par mael.monnier » 04 Jan 2005, 19:32
<!--QuoteBegin-Barikad+mardi 4 janvier 2005 à 14:01--></div><table border="0" align="center" width="95%" cellpadding="3" cellspacing="1"><tr><td><b>QUOTE</b> (Barikad 4 mardi 4 janvier 2005 à 14:01)</td></tr><tr><td id="QUOTE"><!--QuoteEBegin--> José Bové est le representant d'une paysannerie qui est depassé historiquement. C'est un petit bourgeois qui voudrait faire tourner la roue de l'histoire à l'envers (retour des petites exploitations familiales, agriculture "biologique" etc...). Donc, sur bien des points il defends des positions <i>réactionnaires</i>, contre le progrès... <!--QuoteEnd--></td></tr></table><div class="postcolor"><!--QuoteEEnd--><br>En quoi retourner à des exploitations familiales de taille humaine serait-il réactionnaire ?<br>Est-ce véritablement progressiste que de transformer tous les paysans en ouvriers agricoles dans d'énormes exploitations ? Je ne le pense pas. On aboutit ensuite à une agriculture fondée uniquement sur la recherche de la productivité maximale, qui délaisse l'entretien du paysage et qui ne respecte pas l'environnement. Dans une exploitation familiale et paysanne, il y a un lien fort entre les paysan-ne-s et la Nature (à distinguer de la nature avec un n minuscule, qui est la nature vue d'un point de vue capitaliste, purement utilitariste), les paysan-ne-s sont attaché-e-s à leurs animaux, les respectent, en prennent soin, de même ils sont attaché-e-s au paysage qui les entoure et en prennent donc soin comme d'un jardin (ce qui n'est pas le cas des <i>exploitants</i> agricoles qui ne veulent qu'asservir la nature et ne la respecte pas, qui sont agriculteurs dans le but unique d'en retirer des profits). <br><br>L'agriculture industrielle crée une division du travail entre la culture de la terre et l'entretien du paysage, qui n'a rien d'efficace économiquement. On peut arguer que cela irait plus vite d'avoir d'un côté l'ouvrier laboureur qui ne se consacre qu'à la culture, et d'un autre l'ouvrier d'entretien. Or est-ce véritablement exact ? La réponse est non puisqu'il va falloir deux déplacements : un pour l'ouvrier laboureur, l'autre pour l'ouvrier d'entretien. C'est donc du temps perdu dans le déplacement (or le temps, c'est de l'argent, comme dit le dicton), en énergie et en réparation des engins. C'est donc purement stupide.<br><br>Un autre argument en faveur de l'agriculture industrielle serait qu'il est plus efficace de cultiver un ensemble de 200 hectares qu'un ensemble de 20 hectares, ce qui est douteux étant donné que plus une ferme est grande et plus les temps de déplacement deviennent importants.<br><br>Le seul point "positif", c'est pour les gros propriétaires : plus la ferme est grande, plus ils peuvent embaucher d'ouvriers, et donc plus leur plus-value est importante... Je ne vois donc pas en quoi c'est progressiste.<br><br>Et en quoi l'agriculture biologique serait-elle réactionnaire ? Est-ce réactionnaire que de cultiver des aliments de meilleure qualité, plus nourrissants et sans pesticides nuisibles à la santé ? Est-ce réactionnaire que de ne pas polluer les eaux du sol plutôt que d'avoir à réaliser des traitements coûteux pour les rendre propres à la consommation, et plutôt que d'avoir à ramasser les algues vertes sur les plages ? Est-ce réactionnaire que de préférer des aliments à forte valeur gustative à des aliments sans goût et pleins d'eau ? Est-ce réactionnaire que de préférer un environnement sain à un environnement pollué ? Est-ce réactionnaire d'employer des prédateurs naturels (ex : coccinelles) plutôt que des insectides (pour tuer les pucerons par exemple) ? Est-ce réactionnaire que de mêler les cultures entre elles afin de lutter contre les ravageurs ? Est-ce réactionnaire que de laisser les poules en liberté dans les champs pour manger les insectes présents dans le sol et de les laisser faire leurs déjections dans les cultures, plutôt que de les enfermer dans des poulaillers avec ensuite la nécessité d'étendre les fientes avec des machines ? <br><br>L'agriculture "moderne" est-elle plus productive une fois pris en compte le coût des engrais, de leurs transports aux champs et de leur épandage ? Dans Les Enjeux - Les Echos, j'ai ainsi lu qu'il fallait 2 000 km pour fabriquer un yaourt ? En quoi est-ce économique ? Du yaourt, cela peut se fabriquer sur place puis être vendu à proximité, ça n'a rien de compliqué à faire. Il faut également savoir que cette agriculture dite "moderne" est très fortement subventionnée par la bourgeoisie, tandis que l'agriculture familiale et biologique ne touche que très peu d'aides, et également et surtout que le principe pollueur-payeur n'est pas appliqué. Cela explique ensuite les différences de prix déloyales. Les pauvres n'ont alors plus qu'à manger la bouffe de merde produite par les capitalistes de l'agriculture !<br><br>Enfin, j'aimerais bien savoir la raison pourlaquelle la paysannerie serait une classe réactionnaire ? En Russie, les moujiks travaillaient la terre dans des mirs selon un mode communiste primitif, ils haïssaient les koulaks (les grands propriétaires, littéralement en russe : "rapaces" <b>-- modo : nan, c'est "poing", et moujik, c'est "petit gars, mec" --</b>) et trouvaient injustes qu'ils aient les meilleurs terres. Les décisions y étaient prises en démocratie directe. Le partage des terres était fait au tirage au sort selon une façon très équitable. Lors des révolutions de 1905 et de 1917, les soviets ne sont pas nés du néant. De nombreux ouvriers des villes avaient vécu dans les mirs et les soviets furent fortement inspirés de la démocratie des mirs. Les éléments paysans ont donc joué un grand rôle dans les révolutions russes, dont on ne peut dire qu'il fut réactionnaire. Actuellement, la paysannerie française (classe à distinguer des <i>exploitants</i> agricoles) ne peut qu'être avec nous dans la lutte contre les multinationales qui les écrase, non ?<br><br>Encore une question pour finir : comment va-t-on pouvoir mener la Révolution si l'agriculture locale cède de plus en plus la place à l'agriculture mondialisée ? Les productions se spécialisent en effet par régions. Autour de Paris, en Beauce, il n'y a quasiment que des céréales. En Bretagne, on se spécialise dans le cochon, etc. Si demain, sous les pressions de l'OMC, on passe à un stade supérieur, comment fera-t-on ? Si l'on suppose que la Révolution se déclenche dans un pays donné, elle y aura du temps avant que d'autres pays entre à leur tour en Révolution. Il y a donc alors un risque de rupture de l'approvisionnement alimentaire. Comment ferait-on si toutes les semences étaient produites dans un seul pays pour ensuite ensemencer pour l'année suivante ? A mon avis, ce sont des questions qu'il ne faut pas négliger.<br><br>J'espère en tout cas que je ne serais pas traité de réactionnaire avec mes questions et qu'un débat constructif s'engagera.<br><br>Fraternellement,<br>Maël