage aux camarades qui participeront à cette tournée d'été, car renforcer LO dans ce secteur qui est l'un des plus ouvriers et stratégiques du pays est essentiel pour l'avenir !