(dépêche AFP a écrit :Présidentielle turque: l'armée lance un avertissement sur la laïcité
L'armée turque a lancé vendredi soir, en pleine élection présidentielle, un fort avertissement contre toute remise en cause du principe de laïcité en vigueur dans le pays, accusant le gouvernement, issu de la mouvance islamiste, d'inaction face au développement d'activités islamistes.
"Le problème qui a récemment surgi dans l'élection présidentielle se concentre sur la question de la remise en cause de la laïcité", a déclaré l'état-major dans un communiqué diffusé sur son site internet quelques heures à peine après le premier tour du scrutin devant désigner le nouveau président.
"Les forces armées turques sont contre ces débats (...) et afficheront ouvertement leur position et leurs attitudes lorsque cela deviendra nécessaire. Personne ne doit avoir de doute à ce sujet", ont menacé les militaires, rappelant que les forces armées étaient "des protectrices déterminées de la laïcité".
Unique candidat de cette élection, le ministre des Affaires étrangères Abdullah Gül est, comme de nombreux membres du parti au pouvoir de la Justice et du Développement (AKP), un ancien islamiste. Mais il se définit aujourd'hui comme un "démocrate conservateur" ayant renié ses positions passées.
Arguant d'un vice de procédure, le principal parti d'opposition au Parlement, le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), a déposé vendredi devant la cour constitutionnelle une demande d'annulation du vote -au cours duquel M. Gül n'a pas obtenu la majorité des deux tiers des scrutins requise pour être élu.
Le président est élu par le Parlement pour un mandat unique de sept ans.
Partisan de la laïcité, le CHP a d'abord fait campagne contre les ambitions présidentielles supposées du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan -qui a finalement renoncé à se porter candidat- avant de s'en prendre M. Gül, estimant que les deux hommes et leur parti cherchaient à islamiser le pays en catimini.
Dans son communiqué, l'état-major énumère une série d'activités religieuses organisées récemment, en particulier pour des enfants et dans des écoles, qu'il désigne comme autant de tentatives d'éroder le système laïque.
"Le problème est d'autant plus grave qu'une part importante de ces activités se sont tenues avec l'approbation et au su des autorités administratives qui sont censées les prévenir", souligne-t-il.
"Cet état d'esprit réactionnaire (...) a pris courage avec certains développements et paroles survenus ces derniers jours et a étendu le champ de ses activités", accusent les militaires.
Ces activités, insistent-ils, "violent clairement le principe d'attachement (du futur président) au régime républicain non seulement en parole mais aussi dans la pratique".
En 1997, le premier gouvernement islamiste de l'histoire de la Turquie moderne, conduit par Necmettin Erbakan, avait été contraint à la démission à la suite de pressions de l'armée.
Cette intervention des militaires a été interprétée par les analystes comme un avertissement sérieux, engageant le gouvernement à retirer la candidature de M. Gül.
"C'est un ultimatum et la seule signification qu'il puisse avoir est qu'ils (l'armée) ne veulent pas de Gül comme président" a estimé l'éditorialiste Faruk Bildirici, du quotidien à grand tirage Hürriyet. "On peut se demander ce qui serait advenu si Gül avait été élu aujourd'hui".
L'armée turque a conduit trois coups d'Etat, en 1960, 1971 et 1980.
Si le premier tour de l'élection présidentielle n'est pas invalidé -une situation pouvant entraîner la convocation d'élections législatives anticipées-, un deuxième tour devrait avoir lieu mercredi.
Au terme du processus électoral, qui peut compter jusqu'à quatre tours, M.Gül est à peu près assuré de son élection, son parti disposant d'une majorité écrasante de 352 sièges sur 550 à l'Assemblée.
(LeMonde a écrit :Samedi, le ministre de la Justice Cemil Cicek, porte-parole du gouvernement, a jugé que le geste de l'armée n'était ''pas acceptable dans un ordre démocratique'', et a réaffirmé l'attachement du gouvernement de l'AKP aux principes laïques de la République. "Il est inconcevable (...) qu'une institution qui demeure sous les ordres du premier ministre tienne des propos contre le gouvernement," a déclaré M. Cicek. Il a accusé l'état-major de "tentative d'influencer le cours de la justice", après que l'opposition a saisi la Cour constitutionnelle pour faire annuler le premier tour de l'élection présidentielle.
Enfin M. Cicek a indiqué que M. Erdogan avait téléphoné au chef d'Etat-major général, le général Yasar Büyükanit. La discussion a été "utile et fructueuse" selon M. Cicek.
a écrit : Associated Press (AP) Suzan Fraser
06/05/2007 06h42
Le ministre turc des Affaires étrangères Abdullah Gul a retiré dimanche sa candidature à la présidence du pays, après l'échec d'un deuxième scrutin au Parlement sur fond de crise politique autour de la laïcité, rapporte l'agence officielle Anatolia.
Le quorum de 367 parlementaires -soit la majorité des deux tiers- nécessaires pour valider l'élection n'a pas été atteint dimanche en raison du boycott du vote par l'opposition, a annoncé le président du Parlement Bulent Arinc après deux décomptes différents.
«Je retire ma candidature», a déclaré M. Gul à l'issue de la session de dimanche, cité par Anatolia. «Ma candidature est hors de propos pour le moment».
Un premier scrutin avait été invalidé la semaine dernière par la Cour constitutionnelle, plus haute juridiction de la Turquie, déjà en raison du boycott de l'opposition qui exigeait le retrait d'Abdullah Gul. Le ministre des Affaires étrangères avait annoncé dimanche avant le vote qu'il retirerait sa candidature s'il n'était pas élu cette fois-ci.
M. Gul était le seul candidat en lice, mais la désignation de ce proche du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan par le Parti pour la justice et le développement (AKP) a plongé la Turquie dans la crise politique, le camp laïc soupçonnant l'AKP de vouloir revenir sur la séparation de la religion et de l'État, principe fondateur d'un pays à 99% musulman.
L'opposition du camp laïc, soutenu par l'armée et porté par des manifestations géantes à Ankara et Istanbul, a conduit M. Erdogan à convoquer des élections législatives anticipées, le 22 juillet prochain. Samedi encore, plus de 10 000 personnes ont manifesté à Canakkale et Manisa, deux villes proches de la mer Egée. Ces défilés faisaient suite aux manifestations géantes qui ont rassemblé au total plus d'un million de personnes à Ankara et à Istanbul respectivement les 15 et 29 avril.
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