Non à la traque des jeunes

Rien n'est hors-sujet ici, sauf si ça parle de politique

Message par Valiere » 22 Mars 2005, 23:07

a écrit :Congrès académique SNES Rouen – 21 et 22 mars 2005    Thème 3
EMANCIPATION (ex - Ecole Emancipée)
Non à la traque des jeunes,
des pauvres et des sans-papierEs !
La logique sécuritaire post 11 septembre imposée par les Etats-Unis a rapidement trouvé des adeptes dans les gouvernements européens. Dès lors, l'autre est dangereux et les camps pour étrangerEs sans papiers se multiplient dans toute l'Europe, les expulsions par charters entiers se banalisent et la police peut venir en classe chercher un enfant de sans papierEs grâce aux informations données par l'administration de l'Education Nationale…
Parallèlement, pour contenir les révoltes qui couvent, les vieilles recettes font florès. On assiste depuis quelques semaines à une escalade dans la politique gouvernementale liberticide du tout sécuritaire. La surveillance des chômeurEs, le harcèlement des jeunes et des pauvres, la répression contre les syndicalistes… sont toujours plus renforcés. Sous couvert de "prévention de la délinquance", les rapports ou projets de loi récents s'inscrivent dans la continuité des lois Perben, LSI (loi sur la sécurité intérieure) de Sarkosy ou LSQ (loi sur la sécurité quotidienne) de Vaillant ; ils tendent tous vers la criminalisation d’une population mise en situation de fragilité sociale par l'intensification des politiques libérales.
Et pendant ce temps, au cœur des écoles, il est prévu d'intensifier le tri social et la sélection scolaire… car un autre objectif de cette politique de criminalisation des jeunes scolariséEs est d’aider à faire passer les mesures libérales qui mettent en cause l’égalité des citoyenNEs, les services publics (attaques sur les maternelles, plan Borloo, loi Fillon, réformes de l’Etat et de la Fonction Publique…) en détournant l’attention de l’opinion et des médias, ainsi qu'en faisant des économies sur les budgets et les recrutements de la prévention spécialisée au profit d’un affichage sécuritaire.
Les travailleurEs sociaux, les éducateurEs ne deviendront pas des délateurEs !
Depuis plus d’un an, les travailleurEs sociaux se sont mobiliséEs suite à l'avant-projet de loi sur la "prévention de la délinquance" de Sarkozy, qui projetait tout simplement de considérer comme potentiellement délinquante toute "personne présentant des difficultés sociales, éducatives, ou matérielles" et d'obliger tout professionnel de l’action sociale, au mépris du droit des usagers en matière de secret professionnel, à la signaler à la police via le maire, intronisé pilote de la prévention. La jeunesse, notamment celle issue de l’immigration, se trouvait également montrée du doigt, et l’absentéiste devenait un délinquant potentiel, lui aussi à signaler au maire ou au procureur. Une approche sécuritaire, répressive et stigmatisante tendait ainsi à se substituer à une approche éducative ou sociale des difficultés de la population.
Remis à De Villepin dans le cadre du travail ministériel autour de ce projet de prévention, le rapport Benisti est, par son contenu et son style, une injure à des décennies de recherche, de travaux et de pratiques des milliers de professionnelLEs de tous les secteurs impliqués. Il est un terrifiant retour aux valeurs les plus méprisables du colonialisme et, par cela, un danger potentiel pour toutes les immigrations passées et à venir, et pour nous touTEs. Un seul exemple de la "philosophie" de cette logique sécuritaire : la base de ce rapport est un graphique pseudo scientifique, titré "Courbe évolutive d'un jeune qui au fur et à mesure des années s'écarte du « Droit chemin » pour s'enfoncer dans la délinquance", courbe du "parcours déviant" de 0 à 23 ans, découpé par tranche de scolarité, dont les seuls indices sont les liens entre difficultés scolaires (situées à partir de la pratique de la langue), comportement, déficience parentale, activités pré et post-scolaires et entrée progressive dans la consommation de drogue et la délinquance. La mère non francophone d’un enfant de 2 ans se trouve désignée comme facteur de risque, qu’il faut corriger en... interdisant à cette mère de parler son "patois" !?! Le maire doit, bien sûr, être au courant de tout cela, et il faut donc développer "une culture du secret partagé"... avec la police ! Évidemment, la déviance, si elle persiste, mène tout droit à la case internat ou centre fermé, avec cours de (ré)éducation civique intensif... Les réalités socio-économiques ne sont à aucun moment envisagées comme indice significatif, ni même signalées.
Ces projets n'ont pas encore force de loi, mais, tous les jours, le gouvernement, relayé par des administrations et certaines collectivités locales, met en place, sous prétexte d’expérimentations, des dispositifs qui constituent des atteintes aux libertés publiques (fichage nominatif des populations, organisation de la délation...).
Jusqu'à présent, l'engagement des personnels de l'Education - et notamment des enseignantEs - dans la lutte contre ces mesures ou projets qui remettent en cause les fondements du travail social, éducatif et médico-social, n'a pas été à la hauteur : le SNES appelle touTEs les travailleurEs de l'Education à rejoindre les luttes des travailleurEs sociaux organiséEs dans le Collectif National Unitaire contre la délation et le maillage policier de la société.
La police hors des écoles !
Les opérations de police menées nationalement, le 6 janvier 2005, en direction de près de 2000 établissements scolaires, ne répondent pas, loin s’en faut, aux besoins des établissements scolaires, mais visent à se servir de l’école pour le contrôle social et le développement d’une société policière et répressive.
Cette irruption en force de la police dans le quotidien des élèves, avec contrôle d’identité, fouille et suspicion systématique, est contraire à la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, surtout quand elle concerne les élèves les plus jeunes. Des interventions de ce type - de même que des arrestations d'élèves en pleine classe - ne résolvent en rien les difficultés dans et aux abords des établissements scolaires. Spectaculaires, médiatiques et simplistes, elles invalident, notamment auprès de l'opinion, toute recherche de réponses intelligentes et cohérentes sur les problèmes actuels de l’école. Elles contredisent les efforts des personnels et de leurs partenaires, elles retirent tous sens à des apprentissages fondamentaux pour la socialisation et l’éducation civique (par exemple sur le respect des libertés individuelles et collectives, sur l’autonomie des institutions, sur l’indépendance des pouvoirs…).
Cette banalisation de l’intervention des forces de l’ordre marque la priorité donnée à la police par rapport aux institutions comme la justice et l’école. Après la tentative d’introduire un policier dans chaque collège, elle montre pourquoi le protocole Education Intérieur d’octobre prévoit un référent policier par établissement, après avoir supprimé le statut de MI-SE et réduits le nombre de personnels de surveillance.
Le SNES soutient sans réserves les personnels qui s'opposent aux interventions de la police dans et aux abords des établissements scolaires. Il mènera campagne contre ces pratiques et appelle à leur résister collectivement et à y opposer des alternatives éducatives et de prévention.
Le SNES exige le retrait du protocole d’accord entre le ministre de l’Éducation Nationale et celui de l’Intérieur. Il s’oppose à la création du "correspondant-police" dans chaque établissement.
Non à l'utilisation de l'école pour piéger les sans-papierEs !
Le ministre de l'intérieur affiche la volonté d’augmenter de 50% (de 13 000 à 20 000) le nombre d’expulsions en 2005, faisant dans la surenchère électoraliste pour surpasser Sarkozy. Des milliers d’hommes, de femmes, et aussi d’enfants, sont ainsi, chaque année, arrachéEs aux vies qu’ils ont commencé à reconstruire, montéEs de force dans des avions, menottéEs, parfois enchaînéEs et traînéEs vers des pays, parfois en guerre, qu’ils/elles avaient réussi à fuir, pour certainEs au péril de leur vie.
De plus, depuis quelque temps, les forces de l'ordre ont pris pour habitude de venir chercher dans les établissements scolaires des enfants de tous âges pour les enfermer dans des centres de rétention avec leurs parents, dans l'attente de leur expulsion. Ils se servent maintenant de l'école pour piéger les parents et les interpeller. Les pressions des préfectures sur les IA, les chefs d’établissement, reviennent à transposer sur les enfants la méfiance et le choix de la clandestinité et donc à les déscolariser, ce qui est contraire au principe constitutionnel de la scolarisation de touTEs.
Le SNES demande aux enseignantEs et aux personnels de l'éducation nationale de refuser de prêter leur concours à ces pratiques indignes. Il les appelle à participer activement à la mise en place au niveau local du Réseau Education Sans Frontière : nous devons être de plus en plus nombreux/nombreuses à opposer notre volonté d’action et de solidarité à la barbarie ordinaire des ministres respectables et des fonctionnaires obéissants.
Le SNES exige la fermeture de tous les centres de rétention administrative, l'arrêt de toutes les expulsions et la régularisation de touTEs les sans papierEs.
Pour le gouvernement, la lutte contre l’échec scolaire n’existe désormais plus, tout étant vu à travers le prisme de la délinquance potentielle.
Le SNES considère au contraire qu' il faut éduquer et prévenir plutôt que de "pacifier" et criminaliser les jeunes. Il exige donc plus de moyens matériels et humains pour aider les jeunes en difficulté et œuvrer à l’émancipation de touTEs.
Il appelle les personnels de l'Education à combattre, avec l'ensemble des travailleurEs, la politique sécuritaire et antisociale du gouvernement et le modèle de société qu'elle induit : une société basée sur l'exclusion et la criminalisation de la misère.
Valiere
 
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