Le bouquin de Hardy

Message par EZRAROX » 22 Fév 2003, 18:10

Bonjour,

Il y a un aspect du livre que je voudrais souligner et qui me semble assez important d'un point de vue pédagogique.

L'avantage du dialogue en questions-réponses permet au lecteur de choisir ce qu'il veut lire. En effet certaines parties peuvent sembler un peu difficiles pour une personne qui ne connait rien au mouvement trotskyste et à LO.
Par contre en ce qui concerne le fonctionnel de LO, la vie de Barcia et celle de Bois, notamment pendant la grêve de Renault en 47, c'est d'une formidable facilité de lecture et de plus trés passionnant.
Bien évidemment ce livre est une perle pour ceux qui veulent approfondir leurs connaissances de LO sur le plan historique.

Bref c'est un très bon livre pour les néophytes et en cela il est un puissant outil pour les militants.
EZRAROX
 
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Message par stef » 22 Fév 2003, 18:39

Je n'ai pas lu le livre de Hardy mais dans la longue citation ci-dessus, un passage m'a sauté aux yeux.
Hardy écrit :
a écrit :C'est pourquoi, s'il y a une crise des idées révolutionnaires, elle provient moins des travailleurs que des intellectuels de gauche. Il y a bien longtemps, Trotski écrivait que " la crise historique de l'humanité se réduit à la crise de la direction révolutionnaire ".

Et la crise de la direction révolutionnaire, c'est avant tout la défaillance des intellectuels de gauche.


Voici ce qu'expliquait en fait :trotsky: (Programme de transition):
a écrit :Les bavardages de toutes sortes selon lesquels les conditions historiques ne seraient pas encore "mûres" pour le socialisme ne sont que le produit de l'ignorance ou d'une tromperie consciente. Les prémisses objectives de la révolution prolétarienne ne sont pas seulement mûres ; elles ont même commencé à pourrir. Sans révolution socialiste, et cela dans la prochaine période historique, la civilisation humaine tout entière est menacée d'être emportée dans une catastrophe. Tout dépend du prolétariat, c'est-à-dire au premier chef de son avant-garde révolutionnaire. La crise historique de l'humanité se réduit à la crise de la direction révolutionnaire.


Et il conclut le même programme par la même idée - on peut donc en déduire que c'est donc le coeur de ce programme :
a écrit :La crise actuelle de la civilisation humaine est la crise de la direction du prolétariat. Les ouvriers avancés réunis au sein de la IV° Internationale montrent à leur classe la voie pour sortir de la crise. Ils lui proposent un programme fondé sur l'expérience internationale de la lutte émancipatrice du prolétariat et de tous les opprimés du monde. Ils lui proposent un drapeau que ne souille aucune tache.


Ce que dit :trotsky: , c'est que la crise de direction provient de l'absence d'un POR, d'une internationale marxiste. D'où la nécessité de mener ce combat (ce qui implique la lutte acharnée contre les appareils).
Pour dire autrement : l'objectif n'est pas de développer la combatitvité des travailleurs, il est de leur fournir une perspective politique par la construction d'un POR.

Par contre, pour Hardy, "la crise de la direction révolutionnaire, c'est avant tout la défaillance des intellectuels de gauche".

Ce n'est évidemment pas tt à fait la même chose (pour le moins)...

A vos claviers, hardystes acharnés !
stef
 
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Message par Fan_Bizet » 22 Fév 2003, 23:11

a écrit : Je n'ai pas lu le livre de Hardy


Tu devrais...Il est super interessant.

a écrit :Ce que dit  :leon:  , c'est que la crise de direction provient de l'absence d'un POR, d'une internationale marxiste. D'où la nécessité de mener ce combat (ce qui implique la lutte acharnée contre les appareils).
Pour dire autrement : l'objectif n'est pas de développer la combatitvité des travailleurs, il est de leur fournir une perspective politique par la construction d'un POR.

Par contre, pour Hardy, "la crise de la direction révolutionnaire, c'est avant tout la défaillance des intellectuels de gauche".

Ce n'est évidemment pas tt à fait la même chose (pour le moins)...


Cela s'appelle "chipoter"
Les "successeurs" de :trotsky: n'ont pas été suffisament à la hauteur. Point. Il ne faut pas remettre en cause la capacité du prolétariat à mener une révolution. Je ne saisi pas la nuance que tu veux y apporter...
Eclaire moi stp
Fan_Bizet
 
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Message par stef » 22 Fév 2003, 23:53

Je ne chipote pas du tout. C'est une différence essentielle. Peu de choses sont aussi fondamentales.

Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il y a une crise de direction révolutionnaire. Pour :trotsky: , cette crise, c'est le résultat du passage du coté du Capital des PS puis des PC. C'est un problème politique dont découle la nécessité du combat pour construire un POR, l'Internationale - étant entendu que c'est inséparable du combat frontal pour disloquer les appareils.

Bref, pour :trotsky: "la crise de la direction révolutionnaire, c'est avant tout la défaillance des directions du mvt ouvrier".

Hardy, lui explique que "la crise de la direction révolutionnaire, c'est avant tout la défaillance des intellectuels de gauche.". C'est une autre conception - je n'y peux rien !

Dans un cas l'accent est mis sur les facteurs politiques, dans l'autre sur les facteurs sociologiques.


PS:
1/ Je lirai le bouquin en question.
2/ Dans le fragment cité, il y a d'autres assages problématiques. On y reviendra.


PPS. Loin de moi l'idée de nier qu'une organisation trotskyste se construit avec en son centre l'interveniton ouvrière ou que le prolétariat est une classe révolutionnaire.

PPPS. Il me semble effectivement juste de dire que les successeurs de :trotsky: ne furent pas à la hauteur. Ce n'est pas la question.
stef
 
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Message par com_71 » 23 Fév 2003, 00:10

(stef @ samedi 22 février 2003 à 23:53 a écrit :Je ne chipote pas du tout. C'est une différence essentielle.
Bref, pour :trotsky: "la crise de la direction révolutionnaire, c'est avant tout la défaillance des directions du mvt ouvrier".

Hardy, lui explique que "la crise de la direction révolutionnaire, c'est avant tout la défaillance des intellectuels de gauche.". C'est une autre conception - je n'y peux rien !

Dans un cas l'accent est mis sur les facteurs politiques, dans l'autre sur les facteurs sociologiques.



Lis le bouquin, c'est quand même le minimum avant d'en parler.

Cela dit tu chipotes. Mais comme :lenine: a expliqué (dans Que Faire) le rôle important des intellectuels dans la construction d'une direction, il met tout le monde d'accord....

(stef @ . a écrit : l'objectif n'est pas de développer la combativité des travailleurs, il est de leur fournir une perspective politique par la construction d'un POR.

Tu pourrais quand même envisager que la question se pose [en partie] autrement en 2003 qu'au moment de la révolution espagnole.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par Fan_Bizet » 23 Fév 2003, 15:15

a écrit :Dans un cas l'accent est mis sur les facteurs politiques, dans l'autre sur les facteurs sociologiques.


Et alors, quelles conclusions pratiques tu en tires ?
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Message par stef » 23 Fév 2003, 16:19

1/ La citation du bouquin qu'en a fait COM est suffisemment étoffée pour qu'on puisse parler de ça sans avoir lu l'ensemble de l'opus.

2/ Maintenant sur le fond. La première chose à faire est d'avoir une analyse ensuite elle se décline en pratique. Donc les conséquences partiques dont parle notre fan de Bizet, après.

3/ La réponse de Com montre bien qu'il y a là une conception sur laquelle nous ne sommes pas d'accord. Ca n'en fait pas un contre-révolutionnaire, mais nous ne sommes visiblement pas d'accord (Capito, discufred ?). Il écrit en effet :
a écrit :Tu pourrais quand même envisager que la question se pose [en partie] autrement en 2003 qu'au moment de la révolution espagnole.


C'est une opinion tt à fait respectable, mais pas la mienne. Ce que nous dit Com, c'est en définitive que l'appréciation de :trotsky: dans le programme de la IV° était conjoncturelle. Je ne le pense pas. C'est au contraire une idée centrale - qui ouvre et conclut - le programme, valable pour une période historique entière.

Ce qui entrave toujours le mouvement de la classe, c'est l'absence de direction révolutionnaire. D'où le fait que nulle part n'aie pu être mise en place une authentique dictature du prolétariat depuis 1917. Albsence de direction révolutionnaire : ça et pas autre chose. Par exemple pas une insuffisante "combattivité" des travailleurs, qu'il faudrait "conscientiser". D'où la nécessité d'un combat de chien contre les directions (voir nos appels sur les retraites).

Il est vrai que la situation de 1938 n'est pas celle de 2003. Ce qui a changé c'est que cette crise s'est considérablement accentuée. Notamment, la faillite de la IV° en a rajouté une couche. Et il faut rajouter la défaite finale de la révolution russe en 1991 (réintroduction du Capital). Donc je ne "plaque" pas, mais sur l'essentiel, cette idée essentielle du programme reste valide : la tâche des trotskystes consiste à reconstruire un POR par le combat contre les directions officielles du mvt ouvrier.

4/ Je n'ai pas encore pigé clairement à quoi COM fait allusion en faisant référence à "Que Faire ?". Mais s'il s'agit du supposé "trade-unionisme" de la classe ouvrière, qu'il fasse attention. :lenine: lui-même a indiqué que c'était une exagération.

5/ Tout ceci aboutit évidemment à des conceptions dans le combat politique assez différentes. (voir post suivant)
stef
 
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Message par Léandre » 26 Fév 2003, 21:26

Je suis d'accord avec Stef sur ce point.

D'abord, que la question se pose différemment à l'époque qu'actuellement, ce n'est pas une raison pour détourner une citation de son sens. Trotsky ne parlait pas d'une défaillance des intellectuels, qui a toujours existé en période de reflux.

Le problème du passage est qu'on ne sait pas de quels intellectuels parle Hardi. S'il veut parler des Sartre, Malraux... ou des Courtois... Il ne me semble pas qu'à un moment de l'histoire on ait compté sur eux pour diriger le mouvement ouvrier. S'il parle d'une poignée intellectuels nécessaire pour éclaircir les idées politiques, elle existe.
A part ça, il me semble que la direction défaillante du mouvement ouvrier n'est pas toujours composée d'intellectuels (Thorez...)

Alors que LO se tourne entièrement vers la classe ouvrière, je ne comprend pas pourquoi Hardi voudrait que ce soit les intellectuels qui dirigent le mouvement ouvrier (surtout dans les pays riches où les ouvriers ont les moyens de se former) :blink:
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Message par Barnabé » 27 Fév 2003, 12:31

Je suis d'accord aussi avec Stef et Léandre là dessus.
Un parti ouvrier révolutionnaire a bien entendu besoin d'intellectuels révolutionnaires. Mais ils s'agit d'une minorité d'intellectuels qui rompent avec leur milieux et pas d'une parti de la couche social des intellectuels en tant que telle.

La fonction sociale des "intellectuels de gauche" n'est pas d'être une direction révolutionnaire pour la classe ouvrière, leur rôle est d'être les idéologue "de gauche" (réformistes) de la bourgeoisie.
Quand Lénine dans "Que faire?" insiste (en disant lui même qu'il "tord un peu le baton" dans sa lutte contre l'économisme) sur le rôle des intellectuels, il précise que si les intellectuels issus d'autres milieux que la classe ouvrière (car pour lui les intellectuels révolutionnaires ce sont aussi les intellectuels ouvriers) ont leur place dans le parti de révolutionnaires professionels qu'il veut construire, l'intellectuel révolutionnaire est celui qui ne se considère pas comme une fraction de l'intelligentsia, mais comme partie prenante de la classe ouvrière.
La petie bourgeoisie, en particulier les intellectuels, n'ont plus de rôle historique révolutionnaire depuis 1848. Une minorité d'intellectuels en sont conscient et rompent avec leur milieux pour devenir des militants de la classe ouvrière.
A la fondation de la IVème internationale, vu le poids du stalinisme et du réformisme dans la classe ouvrière, ce sont essentiellement des intellectuels qui rejoignent Trotsky. Mais cela c'est un problème (pas imputable à ces intellectuels, mais à la situation qui éloigne la classe ouvrière du marxisme révolutionnaire).
Il ne faut pas faire de nécessité vertue. Ce n'est pas parceque des intellectuels se retrouvent majoritaires dans les groupes trotskystes qu'il faut identifier la direction révolutionnaire du prolétariat (dont Trotsky souligne la crise) et les intellectuels "de gauche". Au contraire, je pense que la préeminence des intellectuels dans le mouvement Trotskyste est un produit de la crise de la direction révolutionnaire du prolétariat: le stalinisme coupe la classe ouvrière du marxisme révolutionniare et c'est cela la crise de la direction politique de la classe ouvrière.
Le problème du mouvement trotskyste n'est pas son incapacité à gagner des intellectuels de gauche, mais son incapacité à se lier organiquement aux masses ouvrières, et la spécificité du courant LO a toujeurs été de montrer la necessité de se lier à ces masses en essayant d'intervenir dans les luttes de la classe ouvrière, pas de rammener à elle les larges masses "défaillantes" des "intellectuels de gauche".
Barnabé
 
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