LO et l'homosexualité

Rien n'est hors-sujet ici, sauf si ça parle de politique

Message par alex » 10 Mai 2004, 11:58

Voici donc l'article de LO dont j'avais demandé en vain la mise en ligne;
Il est le seul document sur le sujet répertorié dans l'Index thématique publié par LO en 1993 ( donc depuis 1968 soit un quart de siècle).
Il présente, comme le texte l'indique, l'opinion de l'organisation.



LUTTE OUVRIERE N°335, 28 JANV.-3 FEV. 1975
(PAGE 19)
Télévision

Aux dossiers de l'écran

L'HOMOSEXUALITE

LES dossiers de l'écran, du
mardi 21 janvier étaient consacrés à
la question de l'homosexualité. Le débat avait lieu entre quatre
écrivains, deux médecins. un théologien et un ex-député dont la principale
action d'éclat fut d'avoir fait voter, en
1960, au Parlement, un amendement définissant
l'homosexualité comme un fléau social.

Sur ce que sont l'homosexualité et ses causes, ce débat n'aura rien
apporté. Les quatre hommes da lettres, qui s'affirmaient ouvertement homosexuels,
étaient là pour témoigner et
dénoncer les tabous et les préjugés
dont sont victimes les homosexuels. Explicite ou implicite, leur thèse était
simple ; certains sont, naissent ou
deviennent homosexuels, exactement comme d'autres sont, naissent ou
deviennent hétérosexuels. L'un est aussi normal

que l'autre, et n'y a donc aucune raison de persécuter en quoi que ce
soit tes premiers.

Les deux médecins, plus nuancés, plus embrouillés aussi, apportaient, qu'ils le veuillent ou non, de l'eau au moulin
de cette thèse, en reconnaissant que la science et la médecine sont aujourd'hui
encore tout à fait incapables d'expliquer
l'homosexualité.

Et il n'y eut personne pour suggérer que, si
ni le neuropsychiatre ni
l'endocrinologue ne pouvaient trouver une solution au problème dans leur
branche particulière, c'est que l'explication est au niveau social et non pas —
c'est au moins ce que la médecine prouve par son aveu d’impuissance – au
niveau d'une malformation ou encore d'une « maladie ».

Des millénaires d'oppression de la femme, des enfants, des classes «
inférieures », de tabous, d'interdits et de préjugés pesant de tout leur poids sur la
vie sexuelle — et bien entendu sur l'hétérosexualité d'abord, ce
qu'ont oublié les participants au débat — voilà très
certainement le terrain où une science sérieuse devrait s'efforcer de rechercher
les causes de l'homosexualité
et ses raisons d'être, il
n'y eut même pas une
allusion, mardi soir, pour dire que la question devait sans doute être posée
dans cette direction. Mais ce n'est
là que la preuve que les sciences
humaines, étouffées par les préjugés d'une société de classe, n'en sont même pas
à leurs premiers pas dans un domaine comme celui-là.

Cela dit, le débat eut un mérite qui n'est pas mince : celui d'avoir posé
avec sérieux un problème que l'hypocrisie et les préjugés commandent généralement de n'aborder qu'avec des ricanements, des rires gros et des
sous-entendus. La dignité avec laquelle les quatre homosexuels présents dénoncèrent brimades, humiliations et préjugés dont
sont victimes les homosexuels dans leur vie quotidienne était remarquable.
D'autant plus remarquable qu'ils reconnaissaient aussi franchement que les
véritables victimes n'étaient
pas spécialement ceux qui étaient là ce soir et qui sont
dans un milieu social relativement tolérant, qui sont même en quelque sorte protégés
par leur qualité d’intellectuels et de bourgeois, mais ceux qui ne sont ni
écrivains ni artistes, mais de
simples petits-bourgeois ou
travailleurs (et il y aurait, paraît-il, trois millions d'homosexuels
en France).

Ajoutons que le seul à tenir un autre langage, l'ex-député Mirguet, était
le repoussoir le plus parfait qu'on avait pu trouver. Falot, bredouillant, inconsistant l'auteur de
l'amendement classant comme fléau social l'homosexualité ne faisait pas le poids face, par exemple, à
un Jean- Louis Bory. Tout ce
qu'il put trouver comme excuse fut qu'il était nécessaire de protéger... la race blanche contre la
dénatalité.

En le voyant, aucune doute n'était permis , même si l'on ne pense pas (et
c'est notre opinion), contrairement à Jean-Louis Bory et Yves Navarre, que
l'homosexualité et l'hétérosexualité soient à mettre exactement sur le même
plan, que les hommes (et les femmes, qui ont été oubliées dans cette émission)
peuvent être l'un ou l'autre indifféremment, sans conséquence d'aucune sorte, en tout cas,
lutter contre les préjugés, combattre les brimades dont les homosexuels peuvent être victimes est un devoir. M.
l'ex-député était i'incarnation parfaite
des préjugés du
Français moyen, y compris dans ses tentatives de faire
la part des choses. Mais ne critiquons pas trop Mirguet. Après tout, par i'image
qu'il a donné au petit écran, il aura peut-être contribué, sans le vouloir bien
sûr, à porter un coup à la bêtise et à l'hypocrisie de la société qu’il
défend.

Jacques MORAND.

(PHOTO avec légende : Voir dans l’homosexualité un fléau
social, et admettre comme normale une sexualité rabaissée au niveau de la
pornographie : voilà qui va de pair chez bon nombre de moralistes
« bien-pensants ».)
alex
 
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Message par Barnabé » 10 Mai 2004, 12:15

C'est vrai que 30 ans après, cet article n'a pas parfaitement bien vieilli (quand bien même il est signé Jacques Morand :hinhin: )
Bon, l'essentiel est quand même que l'axe de l'article est de dénoncer les comportements et préjugés homophobes. Ensuite sur l'analyse, on peut discuter. Dire que fondamentalement, comprendre les comportements sexuels ne peut se faire que dans le cadre d'une analyse des rapports sociaux en général, je suis assez d'accord. Je ne crois pas qu'on naisse hétéro ou homo. C'est dans le développement de l'individu, la construction de la sexualité que va se définir l'orientation sexuelle (sans pour autant qu'on puisse évidemment parler d'un choix). Et ce développement se fait dans le cadre de la famille, et de société plus généralement.
Maintenant, un certain nombre de formules me gênent un peu. du genre
a écrit : même si l'on ne pense pas (et
c'est notre opinion), contrairement à Jean-Louis Bory et Yves Navarre, que
l'homosexualité et l'hétérosexualité soient à mettre exactement sur le même
plan, que les hommes (et les femmes, qui ont été oubliées dans cette émission)
peuvent être l'un ou l'autre indifféremment,

qui peut laisser entendre qu'on émettrait une sorte de jugement de valeur entre hétérosexualité et homosexualité. Dire qu'on ne peu pas les mettre "exactement sur le même plan" parce que dans la société actuelle, les homosexuels sont victimes d'homophobie (mais c'est un peu une tautologie), ok, mais au delà, je ne vois pas trop.
Enfin, il faut voir que l'article date de 30 ans, et je ne sais pas si ces formules apparaîtraient dans un article similaire aujourd'hui.
Toujours est-il qu'il s'agit d'un article dénonçant l'homophobie, et qu'on est bien loin des calomnies relativement courante sur "LO homophobe".
Barnabé
 
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Message par Terouga » 10 Mai 2004, 13:07

Ce texte très lucide a assez bien vieilli : pas de référence au caractère prétendument "libérateur" de l'homosexualité et analyse des causes assez intéressantes (vécu et contradictions sociales), pas de bla-bla pseudo-génétique... :x

Reste que "l'homophobie", comme toute discrimination, est à combattre, mais pas par le différencialisme (homo, hétéro, noirs, blancs...), mais par les intérêts de classe (un ouvrier homo a les mêmes droits qu'un ouvrier hétéo ou bi, etc.). :wavey:
Terouga
 
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Message par Steph » 10 Mai 2004, 15:00

Je suis assez d'accord avec Barnabé : l'essentiel de cet article est contre les préjugés, contre l'homophobie.

Il date de février 1975, et bat donc en brêche l'homophobie supposée viscérale de LO que certains adversaires politiques colportent.

Il y a bien quelques phrases qui posent problème, soit parce qu'elles comportent soit pas leur ambiguité. On peut en mettre une partie sur le compte du fait que dans un article où on manipule des concepts, ce n'est pas toujours simple d'échapper aux ambiguités et aux raccourcis. Mais c'est aussi vrai qu'elles illustrent un certain "retard à l'allumage" de LO à l'époque dans la compréhension de ce qu'est l'homophobie.
Il faut savoir regarder les faiblesses que notre courant a pu connaitre en face (faiblesses qu'ont rencontré aussi nos camarades de la LCR à telle ou telle période aussi...) et s'en servir pour regarder devant, et agir aujourd'hui. En l'occurence, le connaissant, et ayant assisté à une réunion où il s'exprimait sur le sujet, je suis persuadé que Jacques Morand n'écrirait pas cet article comme cela aujourd'hui.

L'important aujourd'hui c'est que tous les camarades de LO travaillent dans leur militantisme quotidien à faire reculer les préjugés homophobes, au même titre qu'il le font face au racisme ou au sexisme. Car cela fait partie de notre combat communiste contre la morale bourgeoise, et pour que les travailleurs deviennent une classe unie, débarassée de toutes les divisions que cette société a distillé... :-P

C'est pour cela qu'il ne faut pas sombrer dans un discours "séparatiste", sur l' "autonomie" des mouvements (homos, femmes, immigrés), comme le font certains autres militants d'extrême gauche, comme si ces combats devaient être menés séparément du combat économique et de classe. C'est toute la classe ouvrière qui doit mener ces combats, Tous Ensemble... :t3xla:
Steph
 
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Message par Terouga » 10 Mai 2004, 15:36

Je ne vois quand et où j'ai pu dire que les homos et les hétéros n'étaient pas sur le même "plan". J'ignore aussi ce que cela peut vouloir dire. Les différences sexuelles (je préfère le terme de "préférences") ne sont pas valides politiquement. Seul le vécu social a un sens. Les préjugés homophobes restent obligatoirement réactionnaires.

Comme le note l'intervenant précédant : gare à "l'autonooooooomie" des luttes, c'est, quoi qu'on en pense, communautariste et, donc, réactionnaire et antirépublicain. :x

Souvenez-vous que le Syndicat des Travailleurs Corses (ouvertement mafieu aujourdh'ui) fut créé par le PT dans années 70 pour affaiblir la CGT "nationale" en créant un syndicat local "autonome". On voit le résultat aujourd'hui ! :roll:
Terouga
 
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Message par Barnabé » 10 Mai 2004, 15:44

a écrit :    Désolé je me suis trompé, c'est alex qui avait dis ça !

En fait c'est le camarade Morand, cité par alex qui l'a dit, et je suis d'accord avec steph, le connaissant un peu aussi, je pense qu'il ne l'écrirait pas comme ça aujourd'hui.
Barnabé
 
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Message par Mariategui » 10 Mai 2004, 15:58

Enfin, il est quand même nul l'article. Notamment ,s'il est pertinent de se poser la question des facteurs sociaux dans la détermination de la préférence sexuelle (puisque la préférence sexuelle n'est qu'un construit social). Mais cet article insinue que l'homosexualité disparaitrait dans l'absence de l'oppression sur les femmes, les hommes et les enfants.

a écrit :Des millénaires d'oppression de la femme, des enfants, des classes « inférieures », de tabous, d'interdits et de préjugés pesant de tout leur poids sur la vie sexuelle — et bien entendu sur l'hétérosexualité d'abord, ce qu'ont oublié les participants au débat — voilà très certainement le terrain où une science sérieuse devrait s'efforcer de rechercher les causes de l'homosexualité et ses raisons d'être.


Car si l'homoséxualité tire son origine de l'oppression de classe et de genre, dans une société sans classes, elle n'existerai plus? Bref, l'homoséxualité serait un comportement "réactif" face a l'oppression de classe et de genre. Un article somme toute très "hétéro-normalisateur".

Donc voilà, l'article est médiocre politiquement. Mais bon, il date de 1975 quand meme donc on pourrait difficilement juger la politique de LO aujourd'hui sur la base de ce simple article.

Ja vais arrêter de ramener ma fraise maintenant avant que quelqu'un poste les analyses de pablo sur la 3 guerre mondiale nucléaire.
Mariategui
 
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Message par Nadia » 10 Mai 2004, 16:20

(Terouga @ lundi 10 mai 2004 à 16:36 a écrit : Comme le note l'intervenant précédant : gare à "l'autonooooooomie" des luttes, c'est, quoi qu'on en pense, communautariste et, donc, réactionnaire et antirépublicain. :x
1. La république (bourgeoise), moi, rien à PT.
2. Les gay prides and co, je ne vois pas ce que ça peut avoir de "réactionnaire". Comme les manifs féministes, même dans certains de leurs excès, je pense que ça contribue à faire avancer les choses vers plus de tolérance. On n'a donc surtout pas à lutter contre ces machins.
Nadia
 
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