« Syndicats :
lendemains de crise »
de Jean-Marie Pernot
édition Folio M actuel
395 pages dont les notes
septembre 2005
8 €
Les syndicats peuvent-ils rebondir ?
C’est un livre utile d’analyse qui tombe à pic dans cette période de remobilisation sociale.
L’ouvrage s’ouvre sur une analyse assez fine du mouvement de 2003, de ses forces et de ses faiblesses...
Cette entrée est fort judicieuse, d’autant plus que, suite à ce demi-échec, les cartes syndicales se sont légèrement redistribuées avec la crise de la CFDT et une ré-orientation des confédérations vers une reconquête difficile d’anciennes terres de prédilection comme la métallurgie et tout le secteur privé.
La partie historique est à mon avis essentielle pour la compréhension de la situation actuelle qui se caractérise par un affaiblissement syndical dans le secteur privé : désyndicalisation réelle et fragmentation.
Les évolutions et les ruptures des deux matrices du syndicalisme que sont la CGT qui seule puise ses racines dans l’histoire du mouvement ouvrier en France et le courant chrétien permettent de mieux comprendre l’émiettement actuel qui s’accélère.
Si tous les pays européens ont connu cette partition et subissent de plein fouet une désyndicalisation inquiétante due en grande partie par l’offensive « néo libérale » et aux conséquences de la fin des « trente glorieuses », la situation du syndicalisme « hexagonal » est plus préoccupante :
un taux de syndicalisation dépassant à peine les 8%, une « balkanisation » avec de nouvelles confédérations en construction....
« La situation française accuse des différences mais aussi des similitudes. Elle radicalise le portrait : la syndicalisation dans le privé se montre plus faible essentiellement en raison d’un véritable effondrement dans les industries traditionnelles »
La charte d’Amiens, texte principiel adopté par le congrès national de la CGT en 1906, n’est-elle pas d’une actualité brûlante ?
Les syndicats ne doivent-ils pas s’engager résolument dans une indépendance par rapport aux partis et aussi aujourd’hui par rapport à l’Etat ?
Si l’auteur de ce livre n’établit pas explicitement de liens entre les deux indépendances essentielles, il explique bien que l’un des plus grands dangers qui guette les organisations c’est de s’inscrire dans « une délégation de service public concédée par l’Etat » :
« Qu’ils le veuillent ou non, la situation de dépendance extrême à l’égard des différents lieux de la puissance publique a des effets sur le rôle « autonome » des syndicats. »
L’auteur ne se contente pas de brosser un tableau assez sombre et réaliste du syndicalisme « ouvrier » en France, il propose des pistes de transformation et a raison d’affirmer :
« Retrouver des adhérents, desserrer l’emprise de l’Etat, il n’y a aucun défi que le syndicalisme français ne puisse relever ».
Le diagnostic établi par Jean-Marie Pernot est particulièrement rigoureux, il permet aux syndicalistes et notamment aux unitaires qui oeuvrent à l’unification syndicale afin de mettre fin au cycle des divisions d’ y puiser des informations et des éléments de compréhension pertinents....
Valière