(com_71 @ mercredi 19 juillet 2006 à 01:19 a écrit : Un petit exemple, dans ce que tu as cité. Les Druzes sont présentés comme un sous-ensemble des chiites. Déjà du point de vue histoire des religions, je suis très dubitatif, et du point de vue histoire moderne (sentiment d'appartenir à un même peuple...), c'est manifestement faux...
Du point de vue historique, les druzes sont bien une sous-scission du chiisme, mais la rupture remonte à des siècles de cela. Aujourd'hui, lorsqu'on parle des druzes du Liban ou des chiites du Liban, on distingue deux communautés différentes.
Quant au sentiment "national" au Liban, c'est une affaire bien compliquée! Le Liban est un Etat artificiel dont les frontières ont été dessinées par l'impérialisme français, en vertu d'un plan de partage défini par les français et les britanniques avant la fin de la première guerre mondiale (accord Sykes-Picot).
Le but poursuivi par la création de cet Etat était: amputer la Syrie de son principal accès à la mer via Beyrouth et de son grenier à blé (la plaine de la Bekaa), favoriser la domination des castes dirigeantes chrétiennes, notamment les maronites, au compte de l'impérialisme français, et bien sûr favoriser les divisions communautaires au sein des masses arabes.
Le fait est que les chrétiens avaient souffert un véritable martyre pendant la guerre, sous le joug de l'Empire ottoman, qui les avait littéralement laissé crever de faim dans la montagne libanaise, et que dès lors la peur de se retrouver placé sous l'hégémonie d'une majorité musulmane a fait partie des instruments politiques préférés des démagogues maronites pour conforter leur domination.
L'aspiration à détruire les frontières artificielles du Liban est une aspiration fondamentale pour une large fraction des masses libanaises, et s'est exprimée dans chaque mouvement de masse - de même que les courants panarabistes qui ont fait florès au Moyen et au Proche Orient à partir de la fin des années 1950 traduisaient de façon déformée l'aspiration des masses arabes à détruire toutes les frontières artificielles de la région. Mais en même temps, les clivages communautaires brouillent la carte, d'autant plus que, sous l'impulsion du stalinisme, le mouvement ouvrier n'a pas su traduire l'aspiration à en finir avec ces clivages d'une autre époque (le PCL est aujourd'hui une force marginale au Liban, tandis que la centrale syndicale CGTL, où se retrouvent les clivages communautaires puisque le sous-prolétariat chiite n'y est que très faiblement représenté, semble avoir été largement asujettie aux politiciens bourgeois pro-syriens et se prête volontiers aux manoeuvres de la Syrie).
Le "nationalisme libanais" est au contraire un subterfuge derrière lequel l'ensemble des dirigeants communautaires et les dignitaires religieux dissimulent leur domination quasi-féodale sur le pays. De même, la quasi-totalité des partis politiques ne sont que des façades qui dissimulent l'emprise de chefaillons sur leur communauté ou sur une fraction de communauté (c'est y compris le cas pour le soi-disant "Parti Socialiste Progressiste" qui n'est autre chose que l'émanation d'un clan féodal druze, les Joumblatt, et constitué à 99% de druzes)
C'est pourquoi la perspective d'une fédération socialiste des Proche et Moyen Orient, garantissant les droits des minorités, est d'une importance particulière dans cette région.