Chacun sait bien que des tas de choses sont inscrites dans la loi et bafouées au quotidien, comme l'égalité hommes-femmes, le droit au logement etc. Il n'y aura de progrès réel en matière d'IVG qu'en revenant sur la diminution constante des moyens attribués au Planning familial par exemple.
Quant à la fin du billet de Sophia Aram, il me laisse pantois :
Suite à ce “triomphe “ donc, j’imaginais que les insoumis allaient enchainer directement avec l’inscription de la déclaration des droits de l’homme - de la femme, des non-binaires, des trans et des citoyen.n.e.s, le tout en gras, dans le préambule de la constitution.
Et bien, pas du tout… Profitant du costume emprunté à Simone Veil, voilà-t-y pas que le groupe insoumis enchaîna directement par une proposition de loi pour la réintégration des soignants non-vaccinés.
Mais j’ai envie de dire pourquoi pas ?
Après avoir fait un pas dans le sens de la raison, pourquoi ne pas revenir sur les principes fondateurs de la médecine, les règles les plus élémentaires de santé publique et plus d’un siècle d’obligation vaccinale juste pour avoir la joie de défendre ceux qui ont choisi de tourner le dos à la science et la protection des patients les plus fragiles.
Mais pourquoi se gêner ? ! ! !
Il faut s’y faire, après des millénaires de sélection naturelle, l’évolutionnisme a fini par accoucher d’un groupe parlementaire cherchant à récupérer en antivax, ceux qu’ils ont perdu par la soudaine reconversion à la vertu cathodique d’un ancien chroniqueur d’Hanouna.
On en est là.
Et finalement c’est peut-être aussi ça la politique en 2022, être chroniqueur chez Hanouna et faire semblant de s’étonner qu’il roule pour Bolloré, être féministe et gifler sa femme, se dire progressiste et militer pour la réintégration des soignants antivax.
Ce qui revient quand même à défoncer Louis Pasteur jusque dans sa tombe, au nom de la pénurie de soignants.
Mais ce qui ouvre aussi pas mal de perspectives. Je sais pas on pourrait lutter contre la recrudescence des incendies en réintégrant les pompiers pyromanes. J’imagine que s’il était encore de ce monde, la réintégration d’Emile Louis aurait pu être envisagée pour palier à la pénurie de chauffeurs.
Franchement c’est tellement novateur comme façon de faire de la politique, que moi si j’étais de gauche, je militerais pour faire l’union de toutes les gauches derrière la France insoumise.
Alors là, camarade Cyrano, je ne suis pas du tout d'accord avec Sophia Aram sur ce point. C'est l'occasion de s'expliquer un peu.
D'abord dans une entreprise, quand un travailleur fait une connerie et que son patron veut le virer, on le défend (quitte à l'engueuler vertement en tête à tête suivant la nature de la connerie en question). Il est tout à fait normal de défendre les soignants suspendus face à l'administration des hôpitaux, ce qui n'empêche pas de discuter avec eux.
Et comment font les gens pour vivre sans salaire pendant des mois sans avoir droit non plus au chômage ? D'ailleurs, peut-être que le problème n'existe plus. Peut-être qu'il n'y a plus de soignants à réintégrer et qu'ils ont tous déjà démissionné, parce que à moins d'avoir une sacrée cagnotte de côté, c'est intenable.
Ensuite, je trouve que cette criminalisation de l'attitude des soignants non vaccinés est tout à fait abusive. Car il y a plusieurs sortes de soignants non vaccinés et tous ne sont pas antivax. Un soignant non vacciné qui se teste très régulièrement, est négatif et prend les bonnes précautions dans son quotidien ne présente aucun danger pour les patients. Contrairement à un soignant vacciné qui ne prendrait pas suffisamment de précautions par ailleurs et compterait sur le seul pouvoir du vaccin, sans porter de masque dans les lieux publics très fréquentés ou les transports en commun bondés et sans se tester avant d'entrer en contact avec les patients.
Le vaccin est très utile contre le risque de développer une forme grave de la Covid-19 mais il n'empêche nullement d'attraper la maladie et de la transmettre. Tout le monde a autour de soi l'exemple de plein de gens vaccinés qui ont quand même attrapé la maladie une, deux ou même trois fois. Ceux-là, s'ils sont soignants, peuvent-ils côtoyer des personnes fragiles ? Oui : ils ne sont pas suspendus.
Je crois qu'il ne faut pas confondre la lutte contre les antivax et l'obscurantisme - une vraie bagarre d'idées sur la base des connaissances scientifiques - avec la lutte des pouvoirs publics contre le personnel soignant, qui leur a fourni l'occasion de faire un peu plus d'économies dans les hôpitaux au détriment du salaire de certains, tout en criant au manque de personnel pour la forme (comme n'importe quel patron crie au manque de volontaires pour se faire exploiter) ce qui leur permet de mieux fermer des services.
Il faut réintégrer les soignants suspendus, tout en faisant en sorte que chacun - suspendu ou pas, vacciné ou pas - applique y compris hors de l'hôpital les règles indispensables pour limiter le plus possible les risques de contamination (par la Covid-19, par la grippe et par toutes les maladies infectieuses contre lesquelles les soignants ne sont pas vaccinables telles que la gastro-entérite, la bronchiolite, les conjonctivites virales etc.) C'est comme cela, collectivement, que l'on protègera le plus efficacement les personnes fragiles.
Ce qui ne nous empêche pas de prendre à la moindre occasion le contrepied de l'infirmière libérale antivax pro-"médecines douces" qui se répand contre les vaccins auprès de ses... "clients" (c'est comme ça que s'appellent les patients). Dont certaines, toutes antivax qu'elles sont, ne se sont pas faites prier pour vacciner à tour de bras vu le tarif proposé, conduisant à des revenus sans commune mesure avec ceux des infirmières en hôpital.