par Cyrano » 19 Avr 2004, 20:44
Je ne résiste pas au plaisir de citer un peu plus le discours du 21 juillet 1945, à Wazier.
Thorez s'adressait aux délégués communistes du bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais (peut-être ce discours a-t-il déjà été cité dans ce forum ?)
Après avoir fait le compte rendu du congrès communiste précédent, il va revenir à son dada : la production, bordel ! Car, horreur, malheur, il constate qu'il « s’est produit un fléchissement à partir d’avril, fléchissement dans la production et fléchissement dans le rendement. »
Thorez examine les causes de cette baisse de la production (outillage défectueux, prime au rendement insuffisante, etc.). Parmi les causes : il y a aussi des grèves « très peu justifiées », et il y a aussi « toute une série de fêtes, fêtes religieuses, Ascension, lundi de Pentecôte et fêtes de la Victoire. Tout cela entraîne, dans un métier comme le métier des mineurs, une certaine désorganisation. » Raffarin n'a rien inventé !
Pour y remédier, il n'est pas à court d'idées lumineuses :
« Pourquoi ne pas mettre au fond ceux qui ont été volontaires pour le travail en Allemagne ? Comment, ces messieurs, lorsque Hitler leur a dit : "Venez travailler chez moi", y sont allés et ils reviennent maintenant et veulent reprendre leur vie tranquille ? Allez travailler au fond ! Vous y serez maintenant, enfin, utiles au pays. » (Georges Marchais a dû apprécier !)
Thorez en vient à l'absentéisme :
« Je dois vous dire, chers camarades, que je ne suis pas tout à fait convaincu des raisons qu’on donne pour justifier les absences. Quand on me dit, par exemple, qu’à Notre-Dame, ou dans certaines fosses de l’ancienne concession, on a payé jusqu’à 27, 28, 30 % d’absences, je dis que c’est un scandale, ce n’est pas possible, cela ne peut pas continuer. On s’absente trop facilement pour un oui ou pour un non et un mineur qui a le goût de son métier, sait très bien que tant d’absences entraîne une désorganisation complète du travail. [... On s'absente] Parfois pour un oui ou pour un non, pour une égratignure. Je dis que c’est un scandale. »
Pas question d'accorder des billets d'absence maladie à tort et à travers :
« Chers camarades, celui qui a le billet de malade sans journée de malade, il a aussi son ravitaillement ; il a aussi les litres de vin, il a aussi la viande ; il mange la part de ses camarades. Ce n’est .pas possible, on ne peut pas continuer comme cela. Il faut avoir plus de conscience. » [On notera : [/I]les[/I] litres de vin…]
Les litres de vin, oui, du moment qu'on reste au boulot :
« On m’a signalé l’autre jour que dans un puits, le puits de l’Escarpelle, une quinzaine de jeunes gens, des galibots, ont demandé de partir à six heures pour aller au bal. Je dis que c’est inadmissible. Vous le savez bien, chers camarades, j’ai été jeune aussi. J’ai été aussi au bal et j’ai dansé, mais je n’ai jamais manqué un seul poste, à cause d’une fête ou d’un dimanche, jamais. »
Et bien sûr, le premier qui fait grève, il lui en cuira :
« Ici, chers camarades, je le dis en toute responsabilité au nom du Comité central, au nom des décisions du Congrès du Parti, je le dis franchement : il est impossible d’approuver la moindre grève, surtout lorsqu’elle éclate, comme la semaine dernière, aux mines de Béthune, en dehors du syndicat et contre le syndicat. On a pris des sanctions. Sur quatre porions, on en a réintégré deux, en les rétrogradant d’ailleurs. »
Ah… Maurice… Pas Chevalier, mais Thorez… Le premier stalinien de France… Une grande figure du communisme, oui….