Je relis avec grand enthousiasme ce grand livre, un journal tenu par une femme turque, Nalan Türkeli au milieu des années 1990. Nalan vit dans un "gecekondu", l'un de ces maisons posées la nuit qui constituent les bidonvilles d'Istanbul. Envers et contre tous, elle tient son journal, alors qu'elle se bat chaque jour pour survivre, lutter contre la faim en travaillant en usine ou à ramasser les déchets, mais aussi les bien pensants. Nalan n'a pas reçu d'instruction (mis à part qu'elle sait lire et écrire) et pourtant elle a atteint une certaine conscience politique et une lucidité admirables. Elle est sans concessions vis-à-vis des islamistes, des politiciens et de tous ceux qui veulent l'acheter elle ou les autres habitants des bidonvilles. Jugez plutôt:
"Si les prières pouvaient résoudre le problème de la faim et de la misère, chacun en aurait profité (...) Même mes enfants n'acceptent plus l'idée que les riches sont plus musulmans que les pauvres. L'homme qui a faim et qui est analphabète se marginalise. Et ceux qui n'ont pas faim viennent nous donner des leçons. En bref, ce pays n'a pas besoin de leçons creuses mais d'écoles, d'emplois, de foyers d'accueil pour apaiser les faims et les colères"
Mais ce n'est qu'un passage parmi d'autres.
aux éditions du Toit (à commander par fax). Mais il devrait être à la fête.