(artza @ samedi 26 avril 2008 à 08:33 a écrit : Les maoïstes ne posèrent jamais les problèmes que posa le PC et identifier les deux n'a pas beaucoup de sens.
IL Y A EU MAOS... ET MAOS
Euh... Ca dépend de quels maoistes on parle. Il y avait tellement, comme tu le dis, de variétés de maos, avec des politiques complètement différentes, qu'on peut difficilement généraliser.
Le PCMLF, le plus gros et le plus ouvrier, directement issu du PC, était le plus stalinien et le plus violemment anti-trotskyste. ("Trotsky assassiné pour une affaire de moeurs", écrivait l'Humanité rouge.) Bien sûr, ils n'avaient pas les moyens de pratiquer à grande échelle les méthodes du PC, mais c'est bien la seule différence. Le PCMLF était d'ailleurs plus ou moins "reconnu" par la Chine : ses dirigeanst étaient invités là-bas et rencontraient des officiels (de second rang tout de même, pas le grand Guide himself).
Quant aux mao-spontex, issus de milieux étudiants pour la plupart, ils voyaient dans la révolution culturelle une révolte spontanée d ela jeunesse contre l'ordre établi. Leurs relations avec la Chine étaient purement fantasmatiques.
Une branche Mao a aussi donné naissance à la Cause du peuple, d'où sont issues la GP et Action directe.
Un des rares groupes Mao à avoir survécu et fait du travail en milieu ouvrier avec régularité est Pour le Parti, qui publie Partisan et vient parfois à la fête de LO. Ils sont très corrects sur beaucoup de points. Ils ont rompu avec le stalinisme, mais pas avec... la révolution culturelle.
SUR LE STALINISME
Un forumeur s'étonne qu'on emploie fréquemment le terme de "stalinien". Il ne s'agit pas d'une insulte mais d'une caractérisation politique, qui se rapporte à un phénomène politico-social historique bien précis. Cela désigne donc à la fois les méthodes employées (mensonges, calomnies, répression violente des opposants, refus de toute démocratie ouvrière etc) et les régimes dictatoriaux mis en place en usurpant le drapeau du communisme.
Lavana a tout à fait raison de dire qu'on ne met pas tous les écrits sur le meme plan. On est obligé de tenir compte du role de leurs auteurs, des circonstances dans lesquelles les textes ont été écrits. Cela nous permet d'évaluer leur degré de fiabilité. Par exemple, si nous voulons être informés sur la grève de Citroen Aulnay, mieux vaut lire la brochure de LO qu'un article du Monde, ou même de l'Huma ou de la Vie ouvrière qui vont, nous le savons, privilégier le point de vue des dirigeants syndicaux.
On ne peut pas discuter des textes de Staline de 1950 ou de Mao de 1970 - et pourqui pas de textes des dirigeants chinois d'aujourd'hui, qui eux-aussi parlent toujours de "communisme" de "parti", de "classe ouvrière", de "marxisme" etc, comme si nous avions affaire à des textes de dirigeants révolutionnaires. Ce sont des textes de circonstance, parfois déconnectés de la réalité, parfois destinés à justifier telle ou telle politique.
Quant aux écrits de Mao, je signale à Convivio que Simon Leys (qu'il devrait lire de toute urgence) en cite pas mal... en les décodant justement.
REVOLUTION CULTURELLE ET RIVALITES AU SEIN DU PC CHINOIS
Pour en revenir à la GRCP, l'un des forumeurs (Zappa ou Lavana ?) pense qu'elle a été seulement une opération de mise au pas de la population, suivant la thèse de LO 1967. (Sur ce point on discute davantage entre trotskystes proches de LO qu'avec Conviviado...).
Cette thèse me parait insuffisante pour expliquer la GRCP car les mouvements ouvriers, les affrontements, la répression ne se sont produits qu'APRES le déclenchement de la GRCP, en raison du désordre et de la confusion créées par cette invasion des villes par des foules de jeunes venus souvent de loin.
Je pense qu'il y a bien eu un affrontement au sein du PC chinois et que Mao s'est appuyé sur l'armée contre ses rivaux du parti. Simon Leys explique d'ailleurs tout cela de façon très détaillée. (Désolé de faire systématiquement appel à lui, mais il me semble être le meilleur analyste de ces événements. Sauf textes que je ne connais pas. ) Si le seul but de la GRCP avait été la mise au pas de la classe ouvrière, pourquoi avoir chassé, humilié, assassiné tant de cadres et de dirigeants locaux, qui n'étaient certes pas dans leur immense majorité des porte-parole des travailleurs ? La LDC 67 ne répond pas à cette question.
Quelle était la nature de cet affrontement ? Ce n'était certes pas un affrontement de classes entre une ligne bourgeoise et une ligne prolétarienne comme le croyaient fort naivement les maoistes étrangers. Il est d'ailleurs très significatif que nombre de bureaucrates sont passés d'un camp à l'autre. Les favoris de Mao du jour se sont retrouvés réprouvés du lendemain et vice-versa. Quant aux malheureux gardes rouges manipulés, ils ont été déportés par centaines milliers voire par millions dans les campagnes quand Mao a estimé que leur role était terminé.
Il n'y a donc pas de principes politiques fermes dans tout cela. Essentiellement une lutte pour le pouvoir. Mao était déconsidéré par les échecs catastrophiques du grands bonds en avant. Certes, superficiellement, la GRCP préconisait la poursuite d'une politique économique volontariste, productiviste à outrance, continuait à faire de nécessité vertu etc, alors que nombre de cadres du parti voulaient rompre avec cette politique dont ils venaient de mesurer les effets désastreux.
Mais Mao s'est montré capable de reprendre à son compte une partie de la politique des opposants selon des techniques bureaucratiques traditionnelles. De la même façon par exemple que Staline après avoir réprimé l'opposition de gauche a repris une partie de sa politique. Ces zigzags sont caractéristiques de ces régimes.
Et, oui, désolé Convivio, la volonté de conserver le poovoir fait partie des motivations les plus importantes de tous les dictateurs : ils sont prets à accepter la politique de leurs opposants, à condition de la diriger eux-memes. Toute l'histoire en atteste.
LES HORREURS DE LA REVOLUTION CULTURELLE
Matrok s'étonne qu'on ne les évoque pas davantage. Eh bien, pour ma part, je tenais surtout à insister sur la nature des faits sociaux. Et je m'attendais bien sûr à ce que Conviviado nous sorte que "La révolution n'est pas un diner de gala" (Mao)
Mais il est vrai que les méthodes employés ne sont pas celles des communistes révolutionnaires. Promener des gens avec des pancartes insultantes sur le dos, des bonnets d'ane, leur cracher dessus, les battre en public, les faire mettre à genoux devant la foule, non ce ne sont pas nos méthodes ! Les descentes des gardes rouges chez des gens accusés d'appartenir à la "bande noire" et de cacher des "vieilleries" (Livres étrangers, disques de musique étrangère etc) ressemblent beaucoup aux descentes des chemises noires de Mussolini ! Et ce ne sont pas des "bavures" : ces brimades ignobles furent systématiquement utilisées pour briser les adversaires politiques du jour.
Certes les bolcheviks, la tchéka ont tué des gens, mais jamais le lynchage public n'a été érigé en méthode par les bolcheviks. Cela ne s'est fait qu'après la contre-révolution, avec les grangs procès de Moscou, les dénonciations, les séances d'auto-critique dans les entreprises etc.
On peut noter à ce propos que certains maos en France ont tenté d'imiter leurs modèles : c'est ainsi qu'ils avaient mis des pancartes sur le dos d'un membre du'ne milice patronale de Citroen en l'avait promené dans la foule, sous les crachats, les huées, les coups etc.