a écrit :
Si la discussion sur comment chacun lutte ou pas contre la décentralisation a son intérêt, je pense que tu as quand même noyé le poisson.
Le point de départ était cette défense de la république (dont tu dis qu'elle est bourgeoise, soit, mais l'édito de IO fait silence sur ce point). Il s'agit de ne pas déplaire à certaines forces ... républicaines. Rien d'autre ne peut expliquer cette attitude. Pourtant, seule la vérité est révolutionnaire (dans l'édito de IO, il y a comme une omission).
Il ya effectivement une dérive de mon discours mélangeant la méthode et l'orientation mais c'est parce que bien évidement la méthode procède de l'orientation et réciproquement.
Je citerais Engels pour te dire en quoi le parti prolétarien doit se battre pour la république une et indivisible, c'est une question de principe (Critique du programme d'Erfurt,1891) :
a écrit :
[...]Cet oubli des grandes considérations essentielles devant les intérêts passagers du jour, cette course aux succès éphémères et la lutte qui se livre tout autour, sans se préoccuper des conséquences ultérieures, cet abandon de l'avenir du mouvement que l'on sacrifie au présent, tout cela a peut-être des mobiles honnêtes. Mais cela est et reste de l'opportunisme. Or, l'opportunisme « honnête » est peut-être le plus dangereux de tous. Quels sont maintenant ces points délicats, mais essentiels ?
Premièrement. - Une chose absolument certaine, c'est que notre Parti et la classe ouvrière ne peuvent arriver à la domination que sous la forme de la république démocratique. Cette dernière est même la forme spécifique de la dictature du prolétariat, comme l'a déjà montré la grande Révolution française. N'est-il pas, en effet, inconcevable que nos meilleurs hommes doivent devenir ministres sous un empereur, comme, par exemple, Miquel [18] ?
Or, il semble légalement impossible de poser directement dans le programme la revendication de la république, - et pourtant cela a pu se faire même sous Louis-Philippe, en France, aussi bien qu'en Italie aujourd'hui. Mais le fait qu'il n'est pas même permis d'établir en Allemagne un programme de parti ouvertement républicain, prouve combien formidable est l'illusion qu'on pourra, par une voie bonnement pacifique, y organiser la république, et pas seulement la république, mais encore la société communiste.
Cependant, on peut encore à la rigueur esquiver la question de la république. Mais ce qui, à mon avis, devrait et pourrait figurer au programme, c'est la revendication de la concentration de tout le pouvoir politique dans les mains de la représentation du peuple. Et cela suffirait, en attendant, si l'on ne peut pas aller plus loin.
Deuxièmement. - La reconstitution de l'Allemagne. D'une part, il faut abolir la subdivision en petits États; - allez donc révolutionner la société, tant qu'il existera des droits particuliers à la Bavière et au Wurtemberg, tant que la carte de la Thuringe, par exemple, aura l'aspect lamentable de maintenant ! D'autre part, il faut que la Prusse cesse d'exister, qu'elle se décompose en provinces autonomes, afin que l'esprit spécifiquement prussien cesse de peser sur l'Allemagne. Subdivision en petits États, esprit spécifiquement prussien, voilà les deux côtés de la contradiction où l'Allemagne est enfermée aujourd'hui et dont l'un des côtés doit toujours servir d'excuse et de justification à l'autre. Que faut-il mettre à la place ? A mon avis, le prolétariat ne peut utiliser que la forme de la république une et indivisible. En somme, sur le territoire immense des États-Unis, la république fédérative est aujourd'hui encore une nécessité, bien qu'elle commence d'ores et déjà à être un obstacle dans l'Est. Elle constituerait un progrès en Angleterre, où dans deux îles habitent quatre nations et où, malgré un Parlement unique, existent côte à côte, encore aujourd'hui, trois législations différentes. Dans la petite Suisse, il y a longtemps qu'elle constitue un obstacle tolérable seulement parce que la Suisse se contente d'être un membre purement passif dans le système d'États européen. Pour l'Allemagne, une organisation fédéraliste à la manière suisse serait un recul considérable. Deux points distinguent un État fédéral d'un État unitaire; c'est d'abord, que chaque État fédéré, chaque canton possède sa propre législation civile et pénale, sa propre organisation judiciaire; c'est ensuite qu'à côté de la Chambre du peuple, il y a une Chambre des représentants des États, où chaque canton, petit ou grand, vote comme tel. Quant au premier point, nous l'avons dépassé heureusement et nous n'allons pas être assez naïfs pour l'introduire à nouveau. Quant au second, nous l'avons sous la forme du Conseil fédéral et nous pourrions fort bien nous en passer, - d'autant plus que notre « État fédéral » forme déjà la transition vers l'État unitaire. Et il ne nous appartient pas de faire rétrograder la révolution d'en haut, faite en 1866 et 1870; au contraire, nous avons à y apporter le complément et l'amélioration nécessaires par un mouvement d'en bas.
Ainsi donc, république unitaire. Mais pas dans le sens de la République française d'aujourd'hui, qui n'est pas autre chose que l'Empire sans empereur fondé en 1798. De 1792 à1798, chaque département français, chaque commune eut sa complète autonomie administrative, sur le modèle américain, et c'est ce qu'il nous faut avoir de même. Comment organiser cette autonomie et comment on peut se passer de la bureaucratie, c'est ce que nous ont démontré l'Amérique et la première République française; et c'est ce que nous montrent encore aujourd'hui l'Australie, le Canada et les autres colonies anglaises. Une semblable autonomie provinciale et communale est beaucoup plus libre que le fédéralisme suisse par exemple, où le canton est, il est vrai, très indépendant à l'égard de la Confédération, mais où il l'est également à l'égard du district (Bezirk) et de la commune. Les gouvernements cantonaux nomment des gouverneurs de districts (Bezirksstatthalter) et des préfets, dont on ne sait rien dans les pays de langue anglaise et dont, à l'avenir, nous devons nous débarrasser aussi résolument que des conseillers provinciaux et gouvernementaux (Landrat et Regierungsrat) prussiens.[...]
Certes, la Veme république est encore plus un empire sans empereur que la IIIeme dont parle Engels, mais il est notable qu'il n'a pas été possible jusqu'à présent à la bourgeoisie de détruire le cadre "un et indivisible" de la république après plus de deux siècles de combat pour détruire l'unité du peuple. Il est légitime et même indispensable de se prononcer pour le maintien de la république une et indivisible si l'on prétend mener la société au socialisme.
Cette citation devrait également convaincre de l'ampleur de la régression qu'on veut nous faire subir.
le premier paragraphe de la citation me parait tout à fait approprié pour répondre à Emman.