mariage annulé pour non-virginité

Tout ce qui touche de près ou de loin à l'actualité politique en France

Message par com_71 » 03 Juin 2008, 20:10

(charpital @ mardi 3 juin 2008 à 20:08 a écrit : com 71 peut penser que je travestis sa pensée
"Travestir", un bien grand mot. On pourrait penser aussi que tu te trompes sur les motivations de la Ligue.
J'ai sur ce forum, évoqué le versant "musulman" de l'affaire, parce que c'était bien présent, ne serait-ce que dans le 1er communiqué de l'AFP. Cela ne signifie pas que je pense que le communiqué de la Ligue est parfait. Donnons acte qu'il aurait pu être bien pire.
Mais évoquer "une campagne de stigmatisation des personnes musulmanes" qui, concrètement, n'est pas en cours, ce n'est pas la meilleure manière d'affirmer une prise de position claire par rapport au problème posé.

Par ailleurs je n'aurais pas écrit "l'islam est réac" (dixit charpital) il faut en ce domaine comme en bien d'autres, avoir le souci des nuances.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par charpital » 03 Juin 2008, 20:40

a écrit :Mais évoquer "une campagne de stigmatisation des personnes musulmanes" qui, concrètement, n'est pas en cours,

Je vois que l'on ne fréquente pas les mêmes bistrots :hinhin:

a écrit :
Par ailleurs je n'aurais pas écrit "l'islam est réac"

Et qu'en est il du communiqué de LO (qu'on puisse comparer) Je n'ai pas vu de communiqué ici, ni sur le site ouèbe national (de LO). Je ne crois pas pourtant que LO se désintéresse de la question...
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Message par luc marchauciel » 03 Juin 2008, 20:56

Je me demande si ce n'est pas une forme de sagesse de LO que de justement ne pas avoir fait de communiqué en politisant une décision de justice qui ne le mérite peut être pas. Je me méfie de plus en plus de ces emballements médiatiques où, à partir d'un fait divers, on dresse en 24h00 un portrait de l'état de la société, on s'indigne, on somme de prendre position et on appelle à manifester....
Les expulsions quotidiennes de sans papiers, ça dit quelque chose de l'état de la société, tout comme les salaires comparés des femmes et des hommes à travail égal.
Un fait divers ou une décision de justice appelle peut être beaucoup plus de prudence...
luc marchauciel
 
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Message par canardos » 04 Juin 2008, 06:32

désolé,Marchauciel, mais cette décision de justice, en assimilant la virginité à une qualité essentielle de la femme dont la dissimulation entrainerait ipsofacto une annulation du mariage, cree une jurisprudence fondée sur un critere totalement réactionnaire et sexiste, une jurisprudence qui si elle est confirmée se retournera forcement contre les femmes.

peu importe à la limite que dans le cas d'espece la femme ait été d'accord (encore que on ne sait rien du contexte familial et des pressions eventuelles) et que le juge ait peut-etre voulu épargner au couple une procdure de divorce, ce qui compte, c'est le precdent que constitue la definition juridique de la virginité comme uen qualité essentielle de la femme au sens de l'article 180 du Code Civil, definition derriere laquelle vont s'engouffrer tout les réactionnaires pour s'attaquer aux droits et protections des femmes et remplacer le divorce par une procedure de répudiation humiliante
canardos
 
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Message par satanas » 04 Juin 2008, 06:48

D'accord globalement avec Canardos,mais on peut aussi espérer que le débat ,la polémique,le réveil de certaines voix et réactions féministes ,contribuent à faire apparaitre cette exigence machiste de virginité pour ce qu'elle est ,une saloperie humiliante et innaceptable.

Et peut-être (soyons optimistes) , le caractère odieux de cette exigence apparaitra plus pour ce qu'il est dans des milieux ou habituellement ,ça va de soi ...

Espérons surtout que des femmes (et des hommes) ,y compris issus des milieux ou sévit encore cette oppression ,sauront s'emparer de cette "affaire " pour militer pour une véritable liberté et égalité sexuelles.
satanas
 
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Message par charpital » 04 Juin 2008, 07:10

Personnelement, je suis assez étonné que Lo n'ai pas fait de communiqué sur le sujet (mais souvent, les camarades prennent pas mal de temps pour les rédiger) Je ne suis pas d'accord avec Marchauciel : meme si c'était un "emballement médiatique" LO aurait pu justement le dénoncer comme tel. En tout cas, c'est émminément politique...
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Message par satanas » 04 Juin 2008, 07:16

LO ne fait pas de communiqué sur un tas de trucs importants.

Mais il y aura probablement un article dans le prochain canard.
satanas
 
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Message par Valiere » 04 Juin 2008, 08:11

l'important, ce n'est pas de faire un communiqué sur toude prendre position clairement, sans ambiguité.
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Message par luc marchauciel » 04 Juin 2008, 12:29

(canardos @ mercredi 4 juin 2008 à 07:32 a écrit :désolé,Marchauciel, mais cette décision de justice, en assimilant la virginité à une qualité essentielle de la femme dont la dissimulation entrainerait ipsofacto une annulation du mariage, cree une jurisprudence fondée sur un critere totalement réactionnaire et sexiste, une jurisprudence qui si elle est confirmée se retournera forcement contre les femmes.



Pas (plus) convaincu par ça. Rien ne dit que c'est cela l'interprétation à donner à la décision du juge. Je dirais presque que c'est tout le tintouin autour de la décision qui lui donne ce sens (ce qui avait été ma première réaction aussi). Le juge ne dit pas ici que la virginité est une condition essentielle du mariage, il ne grave pas ça dans le marbre, il dit que dans ce cas précis ça l'était pour l'un des conjoints et qu'il a été abusé, et il défait le mariage avec l'accord des deux parties prenantes et leur évite un divorce couteux (j'ai connu ça, même avec consentement mutuel absolu sans enfants et tout tout, ça coûte bonbon et ça fait enrager de devoir dépenser du fric pour des conneries pareilles).
Je dis pas que tout est simple dans cette décision, qu'il n'y pas des risques (comme celui de voir plein de filles muslumanes courrir se faire recoudre l'hymen), mais je trouve qu'on l'a beaucoup trop chargée et qu'on y projette trop de trucs par rapports à sa portée réelle.

Sur l'agument "la fille est OK avec la rupture du mariage, mais l'est elle vraiment ?", je me méfie un peu : ça me rappelle les travers de la position abolitionniste sur la question de la prositution, qui nie systématiquement la parole des prostituées et prétend savoir mieux q'elles ce qu'elles pensent en réalité au fond d'elle même. Un juge n'est pas là pour faire de la psychanalyse (ouf !), il se prononce à partir des éléments précis et affichés qu'il a dans un cas précis.

Maintenant, je constate que cette décision soulève de fait un débat sur le statut du mariage, et c'est parfois assez intéressant. Je copie ci dessous une tribune "de gauche à consonnance antilibérales" parue dans l'Huma, dont je ne partage pas le point de vue et qui me semble être le piège dans lequel il ne faut pas se laisser enfermer :
- le discours antiprivatisation est ici hors sujet, et je trouve qu'il est toujours plus sain que l'Etat se mêle le moins possible de si et comment les gens baisent.
- sa conclusion est éloquente : "Nous sommes des défenseurs laïques de l’institution du mariage face à ceux qui veulent se la réapproprier : les religieux les plus rétrogrades." En l'occurence, ce qu'il faut critiquer ici (et non la défendre), c'est l'institution du mariage elle-même, dont l'auteur de l'article rappelle ici la perspective un peu archéo : "le mariage consacre un lien d’amour. Enfin, la perspective du mariage est de créer une famille et donc de s’engager à élever ensemble les enfants nés de l’union". C'est bien parce que l'Etat s'occuppe de définir une partie des termes du contrat (l'"amour", "céer une famille" etc, je me demande même si la fidélité n'est pas encore inscrite dans cette définition du mariage...) que l'on se retrouve à devoir "juger" à tout bout de champ. Ce qui est progressite, c'est la logique du Pacs : des gens choisissent de vivre ensemble pour des raisons qui ne regardent qu'eux et selon des modalités qu'ils définissent, l'Etat se contente de reconnaitre cette existence pour la partie "succession" et éventuellement "parentalité" (ou pour les mutations dans l'Education Nationale...)
Le député UMP qui, tire comme conclusion de l'affaire qu'il faut réformer l'article 180 (celui utilisé pour procéder à l'annulation) pour en écarter "les moeurs" me semble faire un petit pas dans la bonne direction....


a écrit :
Tribune de Ollivier Joulin, vice-président du TGI de Bordeaux
Une lecture dévoyée du Code civil

La tendance actuelle est à la privatisation. Notre régalienne justice ne fait pas exception à ce mouvement : il faut « dépénaliser le droit des affaires », « déjudiciariser le règlement des litiges entre particuliers ». Il a même été envisagé de confier les divorces aux notaires. C’est dans ce contexte que l’on apprend qu’un juge lillois a entériné l’accord des deux époux qui visait à faire prononcer l’annulation de leur mariage « pour erreur dans la personne ou sur les qualités essentielles de la personne » : l’épouse qui s’affirmait vierge ne l’était pas, le mari qui avait pris soin de le vérifier le soir des noces s’estimait trompé. Les époux étant d’accord, le juge sans autre motivation consacre l’annulation de l’union.

_ La révélation de cette décision a déchaîné bien des réactions. Voici ce que peut dire un juriste engagé, un magistrat du Syndicat de la magistrature. Le mariage après avoir été un sacrement religieux est devenu une institution laïque. Le Code civil détermine des conditions essentielles pour se marier : un consentement libre et éclairé, ce qui proscrit les mariages « arrangés » ou les mariages forcés ; un projet matrimonial, ce qui exclut les « mariages blancs », des obligations générales de respect mutuel, de fidélité (mais l’adultère n’est plus une cause péremptoire, obligatoire de divorce), de secours et d’assistance, de communauté de vie : en quelques mots pudiques, le mariage consacre un lien d’amour. Enfin, la perspective du mariage est de créer une famille et donc de s’engager à élever ensemble les enfants nés de l’union. Le mariage est aussi un contrat, une convention passée entre deux personnes, par lequel celles-ci déterminent des modalités de leur union.

_ Il est possible d’annuler un mariage, c’est-à-dire de faire prononcer en justice l’inexistence de l’union célébrée dans des conditions très restrictives, lorsque l’union célébrée est absolument contraire aux principes fondamentaux de cette institution : en cas de bigamie, par exemple. En annulant un mariage pour défaut de virginité de l’épouse, le jugement de Lille va au-delà : il « privatise » en quelque sorte l’institution du mariage. Il admet qu’une condition privée, intime, de virginité soit posée en raison de convictions religieuses et qu’en l’absence de cette « qualité substantielle » l’épouse ruine le fondement de ce mariage. C’est la porte ouverte à des demandes d’annulation fondées sur des considérations très étrangères à notre république laïque : ici on vérifiera la circoncision du mari, pourquoi pas l’excision de l’épouse, là le respect de rites religieux ou sectaires…

_ La manière dont la chancellerie, le ministère de la Justice a pu banaliser cette décision, dans un premier temps, étonne également : les époux étaient d’accord, il s’agit d’une erreur sur les qualités essentielles de la personne, il n’y a donc rien à dire. Lorsqu’il s’agit de ce que les juristes dénomment « l’état des personnes », il existe pourtant un « ordre public » qui permet au ministère de la Justice de veiller par l’intermédiaire de ses procureurs de la République au respect de règles fondamentales : c’est à l’initiative du procureur de la République que sont engagées bien des procédures d’annulation pour bigamie ou pour mariage (supposé) blanc. Ce ministère, qui veille en particulier sur la réalité de l’intention matrimoniale de tout couple mixte et qui suscite de vives réactions comme celle du collectif « Les Amoureux au ban public », ignore tout à coup qu’il a aussi pour mission de faire respecter l’institution du mariage dans le cas patent d’une atteinte intolérable aux droits de la femme, au principe de l’égalité des sexes, à la laïcité de l’union ?

_ Oui, le juge pouvait, malgré l’accord des parties, refuser de prononcer l’annulation en considérant qu’il n’était pas admissible de considérer que la virginité était une condition substantielle possible à l’union matrimoniale. Non, il n’est ni utile ni nécessaire de modifier l’article 180 du Code civil qui permet de prononcer la nullité du mariage forcé, sans consentement et dont l’interprétation a été dévoyée dans le procès de Lille. Au total, le constat peut être fait que, sous couvert d’un pseudo-libéralisme contractuel (les époux étant « libres » de définir ce qu’est le mariage), on favorise l’émergence de communautarismes : il serait alors admissible que dans telle communauté la virginité soit une condition de validité du mariage. Notre république laïque s’est appropriée l’institution religieuse du mariage, ce n’est pas pour revenir à une conception étriquée de cette institution. Nous sommes des défenseurs laïques de l’institution du mariage face à ceux qui veulent se la réapproprier : les religieux les plus rétrogrades.

Dans l’édition de l’Humanité du mercredi 4 juin 2008
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Message par com_71 » 04 Juin 2008, 23:32

(lutte ouvrière n° 2079 a écrit :Un jugement d'un autre âge, avec la bénédiction du ministère !

« S'il y a eu erreur sur la personne ou sur les qualités essentielles de la personne, l'autre époux peut demander la nullité du mariage ». C'est ce que dit l'article 180 du Code civil français. Et c'est en se fondant sur cet article que le tribunal de grande instance de Lille a annulé le mariage entre deux époux, au motif que la femme n'était plus vierge au soir de leurs épousailles.

On croit rêver et on en vient à se demander qui est le plus rétrograde, entre un mari à la mentalité d'un autre âge, furieux que sa femme ne soit pas sa chose, et un tribunal qui, doctement, n'hésite pas à conclure que la virginité est une « qualité essentielle » des femmes.

Au lendemain du jugement, Rachida Dati, la ministre de la Justice, a été une des seules à admettre celui-ci, argumentant que l'annulation était aussi « un moyen de protéger la personne qui souhaite peut-être se défaire du mariage. » Là aussi, on croit rêver devant un argument aussi tordu. Ce n'est pas la mariée qui a demandé l'annulation du mariage, mais son mari, même si elle dit aujourd'hui que c'était une décision commune. Et le jugement d'annulation a été rendu pour « mensonge sur sa virginité » et non parce qu'en effet mieux valait ne pas obliger la femme à continuer à vivre avec un tel mari ! Loin de « protéger » cette femme, le jugement l'a humiliée, proclamant du même coup l'inégalité entre les deux sexes car on ne voit pas comment une épousée pourrait apprécier dans les mêmes conditions la « virginité » de son mari !

Devant le tollé d'indignations soulevé par sa position, la ministre a fait marche arrière en demandant au procureur général de faire appel du jugement. C'est le moins qui puisse être fait pour que celui-ci ne devienne pas un modèle offrant à tous les mâles imbéciles imbus de leur supériorité présumée un encouragement supplémentaire à exercer leurs prérogatives archaïques et à les faire subir à leurs femmes, leurs sœurs et leurs filles.

Sophie GARGAN
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