(iskra @ lundi 23 mai 2005 à 10:38 a écrit :[...] l'origine du peuplement de la Réunion (issue de l'impérialisme esclavagiste et de l'engagisme)
... c'est quoi l'"engagisme" ?
(iskra @ lundi 23 mai 2005 à 10:38 a écrit :[...] l'origine du peuplement de la Réunion (issue de l'impérialisme esclavagiste et de l'engagisme)
(gerard_wegan @ mardi 24 mai 2005 à 19:04 a écrit :Question marginale :
... c'est quoi l'"engagisme" ?
( Anchaing @ mercredi 25 mai 2005 à 05:16 a écrit :Les derniers engagés arriveront sur l'île dans l'entre-deux guerre, venus de Madagascar, de l'île Rodrigues, etc...
a écrit :Une sorte de passage du statut d'esclave au statut de serf en somme ?
(Jacquemart @ mercredi 25 mai 2005 à 18:47 a écrit :Il existe une somme sur le sujet, malheureusement difficile à lire car très épaisse et truffée de pinaillages juridiques. [...] Il s'agit d'un bouquin nommé "de l'esclavage au salariat", de Yann Moulier-Boutang.
(gerard_wegan @ mercredi 25 mai 2005 à 14:59 a écrit :pour Anchaing : merci pour ta réponse sur l'engagisme. Si tu as de bonnes références de textes historiques ou de romans sur cette question et l'après esclavage à la Réunion, peux-tu nous en faire profiter ?
( Anchaing @ mercredi 25 mai 2005 à 05:16 a écrit :Les derniers engagés arriveront sur l'île dans l'entre-deux guerre, venus de Madagascar, de l'île Rodrigues, etc...
... ça signifie que ce système a survécu, au moins partiellement, pendant plus de 70 ans !? Ce système coexistait, dans les mêmes plantations, avec le travail salarié d'anciens esclaves ?
(JIR du 30 août 2004 a écrit :
“L’engagisme est un salariat contraint, pas un esclavage”
Dans ce second ouvrage consacré à l’histoire économique de l’île de la Réunion, l’engagisme, qui a occupé une place prépondérante au 19e siècle, fait l’objet d’un nouveau recadrage par le maître de conférence de l’Université de la Réunion. De quoi faire grincer certaines dents...
1642-1848 : c’est sur cette période que portait la “Contribution à l’histoire économique de l’île de la Réunion”, premier ouvrage de Ho Hai Quang, docteur d’État en sciences économiques et maître de conférences à l’Université de la Réunion. L’auteur y montrait notamment que l’esclavage avait fait son apparition dès les premiers moments du peuplement définitif de l’île et que le Code noir n’était pas un simple catalogue de punitions, mais une législation organisant un compromis social destiné à réguler le fonctionnement d’ensemble du système esclavagiste. C’était il y a six ans. Aujourd’hui, sur plus de 300 pages, Ho Hai Quang publie aux éditions l’Harmattan le volet 2 qui traite, cette fois, de la période de l’engagisme. Cet ouvrage, comme le premier, risque de provoquer des grincements de dents car une fois de plus, l’économiste balaye la plupart des interprétations communément admises. L’une des thèses fortes du livre est que le développement rapide de l’engagisme après 1848 n’est pas uniquement dû à la désertion des esclaves affranchis. HO Hai Quang soutient que c’est aussi pour faire face à la concurrence des betteraviers de métropole que les planteurs réunionnais ont massivement importé des engagés afin, d’une part, de limiter la hausse des salaires et, d’autre part, d’augmenter la productivité du travail en remplaçant les affranchis inefficaces (vieillards, enfants...) par des hommes jeunes. Une autre thèse forte de l’auteur est que l’engagisme n’est pas un esclavage mais un salariat contraint. C’est un salariat parce que l’ouvrier est un homme libre qui s’engage par contrat à travailler contre un salaire. Mais à la différence du salariat libre, dans l’engagisme,“On a affaire à un contrat de longue durée et non résiliable par le salarié“. HO Hai Quang montre également qu’après l’abolition de l’esclavage, l’économie locale n’a pas reposé uniquement sur l’engagisme, mais aussi sur “divers systèmes économiques formels ou informels de survie” mis sur pied par les Blancs paupérisés et les esclaves affranchis qui n’ont pas pu, ou voulu, rester auprès de leurs anciens maîtres. Des faits complexes dont l’universitaire a eu du mal à rendre compte de manière précise en raison du manque de statistiques. Dans la deuxième partie de son livre, HO Hai Quang s’intéresse à la crise sucrière. Son analyse tranche sur les interprétations courantes dans la mesure où s’appuyant sur la théorie économique, il soutient d’abord que la grande dépression débute en 1865 et non pas en 1863 comme on l’admet généralement. Puis, examinant les causes de la crise, il montre qu’elles proviennent surtout de l’augmentation de la productivité du travail dans l’économie betteravière. Il s’ensuit tout à la fois, une baisse continue des coûts de production et une surproduction grandissante de sucre. Le résultat d’ensemble est l’effondrement du prix de cette denrée. À La Réunion, la crise est aggravée parce que le fonctionnement des exploitations sucrières repose sur le travail des engagés. Les planteurs, qui ne peuvent ni licencier leurs ouvriers ni réduire leurs salaires, sont pris en tenaille entre la chute des cours et la rigidité des coûts de production. Beaucoup sont ruinés. La concentration des terres et des usines s’accélère alors au profit de quelques gros planteurs et d’une banque métropolitaine, le Crédit Foncier Colonial. Simultanément, l’engagisme entre aussi en crise car pour tenter de surmonter leurs difficultés, les sucriers durcissent les conditions de travail dans les plantations. Cette surexploitation des engagés va amener l’Angleterre à dénoncer en 1882 la Convention qui, depuis 1861, autorisait les colonies françaises à recruter des travailleurs en Inde. Dès lors, les planteurs ne peuvent plus remplacer les engagés rapatriés en fin de contrat, d’où une pénurie de plus en plus forte de main-d’œuvre. Enfin, les années 1860-1880 voient aussi l’arrivée des premiers immigrants libres chinois et Indo-musulmans. Ils ont pu créer un petit commerce de détail parce que les engagés, à l’inverse des esclaves, recevaient un salaire en monnaie et pouvaient donc constituer une clientèle. C’est pourquoi il est fondamental de ne pas confondre engagisme et esclavage. En définitive, l’originalité des livres de HO Hai Quang tient au fait que l’auteur applique systématiquement les outils de la théorie économique pour interpréter l’histoire de l’île. Son dernier ouvrage propose des thèses nouvelles sur les trois décennies qui ont suivi l’abolition de l’esclavage. Gageons qu’elles ne manqueront pas de susciter maints débats et controverses.
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