Grève générale en Guinée-Conakry

Dans le monde...

Message par Wapi » 13 Juin 2006, 14:40

Encore une fois, on n'en parle pas trop dans les médias français, mais la grève générale se poursuit en Guinée depuis 5 jours.

Hier, les policiers ont tiré sur des manifestant désarmés : 10 morts au moins ! :headonwall:

Sur un site Guinéen, kababachir.com :

a écrit :Poursuite de la grève en Guinée: Après l'échec du Gouvernement, place à la négociation.

Au cinquième jour de la grève décrétée par la centrale syndicale CNTG-USTG ce lundi, le mouvement a prie des allures inquiétantes. Les examens de fin d'année que le Gouvernement voulait qu'ils se tiennent coûte que coûte a tourné au vinaigre. Pour certains, c'est un échec total.

Pour rejoindre les centres d'examens du baccalauréat cette année à Conakry, les milliers de candidats, surveillants et autres encadreurs ont eu tout le problème du monde. Pour cause, les transporteurs sont entrés dans la danse avec fanfare. Car les rues de la capitale guinéenne sont restées désertes. Seuls les parents d'élèves véhiculés ont pu envoyé leurs enfants sans assez de problème.


Cependant, au moment du lancement des épreuves dans les centres, il a été constaté l'absence totale des surveillants. Conséquences, les élèves sont sortis pour manifester leur colère dans toutes les communes de la ville. Par contre, au centre d'examen du lycée Donka, les épreuves ont été lancées par le nouveau Ministre de l'enseignement Pré universitaire et de l'éducation civique, l'ex parlementaire Mamadou Bhoye Barry. Mais une dizaine de minutes plu tard, les candidats ont déserté par manque d'encadreurs.

A l'intérieur du pays, les choses n'ont pas aussi bougé, car au même titre que Conakry, les choses y ont été répercutées. Sauf dans des villes de Dubréka, Télimélé et Faranah où les autorités ont pu vite maîtriser la situation.

Côté dégâts, ils sont énormes. En plus des véhicules qui ont été endommagés, il y a des incidents malheureux qui ont causé des morts et des pertes matérielles importantes. A Nzérékoré, on signale 3 morts. Dans la haute banlieue de Conakry, on apprend que 3 personnes aussi ont succombé à la suite de violentes bagarres entre les forces de l'ordre et des élèves.

Quant à l'Escadron N°3 de Hamdallaye dans la commune de Ratoma, des manifestants ont attaqué cette brigade et fait libérer tous les prisonniers. Face au nombre important des manifestants, les gendarmes auraient pris la poudre d'escampette.

Au finish, nous nous sommes rendus à la bourse du travail qui est le point de refuge des syndicalistes. Un peu après notre arrivée, le Président Lansana Conté a envoyé des émissaires chez les syndicalistes afin que ces derniers se rendent à au Petit Palais pour négocier avec le Gouvernement en présence du chef de l'Etat. Pour l'heure, rien n'aura filtré de cet entretien qui du reste est très important pour la quiétude sociale qui se trouve aujourd'hui ébranlée par cette grève qui perdure.

A l'instant, les choses commencent à se calmer et la grande muette est sur le qui-vive pour réprimer toutes manifestations. Des élèves en grand nombre sont bloqués au niveau du pont du 8 novembre. Ces derniers comptent marcher jusqu'à la présidence pour rencontrer le Président de la République. Ils ont des plaques sur lesquelles on peut lire "Abats Lansana Conté". Ce qui revient à dire que les choses ne sont pas encore rentrées dans l'ordre à Conakry. Nous y reviendrons !


En Guinée, ça ne va pas si mal pour les capitalistes et leur valetaille locale, puisque l'exploitation de l'or et de la bauxite tourne à plein rendement.
Mais la population, comme ailleurs, ne bénéficie nullement des retombées économiques . Avec le problème supplémentaire d'une monnaie qui se déprécie et rend plus cher les produits importés (le riz surtout).
De Gaulle, qui avait voulu "punir" Sekou Touré d'avoir voté "non" au référendum de 1958, a toujours refusé, comme ses successeurs, qu'il rejoigne la zone CFA (la monnaie ouest africaine indexée sur le franc puis sur l'euro). De plus, en partant, l'administration française avait démonté toutes les infrastructures construites pendant la colonisation. (chemin de fer, hôpitaux etc ...)
Et voilà comment un des pays les mieux dotés de la sous-région en ressources naturelles (eau, minéraux, zone de pêche etc ...) se retrouve ruiné, et sa population exangue, tandisque les capitalistes y font de mirobolantes affaires.

Bravo en tous cas à tous ceux qui se battent pour leurs droits et pour leur dignité, parce qu'il en faut du courage, dans de telles conditions !
Wapi
 
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Message par Wapi » 15 Juin 2006, 11:51

Il n'est hélas pas impossible que la Guinée bascule dans la guerre, plus ou moins larvée, entre les factions qui vont vouloir se partager le gateau après la mort du président Conté.

Sur un site ivoirien, cet article, qui me semble un peu éclairant.

a écrit :Guinée- Risque d`embrassement du pays

jeudi 15 juin 2006


Plus rien ne va en Guinée. Chez le président Lansana conté. La grève déclenchée par les enseignants semble toucher toutes les couches sociales malgré la résistance du gouvernement. Une crise qui risque d'emporter le Président de la République Lansana Conté malade depuis des mois. Et même embraser toute la sous région. Son incapacité physique d'ailleurs fait que la Guinée n'est pratiquement pas gouvernée. A tel point que les décisions du gouvernement sont quelquefois légères. Parfois, le régime choisit la voie de la violence que celle des arguments, attitude de tous les pouvoirs agonisants. C'est ce qu'a été donné de constater avec la grève des enseignants qui a obligé le gouvernement à reporter les examens du BAC dans plusieurs localités du pays. A Conakry notamment où la police, sans sommation, a tiré à balles réelles sur les candidats. 21 morts, 83 blessés à la septième (7ème) journée de la grève. Soit en moyenne 3 élèves tués par jour. Les autorités guinéennes, pour se justifier, ont accusé l'opposition politique. Le régime du président Lansana Conté parle de récupération. Quand l'opposition, elle, déclare que le gouvernement a été incapable de gérer la crise. Mais mieux, le régime du président Lansana Conté a fait appel à des loubards a l'effet de mater les élèves, candidats au BAC. L'un dans l'autre, la difficulté est que le pays risque de basculer, de s'embraser face à une grève qui, depuis une semaine, a complètement paralysé le pays tout entier. Mais chose curieuse, le régime n'a pas encore trouvé les moyens de se réconcilier véritablement avec les enseignants qui se plaignent de la cherté de la vie. Une position que les Guinéens partagent dans leur plus grande majorité. Parce que selon toujours l'opposition, l'état de santé du président Lansana Conté ne lui permet pas d'exercer comme il se doit sa mission au sommet de l'Etat. Conséquence donc, les Guinéens grognent. Et leur colère crée des troubles qui peuvent aller au-delà de la simple revendication syndicale ou professionnelle. C'est-à-dire des crises qui pourraient mettre à mal le régime et peut-être même l'emporter. Mais pire, avec des conséquences incalculables dans la sous région. Car autour de la Guinée, beaucoup de pays sont en guerre. C'est dire à tel point que ce qui se passe en Guinée intéresse toute la sous région déjà sur des braises. Le pays du président Lansana Conté est donc une poudrière à surveiller.
Wapi
 
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Message par Combat » 18 Juin 2006, 16:56

Il est assez probable que la mort prochaine de Lansana Conte ouvrira la voie a un putsch militaire et a des conflicts inter ethniques. D'autant plus que la guinee est entouree de pays tres destabilisees ou destabilisants: zone rebelle ivoirienne, sierra leone et liberia qui viennent juste de sortir de la guerre.
Combat
 
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Message par Combat » 18 Juin 2006, 17:09

Cet article de Jeune Afrique est on ne peut plus explicite sur la probabilite d'un coup militaire dans un avenir proche. Jeune Afrique, journal de la franceafrique et proche des regimes corrompus du continent, a la reputation de voir juste:

Lansana Conté face à l’armée
GUINÉE - 14 mai 2006 - par CHEIKH YÉRIM SECK


La troupe va-t-elle laisser longtemps le pouvoir entre les mains de l’entourage du chef de l’État malade ?

Alors que la Guinée se meurt sous la férule d’un chef d’État coupé depuis plusieurs années de la réalité du pouvoir, tous les regards se tournent vers la troupe pour mettre fin à la descente aux enfers. Surtout au cours de la deuxième semaine de mai, où les proches de Lansana Conté, inquiets de la dégradation de son état de santé, s’activent pour le convaincre d’accepter une nouvelle évacuation sanitaire (voir J.A. n° 2365). Dans un pays résigné où les militants de l’opposition sont quasi tétanisés, la société civile embryonnaire, et le syndicalisme étudiant jusqu’ici maté à coups de matraque et d’emprisonnements, l’armée reste l’unique force organisée. Fortes de 15 000 hommes, auxquels s’ajoutent plus de 3 000 volontaires enrôlés de septembre 2000 à août 2001 pour faire face aux incursions de rebelles libériens et sierra-léonais, les forces guinéennes sont aguerries au combat. Après avoir fait le coup de feu dans les années 1970 sur les champs de bataille de la Guinée-Bissau, de l’Angola et du Cap-Vert pour libérer ces « pays frères » du joug colonial portugais, elles ont servi dans les missions d’interposition onusiennes. Avant d’arriver entre 2000 et 2001 à bout d’une rébellion qui avait réussi à porter la guerre du Liberia à moins de 100 km du palais de Conté.
Dotées d’une importante force de frappe, elles se sont équipées, jusqu’en 1984, avec du matériel fabriqué par l’ancienne Union soviétique. L’ouverture du pays, à la disparition de Sékou Touré, a donné à la France et à la Chine des parts dans le marché des armes. Pour combattre le numéro un libérien, Charles Taylor, dont ils voulaient obtenir la tête, les États-Unis ont également fourni en 2000 des hélicoptères et des blindés aux soldats guinéens et les ont formés aux techniques modernes de combat. Le pays dispose aujourd’hui de trois Mi-24 (dont les deux ont été un moment prêtés au pouvoir d’Abidjan au lendemain du 19 septembre 2002) et d’un avion Mig-17.

Mais, même équipée et bien entraînée, la troupe n’est pas homogène. Loin s’en faut. Elle est traversée par les mêmes divisions ethniques et autres conflits de générations qui déchirent la société. De tentatives de coup d’État en mutineries, de chasses aux sorcières en réaménagements ethniques, elle a subi de nombreux remue-ménage et pris de sérieux coups.

Le 4 novembre 2005, un décret présidentiel a mis à la retraite d’office 1 872 officiers, sous-officiers et soldats du rang, soit un dixième de l’effectif. Pas moins de 2 généraux, 4 colonels, 10 lieutenants-colonels, 39 commandants et 93 capitaines se sont brutalement retrouvés hors des rangs. Parmi eux, le chef d’état-major de l’armée de terre (Cemat), le général Mamadou Baïlo Diallo, très populaire dans les casernes ; le secrétaire général de la sécurité intérieure, le général Abdourahmane Diallo, ministre de la Défense de 1993 à 1996 ; et l’inspecteur général des forces armées, le colonel Mamadou Baldé. Le départ de ces officiers supérieurs, tous trois peuls, a révélé la suspicion suscitée par les gradés issus de cette ethnie. Au cours des trois mois précédant son départ, le désormais ex-Cemat avait ainsi été placé sous une stricte surveillance par le chef d’état-major général des armées, Kerfalla Camara.

L’argument avancé de la limite d’âge n’a pu convaincre, du fait du maintien dans les rangs d’autres vieux gradés : Kerfalla Camara lui-même (de matricule F, plus ancien que Lansana Conté, qui l’a trouvé sous le drapeau après la guerre d’Algérie) ainsi que les très âgés généraux Alhousseiny Fofana et « Kaba 44 ». D’autres officiers et sous-officiers à mille lieues de la retraite ont également été de la fournée. Ayant le tort d’être réputés « têtes brûlées », en clair incontrôlables, ils ont été évincés pour des motifs divers portés sur leurs dossiers respectifs : « indiscipliné », « élément subversif », « alcoolique », « délinquant », « irrespectueux de l’autorité »…

Affaibli, impotent à l’image de son chef handicapé par la maladie depuis décembre 2002, le pouvoir voit des coups d’État partout depuis plusieurs années. Et, à chaque (fausse) alerte, se livre à d’impitoyables purges dans les rangs de l’armée. En novembre 2003, il a suffi d’une « information » obtenue d’un certain Gnankoye, un mécanicien de l’unité blindée du Bataillon autonome de la sécurité présidentielle (Basp), pour déclencher une vaste chasse aux sorcières. Tentative de putsch manquée ? Fausse alerte ? À partir du 26 novembre 2003, une vague d’arrestations a frappé les troupes. Quarante ? Cinquante ? Soixante ? Nul ne sait avec précision combien d’officiers et de sous-officiers ont été mis aux arrêts. On note seulement qu’ils étaient en poste aux camps Alpha-Yaya-Diallo et Samory-Touré, à Conakry, et dans les différentes casernes de Kindia, Labé, Kankan et Nzérékoré.

Le « coup d’État déjoué » a opportunément permis d’arrêter les éléments les plus brillants de la 4e promotion de l’École militaire interarmes (Emia) formée par des instructeurs français et sortie en 1993. Mais également certains cadres - et non des moindres - du Basp, un corps d’élite dont les membres, reconnaissables à leur béret rouge, assurent la protection du chef de l’État. Parmi eux, le très populaire lieutenant Mathias et Ali Camara, le commandant en second du Bataillon, dont la mise en détention est vite apparue comme un règlement de comptes. Ancien membre de la milice sous Sékou Touré, le respecté Camara, qui a été formé à Cuba et a pris part à la guerre de libération de l’Angola, faisait de l’ombre au numéro un de l’unité, Sény Camara.

Le « nettoyage » consécutif au vrai-faux complot de novembre 2003 a parachevé la reprise en main de l’armée entreprise depuis la mutinerie (bien réelle, celle-là) des 2 et 3 février 1996. Sortis des casernes pour réclamer de meilleures conditions de travail, les insurgés ont pris le contrôle de Conakry, et se sont emparés du chef de l’État avant de le relâcher. Conté en a été traumatisé. Dans l’histoire de l’armée guinéenne, il y a un avant et un après-février 1996. La mutinerie a conduit à la condamnation à de lourdes peines de prison d’une cinquantaine d’officiers et de sous-officiers parmi les plus qualifiés. Kader Doumbouya, le meilleur spécialiste en armement lourd du pays, a écopé de dix ans de détention. Le flou persiste sur l’élimination ou le départ en exil d’autres officiers, dont le très redouté Gbago Zoumanigui, benjamin du Comité militaire de redressement national (CMRN), qui a porté Conté au pouvoir le 3 avril 1984.

C’est depuis février 1996 que les « tirailleurs sénégalais », ces anciens de la coloniale qui ont rejoint en 1958 l’armée guinéenne naissante, ont repris tout le pouvoir. Et mis sous l’éteignoir les jeunes cadres issus d’institutions prestigieuses comme Saint-Cyr et l’École de guerre de Paris, devenus subitement suspects. Cette fracture n’a cessé de s’accentuer, aiguisant la « guerre des générations » au sein de la troupe. Les jeunes, généralement bien formés, déplorent l’érosion de plus en plus nette de leur pouvoir d’achat, alors que les « vieux » aux commandes cumulent les privilèges, roulent carrosse.

Comme pour faire fonctionner ­l’ascenseur social dans les rangs de l’armée, le décret du 4 novembre 2005 a institué une autre mesure en dehors de la mise à la retraite d’office du dixième des effectifs : il a accordé des avancements à tous les soldats, de la 1re classe au grade d’adjudant, tout en gelant jusqu’à nouvel ordre toute nouvelle promotion dans la hiérarchie. Sans réussir à calmer « la base ». Le séjour médical de Conté en Suisse, du 18 au 24 mars, a été interrompu sur l’insistance de Fodé Bangoura, secrétaire général de la présidence, alerté par des fiches du renseignement militaire. Lesquelles indiquaient la détermination des jeunes officiers à ne pas laisser longtemps vacant le fauteuil présidentiel. Cheikh Yérim Seck
Combat
 
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