(Ottokar @ dimanche 26 février 2006 à 21:36 a écrit :
... je laisserai volontiers dire ceux qui savent. S'il y en a qui veulent bien nous éclairer. Et sauver l'honneur de cette pauvre Noelle Bréham qui en effet, ne choisit pas toujours ses interlocuteurs au mieux.
Noelle Bréham n'est pas en cause (à part dans le choix de ses "experts" mais elle en invite aussi des bons parfois), c'est la prétendue biologiste qu'elle a invité qui a dit une énormité : laisser entendre dans une émission censée être écoutée par des enfants que l'eau était un mélange d'oxygène et d'hydrogène. Ensuite j'espère être de "ceux qui savent", mais si je dis une bêtise on peut me reprendre.
Reprenons : la formule chimique de l'eau est H2O ce qui signifie que chaque molécule d'eau est constituée de deux atomes d'hydrogène et d'un atome d'oxygène. On voit donc que ça n'a rien à voir avec un mélange de 2 équivalents d'hydrogène et d'un équivalent d'oxygène : si on fait ça on obtient rien d'autre qu'un mélange de gaz particulièrement explosif. Il se trouve en effet que si on fait une étincelle dans ce mélange on a une explosion, en fait une réaction chimique extrêmement rapide et qui dégage en un rien de temps une quantité phénoménale de chaleur, réaction qui aboutit... à la formation d'eau. On peut voir au conservatoire des Arts et Métiers à Paris (fabuleux musée !) l'appareillage avec lequel Lavoisier a réalisé cette expérience à la fin du XVIIIème siècle. En fait on obtient très peu d'eau : en mélangeant 2 litres d'hydrogène et 1 litre d'oxygène, on obtient moins 1,5 grammes d'eau (si je ne me suis pas gourré dans le calcul, cf. à la fin de ce post).
En fait cette réaction est plus compliquée qu'elle n'y parait, car le gaz qu'on appelle "oxygène" est en fait pour les chimistes du dioxygène (formule O2), de même que l'hydrogène est du dihydrogène (H2) et l'azote du diazote (N2). L'air que nous respirons est un mélange de 80 % de diazote et de 20% de dioxygène plus des bricoles comme un peu de vapeur d'eau, de dioxyde de carbone (CO2), et de divers polluants (mais pas ou très peu d'hydrogène). Ces pourcentages sont exprimés en volume, ce qui a un sens pour les gaz puisque le même nombre de molécules de gaz donne grosso modo le même volume pour tous les gaz. C'est d'ailleurs pourquoi l'expérience de Lavoisier marche si bien en mélangeant les bons volumes de dioxygène et de dihydrogène. Lorsque nous respirons ("nous" pour "vertébrés terrestres et reptiles et mamiphères marins"), ce mélange de gaz passe dans nos poumons, mais seul le gaz dioxygène réagit avec l'hémoglobine du sang. Lorsqu'on souffle, on rejette donc du dioxyde de carbone (rejeté par l'hémoglobine avant de récupérer l'oxygène) et de l'azote.
Les poissons sont des vertébrés plus primitifs, dans ce sens qu'ils vivent dans l'eau, là où la vie est apparue avant de coloniser les continents. Cependant leur respiration est déja assez proche de la notre, et ils respirent comme nous le gaz dioxygène, la différence étant qu'ils respirent non pas celui de l'air (puisqu'ils sont sous l'eau) mais celui qui est dissout dans l'eau, pas sous forme de bulles mais tout simplement dissout donc tout aussi invisible que du sel dissout dans l'eau. Une expérience qu'on a tous faite : lorsqu'on fait bouillir de l'eau, bien avant qu'elle soit bouillante, on voit des petites bulles se créer au fond de la casserole et remonter à la surface. Ces bulles sont l'air dissout qui est rejeté en premier, avant que l'eau elle-même ne se change en vapeur d'eau (c'est là qu'on peut vraiment dire que l'eau bout). Par ailleurs, ce que savent tous ceux qui ont un aquarium (ou ce qu'ils devraient savoir pour la survie de leurs poissons rouges) , c'est qu'il faut un bulleur pour maintenir de l'air dissout dans l'eau. Si on n'en a pas il faut changer l'eau régulièrement, car les poissons la vident de son oxygène dissout. Lorsqu'ils en manquent, ils viennent à la surface et font des bulles, non pas pour respirer l'oxygène de l'air (leurs branchies ne le permettent pas) mais pour perturber la surface et dissoudre un peu d'air dans l'eau.
Ce qui me fait dire qu'il n'est que très peu probable qu'ils "cassent" les liaisons interatomiques dans les molécules d'eau pour récupérer les atomes d'oxygène c'est que c'est un processus qui demande beaucoup trop d'énergie. Pour y arriver au laboratoire on réalise une électrolyse en applicant une grosse différence de potentiel entre deux électrodes. Certains poissons sont certes capables de faire des décharges électriques intenses mais pas tous et pas en continu ! En d'autres termes : il faut que l'espèce qui oxyde l'hémoglobine soit suffisament oxydante, et l'eau ne l'est pas tandis que le dioxygène l'est.
Tout ça pour dire que l'explication sortie par la soi-disant biologiste n'a que l'apparence d'être scientifique, mais en réalité c'est une bêtise. Et je dit "soi-disant" parce que ces bases de la chimie sont a priori connues des biologistes. Qu'elle n'ait pas su répondre à la question sur la quantité d'oxygène dans l'eau, passe encore (je n'en sais rien non plus), mais s'en tirer par une pirouette en disant une ânerie, dans une émission pour les mômes un peu curieux... elle m'a fichu en rogne tiens.