Dans ton message, Cyrano, je trouve que tu (re-re-re-)poses une question légitime:
a écrit :
-L'espèce humaine, ce sont des hommes, des femmes, des individualités. Après le monde physique, après le déroulement de l'histoire, ne pourrait-on pas trouver des lois qui font l'histoire d'un individu ?
Harpo, faisant écho à cette question, écrivait :
-Le matérialisme historique permet de comprendre l'histoire et d'agir sur celle-ci de façon consciente. Il manque son équivalent dans le domaine de l'individu.
Soit.
Mais tu emploies selon moi de mauvais arguments:
a écrit :
Quoi ? On pourrait faire des choses à l'insu de notre plein gré ? Alors là, ça interpelle notre superbe à nous, êtres langagiers.
Le parallèle avec le marxisme et sa conception de l'histoire s'imposait presque de soi-même. Et on ne pouvait résister au plaisir de citer la célibrissime préface de Marx dans la "Contribution à la critique de l’économie politique" :"Dans la production sociale de leur existence, les hommes entrent en des rapports déterminés, nécessaires, indépendants de leur volonté."
Le parallèle, pour ce qui nous occupe, n'est qu'à moitié justifié. Dans le cas du marxisme, on peut très bien décomposer, à l'état "élémentaire" les rapports entre un homme et son voisin, ce qui va donner, au niveau de la société des rapports "indépendants de la volonté" des hommes, et en partie devenus inconscients, donc puisque sans rapport avec leurs actes de tous les jours. Mais les actes élémentaires sont connus. Par exemple, un capitaliste va tenter de maximiser son profit individuel. En faisant ça, il va en fait participer à la marche globale de la société, et donc à des processus globaux , des lois économiques ou historiques (par exemple la baisse tendancielle du taux de profit ou le déclenchement de crises).
Pour ce qui est de la psychanalyse, il y a des concepts qu'on a du mal à toucher du doigt. Ce sont des sortes d'hypothèses de travail. Le "moi", le "surmoi", le "phallus", ne sont pas la résultante de choses "élémentaires" que l'on peut décrire. Ce qui est gênant, dans ces notions, ce n'est pas l'inconscient en soit, que les hommes fassent des choses "à l'insu de leur plein gré". Ce qui est gênant, pour le moment dans cette discussion, c'est qu'on n'arrive pas à être précis sur les liens entre des concepts de travail Freudiens et la réalité. Note d'ailleurs que les phénomènes mis en évidences par les neurosciences qu'avance Canardos impliquent également que "nous faisons des choses à l'insu de notre plein gré". Personne ne conteste vraiment ça. Le problème n'est pas à ce niveau.
Neurosciences/Psychanalyse
Pour l'instant, de ce que je comprends, les neurosciences se situent à un niveau différent de ce que tu cherches. C'est un problème de complexité. On peut décrire des tas de phénomènes au niveau "élémentaire" dans le cerveau. Mais avant d'arriver à en tirer ce qui compose la personnalité de quelqu'un, par exemple, on sent bien que ce n'est pas demain la veille. Ce n'est pas parce que cette personnalité n'est pas la conséquence de ces phénomènes. C'est parce que leur complexité empêche qu'on les regarde à un niveau élémentaire, et qu'on en déduise un comportement global. Alors, on se situe directement à un niveau global, et on fait avec ce qu'on a à ce niveau: la parole, l'histoire personnelle de l'individu, etc... Tout ça est très bien. C'est ce que fait Freud, en quelque sorte.
Mais...
Mais tout ça ne dispense pas, quand on en est là, de vérifier que les concepts qu'on introduit ne sont pas sans rapport avec la réalité. On peut revenir au parallèle avec le marxisme. Ce qu'a montré Marx, par exemple, c'est que certains philosophes qui l'ont précédé, les idéalistes, se sont totalement fourvoyés sur les concepts qu'ils utilisaient pour décrire la société (pourtant, eux aussi le faisaient de manière globale, au moins pour certains). Ils avaient des notions, des concepts, qui finalement n'étaient pas relevant.
J'aimerais donc qu'on y revienne, et qu'on examine ces concepts un peu plus, en les mettant en parallèle avec des faits, comme on avait commencé à le faire.