plate-forme lo lcr de 1999

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par hispa » 06 Mars 2003, 19:31

Léandre, je change de fil après ce message OK ?


Je crois plutôt que de dire que "Marx a tort" il conviendrait d'amettre que les marxistes oscillent de façon plus ou moins dialectique entre l'idée que la bourgeoisie a achevé son rôle historique et celle de la tendance à la socialisation des moyens de production et de la société. Tendance qui ne pourrait s'accomplir pleinement qu'avec une révolution prolétarienne.

Il me semble que le défaut des marxistes (que l'on rencontre souvent chez les marxistes) est la tendance à la prophétisation que l'on peut toujours en fait interpréter en la modérant, mais qui existe donc bel et bien.

Peut-être est de ce rapport avec la science historique que voulait parler Jean Claude ?

Pour revenir sur LO

a écrit :N 23 avril 89 Lutte de Classe
C.E.E., S.M.E. : DES ACCORDS, MAIS PAS UNE UNIFICATION
(...)


Et les économistes ou les représentants de la bourgeoisie
qui se disent partisans d'une véritable monnaie commune savent bien qu'ils se heurtent
de toutes façons au problème de fond. Il ne peut y avoir de monnaie fiable reconnue
sans un Etat qui la garantisse, il n'y aura pas de monnaie unique en Europe sans un
pouvoir politique unifié.

L'EUROPE UNIFIEE SERA L'OEUVRE DE LA CLASSE OUVRIERE,
PAS DE LA BOURGEOISIE
Les frontières nationales n'ont jamais servi à protéger les intérêts des travailleurs
parce que rien de ce qui est réactionnaire ne peut les protéger. Et surtout pas le cloisonnement
de l'Europe capitaliste en nations rivales qui ne parviennent même pas à se doter
d'institutions qui correspondent au fonctionnement réel de la société.
Un Etat européen unique, battant monnaie unique, établissant un marché réellement
unifié, serait, nous le répétons, un progrès du point de vue social, humain, moral. Et s'il
faut reprocher quelque chose aux bourgeoisies européennes, c'est bien qu'elles ne peuvent
pas et ne veulent pas réaliser cette Europe unifiée dont elles parlent depuis plus de
quarante ans sans jamais commencer réellement à la construire, parce qu'elles limitent
a priori leurs ambitions et que chacune d'elles se refuse à remettre en cause l'appareil
d'Etat national qui protège ses intérêts particuliers.
En réalité cela reflète une réalité profonde de la domination bourgeoise. Les liens entre
les bourgeoisies nationales et leurs Etats sont si forts qu'aucune unification d'Etats bourgeois
ne s'est faite pacifiquement à partir de simples accords. Car aucune bourgeoisie
ne renonce pacifiquement à ses prérogatives. Et cet ancrage est si puissant que même
sur la base d'une défaite militaire de ses rivaux, l'Allemagne nazie n'a pu unifier politiquement
l'Europe et a dé maintenir dans un pays comme la France par exemple un appareil
d'Etat national indépendant. Elle ne l'a pas pu, parce que la bourgeoisie française
et sans doute aussi l'impérialisme américain n'y auraient pas consenti, sans doute. Mais
aussi sans doute pour une raison plus fondamentale : c'est que la bourgeoisie n'est plus
aujourd'hui capable de réaliser de tels progrès, plus capable de surmonter ses
contradictions.



a écrit :Cercle Léon Trotsky N 50 17 janvier 1992

(...)
Mais nous sommes convaincus, nous savons bien que les Etats-Unis d'Europe,
même au sens où existent les Etats-Unis d'Amérique du Nord, les bourgeoisies européennes
n'en sont pas capables.
Elles ne sont plus capables de rien d'important allant dans le sens du progrès pour
l'humanité.
A plus forte raison n'est-il pas question pour elles des Etats-Unis qui seraient nécessaires
aux travailleurs.
Elles n'ont pas pour objectif d'organiser la société en fonction des intérêts de la communauté
humaine, mais uniquement de courir après l'accroissement encore et toujours
de leurs profits privés.
Abolir l'appropriation privée des moyens de production qui permet à une minorité de
privilégiés d'exploiter la plus grande partie de l'humanité et de saccager la planète par la
même occasion ; mettre fin à la concurrence anarchique, mortelle, entre ces intérêts
capitalistes ; et réorganiser la production en fonction de qui est réellement l'intérêt de
tous, avec pour aiguillon du développement l'objectif que les intérêts de la collectivité
prennent au contraire le pas sur les calculs égoïstes : tout cela, c'est une autre tâche, un
autre objectif, qui serait en revanche celui de la classe ouvrière ayant arraché le pouvoir
des mains de la bourgeoisie.
Son horizon ne serait pas celui de douze boutiquiers. Il est à l'échelle du monde
entier, et il a pour drapeau le communisme.




Après ces deux extraits où l'on voit qu'en 89 et en 92 LO caractèrise toujours la bourgeoisie comme incapable. Il n'empèche qu'en 1989 aussi, on peut touver une appréciation plus prudente mais toujours marxiste.


a écrit :Lutte de Classe  mai 89 n 24

(...)
POUR UN MONDE JUSTE ET FRATERNEL,
SANS EXPLOITATION, SANS PATRIES NI FRONTIERES
A l'issue de la Première Guerre mondiale, Trotsky soulignait l'arriération que valait à
l'Europe l'étroitesse du cadre de ses Etats nationaux, encore renforcée par la guerre ! Il
comparait l'Europe à l'Amérique : " Le Traité de Versailles a créé en Europe dix-sept
nouveaux Etats et territoires plus ou moins indépendants, 7.000 kilomètres de nouvelles
frontières, des barrières douanières en proportion, et, de chaque côté de ces nouvelles
frontières, des postes et des troupes.
En Europe, il y a maintenant un million de soldats
de plus qu'avant la guerre... Les pygmées européens s'inquiètent de l'Albanie, de la Bul-
garie, de quelques corridors et malheureuses parcelles de terre. Les Américains s'occu-
pent de continents, cela facilite l'étude de la géographie... et cela donne de l'ampleur à
leurs brigandages... A cette nouvelle Amérique qui pousse dans toutes les directions,
s'oppose l'Europe démembrée, divisée..."( L'Europe et l'Amérique 1924-1926).

Marx et Lénine avant lui avaient lié les chances de la classe ouvière aux plus vastes
perspectives, aux plus vastes arènes, continentales ou mondiales, ouvertes par le capitalisme
puis l'impérialisme eux-mêmes.
Au moment de la guerre de Sécession américaine qui a vu les Etats bourgeois du Nord
industriel en guerre contre les Etats du Sud esclavagiste, pour que le système de la libre
exploitation de la main-d'oeuvre salariée l'emporte sur le système esclavagiste, Marx
présenta la libération des esclaves comme une victoire pour la classe ouvrière, une
"une impulsion morale donnée au mouvement de classe". Pourtant, il savait et écrivait
dans le même temps que la libération de la main-d'oeuvre auparavant servile (ce que
certains appelleraient aujourd'hui "la mise en concurrence des travailleurs des Etats du
Sud avec ceux du Nord" ?) abaissait considérablement le niveau de salaires et de vie
de l'ensemble de la classe ouvrière.
Certains penseront probablement que c'était une autre époque, pas encore celle de
l'impérialisme pourrissant, une époque où la bourgeoisie pouvait être encore "progressiste".
Peut-être.

Mais quelles que soient les époques et les circonstances, les grands
dirigeants marxistes ont toujours milité pour que la classe ouvrière, même sous l'aiguillon
de l'exploitation capitaliste ou de l'impérialisme
, sorte de tous les particularismes,
de tous les régionalismes, de tous les nationalismes.
Lénine après Marx, à une époque de contradictions interimpérialistes exacerbées, exprime
encore, à maintes reprises, l'intérêt pour la paysannerie russe de sortir de son arriération
et de sa barbarie pour connaître les usines et les villes -  même celles de
l'exploitation capitaliste qui va de pair avec une autre civilisation ! L'intérêt pour les ouvriers
russes, ou polonais d'émigrer pour connaître une autre vie et une autre culture,
parce qu'à une autre échelle.
Les grands marxistes qui ont milité pour l'émancipation de la classe ouvrière ne sont
jamais partis en guerre contre aucune "mobilité" ! Ni pour la défense d'on ne sait trop
quels "acquis" ! Ils n'étaient partisans d'aucun repliement, ni statu-quo. Ils étaient pour
le mouvement, pour le changement, pour l'élargissement de l'expérience et de la force
de la classe ouvrière, par les luttes.
Ils étaient pour tous les bouleversements, par la révolution
! A l'échelle mondiale !



Pour terminer dans un CLT de 1999

"Les tendances à la socialisation de l'économie sont puissantes,y com-
pris dans la société capitaliste.
L 'économie est aujourd'hui un tout,fonc tionnant collectivement à l'échelle du monde.
Par le biais des relations économiques internationales,les travailleurs de Hongkong travaillent en
coopération avec ceux d 'Europe ou d 'Amérique.Ce n'est pas le moins du
monde un drame ou une calamité,c 'est un facteur extraordinaire de progrès
humain !C'est l 'illustration de la puissance des tendances à la coopération
que recèle la société humaine,de leur richesse,de leur fécondité.C 'est ce
qui fonde nos convictions socialistes."



Comme quoi les choses ne sont pas si simples....
hispa
 
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Message par hispa » 09 Mars 2003, 15:33

Sur la socialisation et la tendance à....

J'avais commencé une réponse puis je me suis souvenu de ce texte d'Alain Bihr "actualité du communisme" que l'on trouve sur le Net.

Un long texte bien écrit valant mieux qu'un long texte mal écrit (par moi) je pique donc cet extrait.




a écrit :A) Le communisme comme trajet objectif.
 
Marx s'est toujours efforcé de penser et de déterminer le communisme comme un trajet objectif : comme un mouvement, une tendance, une possibilité dont le capitalisme crée, contradictoirement, les conditions tant objectives que subjectives.
"Pour nous, le communisme n'est pas ni un état de choses qu'il convient d'établir, ni un idéal auquel la réalité devra se conformer. Nous appelons communisme le mouvement réel qui abolit l'état actuel des choses. Les conditions de ce mouvement résultent des données préalables telles qu'elles existent présentement."

1. Les conditions objectives.
 
A ce titre, on peut comptabiliser à la fois la croissance des forces productives et la socialisation du procès de production (plus largement de la praxis sociale) que réalise le capitalisme et qui le caractérisent comme mode de production.
a) La croissance des forces productives signifie tout à la fois leur accumulation quantitative et leur développement qualitatif : l'accumulation de forces de travail et moyens de production, mais aussi la plus grande efficacité aussi bien des premières (du fait de leurs mode de combinaison) que des seconds (du fait de l'application systématique de la science au sein de la production industrielle).
Ce qui se traduit à la fois par l'augmentation de la production et l'augmentation de la productivité. Donc domination à la fois extensive et intensive de la nature, créant les conditions et de l'abondance matérielle (fin de la rareté) et de la diminution régulière du travail nécessaire (lato sensu : du travail que la société doit consacrer à la reproduction simple de sa propre base productive).
Cependant, Marx montre que cet accroissement des forces productives entre nécessairement en contradiction avec la forme capitaliste sous laquelle elle se poursuit, provoquant d'inévitables crises de surproduction (de capital productif et de capital-marchandise). Crises qui ne peuvent se solder (dans un cadre capitaliste) que par la destruction d'une partie des forces productives existantes, ce qui limite d'autant leur accroissement et leur accumulation.
8) L'autre condition objective du communisme selon Marx, d'ailleurs étroitement liée à la précédente, est la socialisation de la production et, à travers elle, plus largement de la société, de la praxis sociale dans son ensemble.
- Sous le capitalisme, la socialisation de la production revêt un double aspect.
C'est, d'une part, la socialisation des différents procès de travail dont se compose le procès social de production dans son ensemble. Socialisation qui se marque par le fait que ces procès de travail sont le fait de travailleurs collectifs regroupant fréquemment des centaines, des milliers, voire des dizaines de milliers de travailleurs ; mettant en oeuvre des moyens sociaux de production, autrement dit des moyens de production qui requièrent précisément un travail socialisé, impliquant la coopération d'une multitude de forces de travail diversement qualifiées ; moyens qui matérialisent des siècles voire de millénaires de travail matériel et immatériel, impliquant donc la combinaison de travail vivant socialisé avec un travail mort lui-même socialisé.
C'est, d'autre part, la socialisation du procès social de production dans son ensemble, sous la forme de l'interconnexion de multiples procès de travail eux-mêmes socialisés, sur une base sans cesse élargie. A l'intérieur du capitalisme, cette socialisation prend nécessairement la forme d'une extension grandissante des relations marchandes : de l'entrée dans l'échange marchand de tous les produits du travail humain, matériel ou immatériel ; de la constitution de marché régulateur de la production (par l'intermédiaire de la loi de la valeur) ; et de l'élargissement continu de ces marchés, jusqu'à la constitution de marchés mondiaux pour les types de marchandises.
- Mais la socialisation ne se réduit pas au seul procès social de production. De la sphère économique, elle s'étend à l'ensemble des autres pratiques et rapports sociaux, aboutissant ainsi à une socialisation de la société dans son ensemble : chaque groupe, chaque pratique, chaque rapport social tend à être médiatisé par tous les autres.
Ce concept rend compte de multiples phénomènes contemporains : l'extension et l'intensification de la communication sociale sous toutes ses formes ; l'enchevêtrement croissant des rapports sociaux et des pratiques sociales ; le décloisonnement des groupes sociaux, de leur espace et de leur temps, de leurs pratiques et de leurs représentations, impliquant la confrontation de leur mode de vie, depuis les rapports entre individus et groupes locaux jusqu'aux rapports entre nations, peuples et civilisations sur le plan mondial. Tous mouvements que la phase actuelle du développement capitaliste a rendus parfaitement manifestes.
En impulsant un pareil processus, le capitalisme accomplit une oeuvre non moins révolutionnaire qu'en assurant le développement quantitatif et qualitatif des forces productives. Il arrache les rapports, pratiques, institutions, représentations précapitalistes à leur isolement et à leur particularité originels, en les dépouillant de leur étroitesse et de leur rigidité. Et en ce sens aussi, le capitalisme fait mûrir les conditions objectives d'une société communiste.
- Cependant, comme le développement des forces productives lui-même, la socialisation de la production et de la société qui s'opère sous l'impulsion du développement du mode capitaliste de production est elle aussi entachée de limites et de contradictions. Marx en signale au moins deux.
La première est liée à la persistance de la propriété privée des moyens de production qui fragmente le procès social de production en une myriade de procès de travail privés qui ne peuvent se socialiser que par l'intermédiaire de l'échange marchand de leurs produits. Ce qui, d'une part, fait obstacle à toute organisation et régulation a priori de la production sociale (planification) qui ne peut se réguler que sous la forme des "lois du marché" et de leur soutien étatique. Ce qui, d'autre part, donne naissance à toutes les illusions fétichistes sur la marchandise, l'argent, le capital, etc., voile fétichiste qui empêche en quelque sorte la société de reconnaître de la richesse matérielle le résultat de sa propre oeuvre productive et la rend aveugle et impuissante face à son propre mouvement économique.
La seconde contradiction est liée à la persistance inévitable de la fragmentation du marché mondial en Etats (nationaux ou non) rivaux, chacun représentant et défendant une fraction du capital mondial dans sa lutte concurrentielle contre les autres fractions. Ce qui fait obstacle à toute organisation de la production sur le plan mondial ; et donne naissance à toutes les illusions étatistes, nationalistes et racistes. On y reviendra plus loin.
hispa
 
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