Question d'évolution ?

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par zejarda » 15 Mai 2007, 08:50

Salut a tous les scientifique en herbe du forum.

Une question que l'on s'est posée, durant les pauses café prolongée de l'après-midi:

Existe-t-il une réponse assez simple à la différence de chromosomes entre les différents mammifères (23 paires chez les humains, 30 chez la girafes et 56 chez l'éléphant).

Quelle phénomène a permis au nombres de chromosomes de varier?

Si j'ai bien compris, les mammifères sont issu de la même branche et ils ont du avoir à un moment donné un ancetre commun avec X chromosomes.

En fait la question proviens d'un collègue qui ne comprenais pasla théorie de l'évolution car elle n'expliquais pas comment les espèces apparaissait. Elle explique leurs évolution par l'adaptation au millieu (je resume et je simplifie, on me pardonnera).
Comment des paires de chromosomes apparaissent-elles?
zejarda
 
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Message par Jacquemart » 15 Mai 2007, 09:20

J'ai déjà jamais compris comment on pouvait perdre autant de paires de chaussettes, alors comprendre comment on gagne des paires de chromosomes...
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Jacquemart
 
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Message par canardos » 15 Mai 2007, 09:50

il faut comprendre que l'expression des genes dépend largement de leur place dans le génome et que les réarrangements chromosomiques (echanges de materiel entre chromosomes, fusion, scission) qui interviennent de façon aléatoire dans le processus de reproduction jouent un role important dans l'évolution en modifiant l'expression des genes et en crèant des barrières reproductives.

un exemple sur un groupe de rongeurs africains:


a écrit :

Le complexe d’espèces des Taterillus (Muridae, Gerbillinae) en Afrique de l’Ouest
Ce complexe comprend sept espèces jumelles distribuées de la région soudano-guinéenne aux zones saharo-sahéliennes. Ces espèces montrent une très faible différenciation génétique mais une surprenante fréquence de réarrangements chromosomiques, qui fait de ces rongeurs un des exemples les plus marquant d’évolution chromosomique chez les placentaires]. L’analyse cladistique de ces réarrangements chromosomiques, en prenant en compte les temps de divergence, les distances génétiques ainsi que les distributions spécifiques actuelles, suggère 1) que la spéciation chez les Taterillus d’Afrique de l’Ouest est menée par les réarrangements chromosomiques, 2) que les oscillations paléoclimatiques du désert du Sahara ont joué un rôle majeur dans l’évolution de ce groupe en favorisant l’isolement récurrent de petites populations, et 3) que les principales rivières africaines ont probablement agi comme des barrières à la dispersion au cours des périodes les plus favorables, ce qui pourrait expliquer les distributions parapatriques observées aujourd’hui chez les Taterillus. Par ailleurs, en utilisant des analyses FISH et de Southern Blot, nous avons pu montrer que cette intense réorganisation génomique avait été accompagnée d’amplification de retrotransposons de type LINE-1. Nos résultats indiquent clairement que ces éléments mobiles ne sont pas distribués aléatoirement dans les caryotypes ayant subis des réarrangements nombreux. Une comparaison des patrons de FISH et de banding met en évidence l’absence de corrélation forte entre les sites d’insertion LINE-1 et les points de cassure mutationnels, suggérant que l’amplification des LINEs est subséquente à l’évolution chromosomique des Taterillus. Des exemples similaires sont
observés dans des cas de stress génomiques (génomes hybrides, cancer, etc.) et sont usuellement associés avec des hypométhylation de l’ADN. Ceci suggère que des génomes intensément réarrangés pourraient subir des phases de stress transitoires au cours desquelles des mécanismes comme la méthylation de l’ADN sont déstabilisés favorisant ainsi l’amplification des transposons de type LINE- 1

canardos
 
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Message par canardos » 15 Mai 2007, 09:58

un autre exemple sur le blé:

a écrit :

[center]Blé tendre ou blé dur : une histoire de chromosomes[/center]

INRA - CNRS - Université Evry - Genoscope-CNS - Génoplante - Genopole


 
La comparaison des génomes de plusieurs espèces de blé, depuis leurs formes sauvages jusqu'aux formes cultivées utilisées aujourd'hui, nous éclaire sur des mécanismes génétiques originaux liés à l'évolution de cette céréale.
Ce travail, coordonné par l'INRA, dont le détail est publié dans le numéro d'avril 2005 de "The Plant Cell", a permis de déterminer pour la première fois que des mécanismes de réarrangements chromosomiques par recombinaison illégitime d'ADN, conséquence de la polyploïdie (doublement ou agrégation du génome), ont eu un impact crucial sur l'évolution du génome du blé et de ses caractéristiques. Ils ont notamment permis d'aboutir au caractère dur du grain de blé, utilisé dans l'industrie des pâtes, une nouvelle polyploïdisation conduisant ensuite au caractère tendre du blé panifiable.
 


La plupart des plantes et des animaux ont deux jeux de chromosomes dans leurs cellules, on les appelle diploïdes. Dans certaines conditions, ce nombre de jeux de chromosomes peut être augmenté par agrégation des génomes au cours de croisements entre espèces, on parle alors d'espèces polyploïdes. La polyploïdie joue un rôle très important dans l'évolution des plantes et constitue un mécanisme de diversification et de création de variabilité génétique. La majorité des plantes, y compris les plantes cultivées sont des polyploïdes : le colza, le blé, le cotonnier, le tabac... D'autres, comme le chou ou le maïs dérivent d'ancêtres polyploïdes. Les raisons du "succès" de la polyploïdie chez les plantes ne sont pas élucidées. Par ailleurs la polyploïdie est propice à des réarrangements chromosomiques importants dont les chercheurs connaissent très peu les bases moléculaires.




Le blé, champion au jeu de la multiplication des chromosomes


La domestication et la culture des différentes espèces de blé (Triticum et Aegilops) a été un élément fondateur des premières civilisations humaines dans le croissant fertile. Ces différentes espèces de blé ont subi des transformations au fil du temps, les faisant passer de l'état de graminées sauvages aux espèces cultivées. Deux principales espèces de blé sont encore cultivées : le blé tendre utilisé pour le pain et le blé dur pour les pâtes.

Ces différentes espèces de blé ont été générées par des événements successifs de polyploïdisation intervenant après des croisements interspécifiques entre trois espèces ancestrales diploïdes.
Le premier événement, impliquant Triticum monococcum et Aegilops speltoides, a eu lieu il y a environ 500 000 ans et a conduit à l'apparition du blé dur tétraploïde : Triticum turgidum (ou blé à pâtes).
Le deuxième événement de polyploïdisation a eu lieu au cours de la domestication, il y a environ 9000-12000 ans, entre le blé dur cultivé (tétraploïde) et un autre blé diploïde (Aegilops tauschii) et a donné Triticum aestivum, le blé tendre panifiable actuel (ou blé à pain). Il est hexaploïde c'est-à-dire qu'il comporte 6 jeux de chromosomes.




Le caractère "grains tendres" a disparu et ré-apparu


Ces différentes espèces de blé constituent un excellent modèle pour l'étude de l'évolution des génomes des plantes sous la pression de la polyploïdisation, de la domestication et de la sélection par l'homme.
L'examen par les chercheurs de l'évolution d'une des plus "célèbres" régions chromosomiques du blé, le locus Ha (hardness) qui contrôle la dureté du grain, leur a permis de reconstituer l'histoire et les conséquences des additions successives de jeux de chromosomes du blé. Ce locus revêt une importance cruciale car sa présence ou son absence explique la différence majeure qualitative entre le blé tendre panifiable (blé hexaploïde) et le blé dur ou blé à pâtes (tétraploïde).
Deux gènes au niveau du locus Ha contrôlant le caractère "grain tendre" sont présents chez toutes les espèces diploïdes ancestrales du blé. En revanche, ils ont été perdus chez le blé tétraploïde (T. turgidum) conduisant au caractère "grain dur". Ce caractère porté par un locus équivalent a été "réintroduit" grâce au blé diploïde (Ae. tauschii) lors du deuxième événement de polyploïdisation avec T. turgidum pour donner le blé hexaploïde (T. aestivum). C'est ainsi que nous pouvons utiliser actuellement le blé tendre panifiable.




Des réarrangements chromosomiques que l'on croyait impossibles


C'est par la comparaison des séquences génétiques des espèces de blé diploïdes, tétraploïdes et hexaploïdes que les chercheurs ont élucidé les bases moléculaires des événements évolutifs observés au niveau du locus Ha.
L'analyse comparée leur a permis de déterminer l'étendue des régions réarrangées, leurs séquences ainsi que les sites de réarrangements. Ils ont notamment montré que la perte du locus Ha dans l'espèce de blé tétraploïde (T. turgidum) est due à des pertes de fragments génomiques importants provoquées par des réarrangements entre chromosomes différents.

Cette étude originale suggère que les recombinaisons illégitimes de l'ADN lors des événements de polyploïdisation constituent des mécanismes majeurs de l'évolution des espèces sous pression de polyploïdie.



Ce travail a bénéficié des avancées des recherches en génomique du blé, accélérées grâce au consortium Génoplante. C'est le premier résultat d'un projet de collaboration plus vaste entre l'unité mixte de recherche en génomique végétale (URGV) INRA-CNRS-Université d'Evry et le Genoscope-Centre national de séquençage (CNRG) (tous situés sur le campus de Genopole® Evry). L'objectif est de comprendre l'effet de la polyploïdie et de la domestication sur l'évolution des génomes du blé.




Référence de l'article :
"Molecular Basis of Evolutionary Events That Shaped the Hardness Locus in Diploid and Polyploid Wheat Species (Triticum and Aegilops)"
The Plant Cell - April 1, 2005; 17 (4) http://www.plantcell.org/future/17.4.shtml
Auteurs : Nathalie Chantret (a), Jerome Salse ( 8) , François Sabot © Sadequr Rahman (d) Arnaud Bellec ( 8) , Bastien Laubin ©, Ivan Dubois (e), Carole Dossat (e), Pierre Sourdille ©, Philippe Joudrier (f), Marie-Françoise Gautier (f), Laurence Cattolico (e), Michel Beckert ©, Sébastien Aubourg ( 8) Jean Weissenbach (g), Michel Caboche ( 8) , Michel Bernard ©, Philippe Leroy © and Boulos Chalhoub ( 8) .

-a Institut National de la Recherche Agronomique - Centre de Cooperation Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement, Biotrop, F-34398 Montpellier Cedex 5, France
-b équipe Organisation des génomes de plantes cultivées, Unité de Recherches en Génomique, Végétale-Institut National de la Recherche Agronomique, F-91057 Evry Cedex, France
-c Unité Mixte de Recherche 1095-Institut National de la Recherche Agronomique Amélioration et Santé des Plantes, Domaine de Crouël, F-63039 Clermont-Ferrand Cedex 2, France
-d Commonwealth Scientific and Industrial Research Organization Plant Industry, ACT 2601, Camberra, Australia
-e GENOSCOPE, Centre national de séquençage, F-91057 Evry Cedex, France
-f Institut National de la Recherche Agronomique-Unité Mixte de Recherche, Polymorphismes d'Intérêt Agronomique, 34060 Montpellier Cedex 01, France
-g GENOSCOPE, Centre national de séquençage, CNRS, Unité Mixte de Recherche 8030, 2 rue Gaston Crémieux, 91057 EVRY Cedex

 

canardos
 
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Message par canardos » 15 Mai 2007, 11:00

un autre exemple:

celui des dinosaures et de leurs descendants, les dinosaures aviens, autrement dit les oiseaux....comme le canard....

a écrit :

[center]Les dinosaures avaient un petit génome adapté pour.. le vol[/center]

Comme les oiseaux modernes, les dinosaures théropodes avaient un génome de petite taille. Considérée comme un atout pour le vol, cette caractéristique aurait donc évolué avant le vol, expliquent des chercheurs américains.

Le génome des oiseaux actuels est plus petit que celui des mammifères ou des reptiles. Il est même plus petit chez les oiseaux qui volent que chez ceux, comme l’autruche, qui ne prennent plus guère leur envol. L’évolution vers un ADN de petite taille, considéré comme un atout pour le vol, aurait commencé chez les dinosaures, selon une étude publiée aujourd’hui par la revue Nature.

Pour évaluer la taille du génome des dinosaures, l’équipe de Chris Organ (Harvard University, USA) s’est inspirée de précédents travaux qui montraient que la taille de certaines cellules reflétaient celle du génome (la molécule d’ADN est abritée dans le noyau de la cellule). Organ et ses collègues ont comparé la taille des ostéocytes –des cellules de l’os- chez 26 espèces vivantes de vertébrés avec la taille de leur génome. Ils ont ensuite mesuré ces cellules dans des os fossilisés de dinosaures de différentes époques.

D’après leurs résultats, la taille des génomes des dinosaures s’est réduite au cours de leur évolution. Ainsi de redoutables carnivores comme le Tyrannosaure ou le Velociraptor ont de très petits génomes, dignes de celui d’un passereau d’aujourd’hui. Or c’est à partir de ce groupe des théropodes qu’auraient évolué les oiseaux.

C’est surtout en éliminant les séquences répétées d’ADN et l’ADN non-codant (celui qui ne produit pas de protéines) que ces génomes conservent leur petite taille, précisent les chercheurs. Qui dit petit génome dit cellules de plus petite taille et circulation accélérée des nutriments et des signaux à travers leurs membranes. Cela permettrait de répondre plus efficacement à la demande énergétique très importante de l’oiseau en vol. Et déjà du Velociraptor en course ?

Cécile Dumas
Sciences et Avenir.com
(08/03/07)



et cela, tiré d'une thèse:

a écrit :

[center]Evolution du caryotype des Oiseaux [/center]

A) La taille du génome

Parmi les Vertébrés, la taille du génome des Oiseaux est particulièrement réduite et constante. De plus, les variations observées ne sont pas corrélées avec le nombre diploïde: l’augmentation ou la diminution du nombre diploïde par rapport à la valeur moyenne de 80 chromosomes ne semble pas avoir de conséquence nette sur la taille du génome (Tiersch & Wachtel, 1991). Elle ne montre pas de changement notable, même chez les espèces dont les caryotypes ont une organisation très différente du schéma classique, comme les Accipitridae (De Vita et al., 1994).

Ces résultats sont confirmés par l’étude de la taille du génome de l’Elanion blac, dont le caryotype a une organisation particulièrement dérivée, mais une taille (3,1 pg) comparable aux tailles moyennes calculées chez les Oiseaux (2,82 +/- 0,33) ou chez les Accipitridae (2,90 +/- 0,27) dans le chapitre introductif. On peut donc considérer que la réorganisation du génome dans cette lignée évolutive se déroule avec une taille de génome pratiquement constante.references/wagenmann.html
Wagenmann et al. (1981) supposent que les variations de taille de génome chez les Oiseaux sont probablement liées aux fluctuations de longueur moyenne des séquences répétées. Il est difficile d’estimer la validité de cette hypothèse à partir de données très partielles. Par contre, on peut noter que la quantité d’hétérochromatine constitutive n’a pas forcément un impact majeur sur la taille totale du génome. En effet, parmi les espèces d’Accipitridae dont on connaît la taille du génome, on remarque que la quantité d’hétérochromatine, grossièrement décrite par une appréciation qualitative, ne montre pas de relation avec la taille du génome. Parmi les exemples les plus explicites, on peut citer:

 le Vautour moine (2N = 66) a une faible quantité d’hétérochromatine, pour une taille de génome de 3,2 pg,

 le Milan royal (2N = 66) a une quantité d’hétérochromatine moyenne, pour une taille de génome de 3 pg,

 l’Elanion blac (2N = 68) a une quantité d’hétérochromatine importante, pour une taille de génome de 3,1 pg.

Ces données sont trop partielles pour permettre une conclusion globale. De plus, elle peuvent être sensibles aux sources d’informations différentes pour les tailles de génome, dont le calibrage par rapport à une ou deux références est très important pour la précision finale. Mais on peut supposer que les changements de quantité d’hétérochromatine n’ont pas un impact majeur sur la taille du génome chez les Accipitridae.

8) L’importance des microchromosomes

Les microchromosomes des caryotypes classiques d’Oiseaux, contrairement à ce qui était supposé dans les premières études cytogénétiques, constituent des éléments majeurs du génome. Leur densité de gènes, rapportée par la distribution des isochores et celle des îlots CpG, est globalement plus importante que celle des macrochromosomes, et ils sont de réplications précoce (McQueen et al., 1996; McQueen et al., 1998). Par ailleurs, ils possèdent certaines catégories de séquences répétées qui peuvent être caractéristiques (Matzke et al., 1992).
Les hypothèses d’évolution des compartiments du génome, mises en avant par l’étude des isochores, supposent qu’un nouveau compartiment génomique (néogénome) a été mis en place à partir de l’organisation ancestrale (paléogénome), indépendamment chez les Mammifères et les Oiseaux, probablement à la suite du développement de l’homéothermie (Kadi et al., 1993). Chez les Oiseaux, ces nouveaux compartiments sont particulièrement riches en gènes, et pauvres en séquence répétées. Ils ont un biais de composition assez élevé vers les GC.

L’étude de la distribution des isochores H3, comprenant une fraction du génome particulièrement riche en gène, montre que dans les caryotypes aviaires classiques, les plus grands chromosomes sont plutôt faiblement marqués, tandis que les microchromosomes portent globalement des signaux plus intenses (Saccone, communication personnelle).

Le développement du compartiment des microchromosomes est probablement antérieur à la radiation évolutive des espèces modernes, car la majorité des espèces étudiées présente l’organisation classique des caryotypes, comprenant de nombreux microchromosomes. L’évolution de ces microchromosomes semble liée à l’évolution de la compartimentation fonctionnelle du génome, et l’apparition des isochores les plus riches en GC (néogénome), plus riches en gène. La taille des microchromosomes serait donc le reflet de l’élimination d’une partie des séquences répétées, et correspondrait à la mise en place des isochores les plus riches en gènes, à partir du paléogénome, dont on pourrait toujours discerner l’organisation dans les macrochromosomes, proportionnellement moins riches en GC et en gènes.

Kaufman & Wallny (1996) remarquent d’ailleurs que la compacité du locus B (complexe majeur d’histocompatibilité) de la Poule, remarquable par rapport aux Mammifères, permet pourtant capable de contrôler une réponse immunitaire très diversifiée, est consécutive au développement des microchromosomes, qui ont probablement influencé l’histoire évolutive des oiseaux, par leur organisation et leur fonctionnement. Chez la Poule, ce locus B est situé par la paire 16 de microchromosomes, qui porte aussi les NORs (Bloom & Bacon, 1985; Dominguez-Steglich et al., 1991).

La taille des microchromosomes, et la compacité des séquences n’est donc pas un obstacle au fonctionnement normal des gènes. Par ailleurs, la puissance de recombinaison méiotique autorisée par la fragmentation du génome en microchromosomes a parfois été suggérée comme moteur de la diversification des espèces. En effet, le brassage génétique lors de la méiose a deux origines: la distribution différente des chromosomes lors de la ségrégation (brassage interchromosomique), ainsi que les crossing-over (brassage intrachromosomique). Un caryotype composé de peu de macrochromosomes aura a priori un brassage génétique réduit par rapport à une espèce dont le caryotype est composé de nombreux microchromosomes: le nombre de combinaisons augmente de manière exponentielle avec le nombre diploïde. Cependant, ce brassage interchromosomique peut être modulé par un taux de crossing-over différentiel. Or la mise en évidence des chiasmas méiotiques montre que les microchromosomes ont au moins un crossing-over par méiose. Leur taille génétique est très grande par rapport à leur taille physique.

Les microchromosomes ont donc un mode de fonctionnement particulier, qui peut avoir une importance dans l’histoire évolutive des oiseaux, par leur compacité et le grand brassage génétique (inter- et intrachromosomique) que leur taille et leur indépendance physique autorise.

C) Evolution des caryotypes classiques

Par l’étude des nombres diploïdes, et du nombre relatif des macro- et microchromosomes, Tegelström & Ryttman (1981) supposent que la tendance évolutive majeure chez les Oiseaux, est la fusion des microchromosomes pour former des macrochromosomes petits à moyens. Cependant, les corrélations obtenues entre les effectifs des différentes catégories chromosomiques sont assez faibles en dehors de groupes particuliers. De plus, les taux de diminution du nombre de microchromosomes ne soutiennent pas un mécanisme composé majoritairement de fusion des microchromosomes.

Les résultats des simulations de translocations sur les distributions de taille de chromosomes d’Oiseaux montrent aussi que ce type d’évolution chromosomique ne peut pas être majoritaire chez les espèces dont le caryotype présente une organisation classique, considérée comme ancestrale, et qui comporte quelques grands macrochromosomes, et de nombreux microchromosomes indiscernables entre eux. Elle est trop hétérogène et asymétrique par rapport aux prévisions des simulations.

Le mécanisme hypothétique de translocation au hasard est en moyenne assez puissant et implique en effet une homogénéisation assez rapide de la distribution de taille des chromosomes si des remaniements sont fixés, même à un taux modéré, dans un caryotype.

On peut donc proposer deux hypothèses pour la persistance de cette organisation caryotypique asymétrique dans l’essentiel des lignées aviaires:

 un taux de remaniement chromosomique très faible qui n’a pas d’impact sensible sur la structure du caryotype,

 une compartimentation du génome en deux catégories fonctionnellement et morphologiquement assez distinctes: macro- et microchromosomes.

La première hypothèse paraît confortée par l’allure généralement conservée du caryotype entre la plupart des espèces d’Oiseaux. Mais des études plus larges détaillées montrent que les caryotypes diffèrent souvent d’une espèce à l’autre: Shields (1982), à partir de la comparaison de caryotypes de 136 espèces en coloration conventionnelle, met en évidence plus de 30% de caryotypes différant entre espèces du même ordre, les remaniements concernant généralement des macrochromosomes ou des microchromosomes entre eux. De plus, en raison de la coloration uniquement conventionnelle, seuls les réarrangements majeurs peuvent être détectés. Les petits échanges chromosomiques passant inaperçus, ce taux de remaniement est probablement sous-estimé. Les caryotypes d’Oiseaux ne sont donc probablement pas aussi conservés qu’ils le paraissent.

Cependant Shetty et al. (1999) ont montré, en utilisant des peintures chromosomiques, que les plus grands chromosomes des caryotypes de Poule et d’Emeu sont quasiment identiques. Mais ces données ne concernent que deux espèces, et uniquement leurs macrochromosomes. De plus, les Ratites et les Galliformes font généralement partie des branches basales des reconstructions phylogénétiques, et ce distribution commune peut être de type plésiomorphe.
Si les remaniements chromosomiques sont fortement contre-sélectionnés, en raison par exemple de conséquences méiotiques importantes, on peut aboutir à un grand conservatisme d’un caryotype qui serait alors globalement figé. Bonaminio & Fechheimer (1988) ont d’ailleurs montré que chez des coqs, une translocation réciproque entre le chromosome 1 et un chromosome plus petit pouvait perturber la méiose, avec une viabilité et une fertilité réduites des gamètes produits.
La seconde hypothèse correspond au choix de compartimentation du génome utilisé dans les deuxièmes séries de translocation sur des sous-ensembles des caryotypes de départ. Les résultats des simulations sont tout à fait compatibles avec les distributions de taille observées.

Les résultats préliminaires de cartographie comparée par FISH de plusieurs dizaines de marqueurs chromosomiques chez des Oiseaux domestiques (Poule, Caille, Canard) indiquent que certains marqueurs (sondes BACs) peuvent être détectés en des positions différentes d’une espèce à l’autre, mais généralement sur des chromosomes de même catégorie, macro- ou microchromosomes (Fillon, communication personnelle).

La deuxième hypothèse paraît donc soutenue par ces nouvelles données, ainsi que des études de cytogénétique classique (Shields, 1982) où les remaniements caractérisés entre espèces proches mettant en jeu à la fois des micro- et des macrochromosomes sont minoritaires.

Pour expliquer cette potentielle compartimentation fonctionnelle et morphologique, il est rappelé, dans la première partie que, globalement, les macro- et les microchromosomes ont des organisations différentes, notamment d’un point de vue moléculaire, et génique. La distribution des séquences répétées, le biais de composition en GC, la densité de gènes sont des caractères qui peuvent être fortement différenciés entre macro- et microchromosomes. Des recombinaisons entre séquences dispersées homologues peuvent favoriser des remaniements entre chaque compartiment génomique.

De plus Solovei et al. (1999) ont montré qu’on peut soupçonner une ségrégation des domaines chromosomiques durant l’interphase, avec des macrochromosomes en périphérie du noyau, et des microchromosomes au centre. La proximité interphasique peut favoriser les recombinaisons entre à l’intérieur de chaque catégorie de chromosomes.

Les caryotypes classiques d’Oiseaux montrent donc un remarquable conservatisme dans leur organisation comportant des macro- et des microchromosomes, dont l’apparition et l’organisation sont probablement liées à la mise en place de nouvelles catégories d’isochores. Les remaniements chromosomiques entre macro- et microchromosomes paraissent limités, soit de manière absolue par un très faible taux de remaniements, soit de manière relative, par une compartimentation du génome.

D) La réorganisation du génome

Plusieurs lignées aviaires, non directement apparentées, présentent des distributions de taille de chromosomes très différentes de celles observées pour les caryotypes classiques d’Oiseaux. Ces groupes sont notamment les Piciformes (Pics), les Accipitridae, les Tytonidae (Chouette effraie, Chouette baie), les Falconidae (Faucons). Ces caryotypes ont généralement été écartés par les auteurs lors des analyses des tendances évolutives des caryotypes d’Oiseaux (Tegelström & Ryttman, 1981; Tegesltröm et al., 1983), en raison de la difficulté d’envisager les processus qui peuvent aboutir à l’évolution de caryotypes aussi dérivés. La " distance cytogénétique " de ces espèces paraît bien supérieure à la minime distance génétique qui les sépare des autres groupes d’oiseaux.

Durant la modélisation de l’évolution de taille des chromosomes par l’intermédiaire de translocations, les caryotypes de la Chouette effraie et de certains Accipitridae ont été utilisés. Les résultats des simulations de translocations, sans hypothèse supplémentaire de compartimentation de génome, sont compatibles avec les tailles des chromosomes observées dans les caryotypes de ces espèces.

L’étude comparée des caryotypes aviaires classiques et de ces caryotypes atypiques a confirmé qu’un nombre très important de remaniements chromosomiques est nécessaire pour passer de l’organisation classique, hétérogène et ancestrale, à l’organisation plus homogène et dérivée, observée notamment chez les Accipitridae. De plus, dans le cas des Accipitridae, les translocations, combinées à un faible taux de fusions, sont les seuls mécanismes qui permettent d’expliquer l’évolution des nombres diploïdes et fondamentaux, ainsi que les distributions de tailles de chromosomes. Ce mécanisme permet d’expliquer l’intégration des microchromosomes, mais aussi la disparition des très grandes paires chromosomiques.

Deux hypothèses ont été envisagées pour expliquer le maintien des deux catégories de chromosomes dans les caryotypes classiques: un caryotype figé, qui n’est affecté que très rarement par des remaniements, ou un caryotype composé de deux compartiments dont l’évolution est indépendante. Dans les deux cas, il est nécessaire d’envisager un processus qui lève la contrainte sur les remaniements chromosomiques.

Si la contrainte est d’origine moléculaire, liée à une composition différente de certaines séquences répétées des macro- et microchromosomes, on peut envisager une homogénéisation des séquences répétées entre les deux compartiments, qui autoriserait alors des échanges de fragments chromosomiques entre macro- et microchromosomes.

Parmi les mécanismes d’homogénéisation de séquences répétées, la transposition de rétrotransposons permet d’expliquer la dispersion dans le génome de séquences homologues. De plus, ces types de séquences répétées dispersées peuvent avoir un rôle important dans des remaniements chromosomiques comme des translocations.

Certaines de ces séquences dispersées sont particulièrement abondantes dans le génome. Vandergon & Teitman (1994) estiment à environ 105 le nombre de copies des séquences CR1 dans le génome de la Poule, tandis que Deininger & Batzer (1999) proposent un nombre de 5.105 pour le nombre de copies des séquences Alu dans le génome humain. Ce nombre important de copies augmente la probabilité de recombinaison homologue entre séquences de sites différents.
En effet, l’importance, dans certains types de translocations, des séquences répétées de type Alu a été décrite dans plusieurs cas pathologiques chez l’Homme, notamment la translocation t(9;22), responsable de la formation du chromosome Philadelphia des leucémies aiguës (Toth & Jurka, 1994), et de la protéine chimérique BCR-ABL responsable des leucémies myéloïdes chroniques (Jeffs et al., 1998), la translocation t(17;22) dans le cas des sarcomes d’Ewing (Ishida et al., 1998), ou la translocation t(2;8) impliquée dans le développement du lymphome de Burkitt (Kato et al., 1991). Deininger & Batzer (1999) ont recensé seize pathologies génétiques dont l’origine peut être imputée à une recombinaison entre séquences Alu, intra- ou interchromosomique. D’autres types de transposons peuvent être impliqués dans des recombinaisons homologues, comme un élément de la famille mariner (Hsmar2) dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth (Reiter et al., 1999).

Cohen et al. (1996) ont répertorié de nombreux points de cassures dans les translocations réciproques chez l’Homme: ces points de cassures ne sont pas distribués au hasard, et le génome comprend des zones préférentielles de cassure, notamment les bandes R les plus riches en ilôts CpG, ce qui correspond aux zones les plus riches en gènes.

Chez la Drosophile (Drosophila melanogaster), des éléments transposables permettent de favoriser certains types de remaniements chromosomiques (inversions et translocations), probablement par recombinaisons entre séquences répétées présentes sur des sites hétérologues (Busseau et al., 1989; Montgomery et al., 1991; Lim & Simmons, 1994).

De nombreux types d’éléments rétroviraux ou transposables sont connus dans le génome de la Poule (Boyce-Jacino et al., 1992). De plus, les séquences non-LTR, comme les éléments aviaires CR1 pourraient assurer leur mobilité par l’intermédiaire des transcriptases

canardos
 
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Message par zejarda » 15 Mai 2007, 15:29

Merci pour ces articles.
Ils sont un peu touffu, et mes souvenir de terminale sont un peu loin.

Un autre exemple interessant, est celui de l'homme et du chimpanzé. Le premier a 2*23 chromosome et le second en a 2*24. Il semblerait que la paire 2 et 3 du chimpanzé ait donné la paire 2 de l'homme. Donc un passage de 24 paire à 23.

Une question: il parait peu probable que ce passage de 23 à 24 ne se soit produit que pour un seul individu. Pour donner une espèce, il faut qu'il y ai eu plusieurs individus issus de ce passage de 23 à 24 en même temps. Sinon la reproduction parait compromise, non?
zejarda
 
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Message par canardos » 15 Mai 2007, 20:54

ce genre de fusion ne cree pas au début une barrière reproductive totale mais a du entrainer une baisse considérable de la fécondité et une forte proportion de rejetons stériles.

compte tenu de ce désavantage, la mutation n'a pu gagner du terrain dans un premier temps que dans des petits groupes isolés pratiquant l'inceste et où la mutation s'est généralisée.

mais c'est un processus extremememt banal et courant de spéciation, et c'est grace à la barrière reproductive ainsi créée que des spéciations peuvent s'operer à partir d'une espece initiale sans isolment géographique.
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Message par jeug » 15 Mai 2007, 21:12

(canardos @ mardi 15 mai 2007 à 20:54 a écrit :ce genre de fusion ne cree pas au début une barrière reproductive totale mais a du entrainer une baisse considérable de la fécondité et une forte proportion de rejetons stériles.

compte tenu de ce désavantage, la mutation n'a pu gagner du terrain dans un premier temps que dans des petits groupes isolés pratiquant l'inceste et où la mutation s'est généralisée.

mais c'est un processus extremememt banal et courant de spéciation, et c'est grace à la barrière reproductive ainsi créée que des spéciations peuvent s'operer à partir d'une espece initiale sans isolment géographique.

Ca veut dire que la spéciation sans isolement géographique, à partir d'une espèce qui ne pratique pas l'inceste, est (quasiment) impossible ?
jeug
 
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Message par canardos » 15 Mai 2007, 21:12

c'est la spéciation parapatrique décrite par Mayr, l'un des auteurs de la théorie synthétique de l'évolution, un darwinien pur jus.

a écrit :Les cas de spéciation parapatrique existent, le plus souvent chez les animaux peu mobiles où les générations se succèdent sur place . Ce type de spéciation peut provenir d'un réarrangement chromosomique spontané (translocation, fusion ou inversion). Ce réarrangement peut se fixer par dérive génétique dans de petites populations de l'aire de répartition de l'espèce, voire se répandre si le bénéfice est important.  Des zones dites d'intergradation, comprenant des hybrides, peuvent exister en limite de la zone de répartition de la population. Selon leur compétitivité, les hybrides peuvent perdurer ou disparaître. Dans le cas d'espèces peu mobiles,  tels les nématodes phytoparasites, cette zone est limitée.


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Message par canardos » 15 Mai 2007, 21:21

(jeug @ mardi 15 mai 2007 à 22:12 a écrit :
Ca veut dire que la spéciation sans isolement géographique, à partir d'une espèce qui ne pratique pas l'inceste, est (quasiment) impossible ?

euh, j'ai parlé d'inceste, mais je ferais mieux de parler de forte endogamie, ce qui inclue l'inceste

non, il peut y avoir aussi des isolements reproducteurs dus à des differences de comportement et de niche écologique sur un meme territoire. en quelque sorte les groupes se cotoient mais se mélangent peu. peut-etre par exemple que les orques qui pratiquent la chasse en haute mer et suivent la migration des baleines se sépareront progressivement des orques sédentaires et cotiers qui se nourrissent essentiellement de phoque, de manchots, de pingouins....

ils n'ont deja pas la meme culture et les memes dialecte.


il peut y avoir aussi évolution d'une espece A vers une espece B par diffusion au sein de cette population de caractérisitques avantageuses et disparition de caractéristiques désavantageuses sans que deux especes differentes apparaissent. l'espece A devient simplement progressivement l'espèce B.
canardos
 
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