Briseurs de grève, roman de Valerio Evangelisti.

[pouchtaxi]

Briseurs de grève, roman de Valerio Evangelisti, chez Libertalia


Itinéraire d'un briseur de grève, et pas seulement.

Aux USA entre les années 1880 et la première guerre mondiale, un jeune garçon, recruté à l'âge de 14 ans, comme homme de main par des agences de détectives privés qui outre la surveillance des conjoints volages, mènent, pour le compte des propriétaires capitalistes importants, des opérations d'intimidation et /ou d'élimination physique des syndicalistes et des grévistes.

Le personnage principal travaillera pour l'agence Burns, dont le directeur sera l'un des premiers chefs de l'agence précédant le FBI. Il collabore souvent avec les agents Pinkerton. A l'époque il n'était pas rare que l'Etat fasse appel à une agence privée pour traiter des affaires de police au niveau fédéral, d'où l'une des raisons de leur développement considérable.

Son travail ne consiste pas uniquement à tabasser grévistes et quiconque n'est pas blanc, protestant et bien pensant mais aussi à infiltrer les syndicats pour y recueillir des informations ou bien y jouer, selon les directives qu'il reçoit, les provocateurs.

Les affrontements entre détectives et grévistes se règlent souvent à coup de fusil. Il n'est pas rare que les syndicalistes en vue portent des pistolets à la ceinture. Les polices locales sont bien sûr des alliées fidèles des briseurs de grève.

On croise dans le roman : Debs, De Leon, Big Bill Haywood, Mother Jones ou Joe Hill et ses chansons. Le roman dessine schématiquement les différences de point de vue au sein des syndicats entre réformistes, syndicalistes plus ou moins révolutionnaires et militants plus politiques, socialistes notamment. L'agence Burns concentra une part de son activité à infiltrer et contrecarrer la naissance et le développement des IWW.

Le personnage central est une épouvantable ordure, tout comme ses employeurs et commanditaires. Il est un concentré des pires préjugés qu'on puisse trouver dans une cervelle humaine. L'un de ses employeurs exprime clairement la volonté que ces agences de détectives soient des organes de "contre-révolution permanente" et donc des milices privées et armées anti-ouvrières.

Certains pourront reprocher au livre de ne montrer qu'une classe ouvrière trop faible sur les plans organisationnel et politique pour échapper à une répression meurtrière. Toutefois le récit même montre une classe ouvrière qui ne désarme pas malgré d'effroyables obstacles. C'est donc une lecture très instructive que je recommande.

L'ouvrage se clôt sur une bibliographie concernant le syndicalisme aux USA et quelques biographies.

[Byrrh]

Sur le même sujet, lire également : Go By Go de Jon A. Jackson (Gallimard, Série Noire, 2001). Et beaucoup plus difficile à trouver : 100 %. Histoire d'un patriote d'Upton Sinclair (Flammarion, 1924).