par Valiere » 18 Juin 2006, 15:16
JE VIENS DE LE LIRE APRES AVOIR LU LA CHRONIQUE ICI MEME
« Cronstadt »
de Jean-Jacques Marie
Dissiper les voiles de la légende
Rappelle-toi Cronstadt ! C’était une véritable révolution antibureaucratique écrasée , voici pour la version libertaire...
Oh que non ! ce n’était qu’une offensive réactionnaire dangereuse qu’il fallait stopper avant qu’il ne soit trop tard, voila la version marxiste léniniste....
Ce sont là des échanges interminables entre révolutionnaires, 90 ans après la révolution russe...
Qui a raison ?
Jean Jacques Marie, historien a voulu apporter sa marque, en s’appuyant sur les archives soviétiques enfin ouvertes pour nous livrer sa vérité ou du moins dissiper les voiles d’une légende entretenue.
Aucun document n’a été oublié, l’historien a voulu expliquer les raisons de la révolte en s’appuyant sur de nombreux pièces d’archive d’époque et aussi sur des éléments d’analyse contradictoires venant des blancs, des bolcheviks, des SR, des mencheviks et des anarchistes.
Les erreurs commises par le Parti Communiste, resituées dans le contexte historique d’une guerre civile sans pitié ne sont pas évacuées, il ne s’agit pas de reconstruire l’histoire comme ont pu le faire les historiens staliniens mais de donner plus qu’un éclairage sur le mythe encore vivant.
Jean Jacques Marie profite de l’occasion pour fustiger d’ailleurs certains prétendus historiens comme Semanov qui commence à écrire en 1973 : « la liquidation de l’émeute antisoviétique de Cronstadt » pour écrire en 2003 que Zinoviev et Trotsky ont été des « sombres aventuriers », « tous acharnés à jeter les jeunes paysans-soldats russes dans une boucherie fratricide » !?
Avec Jean Jacques Marie, on change de registre, il s’agit là d’une recherche scientifique qui refuse de masquer certaines réalités.
Le lecteur peut ainsi saisir les enjeux et comprendre pourquoi cette révolte n’a pas abouti à une victoire des insurgés. Le refus des travailleurs de Pétrograd d’entrer en mouvement aux côtés de ceux de Cronstadt malgré leur ressentiment a permis d’isoler les mutins n’ayant de fait aucun soutien significatif autre que les révoltes des paysans qui d’ailleurs n’ont pas embrasé le pays malgré certaines annonces.
Les différents commentateurs, qu’ils se réclament de tel ou tel courant politique,
« tous oublient qu’en instaurant l’impôt fixe en nature et en proclamant la NEP- même si elle se traduit dans les faits-Lénine a retiré aux paysans, peu sensibles à l’idéologie et aux discours, et donc aux soldats-paysans, leur principal grief et leur principale raison de s’insurger. La décision politique de Lénine est la première cause de l’isolement et de l’échec, dès lors programmé ; de Cronstadt... »
Cette oeuvre majeure nous sort fort heureusement des arguments ressassés de part et d’autre.
Elle nous fait comprendre une situation complexe en évitant deux écueils symétriques : le classement précipité de cette révolte dans la catégorie des combats anti bureaucratiques et l’idéalisation d’une direction et d’une politique du parti bolchevik.
Valière