Formalisme

Rien n'est hors-sujet ici, sauf si ça parle de politique

Message par Louis » 12 Mai 2003, 21:05

En fait, j'aime bien François Bon Mais je connais le bonhomme, alors ça influt forcément sur mon jugement littéraire
N'empeche que "paysage fer, c'est de la bombe, Baby...

CITATION Et la maladie qui gagne comme notre vengeance de mains noires, parce qu’ils ne savent pas quoi faire de nous : l’encombrement de ce qu’ils disent formation quand il s’agit d’apprendre à manier des ensembles vides (travaux multiples de la parlote à vendre ou d’écrans déjà obsolètes, petites tâches que l’industrie du loisir et de la consommation offre à ses guichets et dans le fond de ses entrepôts), les lotissements de pavillons où ils vieillissent comme des surfaces périmées de la terre, ses banlieues comme des taches stériles sur la croûte vivante du monde, et ceux qui restent dans la journée circulant dans les escaliers des immeubles de béton en bordure des villes et le néant de leurs jours comme le néant d’aspirations limitées à ce qui peut advenir au fond des entrepôts ou des guichets où on vous colle, comme les livrées du temps de la fin des rois absolus, l’uniforme de l’empire d’argent qui vous rémunère.
    Le monde est fragile, et s’alourdit : les morts sont dans les immeubles et attendent, ils descendent dans les villes au soir, les morts débordent parce que même dans les cubes de tôle des campagnes on les rejette à côté pour ne plus servir de rien, ce n’est plus un siècle à mains, les morts restent là debout et c’est pire encore de les voir non plus hurler ni se plaindre mais attendre au bord des entrepôts. L’encombrement obligé des salons autour du téléviseur, la quasi-loi, accroché au mur, de posséder un fusil de chasse comme au 31 du mois sous les immeubles le tas plus haut que les fenêtres du premier étage, qui se fait des meubles jetés pour d’autres aussi beaux. Le monde de formica tombera et les morts emmèneront avec eux ceux qui se contentaient d’aller au cinéma, lire leurs magazines, auront passé en abandonnant la révolte aux mains noires qui n’en avaient plus la force et vivez donc, en attendant.[/quote]
Louis
 
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Message par Louis » 12 Mai 2003, 21:21

CITATION (Byrrh @ lundi 12 mai 2003, 22:07)CITATION (LouisChristianRené @ lundi 12 mai 2003, 22:05)En fait, j'aime bien François Bon Mais je connais le bonhomme, alors ça influt forcément sur mon jugement littéraire
[/quote]
M'en l'autre, comme il s'la pète ! :D [/quote]
ben noooon ! parce que si je le connais, c'est vraiment pas parce que je suis le plus beau/intelligent mais vraiment parce qu'il m'arrive d'étre tres con (mais la connerie est souvent récompensée, y'a pas de justice)

sinon, tu m'as pas dit ce que tu pensais de FBon ??
Louis
 
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Message par Louis » 12 Mai 2003, 21:33

en fait, j'ai organisé un "café littéraire" pendant plusieures années : donc j'ai rencontré Didier Daeninckx, delteil (que je connaissait de la fete), françois bon, plus des tas de sociologues, d'antropologues, etc etc et

Pour francois bon, j'ai merdé particulierement, ce qui fait que j'ai été "obligé" de l'heberger, mais bon, c'était assez sympa au final
Louis
 
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Message par Louis » 12 Mai 2003, 21:44

Francois bon

CITATION  Né à Luçon, en Vendée, en 1953. Père mécanicien-garagiste, mère institutrice. Après une école d’ingénieur à dominante mécanique (Arts et Métiers), François Bon se spécialise dans le soudage par faisceau d’électrons et travaille plusieurs années dans l’industrie aérospatiale et nucléaire, en France et à l’étranger (Moscou, Prague, Bombay, Göteborg, etc.). Publie en 1982 son premier livre aux éditions de Minuit (Sortie d’usine) et se consacre depuis lors à la littérature. Lauréat en 1984-1985 de l’Académie de France à Rome (Villa Médicis). En 1987-1988, lauréat du Deutscher Akademischer Austauschdienst (Berliner Künstlerprogramm). En 1991, lauréat de la Fondation Bosch (Stuttgart). Prix Paul Vaillant-Couturier en 1992. Mène depuis 1991 une recherche continue dans le domaine des ateliers d’écriture, en particulier auprès de publics en situation sociale difficile, et collabore régulièrement, depuis 1996, avec différents théâtres (Centre dramatique national de Nancy, Centre dramatique régional de Tours, Théâtre de la Colline et Théâtre ouvert à Paris). Chargé de cours en technique d’écriture à l’université de Bordeaux-1 (sciences) en 1996 puis à l’université Rennes 2 (arts du spectacle) en 2000. Paysage fer a récemment reçu le Prix La Ville à lire, décerné par France Culture et la revue Urbanismes.
    Traduit en allemand, danois, suédois, chinois, néerlandais, coréen, italien et anglais.[/quote]

quelques réussites totales

CITATION Tout un hiver, chaque jeudi, le train Paris-Nancy.
    On suit la Marne, puis la Meuse et la Moselle.
    Vieilles usines défaites, gares désertes, cimetières au pied des immeubles… Vient le temps des inondations, ensuite de la neige. De semaine en semaine, l’éclairage diminue, les villes s’allument.
    La cimenterie, la boîte de nuit, c’est à Toul ou à Commercy ? À chaque trajet, de cette matière fascinante et profuse, on enrichit le détail par écrit, sans revenir sur l’état premier.
    Travail du regard sur ces apparitions répétées, fragmentaires, discontinues, afin d’inscrire la réalité dans un espace recréé jusqu’à ce que forme et construction l’emportent sur le chaos de la vision – beauté arrachée à un paysage dévasté pourtant tellement riche d’humanité[/quote]

Prisons

CITATION   Si Brulin – à peine croisé avant d’être assassiné dans un squat – est la figure en creux qui soutient le récit, elle laisse à d’autres la charge de dire le désarroi et la rage de ceux que notre monde rejette dès l’enfance aux bords des villes, et dont l’une des premières expériences de jeunesse est la prison.
     Au regard de ces situations extrêmes, les mots ont-ils pouvoir de forcer un destin trop souvent fixé d’avance ?
     Réponses extrêmes elles aussi : « Écrire, ça fait quelque chose à l’intérieur de soi » ; « Car parfois les mots sont sensibles » ; ou « Peut-être que ça ferait sortir mes sentiments mais ma douleur restera en moi. Ce n’est pas vous qui m’aiderez à la quitter ».
     Christian, Tignasse, Jean-Claude, Sefia, Ciao : témoignages épars que la fiction resserre en une structure éclatée. Les silhouettes apparaissent, s’estompent et se fondent. Les paroles rugueuses, comme en amont de la langue, sont des voix véritables que l’écrivain, lui aussi aux prises avec elle, nous fait entendre comme un partage.[/quote]

et son premier roman "sortie d'usine", celui avec lequel je l'ai découvert

CITATION Le cri. D'où, plus loin, de l'autre côté de l'allée. Derrière, contre le mur, là-bas. Le tour, oui, le tour. Tous déjà avaient arrêté leurs mains. Le regard comme celui de tous qui ne portait plus que sur ce même point, déjà savait voyait, voyait. Pas même d'interrogation. Un cri encore, plus long feulant. Un cri ne trompe pas, malgré l'ivresse ici des bruits. Feulant comme.

Il traversa. Un détour qu'il avait à faire par l'allée transverse, mais par-dessus les établis, à pas même dix mètres, il voyait. Le type couché presque sur le tour, une blouse bleue et des cheveux noirs. Il voyait.


Le type couché presque sur le mandrin. Aucun cri plus, et déjà autour un groupe, des gars l'avaient rejoint, le touchaient. Le courant, il pensa le courant, arrêter le courant, mais ça y était. Ils avaient, puisque rien ne tournait plus. Cette impression de silence soudain, au rôt veule des compresseurs coupés, le décroît brusque des moteurs, les lumières là-haut éteintes, au lieu du jaune maintenant ces quelques veilleuses très pâles dans le jour.

La sirène, brutale. Deux déjà ont pris le type sous les épaules et le relèvent, la tête lui tombe sur le côté. La bouche ouverte mais le visage, le visage intact. Comme très blanc, oui, ce jeune, un intérim. Quatre mois qu'il est là, justement ils en avait parlé la semaine passée, puisque les intérims ne peuvent rester plus de trois mois, mais au bout du temps le chef du personnel les change d'office de patron, rien qu'un papier à signer et pour le gars un jour de congé payé sous table, puisqu'il faut trois jours d'interruption légale entre les contrats, dimanche compris, pratique courante. Un jeune aux cheveux noirs, pas lisses, bouffants plutôt, la limite du frisé. Jeune vraiment, et les cheveux mi-longs. Boîte d'intérim d'ailleurs dirigée par le beau-frère de.
 


Lui le reconnaissait bien, le jeune, encore qu'en quatre mois ils n'aient pas fait connaissance, en quatre mois on ne peut pas connaître grand monde. Ils l'avaient dégagé, mais si lentement. Activité, mais comme ralentie. La sirène toujours, présence hurlante du cri par-delà son étouffement dans sa voix. Eux rapprochés à différentes distances, immobiles à tendre vers le groupe là-bas. La tête du type glissée sur le côté, bouche entrouverte, semblant ne rien voir.


Dans les pommes, sans doute. Temps vidé, lui n'approchait pas plus. Pas la peine de se marcher sur les pieds, se gêner. Un gars là-bas soutenait par le coude le bras, le type aux yeux fermés, les paupières très marquées ou gonflées, un ovale large plus mauve sur le visage blême, et très grandes. Tenaient le coude à l'horizontale, reculant lentement, s'éloignant maintenant de la machine, retrouvant des gestes plus vifs, la course à nouveau bousculée du temps. La tête roulant vers l'arrière, cou et menton remplaçant les yeux, la bouche à bâiller aux verrières là-haut, aspirant. Le bras qu'il voyait maintenant, ouvert comme. Comme si ni sang ni plaie. Comme, mais l'os et du rouge et. Puis la main à pendre, raide et blanche, comme à l'envers. Voir, seulement voir. Bousculé par les types de l'entretien, amenant le brancard. Il recula, s'appuyant contre un poteau derrière. La sirène décroissait, finissait de vomir son air miaulant...[/quote]
Louis
 
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